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Arrêt De La Cour Constitutionelle
publié le 10 février 1998

Arrêt n° 78/97 du 17 décembre 1997 Numéros du rôle : 1009, 1010, 1011 et 1012 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 87, §§ 2 et 4, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, modifié par La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et L. De Grève, et des juges H. Boel, P(...)

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COUR D'ARBITRAGE


Arrêt n° 78/97 du 17 décembre 1997 Numéros du rôle : 1009, 1010, 1011 et 1012 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 87, §§ 2 et 4, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, modifié par la loi spéciale du 8 août 1988, posées par le Conseil d'Etat.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et L. De Grève, et des juges H. Boel, P. Martens, J. Delruelle, G. De Baets, E. Cerexhe, H. Coremans, A. Arts et R. Henneuse, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles a. Par arrêts nos 62923, 62922 et 62924 du 5 novembre 1996 en cause respectivement de l'a.s.b.l. Groupe d'étude et de réforme de la fonction administrative, H. Orfinger et M. De Baenst contre l'Etat belge, dont les expéditions sont parvenues au greffe de la Cour le 25 novembre 1996, le Conseil d'Etat a posé les questions préjudicielles suivantes : « 1. L'article 87, § 2, de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980, modifié par la loi spéciale du 8 août 1988, respecte-t-il les règles de l'égalité devant la loi et de non-discrimination établies par les articles 10 et 11 de la Constitution en tant que ces règles interdiraient de traiter différemment, d'une part, l'Etat et, d'autre part, les Communautés et les Régions, en ce qu'il autorise le premier à ne pas faire appel au Secrétariat permanent de recrutement pour certaines catégories d'agents publics, alors que la même faculté n'est pas reconnue aux secondes, et respecte-t-il les mêmes articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il soumet à des modes de recrutement différents certains citoyens qui sont candidats à des emplois relevant d'une même catégorie, selon que ces emplois font partie d'une administration fédérale, d'une part, ou d'une administration communautaire ou régionale, d'autre part ? 2. L'article 87, § 4, de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980, modifié par la loi spéciale du 8 août 1988, respecte-t-il les règles de l'égalité devant la loi et de non-discrimination établies par les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'il dispose que l'arrêté royal désignant ceux des principes généraux du statut administratif et pécuniaire du personnel de l'Etat qui seront applicables de plein droit au personnel des Communautés et des Régions, ainsi qu'à celui des personnes morales de droit public qui dépendent des Communautés et des Régions, est de plein droit applicable aux organismes d'intérêt public qui relèvent des Communautés et des Régions alors qu'il ne l'est pas aux organismes d'intérêt public qui relèvent de l'Etat fédéral ? » Ces affaires ont été inscrites sous les numéros 1009, 1010 et 1012 du rôle de la Cour.b. Par arrêt n° 62926 du 5 novembre 1996 en cause de A.Menu contre l'Etat belge, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 25 novembre 1996, le Conseil d'Etat a posé uniquement la deuxième question précitée.

Cette affaire a été inscrite sous le numéro 1011 du rôle de la Cour.

II. Les faits et la procédure antérieure L'a.s.b.l. Groupe d'étude et de réforme de la fonction administrative, en abrégé GERFA (affaire portant le numéro 1009 du rôle), H. Orfinger (affaire portant le numéro 1010 du rôle), A. Menu (affaire portant le numéro 1011 du rôle) et M. De Baenst (affaire portant le numéro 1012 du rôle) demandent en ordre principal au Conseil d'Etat l'annulation de l'arrêté royal du 26 septembre 1994 fixant les principes généraux du statut administratif et pécuniaire des agents de l'Etat applicables au personnel des services des gouvernements de communauté et de région et des collèges de la Commission communautaire commune et de la Commission communautaire française ainsi qu'aux personnes morales de droit public qui en dépendent, et, en ordre subsidiaire, l'annulation, dans ce même arrêté, de certains articles.

Un des moyens est dirigé contre l'article 11, § 3, de l'arrêté attaqué et pris de la violation de l'article 87, § 2, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles. L'Etat belge demande de poser à la Cour une question préjudicielle portant sur cet article 87, § 2.

Estimant que le fondement du moyen dépend de l'applicabilité de cet article et que la question soulevée présente un caractère préjudiciel, le Conseil d'Etat décide de poser à la Cour la première question préjudicielle mentionnée ci-dessus.

Deux autres moyens invoqués, l'un contre l'article 62 de l'arrêté attaqué (moyen unique dans l'affaire portant le numéro 1011 du rôle) et l'autre contre l'article 63 de cet arrêté, sont pris de la violation de l'article 87, § 4, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles. La partie adverse suggère une nouvelle fois de soumettre à la Cour la différence de traitement instaurée. Le Conseil d'Etat relève que le fondement du moyen dépend de l'applicabilité de cet article 87, § 4, et que la question posée présente un caractère préjudiciel. Il décide dès lors de poser la deuxième question préjudicielle mentionnée plus haut.

III. La procédure devant la Cour Par ordonnances du 25 novembre 1996, le président en exercice a désigné les juges des sièges conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.

Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.

Par ordonnance du 18 décembre 1996, la Cour réunie en séance plénière a joint les affaires.

Les décisions de renvoi ont été notifiées conformément à l'article 77 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 20 janvier 1997; l'ordonnance de jonction a été notifiée par les mêmes lettres.

L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 5 février 1997.

Des mémoires ont été introduits par : - A. Menu, avenue Gustave Latinis 159, 1030 Bruxelles, par lettre recommandée à la poste le 5 mars 1997; - le Gouvernement de la Communauté française, place Surlet de Chokier 15-17, 1000 Bruxelles, par lettre recommandée à la poste le 6 mars 1997; - le Conseil des ministres, rue de la Loi 16, 1000 Bruxelles, par lettre recommandée à la poste le 6 mars 1997; - le Collège de la Commission communautaire française, boulevard du Régent 21-23, 1000 Bruxelles, par lettre recommandée à la poste le 6 mars 1997; - le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale, rue Ducale 7-9, 1000 Bruxelles, par lettre recommandée à la poste le 6 mars 1997. - l'a.s.b.l. GERFA, avenue du Pont de Luttre 137, 1190 Bruxelles, par lettre recommandée à la poste le 7 mars 1997; - le Gouvernement wallon, rue Mazy 25-27, 5100 Namur, par lettre recommandée à la poste le 10 mars 1997.

Ces mémoires ont été notifiés conformément à l'article 89 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 28 mars 1997.

Des mémoires en réponse ont été introduits par : - le Collège de la Commission communautaire française, par lettre recommandée à la poste le 23 avril 1997; - A. Menu, par lettre recommandée à la poste le 25 avril 1997; - le Conseil des ministres, par lettre recommandée à la poste le 25 avril 1997; - l'a.s.b.l. GERFA, par lettre recommandée à la poste le 25 avril 1997; - le Gouvernement de la Communauté française, par lettre recommandée à la poste le 28 avril 1997; - le Gouvernement wallon, par lettre recommandée à la poste le 28 avril 1997.

Par ordonnances des 29 avril 1997 et 28 octobre 1997, la Cour a prorogé respectivement jusqu'aux 25 novembre 1997 et 25 mai 1998 le délai dans lequel l'arrêt doit être rendu.

Par ordonnance du 15 octobre 1997, le président M. Melchior a soumis les affaires à la Cour réunie en séance plénière.

Par ordonnance du même jour, la Cour a déclaré les affaires en état et fixé l'audience au 12 novembre 1997.

Cette ordonnance a été notifiée aux parties ainsi qu'à leurs avocats, par lettres recommandées à la poste le 16 octobre 1997.

A l'audience publique du 12 novembre 1997 : - ont comparu : . M. Legrand, président de l'a.s.b.l. GERFA, pour l'a.s.b.l. GERFA; . Me M. Detry, avocat au barreau de Bruxelles, pour A. Menu; . Me V. De Wolf et Me P. Simonart, avocats au barreau de Bruxelles, pour le Collège de la Commission communautaire française; . Me R. Witmeur, avocat au barreau de Bruxelles, pour le Gouvernement de la Communauté française; . Me V. Thiry, avocat au barreau de Liège, pour le Gouvernement wallon; . Me J. Bourtembourg, avocat au barreau de Bruxelles, pour le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale; . Me M. Uyttendaele, avocat au barreau de Bruxelles, pour le Conseil des ministres; - les juges-rapporteurs J. Delruelle et A. Arts ont fait rapport; - les parties précitées ont été entendues; - les affaires ont été mises en délibéré.

La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.

IV. En droit - A - Mémoire de l'a.s.b.l. GERFA Quant à la première question préjudicielle A.1.1. La question ne semble pas posée correctement parce que l'article 87, § 2, de la loi spéciale du 8 août 1980 n'a pas pour objet d'autoriser l'Etat fédéral à ne pas recruter par l'intermédiaire du Secrétariat permanent de recrutement. L'obligation établie par cet article concerne uniquement les entités fédérées et n'a donc pas trait à une compétence quelconque de l'Etat fédéral.

A.1.2. La question a été posée dans le cadre du recours en annulation de l'article 11, § 3, de l'arrêté royal du 26 septembre 1994 fixant les principes généraux, qui permet aux communautés et aux régions de ne pas recourir au Secrétariat permanent de recrutement. Selon le requérant, cet article viole l'article 87, § 2, de la loi spéciale de réformes institutionnelles. L'avis de la section de législation du Conseil d'Etat est invoqué à l'appui de cette thèse. Dans le rapport au Roi, le Gouvernement déclare ne pouvoir adhérer à cette conception et renvoie à cet effet à l'égalité des différentes autorités politiques et à leur autonomie. Une telle argumentation méconnaît les limites que, dans l'article 87 de la loi spéciale du 8 août 1980, le législateur spécial a assignées lui-même à l'autonomie des communautés et des régions. Elle repose sur une conception erronée du principe d'égalité entre les entités. Le principe d'égalité entre l'Etat et les entités fédérées ne repose nullement sur une règle juridique, mais bien sur un postulat politique démenti par l'économie même des lois de réformes institutionnelles. Il est par ailleurs curieux que la partie adverse remette en question une règle répartitrice de compétence en invoquant la violation d'une règle constitutionnelle soumise au contrôle de la Cour. Le principe constitutionnel d'égalité et de non-discrimination implique qu'il faut traiter de manière égale des situations similaires et non des situations fondamentalement différentes.

A.1.3. Concernant plus particulièrement le principe d'égalité entre des candidats à un emploi, l'article 87, § 2, de la loi spéciale du 8 août 1980 garantit plus sûrement aux candidats à un emploi dans une entité fédérée le respect de la règle d'objectivité et de la règle d'égalité devant les emplois publics puisqu'il impose la sélection objective par le Secrétariat permanent de recrutement.

Quant à la deuxième question préjudicielle A.2. La partie rappelle ses griefs à l'encontre des articles 62 et 63 de l'arrêté royal du 26 septembre 1994. Elle prend appui sur l'avis du Conseil d'Etat, qui est également rappelé, et elle en conclut que les personnes morales dépendant des régions et des communautés sont soumises à toutes les dispositions de l'arrêté royal fixant les principes généraux et qu'une application à la carte n'est donc pas régulière.

Mémoire d'A. Menu A.3. La réponse à la question préjudicielle (question unique dans l'affaire portant le numéro 1011 du rôle, deuxième question préjudicielle dans les autres affaires) ne peut être que négative. Par l'article 87, § 4, de la loi spéciale du 8 août 1980, le législateur fédéral a précisément voulu s'assurer que le principe d'égalité ne puisse être violé par les autorités régionales et communautaires. Pour les agents de l'Etat, il résulte de la Constitution, d'une part, et de la loi du 16 mars 1954 relative au contrôle de certains organismes d'intérêt public, d'autre part, que seul le Roi est habilité à fixer le statut des agents de l'Etat, d'une part, et du personnel des organismes parastataux, d'autre part. Si un agent estime que le principe d'égalité a été violé, il lui revient de soulever l'irrégularité de l'acte réglementaire devant la juridiction compétente. Par l'article 87, § 4, de la loi spéciale du 8 août 1980, le législateur n'a pas voulu créer de discrimination, mais a voulu éviter que les autorités « fédérées » ne puissent tirer parti de leur autonomie pour créer les situations discriminatoires entre les agents de la fonction publique alors même que l'autorité fédérale, le Roi, assure, de fait, l'égalité entre les agents relevant de sa compétence.

Mémoire du Conseil des ministres Quant à la première question préjudicielle A.4.1. L'Etat belge, d'une part, et les communautés et les régions, de l'autre, se trouvent dans une situation comparable. Ces entités font partie de la structure de la Belgique fédérale. Dans le cadre de leurs compétences, elles disposent d'une partie de la puissance publique et bénéficient de moyens identiques pour exercer leurs missions. Chacune de ces entités a une personnalité juridique distincte, une assemblée parlementaire qui peut adopter des normes de type législatif et un gouvernement, responsable politiquement devant l'assemblée. En outre, la construction de l'Etat fédéral repose sur le principe de l'égalité entre les entités fédérées. Le transfert de compétences de l'autorité fédérale vers les communautés et les régions s'est d'ailleurs toujours accompagné d'un transfert financier égal à la charge budgétaire que ces compétences engendraient pour le budget de l'Etat.

En particulier, dans le domaine de la fonction publique, aucune différence tirée de la qualité d'employeur n'autorise la discrimination entre l'Etat fédéral et les communautés et les régions qui résulterait de l'interprétation de l'article 87, § 2, de la loi spéciale du 8 août 1980. A l'égard de leur personnel, l'Etat, les communautés et les régions se trouvent dans une situation comparable.

Les membres des services des gouvernements de communauté et de région sont soumis à des règles statutaires et exercent, au même titre que les agents de l'Etat fédéral, des missions relevant des pouvoirs publics.

Dès lors, si l'article 87, § 2, de la loi spéciale du 8 août 1980 est interprété comme autorisant l'Etat belge à ne pas faire appel au Secrétariat permanent de recrutement pour certaines catégories d'agents publics, alors que cette même faculté ne serait pas reconnue aux communautés et aux régions, il violerait les articles 10 et 11 de la Constitution.

A.4.2. En revanche, si l'article 87, § 2, de la loi spéciale du 8 août 1980 est interprété comme imposant le recrutement du personnel des communautés et des régions par l'intermédiaire du Secrétariat permanent de recrutement, sauf pour les catégories d'agents pour lesquelles les dispositions légales ou réglementaires applicables au personnel de l'Etat autorisent des procédures spécifiques de nominations, il n'y a pas violation des articles 10 et 11 de la Constitution. Cette interprétation doit être préférée parce qu'elle résulte de la jurisprudence du Conseil d'Etat (arrêt du 31 mai 1994, assemblée générale), qu'elle a été retenue par le Conseil des ministres lors de l'adoption de l'arrêté royal du 22 novembre 1991 (cf. le rapport au Roi) et qu'elle est retenue par la doctrine, qui ne conteste pas la légalité de l'article 11, § 3, de l'arrêté royal du 26 septembre 1994. Les avis de la section de législation du Conseil d'Etat sont également invoqués à l'appui de cette thèse.

Quant à la deuxième question préjudicielle A.5. Le Conseil des ministres s'en réfère à la sagesse de la Cour sur cette question. Il observe néanmoins que la question est libellée de manière particulière parce que l'arrêté royal est pris en exécution de l'article 87, § 4, de la loi spéciale du 8 août 1980 et ne s'applique aux organismes d'intérêt public qui dépendent des communautés et des régions, non pas en vertu de cet article 87, § 4, lui-même, mais au contraire en vertu de l'article 9 de la loi spéciale du 8 août 1980.

Mémoire du Gouvernement de la Communauté française A.6. La Communauté française est protégée par les articles 10 et 11 de la Constitution. La jurisprudence de la Cour sur l'application des articles 10 et 11 de la Constitution aux personnes morales de droit public est rappelée. La Communauté française répond à cet égard aux différentes conditions qui ont été posées par la Cour. En effet, ces caractéristiques essentielles sont : un territoire, des habitants, des organes propres, des intérêts propres. L'autonomie qui est la sienne est supérieure à celle qui est reconnue aux pouvoirs subordonnés que sont les provinces et les communes.

Quant à la première question préjudicielle A.7. L'argumentation est identique à celle développée par le Conseil des ministres. En conclusion, le Gouvernement de la Communauté française prie la Cour de dire pour droit que l'article 87, § 2, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution s'il est interprété comme imposant le recrutement du personnel des communautés et des régions par l'intermédiaire du Secrétariat permanent de recrutement sauf pour les catégories d'agents pour lesquelles les dispositions légales ou réglementaires applicables au personnel de l'Etat autorisent des procédures spécifiques de nomination.

Quant à la deuxième question préjudicielle A.8. Le Gouvernement de la Communauté française conclut à la violation des articles 10 et 11 de la Constitution. L'application de plein droit de l'arrêté royal visé à l'article 87, § 4, de la loi spéciale du 8 août 1980 aux organismes d'intérêt public emporte une violation des articles 10 et 11 de la Constitution. Si le souhait premier du législateur fédéral de maintenir une certaine harmonie entre les règles qui gouvernent le statut du personnel des organismes fédéraux d'intérêt public et celles qui s'appliquent au personnel des organismes d'intérêt public régionaux et communautaires n'est pas contestable, il n'en demeure pas moins qu'à la suite de l'entrée en vigueur de l'article 16, 4°, de la loi spéciale du 8 août 1988, l'autorité fédérale enserre trop strictement le pouvoir des communautés et des régions de fixer le statut des agents des organismes d'intérêt public qu'elles créent. Le législateur a en effet laissé intacte l'autonomie du Roi pour fixer le statut des organismes d'intérêt public qui dépendent de l'autorité fédérale. Cette différence de traitement n'est pas admissible, alors que, à l'égard de leur personnel, l'Etat, les communautés et les régions se trouvent dans une situation comparable. Cet enseignement vaut également à l'égard des organismes d'intérêt public qui dépendent d'eux. Il y a en outre une négation de la notion même de principes généraux, puisque des agents des organismes d'intérêt public qui dépendent des communautés et des régions pourraient se voir soumis à des règles qui n'ont pas de correspondant au sein des organismes d'intérêt public qui dépendent de l'Etat fédéral. La distinction que le législateur fédéral fait entre les agents qui dépendent des services du Conseil des ministres et les agents des organismes d'intérêt public qui dépendent de l'autorité fédérale doit pouvoir également être mise en oeuvre par les communautés et les régions. Les organismes d'intérêt public qui dépendent des communautés et des régions sont évidemment comparables à ceux qui dépendent de l'autorité fédérale, notamment en raison de leur création par un texte de nature législative et par les principes communs qui gouvernent leur mode d'action et de gestion.

A tout le moins, il faut admettre que l'application obligatoire de l'arrêté royal « principes généraux » aux organismes d'intérêt public qui dépendent des communautés et des régions, opposée à la liberté qui est laissée au pouvoir exécutif fédéral, emporte une violation du principe général de la proportionnalité.

Mémoire du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale A.9. L'article 87, §§ 2 et 4, viole les principes relatifs à l'égalité devant la loi et à la non-discrimination, fixés dans les articles 10 et 11 de la Constitution.

Le fait que les citoyens soient traités différemment, selon qu'ils sollicitent un emploi auprès de l'autorité fédérale ou des autorités d'une région ou d'une communauté, ne peut être accepté de manière objective et raisonnable. « Le même raisonnement vaut en ce qui concerne l'application de plein droit des Principes généraux aux organismes d'intérêt public régionaux et communautaires, même lorsque le personnel d'une institution peut mieux fonctionner, en raison du caractère des activités exercées par celle-ci, sous un statut qui déroge d'une façon ou d'une autre aux Principes généraux.

Le but poursuivi par les deux réglementations ne pourrait être qualifié d'un intérêt général et public supérieur, à moins que l'on ne parte de l'idée que l'on puisse raisonnablement justifier la nécessité de soumettre indirectement au contrôle ultime de l'Autorité fédérale, la compétence autonome des Régions et des Communautés en ce qui concerne la création d'organismes d'intérêt public propres, la rédaction du statut du personnel de ceux-ci et le mode de recrutement pour certains de leurs emplois. » Mémoire de la Commission communautaire française de la Région de Bruxelles-Capitale, représentée par son Collège Quant à la première question préjudicielle A.10. Il apparaît de la lecture des textes que l'article 11, § 3, de l'arrêté royal du 26 septembre 1994 est manifestement en contradiction avec l'article 87, § 2, de la loi spéciale du 8 août 1980. Il apparaît également de cette lecture que si l'Etat belge peut appliquer à certaines catégories d'agents des procédures spécifiques de nomination, il n'en va pas de même pour les communautés et les régions, qui sont tenues de recruter leurs agents par l'intermédiaire du Secrétariat permanent de recrutement. La même observation vaut pour la catégorie de personnel de la Commission communautaire française de la Région de Bruxelles-Capitale qui intervient directement dans la gestion des matières transférées par la Communauté française en vertu de l'article 138 de la Constitution. La distinction ainsi créée entre les catégories d'agents n'est pas susceptible de justification objective et raisonnable. L'appartenance de ces agents à l'une ou l'autre administration ne suffit pas à elle seule pour justifier les différences de traitement entre des agents relevant de la même catégorie ou exerçant des fonctions identiques. Une même différence de traitement entre agents d'autorités fédérées et agents d'autorités subordonnées ne pourrait pas non plus se justifier. Il en est a fortiori de même entre agents d'institutions qui se trouvent de par la Constitution sur un même pied d'égalité.

Par ailleurs, l'article 87, § 2, de la loi spéciale du 8 août 1980 ne trouve pas sa légitimation dans l'article 107 de la Constitution, cette disposition n'ayant d'autre portée que de conférer au Roi, c'est-à-dire aux organes des gouvernements, le pouvoir de nommer aux emplois d'administration générale.

Il y a donc lieu de conclure à la violation dans l'un et l'autre aspect de la question préjudicielle.

Quant à la deuxième question préjudicielle A.11. La Commission communautaire française de la Région de Bruxelles-Capitale estime que cette question intéresse l'Etat belge et ne la concerne pas directement. Elle émet cependant un avis dans le seul but d'éclairer la Cour. Il lui paraît déraisonnable de ne pas permettre aux agents des personnes morales de droit public qui dépendent de l'Etat de bénéficier des mêmes règles de droit que celles applicables aux agents des personnes morales de droit public qui dépendent des communautés et des régions. Elle conclut dès lors à la violation des articles 10 et 11 de la Constitution.

Mémoire du Gouvernement wallon A.12. Le Gouvernement wallon déclare intervenir à la cause et s'en remettre provisoirement à la sagesse de la Cour, sous réserve d'autres prises de position dans un mémoire en réponse.

Mémoire en réponse de l'a.s.b.l. GERFA A.13. La partie requérante constate que les différentes parties adverses n'apportent aucun élément nouveau. Elle s'en tient donc aux arguments développés dans son mémoire et s'en remet à la sagesse de la Cour.

Mémoire en réponse d'A. Menu A.14. Lorsque le Roi exerce le pouvoir qu'Il tient de la Constitution ou de l'article 11 de la loi du 16 mars 1954 relative au contrôle de certains organismes d'intérêt public, Il est tenu de respecter les articles 10 et 11 de la Constitution. Il a d'ailleurs posé pour principe général d'appliquer à ce personnel les dispositions fondamentales du statut des agents de l'Etat. Il le fait au travers de l'arrêté royal du 8 janvier 1973 fixant le statut du personnel de certains organismes d'intérêt public.

Le législateur fédéral, soucieux de voir se perpétuer cette règle d'égalité entre l'ensemble des agents de la fonction publique, mais confronté à l'autonomie constitutive qu'il octroyait aux communautés et aux régions, a jugé utile de définir les principes généraux du statut des agents de l'Etat qu'il entendait voir appliquer à l'ensemble des agents des services administratifs relevant de ces dernières. Si le Roi devait s'écarter sans motif objectif et raisonnable des règles qu'Il a fixées comme relevant des principes généraux, Il violerait les articles 10 et 11 de la Constitution puisqu'Il créerait une discrimination injustifiée entre agents de la fonction publique.

Dans le protocole n° 60 du 19 avril 1991 relatif aux négociations menées le lundi 11 mars et le mercredi 27 mars 1991 au sein du comité commun à l'ensemble des services publics, concernant la liste des principes généraux qui doivent être repris dans l'arrêté royal fixant les principes généraux du statut administratif et pécuniaire des agents de la fonction publique (voy. Moniteur belge du 13 juillet 1991), l'autorité fédérale s'est d'ailleurs engagée à ne pas commettre pareil acte discriminatoire. Il y a donc lieu de conclure à titre principal que l'article 87, § 4, n'est nullement discriminatoire puisqu'il a pour objet d'assurer le respect du principe d'égalité entre les agents de la fonction publique.

A tout le moins, si la Cour estimait que cet article était contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution, il faudrait alors considérer que cette décision ne peut s'interpréter comme signifiant que l'arrêté royal du 26 septembre 1994 fixant les principes généraux ne serait pas applicable aux organismes « paracommunautaires » et « pararégionaux » mais bien comme signifiant que le Roi est tenu de respecter les dispositions de cet arrêté royal quand Il fixe le statut des membres du personnel des « parastataux ». Sinon chaque entité politique retrouverait une autonomie totale pour fixer le statut de son personnel, sans qu'aucune règle n'assure un minimum de normes communes à l'ensemble de la fonction publique. Cette position se heurterait au principe même d'égalité d'accès aux emplois publics garanti par la Constitution et serait source d'insécurité juridique puisque tout acte par lequel un organe exécutif modifierait le statut de son personnel serait potentiellement contentieux.

Mémoire en réponse du Conseil des ministres A.15. C'est à tort que l'a.s.b.l. GERFA considère que le principe d'égalité n'aurait pas vocation à protéger l'autorité fédérale et les autorités fédérées. L'argumentation tirée de la doctrine et de la jurisprudence du Conseil d'Etat est contestée pour son défaut de pertinence.

La construction de l'Etat fédéral repose sur le principe de l'égalité entre les entités fédérées. L'arrêt de la Cour n° 62/96 du 7 novembre 1996 est rappelé.

Par ailleurs, la Cour peut procéder, en réponse à la première question préjudicielle, à une interprétation conforme de la disposition litigieuse.

Concernant la seconde question préjudicielle, le Conseil des ministres s'en réfère à la sagesse de la Cour mais il estime que la thèse défendue par le Collège de la Commission communautaire française n'est pas pertinente en l'espèce. Elle soulève en effet une question qui est différente de celle qui est contenue dans la question préjudicielle posée par le Conseil d'Etat. Le point de départ de cette question est qu'en vertu des dispositions légales, l'arrêté d'exécution de l'article 87, § 4, ne s'applique pas aux organismes d'intérêt public qui dépendent d'autorités fédérales. L'arrêt de la Cour ne pourrait donc pas, sauf à contenir un vice de raisonnement, conclure à cette application.

Une telle règle ne pourrait être adoptée que par le législateur fédéral, qui devra en outre veiller à ne pas porter atteinte au pouvoir réglementaire autonome que la Constitution a conféré au Roi dans le domaine de la fonction publique.

En outre, par essence, l'arrêté royal d'exécution de l'article 87, § 4, n'a pas vocation à s'appliquer à des organismes qui dépendent de l'autorité fédérale.

En conclusion, dans le cadre de la seconde question préjudicielle, il convient uniquement d'examiner si le principe de l'égalité des Belges devant la loi n'est pas violé par le fait que l'arrêté royal d'exécution de l'article 87, § 4, de la loi spéciale du 8 août 1980 s'applique aux organismes d'intérêt public qui dépendent des communautés et des régions alors que les principes qu'il pose ne correspondent pas forcément à une règle en vigueur au sein des organismes d'intérêt public qui dépendent de l'autorité fédérale. Sur ce point, le Conseil des ministres s'en réfère à la sagesse de la Cour.

Mémoire en réponse du Gouvernement de la Communauté française A.16. Concernant l'étendue du principe d'égalité, l'argumentation est identique à celle du Conseil des ministres.

Concernant la seconde question préjudicielle, la thèse du Collège de la Commission communautaire française est également rejetée.

Sur le fond, il y a lieu de conclure à la violation des articles 10 et 11 de la Constitution. Si le législateur voulait maintenir une certaine harmonie entre les règles qui gouvernent le statut du personnel des organismes fédéraux d'intérêt public et celles qui s'appliquent au personnel des organismes d'intérêt public régionaux et communautaires, il devait, sous peine de méconnaître le principe de proportionnalité, se soucier de prendre une règle qui mette ce principe en exécution de manière effective. Or, il a laissé intacte l'autonomie du Roi pour fixer le statut des agents des organismes d'intérêt public qui dépendent de l'autorité fédérale. Il n'a donc pas pris une mesure de nature à assurer l'uniformité des règles applicables aux agents.

La disposition litigieuse n'est donc pas proportionnée à l'objectif poursuivi et viole les articles 10 et 11 de la Constitution.

Mémoire en réponse du Gouvernement wallon A.17. Les parties devant la Cour n'ont pas la possibilité de modifier ou faire modifier la teneur des questions posées à la Cour. Dès lors que les décisions de renvoi visent uniquement l'Etat fédéral, les régions et les communautés, et non la Commission communautaire française, même agissant dans le cadre de l'article 138 de la Constitution, le mémoire du Collège de la Commission communautaire française n'est pas recevable en ce qu'il sollicite l'extension de la première question préjudicielle à la Commission communautaire française ou à ses agents.

Il appartient au juge qui a posé la question préjudicielle d'interpréter la disposition sur laquelle porte cette question. Il résulte incontestablement de la formulation de la question préjudicielle que le juge de renvoi ne soumet pas au contrôle de la Cour l'article 87, § 2, de la loi spéciale du 8 août 1980 dans l'interprétation qu'en donne l'a.s.b.l. GERFA dans son mémoire. La Cour devra donc d'abord vérifier si la disposition, telle qu'elle est interprétée par le Conseil d'Etat, viole ou non les articles 10 et 11 de la Constitution. Dans l'affirmative, il lui appartient de suggérer une autre interprétation de la disposition litigieuse qui permette d'échapper au constat d'inconstitutionnalité.

Concernant la première question préjudicielle, le principe d'égalité entre l'Etat, les communautés et les régions dans l'Etat fédéral belge est rappelé. La circonstance qu'au sein de l'Etat fédéral belge, les compétences et les moyens des composantes sont fixés par la Constitution ou en vertu de celle-ci n'implique pas que l'Etat se trouve dans une situation différente des régions et des communautés, plus particulièrement dans les rapports qu'ils ont avec les services de leur gouvernement respectif.

Les articles 87 et 9 de la loi spéciale du 8 août 1980 consacrent essentiellement des compétences parallèles.

Interprété en ce sens qu'il autorise l'Etat à ne pas faire appel au Secrétariat permanent de recrutement pour certaines catégories d'agents publics, alors que la même faculté n'est pas reconnue aux communautés et aux régions, l'article 87, § 2, de la loi spéciale du 8 août 1980 viole les articles 10 et 11 de la Constitution.

La Cour peut toutefois suggérer une interprétation de la disposition plus conforme au prescrit constitutionnel.

Même sous le régime de la loi spéciale du 8 août 1980, la compétence des régions et des communautés de recruter des agents sans passer par l'intermédiaire du Secrétariat permanent de recrutement n'a, en soi, jamais été sérieusement contestée. La loi spéciale du 8 août 1988 n'a rien changé à cet égard. L'article 11, § 3, de l'arrêté royal du 26 septembre 1994 fixant les principes généraux va dans le même sens.

L'interprétation conforme suggérée par le Conseil des ministres et le Gouvernement de la Communauté française pourrait dès lors être retenue.

Le même raisonnement s'impose pour la seconde partie de la première question préjudicielle, qui compare entre eux les candidats à des emplois relevant d'une même catégorie, selon que ces emplois font partie d'une administration fédérale ou d'une administration communautaire ou régionale.

Les modifications apportées à l'article 9 de la loi spéciale du 8 août 1980 ont encore renforcé les compétences parallèles de l'Etat, des communautés et des régions à l'égard de leurs organismes d'intérêt public respectifs.

L'Etat, les communautés et les régions sont des catégories comparables, plus particulièrement à l'égard de leurs services respectifs et des services de leurs organismes d'intérêt public respectifs. L'article 87, § 4, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles viole dès lors les articles 10 et 11 de la Constitution parce que la mesure qu'il contient notamment à l'égard des organismes d'intérêt public est dénuée de toute justification et est en tout état de cause disproportionnée au regard du but poursuivi.

Mémoire en réponse de la Commission communautaire française de la Région de Bruxelles-Capitale, représentée par son Collège A.18. La Commission communautaire française de la Région de Bruxelles-Capitale prie la Cour de conclure à la violation des articles 10 et 11 de la Constitution en réponse aux deux questions préjudicielles. - B - B.1. L'article 87 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, tel qu'il a été modifié par la loi spéciale du 8 août 1988, dispose : « § 1er. Sans préjudice de l'article 88, chaque Exécutif dispose en propre d'une administration, d'institutions et d'un personnel. § 2. Chaque Exécutif fixe le cadre du personnel de son administration et procède aux nominations. Ce personnel est recruté par l'intermédiaire du Secrétariat permanent de recrutement du personnel de l'Etat.

Il prête serment, conformément aux dispositions légales, entre les mains de l'autorité que l'Exécutif désigne à cet effet. § 3. Sans préjudice du § 4, les Communautés et les Régions fixent les règles relatives au statut administratif et pécuniaire de leur personnel définitif, temporaire et auxiliaire, à l'exception des règles relatives aux pensions. En matière de pensions, leur personnel est soumis aux règles légales et statutaires applicables au personnel définitif, temporaire et auxiliaire de l'Etat. § 4. Un arrêté royal délibéré en Conseil des Ministres, pris après avis des Exécutifs, désigne ceux des principes généraux du statut administratif et pécuniaire du personnel de l'Etat qui seront applicables de plein droit, au personnel des Communautés et des Régions, ainsi qu'à celui des personnes morales de droit public qui dépendent des Communautés et des Régions, à l'exception du personnel visé à l'article 17 de la Constitution.

B.2. La première question porte sur la compatibilité de l'article 87, § 2, de la loi spéciale du 8 août 1980 avec les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il autorise l'Etat à ne pas faire appel au Secrétariat permanent de recrutement pour certaines catégories d'agents publics, alors que la même faculté n'est pas reconnue aux communautés et aux régions et en ce qu'il soumet à des modes de recrutement différents certains citoyens qui sont candidats à des emplois d'une même catégorie, selon que ces emplois font partie d'une administration fédérale, d'une part, ou d'une administration communautaire ou régionale, d'autre part.

B.3. La deuxième question porte sur la compatibilité de l'article 87, § 4, de la loi spéciale précitée avec les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il dispose que l'arrêté royal désignant ceux des principes généraux du statut administratif et pécuniaire du personnel de l'Etat qui seront applicables de plein droit au personnel des communautés et des régions, ainsi qu'à celui des personnes morales de droit public qui dépendent des communautés et des régions, est de plein droit applicable aux organismes d'intérêt public qui relèvent des communautés et des régions, alors qu'il ne l'est pas aux organismes d'intérêt public qui relèvent de l'Etat fédéral.

B.4. Il ressort des articles 1er, 2 et 3 de la Constitution que la Belgique est un Etat fédéral et que chacune des communautés et régions puise dans ces dispositions le fondement d'une autonomie qui se traduit par l'attribution de compétences.

Cette autonomie implique que ni les communautés, ni les régions, ni les personnes morales de droit public qui en dépendent, ni les membres de leur personnel ne puissent alléguer une violation du principe d'égalité par cela seul que le statut du personnel puisse y être différent de celui qui s'applique au personnel de l'Etat, d'une autre communauté ou d'une autre région ou des personnes morales de droit public qui en dépendent.

La Cour constate qu'en raison de cette autonomie, le législateur spécial a imposé, à l'article 87, § 4, de la loi, le respect de principes généraux qui garantit une certaine uniformité, en ce qui concerne les statuts administratif et pécuniaire du personnel des diverses entités.

Il découle de ce qui précède que, dans la matière de la fonction publique, même si en ce domaine le législateur spécial a limité par l'article 87, §§ 2 et 4, l'autonomie des entités fédérées, les communautés, les régions, les personnes morales de droit public qui en dépendent et leur personnel ne sont pas des personnes comparables à l'Etat fédéral, aux personnes morales de droit public qui en dépendent et au personnel de l'Etat ou de ces dernières.

B.5. Il va de soi qu'en Belgique, aucun statut relatif à la fonction publique ne peut méconnaître les articles 10 et 11 de la Constitution.

Cela signifie que les personnes concernées par ces statuts ne pourraient être traitées de manière discriminatoire, soit entre elles, soit par rapport à d'autres catégories de personnes qui se trouvent dans une situation comparable, par rapport, selon le cas, à l'Etat, à la même communauté ou à la même région. Mais ni les autorités d'une communauté ou d'une région, ni leur personnel ne pourraient être utilement comparés aux autorités ou au personnel de l'Etat, d'une autre communauté ou d'une autre région, sous peine de méconnaître en cette matière l'autonomie consacrée par les dispositions constitutionnelles précitées.

B.6. Les deux questions appellent une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : - L'article 87, § 2, de la loi spéciale du 8 août 1980, modifié par la loi spéciale du 8 août 1988, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il traite différemment l'Etat, d'une part, et les communautés et les régions, d'autre part, ou les citoyens qui sont candidats à des emplois d'une administration fédérale, d'une part, ou d'une administration communautaire ou régionale, d'autre part. - L'article 87, § 4, de la loi spéciale du 8 août 1980, modifié par la loi spéciale du 8 août 1988, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il n'est applicable qu'au personnel des personnes morales de droit public qui dépendent des communautés et des régions et non au personnel de celles qui dépendent de l'Etat.

Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 17 décembre 1997.

Le greffier, L. Potoms.

Le président, M. Melchior.

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