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Arrêt De La Cour Constitutionelle
publié le 23 juillet 1999

Arrêt n° 63/99 du 9 juin 1999 Numéro du rôle : 1411 En cause : le recours en annulation de l'article 214 de la loi du 22 février 1998 portant des dispositions sociales, qui abroge l'article 10, § 2, de la loi du 28 août 1991 sur l'exerci La Cour d'arbitrage, composée du président L. De Grève et du juge L. François, faisant fonction (...)

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1999021321
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COUR D'ARBITRAGE


Arrêt n° 63/99 du 9 juin 1999 Numéro du rôle : 1411 En cause : le recours en annulation de l'article 214 de la loi du 22 février 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/02/1998 pub. 03/03/1998 numac 1998021087 source services du premier ministre Loi portant des dispositions sociales type loi prom. 22/02/1998 pub. 03/03/1998 numac 1998021086 source services du premier ministre Loi portant certaines dispositions sociales fermer portant des dispositions sociales, qui abroge l'article 10, § 2, de la loi du 28 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/08/1991 pub. 06/07/2011 numac 2011000415 source service public federal interieur Loi sur l'exercice de la médecine vétérinaire fermer sur l'exercice de la médecine vétérinaire, introduit par l'a.s.b.l. Vlaamse Dierenartsenvereniging et autres.

La Cour d'arbitrage, composée du président L. De Grève et du juge L. François, faisant fonction de président, et des juges P. Martens, J. Delruelle, H. Coremans, A. Arts et M. Bossuyt, assistée de la référendaire B. Renauld, faisant fonction de greffier, présidée par le président L. De Grève, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 3 septembre 1998 et parvenue au greffe le 4 septembre 1998, l'a.s.b.l.

Vlaamse Dierenartsenvereniging, dont le siège social est établi à 1060 Bruxelles, avenue Fonsny 41, M. Janssens, demeurant à 9250 Waasmunster, Dommelstraat 46, W. Stragier, demeurant à 8870 Izegem, Bellevuestraat 35, et J. Nijs, demeurant à 2222 Itegem, Schoolstraat 9, ont introduit un recours en annulation de l'article 214 de la loi du 22 février 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/02/1998 pub. 03/03/1998 numac 1998021087 source services du premier ministre Loi portant des dispositions sociales type loi prom. 22/02/1998 pub. 03/03/1998 numac 1998021086 source services du premier ministre Loi portant certaines dispositions sociales fermer portant des dispositions sociales (publiée au Moniteur belge du 3 mars 1998), qui abroge l'article 10, § 2, de la loi du 28 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/08/1991 pub. 06/07/2011 numac 2011000415 source service public federal interieur Loi sur l'exercice de la médecine vétérinaire fermer sur l'exercice de la médecine vétérinaire.

II. La procédure Par ordonnance du 4 septembre 1998, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.

Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.

Le recours a été notifié conformément à l'article 76 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 29 septembre 1998.

L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 6 octobre 1998.

Le Conseil des ministres, rue de la Loi 16, 1000 Bruxelles, a introduit un mémoire par lettre recommandée à la poste le 13 novembre 1998.

Ce mémoire a été notifié conformément à l'article 89 de la loi organique, par lettre recommandée à la poste le 20 novembre 1998.

Par ordonnance du 24 décembre 1998, le président en exercice a prorogé de quinze jours le délai prévu pour introduire un mémoire en réponse, à la demande des parties requérantes.

Cette ordonnance a été notifiée aux parties requérantes, par lettre recommandée à la poste le 28 décembre 1998.

Par ordonnance du 24 février 1999, la Cour a prorogé jusqu'au 3 septembre 1999 le délai dans lequel l'arrêt doit être rendu.

Par ordonnance du 31 mars 1999, la Cour a déclaré l'affaire en état et fixé l'audience au 20 avril 1999.

Cette ordonnance a été notifiée aux parties ainsi qu'à leurs avocats, par lettres recommandées à la poste le 1er avril 1999.

Par ordonnance du 20 avril 1999, le président en exercice, après avoir constaté que le président M. Melchior était légitimement empêché et remplacé par le juge L. François, juge le plus ancien, qui était déjà membre du siège, et que le juge H. Boel était également légitimement empêché, a complété le siège par les juges P. Martens et A. Arts.

A l'audience publique du 20 avril 1999 : - ont comparu : . Me P. Devers, avocat au barreau de Gand, pour les parties requérantes; . Me T. Balthazar, avocat au barreau de Gand, Me H. Diependaele et Me A. Vastersavendts, avocats au barreau de Bruxelles, pour le Conseil des ministres; - les juges-rapporteurs H. Coremans et P. Martens ont fait rapport; - les avocats précités ont été entendus; - l'affaire a été mise en délibéré.

La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.

III. En droit - A - Sur la recevabilité A.1. Les parties requérantes allèguent qu'elles sont directement et défavorablement affectées par les dispositions attaquées, « en ce qu'il est désormais interdit aux médecins vétérinaires d'effectuer eux-mêmes des préparations extemporanées, et ce quelle que soit l'espèce animale à laquelle ces préparations magistrales seraient destinées ».

La première partie requérante est la plus grande association de défense d'intérêts des médecins vétérinaires néerlandophones. Son président a été associé par la Chambre des représentants à l'élaboration de la loi du 28 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/08/1991 pub. 06/07/2011 numac 2011000415 source service public federal interieur Loi sur l'exercice de la médecine vétérinaire fermer sur l'exercice de la médecine vétérinaire. Aux termes de ses statuts, l'association a pour objet « d'assurer la défense des intérêts professionnels de ses membres dans l'ensemble du pays et devant toute juridiction et d'assumer la gestion des biens qui lui ont été confiés à cette fin ». Le 12 juin 1998, le conseil d'administration a décidé d'introduire un recours en annulation de la disposition attaquée.

Les deuxième et troisième parties requérantes tiennent une pratique en qualité de médecin vétérinaire tant pour les animaux d'élevage que pour les animaux de compagnie. La quatrième partie requérante tient une pratique en qualité de médecin vétérinaire pour les animaux de compagnie. Elle est impliquée aussi dans une procédure pénale concernant notamment des préparations extemporanées. Elle a été acquittée en première instance mais le ministère public a interjeté appel.

A.2. Selon le Conseil des ministres, l'article 10, § 2, de la loi du 28 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/08/1991 pub. 06/07/2011 numac 2011000415 source service public federal interieur Loi sur l'exercice de la médecine vétérinaire fermer, abrogé par la disposition attaquée, prévoyait la possibilité d'instaurer des exceptions très limitées au principe général du monopole des pharmaciens en matière de préparation des médicaments. Cet article habilitait le Roi à dresser une liste limitative de préparations extemporanées que le médecin vétérinaire était autorisé à effectuer. Etant donné qu'au moment de l'abrogation de cet article, le Roi n'avait pas encore dressé de liste, les médecins vétérinaires n'étaient pas autorisés à effectuer des préparations de médicaments. L'abrogation de l'article 10, § 2, ne modifie donc rien à la situation des parties requérantes. Celles-ci perdent seulement la possibilité que le Roi dresse encore une liste qui aurait autorisé les médecins vétérinaires à effectuer les préparations extemporanées strictement désignées. Selon le Conseil des ministres, la perte d'une opportunité ne suffit cependant pas pour justifier de l'intérêt requis. En effet, l'intérêt doit être actuel et certain.

Le Conseil des ministres ajoute que les médicaments enregistrés suffisent au traitement des maladies animales et qu'il n'est par conséquent point besoin de préparations extemporanées. C'est pour cette raison que le Roi n'a jamais dressé de liste. Les préparations qui auraient pu figurer sur cette liste étaient du reste fort limitées, tant du point de vue de leur composition que du point de vue de leur emploi : les préparations devaient être effectuées à partir de médicaments enregistrés et être destinées à un seul animal ou à un petit nombre d'animaux. Dans ce dernier cas, il devait s'agir de bêtes appartenant à une même exploitation. Ces restrictions excluaient la tenue en dépôt de préparations. Le médecin vétérinaire ne pouvait pas non plus délivrer la préparation et devait donc l'administrer lui-même.

Le Conseil des ministres conclut de ce qui précède que les requérants ne justifient pas de l'intérêt requis.

Quant au fond A.3. Le moyen unique est pris « de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution (lus également en combinaison avec les articles 4 et 24 de la directive C.E.E. 81/851/CEE du 28 septembre 1981 concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives aux médicaments vétérinaires, modifiée par la directive 90/676/CEE du 13 décembre 1990) ».

A.4. Selon la première branche du moyen, les médecins vétérinaires établis en Belgique subissent, du fait de la disposition attaquée, un traitement inégal illicite par rapport, d'une part, aux pharmaciens établis en Belgique qui tiennent une officine publique et, d'autre part, aux médecins vétérinaires établis dans les pays voisins, « qui relèvent de leur propre législation nationale suivant laquelle de telles préparations extemporanées sont autorisées sous diverses conditions, compte tenu des articles 2, 4 et 24 de la directive CEE 81/851/CEE du 28 septembre 1981 (et du régime de permis qu'elle prévoit et qui n'est pas réservé aux pharmaciens) (ce qui entraîne notamment que dans la zone frontalière, particulièrement en ce qui concerne les animaux de compagnie, il est souvent fait appel aux médecins vétérinaires établis juste de l'autre côté de la frontière), et aussi par rapport aux médecins vétérinaires qui peuvent, sans s'établir, prêter librement leurs services dans le pays s'ils sont établis dans un autre Etat membre et satisfont aux conditions du chapitre III de l'arrêté royal du 23 juin 1981 portant des mesures destinées à faciliter l'exercice effectif du droit d'établissement et de libre prestation de service des vétérinaires, tel qu'il a été modifié à ce jour (voy. l'article 1er, § 1er, 2°, de cet arrêté royal), c'est-à-dire à la condition de remplir la déclaration visée à l'article 4, § 1er, de ce même arrêté royal et même, pour peu qu'il ne s'agisse pas de services réguliers, sans être inscrit dans le registre spécial du Conseil régional compétent de l'Ordre des médecins vétérinaires ».

Le traitement inégal existerait en particulier par rapport aux médecins vétérinaires néerlandais qui sont établis dans des communes néerlandaises limitrophes de la Belgique, compte tenu de la convention belgo-néerlandaise du 28 avril 1947 concernant l'exercice de l'art vétérinaire dans les communes de la frontière (Moniteur belge, 23 octobre 1949).

Selon les parties requérantes, la différence de traitement que la disposition législative attaquée instaure par rapport aux médecins vétérinaires établis à l'étranger et qui exercent également en Belgique n'est pas objective. Le traitement différent des catégories examinées ci-dessus ne saurait pas davantage résister au contrôle de proportionnalité. En effet, l'objectif de la loi du 22 février 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/02/1998 pub. 03/03/1998 numac 1998021087 source services du premier ministre Loi portant des dispositions sociales type loi prom. 22/02/1998 pub. 03/03/1998 numac 1998021086 source services du premier ministre Loi portant certaines dispositions sociales fermer concerne la prescription et la fourniture de médicaments vétérinaires - matière réglée par l'article 9 de la loi du 28 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/08/1991 pub. 06/07/2011 numac 2011000415 source service public federal interieur Loi sur l'exercice de la médecine vétérinaire fermer - et non l'exécution de préparations extemporanées qui faisait l'objet de l'article 10, § 2, de la même loi.

Par ailleurs, selon les parties requérantes, la disposition législative litigieuse ne saurait pas non plus contribuer à l'objectif spécifiquement visé, qui consiste à optimiser le contrôle de l'usage des médicaments vétérinaires et à garantir la qualité de ceux-ci en centralisant leur fourniture et leur préparation chez le pharmacien.

Il ne peut en effet être soutenu sans justification que la formation des médecins vétérinaires serait insuffisante pour leur permettre d'effectuer eux-mêmes des préparations extemporanées, puisque l'on a prétendu le contraire lors des travaux préparatoires de la loi du 28 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/08/1991 pub. 06/07/2011 numac 2011000415 source service public federal interieur Loi sur l'exercice de la médecine vétérinaire fermer et que les formations de médecin vétérinaire et de pharmacien n'ont pas été modifiées depuis. En outre, la liberté de prescription des médecins vétérinaires, notamment sur le plan des préparations magistrales, est maintenue, cependant qu'il n'est en principe pas permis aux pharmaciens de ne pas effectuer les prescriptions ou de modifier celles-ci.

A.5. Selon le Conseil des ministres, la distinction entre les médecins vétérinaires et les pharmaciens existe déjà depuis l'arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967 relatif à l'exercice de l'art de guérir, de l'art infirmier, des professions paramédicales et aux commissions médicales, qui attribue aux pharmaciens le monopole d'effectuer des préparations extemporanées. L'article 10, § 2, abrogé, de la loi du 28 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/08/1991 pub. 06/07/2011 numac 2011000415 source service public federal interieur Loi sur l'exercice de la médecine vétérinaire fermer autorisait seulement les médecins vétérinaires à effectuer les préparations qui figureraient sur la liste établie par le Roi.

Etant donné que cette liste n'a jamais été établie, l'autorisation n'a jamais été donnée aux médecins vétérinaires d'effectuer une quelconque préparation extemporanée par dérogation à l'arrêté royal n° 78.

Surabondamment, le Conseil des ministres renvoie à l'article 5 de l'arrêté royal du 16 mars 1984 portant des dispositions spéciales relatives aux médicaments destinés aux animaux (« Le médecin vétérinaire qui délivre lui-même des médicaments, doit les acquérir auprès d'un pharmacien tenant officine ouverte au public. La commande est effectuée au moyen d'un bon de commande signé et daté, rédigé en double exemplaire. »).

La distinction entre les pharmaciens et les autres personnes repose par ailleurs, selon le Conseil des ministres, sur un critère objectif : la formation et l'obtention d'un diplôme qui doit attester que le porteur de celui-ci a subi avec succès les examens dans les disciplines et sur les matières figurant au programme des examens universitaires. Les parties requérantes ne peuvent pas prétendre que le diplôme qu'elles ont obtenu satisfait aux exigences précitées et qu'elles ont bénéficié d'une formation équivalente à celle des pharmaciens en matière de pharmacologie et d'autres connaissances nécessaires à l'exercice de l'art pharmaceutique. De même que l'article 4 de la loi du 28 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/08/1991 pub. 06/07/2011 numac 2011000415 source service public federal interieur Loi sur l'exercice de la médecine vétérinaire fermer dispose que nul ne peut exercer la médecine vétérinaire s'il n'est pas médecin vétérinaire et que cet article confère ainsi un monopole aux médecins vétérinaires, l'article 4, § 1er, de l'arrêté royal n° 78 attribue un monopole aux pharmaciens en ce qui concerne l'art pharmaceutique. Dans les deux cas, la distinction est fondée sur la différence de formation universitaire.

Le Conseil des ministres estime, enfin, qu'il existe un rapport raisonnable entre les moyens utilisés et le but poursuivi, qui consiste à contrôler mieux et plus efficacement la prescription et la délivrance des médicaments vétérinaires et à combattre par conséquent de manière plus efficace les abus existant dans ce secteur. En permettant seulement aux pharmaciens de délivrer des médicaments vétérinaires, le contrôle est centralisé et peut être limité aux pharmaciens. Les possibilités étendues de contrôle qui existent pour les préparations effectuées par les pharmaciens n'existent pas pour celles qui seraient effectuées par les médecins vétérinaires. Ces préparations ne pourraient pas non plus être effectuées avec la même efficacité et la même possibilité de contrôle.

A.6. S'agissant de la comparaison avec les médecins vétérinaires étrangers, le Conseil des ministres considère que la disposition attaquée ne crée pas une inégalité de traitement entre les dispensateurs de soins dans l'Union européenne. En effet, la directive invoquée par les parties requérantes ne permet pas de conclure que les Etats membres de l'Union devraient autoriser les médecins vétérinaires à effectuer des préparations extemporanées.

En ce qui concerne les médecins vétérinaires néerlandais, le Conseil des ministres estime que le moyen manque en fait : l'article 2 de la convention invoquée par les parties requérantes dispose que les médecins vétérinaires doivent se conformer à la législation en vigueur dans le pays où ils exercent l'art vétérinaire. Le médecin vétérinaire néerlandais est par conséquent soumis à la même législation que son collègue belge et ne peut pas non plus effectuer de préparations extemporanées dans notre pays.

A.7. Selon la seconde branche du moyen, formulée seulement par la quatrième partie requérante, la disposition attaquée ne résisterait pas au contrôle de proportionnalité inhérent au principe d'égalité, étant donné qu'elle a pour effet que les médecins vétérinaires ne peuvent effectuer aucune préparation extemporanée, que celle-ci soit destinée aux animaux d'élevage ou aux animaux de compagnie. La partie requérante conclut des travaux préparatoires que l'objectif de la mesure concerne les animaux destinés à la consommation humaine et que la distinction entre les animaux d'élevage et les animaux de compagnie est pertinente. La directive mentionnée plus haut établit également une distinction, en ce qui concerne les préparations extemporanées, en fonction de l'espèce animale à laquelle les médicaments sont destinés (voy. le terme « animaux de rapport » à l'article 4, paragraphe 4).

Souvent, il n'existe pas de médicaments enregistrés pour les animaux qui ne sont pas producteurs d'alimentation, de sorte que des préparations magistrales restent nécessaires dans ce cas et que celles-ci doivent en outre bien souvent être administrées d'urgence et suivant des dosages délicats.

A.8. Selon le Conseil des ministres, la distinction entre les différentes espèces animales n'est pas pertinente au regard du but de la loi, qui consiste à permettre un contrôle efficace de l'emploi des produits vétérinaires et à protéger ainsi la santé publique. Des espèces animales plus petites sont également consommées, de même que leurs dérivés, tels les oeufs. Pour un contrôle efficace, toute préparation extemporanée en vue du traitement de n'importe quel animal doit être interdite. Les conséquences d'un traitement identique pour tous les animaux sont réduites : l'impossibilité d'effectuer soi-même une préparation extemporanée n'empêche pas de traiter les petits animaux et les animaux de compagnie et n'entrave pas l'exercice de la médecine vétérinaire. Les conséquences défavorables de la mesure attaquée ne sont en aucun cas disproportionnées à l'objectif que poursuit le législateur. - B - Quant à la recevabilité du recours B.1. Les parties requérantes demandent l'annulation de l'article 214 de la loi du 22 février 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/02/1998 pub. 03/03/1998 numac 1998021087 source services du premier ministre Loi portant des dispositions sociales type loi prom. 22/02/1998 pub. 03/03/1998 numac 1998021086 source services du premier ministre Loi portant certaines dispositions sociales fermer portant des dispositions sociales, qui énonce : « L'article 10, § 2, de la même loi [du 28 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/08/1991 pub. 06/07/2011 numac 2011000415 source service public federal interieur Loi sur l'exercice de la médecine vétérinaire fermer sur l'exercice de la médecine vétérinaire] est abrogé. » L'article 10, § 2, abrogé, était libellé comme suit : « Le Roi détermine la liste des préparations extemporanées que le médecin vétérinaire est autorisé à effectuer, ainsi que les conditions dans lesquelles le médecin vétérinaire effectue ces préparations à partir de médicaments enregistrés, et qui sont destinées à un animal ou à un petit nombre d'animaux d'une exploitation donnée. » B.2. En vertu de l'article 3 de ses statuts, publiés dans les annexes du Moniteur belge du 22 août 1996, la première partie requérante, l'a.s.b.l. Vlaamse Dierenartsenvereniging, a pour objet « d'assurer la défense des intérêts professionnels de ses membres dans l'ensemble du pays et devant toute juridiction et d'assumer la gestion des biens qui lui ont été confiés à cette fin ». Selon cette même disposition, les activités de l'association peuvent s'étendre à « tout ce qui peut contribuer directement ou indirectement, dans le sens le plus large, à la réalisation de son objet ».

L'objet social de cette requérante doit se concevoir comme étant de défendre l'intérêt collectif de la catégorie à laquelle ses membres appartiennent.

B.3.1. Le Conseil des ministres objecte que les parties requérantes ne justifient pas de l'intérêt requis, étant donné que l'article 10, § 2, de la loi du 28 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/08/1991 pub. 06/07/2011 numac 2011000415 source service public federal interieur Loi sur l'exercice de la médecine vétérinaire fermer, abrogé par la disposition attaquée, n'a jamais été exécuté et que les médicaments enregistrés suffisent pour le traitement des maladies animales.

B.3.2. Bien que le Roi n'ait pas exécuté l'article 10, § 2, de la loi du 28 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/08/1991 pub. 06/07/2011 numac 2011000415 source service public federal interieur Loi sur l'exercice de la médecine vétérinaire fermer, celui-ci conférait virtuellement aux médecins vétérinaires le droit d'effectuer des préparations extemporanées. La disposition attaquée prive les médecins vétérinaires de ce droit. Ceci peut affecter directement et défavorablement toutes les parties requérantes.

B.3.3. L'exception ne peut être accueillie.

Quant au moyen unique B.4. Dans la première branche du moyen, les parties requérantes allèguent que la disposition attaquée discrimine les médecins vétérinaires établis en Belgique par rapport, d'une part, aux pharmaciens établis en Belgique et, d'autre part, aux médecins vétérinaires établis dans un autre Etat membre de l'Union européenne qui exercent aussi en Belgique.

Dans la deuxième branche du moyen, la quatrième partie requérante allègue que la disposition attaquée ne résiste pas au contrôle de proportionnalité inhérent au principe d'égalité, étant donné qu'elle a pour effet que les médecins vétérinaires ne peuvent effectuer aucune préparation extemporanée, que celle-ci soit destinée aux animaux d'élevage ou aux animaux de compagnie.

Etant donné que le contrôle de proportionnalité fait partie du contrôle au regard des articles 10 et 11 de la Constitution, la seconde branche du moyen est examinée en même temps que la première.

Sur le traitement inégal des médecins vétérinaires et des pharmaciens B.5.1. Selon les parties requérantes, la disposition attaquée viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'elle prive les médecins vétérinaires du droit d'effectuer des préparations extemporanées, réservant ainsi exclusivement ce droit aux pharmaciens.

B.5.2. L'arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967 relatif à l'exercice de l'art de guérir, de l'art infirmier, des professions paramédicales et aux commissions médicales a instauré une interdiction de cumul médico-pharmaceutique.

L'article 4, § 1er, alinéas 1er et 2, de cet arrêté dispose : « § 1er. Nul ne peut exercer l'art pharmaceutique s'il n'est porteur du diplôme légal de pharmacien obtenu conformément à la législation sur la collation des grades académiques et le programme des examens universitaires ou s'il n'en est légalement dispensé et s'il ne réunit pas en outre les conditions imposées par l'article 7, § 1er ou § 2.

Constitue l'exercice illégal de l'art pharmaceutique, l'accomplissement habituel par une personne ne réunissant pas l'ensemble des conditions requises par l'alinéa 1er du présent paragraphe de tout acte ayant pour objet la préparation, l'offre en vente, la vente en détail et la délivrance, même à titre gratuit, de médicaments. » L'article 4, § 2, 5°, du même arrêté prévoit certes une exception pour la fourniture par les médecins vétérinaires de médicaments achetés chez un pharmacien, mais non pour la préparation de médicaments par les médecins vétérinaires eux-mêmes.

L'article 10, § 2, de la loi du 28 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/08/1991 pub. 06/07/2011 numac 2011000415 source service public federal interieur Loi sur l'exercice de la médecine vétérinaire fermer avait néanmoins habilité le Roi à déterminer la liste des préparations extemporanées, destinées à un animal ou à un petit nombre d'animaux d'une exploitation donnée, que le médecin vétérinaire serait autorisé à effectuer à partir de médicaments enregistrés.

La disposition présentement attaquée abroge l'article 10, § 2, de la loi du 28 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/08/1991 pub. 06/07/2011 numac 2011000415 source service public federal interieur Loi sur l'exercice de la médecine vétérinaire fermer. Cette abrogation vise, selon les travaux préparatoires, à « réaliser un meilleur contrôle sur la prescription et la fourniture des médicaments pour les animaux et [à] pouvoir combattre ainsi les abus dans ce secteur d'une façon plus efficace »; elle vise en même temps à « centraliser la délivrance des médicaments préparés par une personne autorisée, c'est-à-dire le pharmacien, et [à] garantir ainsi la qualité de ces médicaments » (Doc. parl., Chambre, 1996-1997, nos 1184/1-1185/1, pp. 34 et 85, et 1184/2-1185/2, pp. 39 et 89).

B.5.3. Centraliser la fourniture de médicaments préparés pour l'usage vétérinaire auprès d'une catégorie déterminée de personnes peut constituer la mesure la plus adéquate sous le rapport de la qualité des médicaments et du contrôle de leur emploi.

Le choix du législateur d'accorder aux seuls pharmaciens l'autorisation d'effectuer des préparations extemporanées - conformément à la prescription d'un vétérinaire - repose sur un critère objectif et n'est pas dénué de justification raisonnable au regard de l'objectif, compte tenu de la formation spécialisée des pharmaciens.

L'interdiction qui en résulte pour les médecins vétérinaires de préparer eux-mêmes sous certaines conditions des médicaments n'est pas disproportionnée, étant donné qu'elle n'entrave pas le bon exercice de la médecine vétérinaire. En effet, rien n'empêche qu'un médecin vétérinaire prescrive et administre des préparations extemporanées effectuées par un pharmacien. Pour le même motif, il n'est pas disproportionné que cette interdiction s'applique non seulement aux préparations destinées aux animaux d'élevage mais aussi aux préparations destinées aux animaux de compagnie.

B.5.4. Le moyen n'est pas fondé en tant qu'il dénonce un traitement inégal des médecins vétérinaires et des pharmaciens.

Quant à l'inégalité de traitement entre les médecins vétérinaires établis en Belgique et ceux établis dans un autre Etat membre de l'Union européenne qui exercent également en Belgique B.6. Selon les parties requérantes, la disposition attaquée viole les articles 10 et 11 de la Constitution, lus conjointement avec les articles 4 et 24 de la directive 81/851/CEE du Conseil du 28 septembre 1981 concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives aux médicaments vétérinaires, en ce qu'elle prive les médecins vétérinaires établis en Belgique du droit d'effectuer des préparations extemporanées alors que les médecins vétérinaires établis dans un autre Etat membre de l'Union européenne qui exercent également en Belgique pourraient effectuer de telles préparations. Compte tenu de la convention belgo-néerlandaise du 28 avril 1947 concernant l'exercice de l'art vétérinaire dans les communes de la frontière, l'inégalité de traitement serait particulièrement patente par rapport aux médecins vétérinaires néerlandais qui sont établis dans les communes néerlandaises limitrophes de la Belgique.

B.7. Le moyen ne critique pas le fait que les médecins vétérinaires établis dans un autre Etat membre de l'Union européenne peuvent y effectuer des préparations extemporanées, mais uniquement le fait que ces médecins vétérinaires pourraient exercer la même activité en Belgique.

B.8.1. Le premier considérant du préambule de la directive 81/851/CEE indique que toute réglementation en matière de production et de distribution des médicaments vétérinaires doit avoir comme objectif essentiel la sauvegarde de la santé publique.

B.8.2. L'article 24 de la directive, tel qu'il a été modifié par la directive 90/676/CEE du 13 décembre 1990, concerne le contrôle exercé par les Etats membres sur la fabrication des médicaments vétérinaires et sur leur importation en provenance de pays tiers.

Cette disposition est étrangère à l'objet du recours.

B.8.3. L'article 4 de la directive, tel qu'il a été modifié par la directive 90/676/CEE du 13 décembre 1990 et par la directive 93/40/CEE du 14 juin 1993, concerne la commercialisation et l'administration des médicaments vétérinaires.

En vertu de cet article 4, aucun médicament vétérinaire ne peut être mis sur le marché d'un Etat membre sans qu'une autorisation n'ait été préalablement délivrée et aucun médicament vétérinaire ne peut être administré aux animaux sans que l'autorisation visée ci-dessus n'ait été délivrée.

Le paragraphe 4 de l'article 4 dispose : « Toutefois, les Etats membres peuvent, exceptionnellement, lorsqu'il n'existe pas de médicaments autorisés pour une affection, autoriser l'administration, par un vétérinaire ou sous sa responsabilité personnelle, à un ou à un petit nombre d'animaux d'une exploitation donnée, notamment afin de leur éviter des souffrances inacceptables : a) d'un médicament vétérinaire autorisé dans l'Etat membre concerné pour des animaux d'une autre espèce ou pour des animaux de la même espèce, mais pour une affection différente, ou, b) si le médicament visé au point a) n'existe pas, d'un médicament autorisé dans l'Etat membre concerné pour l'usage humain conformément à la directive 65/65/CEE;c) si le médicament visé au point b) n'existe pas et dans les limites découlant de la législation de l'Etat membre concerné, d'un médicament vétérinaire préparé extemporanément par une personne autorisée selon la législation nationale conformément aux termes d'une prescription vétérinaire, Cette disposition de la directive, en vertu de laquelle le législateur national peut imposer des restrictions à la réalisation de préparations extemporanées et peut habiliter certaines personnes à effectuer ces préparations, implique que ces dispositions nationales s'appliquent à tous les médicaments vétérinaires administrés dans l'Etat membre concerné, qu'ils le soient par un médecin vétérinaire établi dans cet Etat membre ou par un médecin vétérinaire établi ailleurs et qui exerce dans cet Etat membre, et sans égard au fait que ce dernier, en vertu de sa législation nationale, peut, conformément aux dispositions de la directive, effectuer des préparations extemporanées dans l'Etat membre où il est établi. B.8.4. En vertu de l'article 1er de la convention belgo-néerlandaise du 28 avril 1947 concernant l'exercice de l'art vétérinaire dans les communes de la frontière, les vétérinaires néerlandais qui sont établis dans les communes néerlandaises limitrophes de la Belgique et qui sont autorisés à y exercer l'art vétérinaire pourront exercer le même art dans les communes belges limitrophes des Pays-Bas.

Toutefois, en vertu de l'article 2 de la même convention, les médecins vétérinaires néerlandais qui usent de ce droit sont soumis comme les médecins vétérinaires belges à la législation belge relative à l'exercice de l'art vétérinaire.

B.9. Le moyen ne peut être admis en aucune de ses branches.

Par ces motifs, la Cour rejette le recours.

Ainsi prononcé en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 9 juin 1999.

Le greffier f.f., B. Renauld.

Le président, L. De Grève.

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