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Arrêt De La Cour Constitutionelle
publié le 02 juillet 1999

Arrêt n°42/99 du 30 mars 1999 Numéro du rôle : 1605 En cause : la demande de suspension de l'article 39, alinéas 3, seconde phrase, à 6, du décret de la Communauté française du 13 juillet 1998 portant organisation de l'enseignement maternel e La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et L. De Grève, et des juges H. Boel, G(...)

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COUR D'ARBITRAGE


Arrêt n°42/99 du 30 mars 1999 Numéro du rôle : 1605 En cause : la demande de suspension de l'article 39, alinéas 3, seconde phrase, à 6, du décret de la Communauté française du 13 juillet 1998 portant organisation de l'enseignement maternel et primaire ordinaire et modifiant la réglementation de l'enseignement, introduite par L. Mann et autres.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et L. De Grève, et des juges H. Boel, G. De Baets, E. Cerexhe, A. Arts et R. Henneuse, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la demande Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 29 janvier 1999 et parvenue au greffe le 1er février 1999, L. Mann et C. Mann-Coune, demeurant à 4000 Liège, avenue du Hêtre 9, J. Miklatzki, demeurant à 4000 Liège, rue Saint Séverin 134, P. Bergmann, demeurant à 4040 Herstal, rue Large Voie 226, et A. Roth et C. Vandersmissen, demeurant à 4130 Esneux, rue Bois des Chevreuils 23, ont introduit une demande de suspension de l'article 39, alinéas 3, seconde phrase, à 6, du décret de la Communauté française du 13 juillet 1998 portant organisation de l'enseignement maternel et primaire ordinaire et modifiant la réglementation de l'enseignement (publié au Moniteur belge du 28 août 1998).

Par la même requête, les requérants demandent également l'annulation des mêmes dispositions décrétales.

II. La procédure Par ordonnance du 1er février 1999, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.

Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.

Par ordonnance du 17 février 1999, la Cour a fixé l'audience au 2 mars 1999.

Cette ordonnance a été notifiée aux autorités mentionnées à l'article 76 de la loi organique ainsi qu'aux requérants et à leurs avocats, par lettres recommandées à la poste le 18 février 1999.

A l'audience publique du 2 mars 1999 : - ont comparu : . Me P. Pichault et M.-A. Lucas, avocats au barreau de Liège, pour les requérants; . Me M. Kestemont-Soumeryn, avocat au barreau de Bruxelles, pour le Gouvernement de la Communauté française; - les juges-rapporteurs E. Cerexhe et H. Boel ont fait rapport; - les avocats précités ont été entendus; - l'affaire a été mise en délibéré.

La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.

III. En droit - A - Requête Quant à l'intérêt des parties requérantes A.1. La disposition attaquée du décret a pour objet l'organisation des cours de morale et de religion dans les écoles primaires organisées ou subventionnées par la Communauté française. Les requérants sont tous parents d'élèves inscrits dans différentes écoles primaires subventionnées de la ville de Liège où ces élèves suivent les cours de religion israélite. Ils attaquent en particulier les alinéas de l'article 39 du décret du 13 juillet 1998 relatifs aux modalités d'organisation et à l'encadrement des cours les moins suivis, qu'ils comparent aux modalités prévues pour l'organisation des cours les plus suivis. Dans les écoles où les enfants des requérants suivent le cours de religion israélite, celui-ci est organisé par degré, conformément à l'alinéa 4 de l'article 39 attaqué du décret. Il en résulte une série de perturbations dans l'horaire de leurs enfants voire même, pour certains d'entre eux, l'impossibilité de suivre certains cours et ce, contrairement à l'article 39, alinéa 6, lui aussi attaqué du décret, qui prévoit que les enfants inscrits dans les cours de religion minoritaires ne peuvent les suivre qu'aux heures où se font pour les autres élèves « les travaux dirigés » et donc perdre le bénéfice de ces travaux dirigés.

Les requérants invoquent aussi l'intérêt à agir au nom de leurs enfants contre une disposition décrétale qui empêche leurs enfants inscrits dans un cours de religion minoritaire de suivre le cours de religion israélite dans les mêmes conditions pédagogiques, psychologiques et morales que les élèves inscrits dans les cours les plus suivis de morale non confessionnelle ou de religion.

Quant au moyen unique A.2.1. Un moyen unique est pris, tiré de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution lus en combinaison avec les articles 19 et 24 de la Constitution, ainsi que, d'une part, de l'article 9 de la Convention européenne des droits de l'homme et de l'article 2 de son Premier Protocole additionnel, et, d'autre part, de l'article 18, paragraphe 4, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de l'article 13, paragraphe 3, du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

A.2.2. Les parties requérantes estiment que l'article 39, alinéas 3, deuxième phrase, à 6, du décret de la Communauté française du 13 juillet 1998 viole de deux manières le principe d'égalité de traitement et de non-discrimination dans la liberté des cultes et dans les droits à l'enseignement et à l'instruction.

A.2.3. Tout d'abord, il y a discrimination entre élèves inscrits à un cours de religion minoritaire et ceux inscrits aux cours majoritaires, en ce que les premiers reçoivent l'enseignement de leur religion dans des conditions moins favorables que celles dans lesquelles leurs condisciples reçoivent l'enseignement de la religion catholique ou de la morale non confessionnelle, des enfants d'âges différents étant regroupés dans le premier cas tandis qu'il existe un groupe par année dans le second. Ensuite, certains élèves reçoivent l'enseignement de certaines des autres matières prévues au programme dans des conditions moins favorables que les élèves inscrits au cours de religion catholique ou de morale non confessionnelle, puisqu'ils perdent le bénéfice des travaux dirigés visés à l'article 39, alinéa 6, du décret.

Les droits au libre choix entre l'enseignement d'une des religions reconnues et celui de la morale non confessionnelle, à l'enseignement ou à l'instruction dans le respect de la liberté des cultes et à un enseignement moral ou religieux à charge de la Communauté française sont également violés en raison de la gravité de la discrimination ci-dessus dénoncée, qui porte atteinte à la substance même de ces droits.

Or, selon les parties requérantes, rien ne justifie pareilles discriminations. En effet, des situations comparables - il n'existe aucune différence intrinsèque entre un cours de morale ou de religion majoritaire ou minoritaire - sont traitées de manière différente du point de vue de l'organisation des cours (par année ou par degré), entraînant une différence de traitement dans l'enseignement des cours philosophiques (classes d'âge homogènes ou hétérogènes) et des autres matières prévues au programme (bénéfice ou non des travaux dirigés).

S'il est vrai que le décret s'appuie sur un critère de distinction objectif, à savoir le dépassement ou non d'un minimum de cinq élèves inscrits à un cours, et que le but poursuivi par le décret, à savoir de réaliser des économies budgétaires est, lui aussi, légitime, la façon dont ce but est poursuivi est illégitime en ce qu'elle aboutit à réduire le nombre de situations dites « de préceptorat », où des cours de religions minoritaires étaient dispensés pour un seul élève, et jugées « indécentes » dans les travaux préparatoires du décret. Les parties requérantes estiment ne pas voir ce qui autorise le Gouvernement de la Communauté française à interpréter restrictivement l'article 24, § 1er, alinéa 4, de la Constitution, c'est-à-dire comme n'imposant qu'au niveau de l'implantation, et non au niveau des années d'études, l'organisation d'un cours de religion sans considération du nombre d'élèves inscrits à ce cours.

Les parties requérantes estiment ensuite que les principes en cause, en l'espèce les droits et libertés auxquels les dispositions attaquées portent atteinte, sont la liberté des cultes, le droit à l'enseignement et la liberté de choix entre l'enseignement d'une des religions reconnues et de la morale non confessionnelle, c'est-à-dire autant de droits fondamentaux. Ceci doit à tout le moins avoir pour conséquence que la Cour fasse preuve d'une particulière sévérité dans l'examen de proportionnalité des dispositions attaquées.

Si les requérants ne contestent pas que les dispositions litigieuses sont adéquates pour réaliser leurs objectifs et que les objectifs d'économie et de rétablissement de la « décence » poursuivis par le législateur décrétal impliquent nécessairement le regroupement des classes d'âges pour les cours minoritaires, la réalisation de ces objectifs n'implique pas nécessairement que les élèves inscrits aux cours minoritaires soient extraits de leur groupe classe pour suivre leur cours de religion, avec pour conséquence la perturbation de leur programme de cours.

Par ailleurs, le décret n'adopte aucune mesure qui garantisse une organisation optimale des horaires des différentes classes, pour éviter autant que faire se peut un préjudice pédagogique aux élèves des cours minoritaires. Le décret ne prévoit non plus aucune coordination entre les différentes écoles de la Communauté ou subsidiées par elle dans l'établissement des horaires des cours de religion minoritaires.

Enfin, le décret aurait dû prévoir lui-même l'organisation de cours « de remise en ordre » au bénéfice des élèves devant être extraits de leur classe pour suivre les cours minoritaires, au moment des cours de religion catholique ou de morale de leurs condisciples.

A.2.4. La seconde discrimination dénoncée par les parties requérantes consiste en une différence de traitement injustifiée entre élèves inscrits à un cours de religion minoritaire. En effet, certains parmi eux doivent être extraits de leur groupe classe pour pouvoir suivre ce cours, ainsi qu'au moment où leurs condisciples suivent leur cours de religion catholique ou de morale non confessionnelle, tandis que ce n'est pas le cas pour d'autres, ou seulement dans une moindre mesure.

La discrimination dénoncée est manifestement inconstitutionnelle. En effet, - les situations des deux catégories d'élèves sont exactement semblables; - la différence de traitement est évidente et semblable à celle qui existe entre élèves des cours minoritaires et majoritaires; - elle ne repose pas sur un critère objectif mais bien, soit sur les hasards de la concordance des horaires, soit sur une organisation de ceux-ci par la direction des écoles de manière à éviter un préjudice pédagogique à certaines classes d'âge lorsque cela se révèle possible, le choix des bénéficiaires se faisant alors de manière plus ou moins arbitraire; - il n'existe aucun objectif d'intérêt général qui justifie une telle différence de traitement, si ce n'est, indirectement, les objectifs poursuivis par la première différence de traitement dénoncée; - les droits et libertés affectés par cette discrimination sont les mêmes droits fondamentaux que ceux affectés par la première; - il n'existe aucun rapport de proportionnalité entre les atteintes ainsi portées aux droits de certains des élèves des cours minoritaires et les objectifs poursuivis par le décret.

Quant au préjudice grave difficilement réparable A.3.1. Un triple préjudice est, selon les parties requérantes, subi par leurs enfants. Les deux premiers sont de nature matérielle, à savoir, d'une part, l'atteinte à la liberté des cultes et de l'enseignement pour les enfants qui, en raison de la disposition attaquée du décret, doivent suivre un enseignement inadapté de la religion israélite à leur âge et au niveau de maturité qu'ils ont atteint et, d'autre part, la privation du bénéfice des travaux dirigés. Le troisième préjudice est moral, à savoir que parce qu'ils sont extraits de leur classes pour suivre les cours de religion israélite, les enfants se sentent marginalisés en raison de leurs convictions religieuses et de leur appartenance à la communauté juive.

A.3.2. Ces préjudices justifient la suspension immédiate du décret. En effet, ils sont personnellement encourus par les enfants des requérants; ils sont effectifs puisque le décret est entré en vigueur le 1er octobre 1998; ils sont graves et difficilement réparables. Les parties requérantes estiment d'ailleurs que la gravité de certains préjudices est telle qu'ils ne pourraient être réparés ni par l'annulation de la norme attaquée, ni par l'octroi de dommages et intérêts. - B - La disposition en cause B.1. L'article 39 du décret de la Communauté française du 13 juillet 1998 portant organisation de l'enseignement maternel et primaire ordinaire et modifiant la réglementation de l'enseignement, dont les alinéas 3, 2ème phrase, à 6 sont attaqués, dispose comme suit : « Dans chaque implantation, isolée ou non, un cours de morale ou de religion est organisé dès qu'un élève est inscrit dans un de ces cours, conformément à l'article 8 de la loi du 29 mai 1959 modifiant certaines dispositions de la législation de l'enseignement. Le cas échéant, le cours est créé ou supprimé dans le courant de l'année scolaire.

Le nombre de groupes, applicable du 1er octobre au 30 septembre suivant est fixé, pour le cours le plus suivi, conformément au tableau ci-après, qui prend en compte l'ensemble des élèves de l'implantation inscrits dans ce cours le 1er octobre de l'année scolaire en cours : Nombre d'élèves Nombre de groupes jusqu'à 25 élèves 1 groupe à partir de 26 élèves 2 groupes à partir de 45 élèves 3 groupes à partir de 72 élèves 4 groupes à partir de 93 élèves 5 groupes à partir de 115 élèves 6 groupes à partir de 141 élèves 7 groupes à partir de 164 élèves 8 groupes à partir de 187 élèves 9 groupes à partir de 210 élèves 10 groupes à partir de 233 élèves 11 groupes + 23 élèves + 1 groupe Les cours les moins suivis comptent le même nombre de groupes que le cours le plus suivi, sans pouvoir excéder un groupe par année, sauf lorsque l'application du tableau de l'alinéa 2 fournit un résultat plus favorable. En outre, chaque groupe d'élèves ne peut comporter moins de 5 élèves, sauf s'il y a effectivement moins de 5 élèves qui suivent le cours. Toutefois, lorsque l'implantation compte des élèves répartis, d'une part, en première et deuxième primaires, d'autre part, en troisième, quatrième, cinquième et sixième primaires, deux groupes peuvent être organisés dans les cours les moins suivis s'il y a au moins deux groupes dans le cours le plus suivi.

Le cours moins suivi est organisé par degré lorsque le cours le plus suivi compte effectivement au moins un groupe par degré.

Un groupe comprend deux périodes de cours. Ces deux périodes peuvent être groupées.

Lorsqu'un élève est amené à suivre un cours de morale ou de religion moins suivi qui n'est pas donné simultanément avec le cours le plus suivi, il ne peut être soustrait de son groupe classe qu'au moment des travaux dirigés visés à l'article 2, 22°, et ceux-ci ne peuvent comprendre aucune acquisition nouvelle dans les savoirs et compétences visés à l'article 16, § 3, du décret du 24 juillet 1997 précité. » Quant à la demande de suspension B.2. Aux termes de l'article 20, 1°, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, deux conditions de fond doivent être remplies pour que la suspension puisse être décidée : - des moyens sérieux doivent être invoqués; - l'exécution immédiate de la règle attaquée doit risquer de causer un préjudice grave difficilement réparable.

Les deux conditions étant cumulatives, la constatation que l'une de ces deux conditions n'est pas remplie entraîne le rejet de la demande de suspension.

Quant au préjudice grave difficilement réparable B.3.1. Les parties requérantes allèguent que l'application immédiate de la disposition attaquée est de nature à leur causer un préjudice grave difficilement réparable.

B.3.2. Ce préjudice serait d'abord matériel en raison du regroupement par degré pour le cours de religion israélite que suivent leurs enfants, ce cours étant suivi dans l'implantation où ils sont inscrits par moins de cinq élèves dans chaque année d'études. Il consisterait en ce que l'enseignement qui est dispensé à leurs enfants serait moins adapté à leur âge et à leur niveau de maturité, d'une part, et à ce que ces enfants perdraient le bénéfice des travaux dirigés, d'autre part.

Ce préjudice serait aussi moral en raison de ce que les enfants des requérants étant extraits de leur classe pour suivre les cours de religion israélite, se sentent dès lors marginalisés en raison de leurs convictions religieuses et de leur appartenance à la communauté juive.

B.4.1. En vertu de l'article 22 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, les parties qui demandent la suspension doivent, pour satisfaire à la seconde condition inscrite à l'article 20, 1°, de cette loi, exposer dans leur requête des faits concrets démontrant que l'application de la norme litigieuse à la date de son entrée en vigueur risque de leur causer un préjudice grave difficilement réparable.

B.4.2. Le préjudice invoqué tiré de ce que le regroupement par degré de leurs enfants pour l'enseignement de la religion israélite serait inadapté à leur âge et à leur niveau de maturité n'est pas suffisamment démontré dans la requête, le même type d'enseignement par degré est d'ailleurs prévu par l'article 39 du décret pour tous les cours philosophiques dès lors qu'il y a moins de cinq élèves inscrits.

D'ailleurs, le mode de calcul des groupes prévu par l'alinéa 2 de l'article 39 du décret, que les parties n'attaquent pas, aboutit, dans les implantations où les élèves sont peu nombreux, à organiser les cours philosophiques mêmes majoritaires dans un seul groupe pour les six années d'études. Le risque de préjudice grave difficilement réparable exigé par l'article 20, 1°, de la loi du 6 janvier 1989Documents pertinents retrouvés type loi prom. 06/01/1989 pub. 18/02/2008 numac 2008000108 source service public federal interieur Loi spéciale sur la Cour d'arbitrage fermer sur la Cour d'arbitrage n'est pas démontré.

B.5. Le préjudice selon lequel les enfants des requérants perdraient le bénéfice des travaux dirigés, à supposer qu'il soit réel, ne résulte pas de l'alinéa 6, attaqué, du décret. La Cour relève en effet que cette disposition protège les enfants qui suivent des cours de religion minoritaires puisqu'elle empêche qu'ils soient extraits de leur classe lorsque des cours de base sont dispensés. La suspension de cette disposition conduirait à priver les parties requérantes d'une protection qui n'existait pas antérieurement.

D'autre part, la Cour constate que, dans la logique du mécanisme d'organisation des cours philosophiques mis en place par le décret et comme le confirme par ailleurs le Gouvernement de la Communauté française, si les cours philosophiques ne sont pas tous donnés simultanément, pendant que les enfants d'une classe suivront les cours philosophiques majoritaires, les enfants des cours de religion minoritaires doivent bénéficier de travaux dirigés. Le préjudice invoqué ne pourrait résulter que d'une application incorrecte par les écoles du décret attaqué, application qui échappe au contrôle de la Cour.

B.6. Quant au préjudice moral allégué, la Cour constate que le sentiment de marginalisation dont se plaignent les requérants est la conséquence du choix qu'ils ont fait eux-mêmes, au nom de la liberté religieuse et de la liberté d'enseignement qui leur sont reconnues par la Constitution, d'inscrire leurs enfants dans un cours de religion minoritaire. Ils ne sauraient donc imputer à l'article 39 du décret de la Communauté française une discrimination qu'ils auraient par contre pu à juste titre faire valoir si cette disposition n'avait pas organisé de cours pour toutes les religions reconnues.

Le préjudice moral allégué ne saurait trouver son origine dans les dispositions attaquées.

B.7. Il résulte des considérants B.4 à B.6 que les requérants n'ont pas démontré que l'application de la disposition attaquée risque de leur causer un préjudice grave difficilement réparable.

Leur demande de suspension ne satisfait donc pas à la seconde condition prévue par l'article 20, 1°, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.

La demande de suspension doit être rejetée.

Par ces motifs, la Cour rejette la demande de suspension.

Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 30 mars 1999.

Le greffier, Le président, L. Potoms. M. Melchior.

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