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Arrêt De La Cour Constitutionelle
publié le 30 janvier 1999

Arrêt n° 114/98 du 18 novembre 1998 Numéros du rôle : 1128, 1129 et 1130 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 2bis, § 1 er , de la lo(...)

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cour d'arbitrage
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1999021532
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30/01/1999
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COUR D'ARBITRAGE


Arrêt n° 114/98 du 18 novembre 1998 Numéros du rôle : 1128, 1129 et 1130 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 2bis, § 1er, de la loi du 24 février 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/02/1921 pub. 17/12/2004 numac 2004000617 source service public federal interieur Loi concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques. - Traduction allemande fermer concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques, et aux articles 1er (n° 15), 11 et 28 de l'arrêté royal du 31 décembre 1930 concernant le trafic des substances soporifiques et stupéfiantes, posées par le Tribunal correctionnel de Bruxelles.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et L. De Grève, et des juges H. Boel, L. François, P. Martens, J. Delruelle, G. De Baets, E. Cerexhe, H. Coremans, A. Arts, R. Henneuse et M. Bossuyt, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles Par jugements du 30 juin 1997 en cause du ministère public contre respectivement S.D., H.E. et M.B., dont les expéditions sont parvenues au greffe de la Cour le 11 juillet 1997, le Tribunal de première instance de Bruxelles a posé les questions préjudicielles suivantes : « L'article 2bis, § 1er, de la loi du 24 février 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/02/1921 pub. 17/12/2004 numac 2004000617 source service public federal interieur Loi concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques. - Traduction allemande fermer, modifiée par la loi du 9 juillet 1975Documents pertinents retrouvés type loi prom. 09/07/1975 pub. 24/12/2014 numac 2014000890 source service public federal interieur Loi relative au contrôle des entreprises d'assurances. - Coordination officieuse en langue allemande type loi prom. 09/07/1975 pub. 23/10/2015 numac 2015000557 source service public federal interieur Loi relative au contrôle des entreprises d'assurances. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer et les articles 1er (n° 15), 11 et 28 de l'arrêté royal du 31 décembre 1930, modifié par l'article 1er de l'arrêté royal du 20 février 1987, en ce qu'ils répriment, n'étant ni médecin, ni pharmacien, ni vétérinaire et n'ayant pas acquis ou détenu la substance en vertu d'une prescription médicale valable, l'importation, la fabrication, la détention, la vente ou l'offre en vente, la délivrance ou l'acquisition à titre onéreux ou à titre gratuit et sans avoir obtenu l'autorisation préalable du Ministre qui a la santé publique dans ses attributions, de cannabis, violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution dans la mesure où : - ils n'établissent aucune distinction entre les différents modes de préhension précités, selon que le prévenu y ait recours en vue de sa seule consommation ou dans un but de revente; - ils mettent sur un pied d'égalité, les différentes substances soporifiques stupéfiantes ou autres substances psychotropes susceptibles d'engendrer une dépendance, visées à l'article 1er de l'arrêté royal du 31 décembre 1930, modifié par l'article 1er de l'arrêté royal du 20 février 1987; (Dans la deuxième et la troisième affaire, ce dernier point était formulé comme suit :) - ils mettent sur le même pied, le cannabis et les autres substances soporifiques stupéfiantes ou autres substances psychotropes susceptibles d'engendrer une dépendance, visées à l'article 1er de l'arrêté royal du 31 décembre 1930, modifié par l'article 1er de l'arrêté royal du 20 février 1987; - ils pénalisent la consommation de cannabis alors que l'usage d'autres produits, dont il n'est pas démontré scientifiquement qu'ils soient moins nocifs pour la santé ou susceptibles d'engendrer une dépendance moindre, ne tombent pas sous le coup de la loi pénale; - ils peuvent amener le ministère public, compte tenu de la réprobation sociale limitée que suscite la consommation de cannabis, à conduire des politiques de poursuite très divergentes ? » II. Les faits et la procédure antérieure S.D., M.B. et H.E. sont poursuivis, selon le cas, pour commerce et/ou usage en groupe de cannabis ou pour en avoir facilité l'usage. Le Tribunal soulève d'office les questions préjudicielles précitées.

III. La procédure devant la Cour Par ordonnances du 11 juillet 1997, le président en exercice a désigné les juges des sièges respectifs conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.

Par ordonnance du 14 juillet 1997, la Cour a joint les affaires.

Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.

Les décisions de renvoi ont été notifiées conformément à l'article 77 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 11 septembre 1997; l'ordonnance de jonction a été notifiée aux parties par les mêmes lettres.

L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 16 septembre 1997.

Le Conseil des ministres, rue de la Loi 16, 1000 Bruxelles, a introduit un mémoire dans chacune des affaires, par lettres recommandées à la poste le 27 octobre 1997.

Par ordonnances du 18 décembre 1997 et du 30 juin 1998, la Cour a prorogé respectivement jusqu'aux 11 juillet 1998 et 11 janvier 1999 le délai dans lequel l'arrêt doit être rendu.

Par ordonnance du 29 avril 1998, le président M. Melchior a soumis les affaires à la Cour réunie en séance plénière.

Par ordonnance du même jour, la Cour a invité le Conseil des ministres à introduire le 22 mai 1998 au plus tard un mémoire complémentaire concernant la compatibilité des dispositions visées aux questions préjudicielles avec l'article 12, alinéa 2, de la Constitution combiné avec les articles 10 et 11 de celle-ci.

Cette ordonnance a été notifiée au Conseil des ministres par lettre recommandée à la poste le 30 avril 1998.

Le Conseil des ministres a introduit un mémoire complémentaire par lettre recommandée à la poste le 20 mai 1998.

Par ordonnance du 8 juillet 1998, la Cour a déclaré les affaires en état et fixé l'audience au 16 septembre 1998.

Cette ordonnance a été notifiée au Conseil des ministres ainsi qu'à son avocat par lettres recommandées à la poste le 10 juillet 1998.

A l'audience publique du 16 septembre 1998 : -a comparu Me J. Bourtembourg, avocat au barreau de Bruxelles, pour le Conseil des ministres; - les juges-rapporteurs R. Henneuse et M. Bossuyt ont fait rapport; - l'avocat précité a été entendu; - les affaires ont été mises en délibéré.

La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.

IV. En droit - A - La position du Conseil des ministres A.1.1. En adoptant la loi du 24 février 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/02/1921 pub. 17/12/2004 numac 2004000617 source service public federal interieur Loi concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques. - Traduction allemande fermer, le législateur a entendu donner au Gouvernement les moyens de remplir les engagements résultant de la Convention internationale de l'opium du 23 janvier 1912. A cette fin, il a habilité le Gouvernement, d'une part, à réglementer la matière, et, d'autre part, à fixer lui-même les peines qui seraient applicables aux infractions aux dispositions des arrêtés royaux adoptés sur la base de l'habilitation précitée.

A.1.2. Parmi les diverses modifications de la loi du 24 février 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/02/1921 pub. 17/12/2004 numac 2004000617 source service public federal interieur Loi concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques. - Traduction allemande fermer, la principale est celle apportée par la loi du 9 juillet 1975Documents pertinents retrouvés type loi prom. 09/07/1975 pub. 24/12/2014 numac 2014000890 source service public federal interieur Loi relative au contrôle des entreprises d'assurances. - Coordination officieuse en langue allemande type loi prom. 09/07/1975 pub. 23/10/2015 numac 2015000557 source service public federal interieur Loi relative au contrôle des entreprises d'assurances. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer.

Celle-ci répond à l'apparition, d'une part, de réseaux de trafiquants de stupéfiants, et d'autre part, de nouvelles substances d'une nocivité au moins égale à celle des stupéfiants. A cette fin, la loi du 9 juillet 1975Documents pertinents retrouvés type loi prom. 09/07/1975 pub. 24/12/2014 numac 2014000890 source service public federal interieur Loi relative au contrôle des entreprises d'assurances. - Coordination officieuse en langue allemande type loi prom. 09/07/1975 pub. 23/10/2015 numac 2015000557 source service public federal interieur Loi relative au contrôle des entreprises d'assurances. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer a, d'une part, créé de nouvelles infractions et, d'autre part, assuré une répression plus sévère des faits érigés en infraction par la loi du 24 février 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/02/1921 pub. 17/12/2004 numac 2004000617 source service public federal interieur Loi concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques. - Traduction allemande fermer.

A.1.3. Par ailleurs, la Belgique a approuvé, par une loi du 20 août 1969, la Convention unique sur les stupéfiants, signée le 30 mars 1961, et modifiée par le Protocole de Genève du 25 mars 1972. Il est relevé que le cannabis figure parmi les substances reprises en annexe à ladite Convention et que s'appliquent à son égard des mesures tant de contrôle que d'interdiction de production, d'exportation et d'importation, de commerce, de détention ou d'utilisation. En outre, l'article 36, § 1er, de la Convention prévoit l'obligation d'ériger en infraction divers comportements ayant trait aux stupéfiants lorsque ces comportements sont commis intentionnellement, des peines privatives de liberté devant sanctionner les infractions graves.

A.1.4. Enfin, l'article 2bis de la loi du 24 février 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/02/1921 pub. 17/12/2004 numac 2004000617 source service public federal interieur Loi concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques. - Traduction allemande fermer a été modifié par la loi du 14 juillet 1994Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/07/1994 pub. 20/11/2008 numac 2008000938 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994. - Traduction allemande de dispositions modificatives de l'année 2007 type loi prom. 14/07/1994 pub. 08/10/2010 numac 2010000581 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994. - Traduction allemande de dispositions modificatives du premier semestre de l'année 2010 type loi prom. 14/07/1994 pub. 08/10/2010 numac 2010000576 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 14/07/1994 pub. 25/01/2012 numac 2012000022 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 14/07/1994 pub. 19/12/2008 numac 2008001027 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 14/07/1994 pub. 10/07/2014 numac 2014000464 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 14/07/1994 pub. 25/02/2009 numac 2009000104 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer afin d'accroître les moyens de lutte contre le trafic des substances à action hormonale administrées aux animaux destinés à l'alimentation humaine.

A.2. En vertu de l'article 142 de la Constitution et de l'article 26 de la loi spéciale du 6 janvier 1989, la Cour n'exerce son contrôle qu'à l'égard des normes de nature législative; il s'ensuit qu'elle est incompétente pour répondre aux questions préjudicielles en ce que celles-ci visent les articles 1er, 11 et 28 de l'arrêté royal du 31 décembre 1930, « adopté en vertu d'une délégation accordée par le législateur ».

A.3. Quant à l'identité de traitement entre les prévenus, ayant commis une infraction, à l'article 11 de l'arrêté royal précité, que ce soit en vue de la consommation ou de la revente, il est, d'une part, contesté que ces deux catégories de prévenus se trouvent dans des situations substantiellement différentes et, d'autre part, il n'apparaît pas que la disposition en cause les traite de manière identique. En effet, en recourant à la technique, classique en droit pénal, d'une échelle de peines, le législateur permet aux cours et tribunaux de moduler la sanction en fonction des éléments propres à la cause.

A.4. Quant à l'identité de traitement établie, sur le plan des sanctions, entre les différentes substances visées à l'article 1er de l'arrêté royal du 31 décembre 1930, elle pose en substance la question de la distinction entre les drogues douces et les drogues dures. Pour la même raison que celle relevée ci-dessus (institution d'une échelle de peines), l'identité de traitement est contestée, le juge pouvant moduler sa sanction en fonction de la nature des substances en cause, en particulier selon qu'il s'agit de drogues douces ou de drogues dures; les travaux préparatoires de la loi du 9 juillet 1975Documents pertinents retrouvés type loi prom. 09/07/1975 pub. 24/12/2014 numac 2014000890 source service public federal interieur Loi relative au contrôle des entreprises d'assurances. - Coordination officieuse en langue allemande type loi prom. 09/07/1975 pub. 23/10/2015 numac 2015000557 source service public federal interieur Loi relative au contrôle des entreprises d'assurances. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer confirmeraient la nécessité d'une telle différenciation de la répression.

A.5. Quant à la différence de traitement faite entre le cannabis et d'autres substances également toxiques ou susceptibles d'engendrer une égale dépendance, il est relevé, d'une part, que le classement du cannabis comme drogue résulte d'un arrêté royal, lequel échappe à la compétence de la Cour, et que, d'autre part, il appartient au seul législateur d'apprécier si et dans quelle mesure le souci de protéger la santé publique justifie d'interdire la consommation de telle ou telle substance. Les drogues visées par la loi pénale ont en commun de mettre en péril la santé publique et d'être stupéfiantes; le traitement réservé à d'autres substances, tel le tabac ou l'alcool, ne peut être considéré comme manifestement arbitraire ou déraisonnable.

A.6. En ce qu'enfin l'article 2bis de la loi du 24 février 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/02/1921 pub. 17/12/2004 numac 2004000617 source service public federal interieur Loi concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques. - Traduction allemande fermer conduirait à des politiques de poursuites divergentes dans le chef du ministère public, ce risque ne trouve sa source dans aucune des dispositions visées par les questions préjudicielles, mais bien dans le principe de l'opportunité des poursuites, qui régit l'organisation des parquets; bien que l'existence d'une base légale audit principe soit contestée, en toute hypothèse celle-ci ne réside-t-elle pas dans les dispositions en cause en l'espèce.

Mémoire complémentaire du Conseil des ministres A.7. L'article 12, alinéa 2, de la Constitution consacre le principe de la légalité des incriminations; ce principe signifie qu'un fait n'est punissable que si, au moment où il a été commis, il correspondait à un fait incriminé par la loi pénale.

Si la matière régie par l'article 12, alinéa 2, est réservée au législateur, cela n'exclut pas l'intervention du Roi au titre du pouvoir d'exécution qu'Il détient en vertu de l'article 108 de la Constitution.

Ce pouvoir d'exécution est doublement limité. D'une part, Il doit y être habilité par le législateur. D'autre part, le législateur devra fixer dans la loi les principes essentiels qu'Il doit respecter.

A.8. Le Conseil des ministres fait ensuite application de ces principes au dossier.

Si l'incrimination se conçoit comme visant la sanction d'une obligation pénalement sanctionnée, il est satisfait au prescrit de l'article 12, alinéa 2, de la Constitution par l'article 2bis de la loi du 24 février 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/02/1921 pub. 17/12/2004 numac 2004000617 source service public federal interieur Loi concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques. - Traduction allemande fermer.

Si par contre la notion d'incrimination vise l'obligation pénalement sanctionnée, il y a lieu d'examiner également l'article 1er de la loi précitée, dès lors que l'article 2bis ne définit en tant que tel aucune obligation. Selon le Conseil des ministres, « cette définition est donnée par l'article 1er de la loi du 24 février 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/02/1921 pub. 17/12/2004 numac 2004000617 source service public federal interieur Loi concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques. - Traduction allemande fermer, sur un mode ' relativement indéterminé ', puisque cette disposition habilite le Roi à réglementer et à surveiller la matière considérée, dans l'intérêt de l'hygiène et de la santé publique ». Il s'ensuit que les deux éléments constitutifs de l'incrimination, l'obligation et la sanction, sont chacun définis par une disposition différente, chacun de ceux-ci devant être examinés pour s'assurer du respect de l'article 12, alinéa 2, de la Constitution.

A.9. En ce qui concerne la question de savoir si l'article 1er de la loi préc itée du 24 février 1921, portant habilitation au Roi, définit de façon suffisamment précise les principes essentiels sur lesquels doit se fonder l'intervention du Roi, il est souligné que l'habilitation donnée au Roi l'est à des fins de réglementation et de surveillance et a pour objet l'intérêt de l'hygiène et de la santé publique, précisions qui limitent la latitude donnée au Roi dans Son pouvoir réglementaire d'exécution. Il en est déduit que les articles 1er et 2bis satisfont au prescrit de l'article 12, alinéa 2, de la Constitution.

A.10. Dans l'hypothèse où la Cour considérerait que tel n'est pas le cas, est ensuite examinée la question de savoir si cette violation est discriminatoire.

En ce qui concerne la finalité de la délégation donnée au Roi, il s'agissait de donner au pouvoir exécutif les armes juridiques permettant de satisfaire aux obligations internationales résultant de la Convention sur l'opium du 23 janvier 1912, approuvée par la loi du 15 mars 1914. Le même objectif a fondé la loi du 14 juillet 1994Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/07/1994 pub. 20/11/2008 numac 2008000938 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994. - Traduction allemande de dispositions modificatives de l'année 2007 type loi prom. 14/07/1994 pub. 08/10/2010 numac 2010000581 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994. - Traduction allemande de dispositions modificatives du premier semestre de l'année 2010 type loi prom. 14/07/1994 pub. 08/10/2010 numac 2010000576 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 14/07/1994 pub. 25/01/2012 numac 2012000022 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 14/07/1994 pub. 19/12/2008 numac 2008001027 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 14/07/1994 pub. 10/07/2014 numac 2014000464 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 14/07/1994 pub. 25/02/2009 numac 2009000104 source service public federal interieur Loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer, modificative de la loi du 24 février 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/02/1921 pub. 17/12/2004 numac 2004000617 source service public federal interieur Loi concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques. - Traduction allemande fermer. Il en est déduit, compte tenu des « responsabilités particulières que la Constitution confie au Roi en matière de relations internationales, de conclusions de traités et de respect des obligations qui en découlent, ainsi que du caractère technique de la matière », que le but poursuivi n'apparaît pas illégitime.

L'habilitation contestée est pertinente par rapport à cet objectif et n'est pas disproportionnée, les atteintes portées aux garanties offertes par l'article 12, alinéa 2, n'étant pas excessives. - B - En ce qui concerne la compétence de la Cour B.1.1. Les questions préjudicielles portent aussi bien sur l'article 2bis, § 1er, de la loi du 24 février 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/02/1921 pub. 17/12/2004 numac 2004000617 source service public federal interieur Loi concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques. - Traduction allemande fermer concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques que sur les articles 1er (n° 15), 11 et 28 de l'arrêté royal du 31 décembre 1930 concernant le trafic des substances soporifiques et stupéfiantes.

B.1.2. L'article 2bis, § 1er, de la loi du 24 février 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/02/1921 pub. 17/12/2004 numac 2004000617 source service public federal interieur Loi concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques. - Traduction allemande fermer dispose : « Les infractions aux dispositions qui, dans les arrêtés royaux pris en exécution de la présente loi, concernent les substances soporifiques, stupéfiantes et les autres substances psychotropes susceptibles d'engendrer une dépendance et dont la liste est arrêtée par le Roi ainsi que la culture des plantes dont peuvent être extraites ces substances, seront punies d'un emprisonnement de trois mois à cinq ans et d'une amende de mille à cent mille francs ou de l'une de ces peines seulement. » L'arrêté royal du 31 décembre 1930 énumère, en son article 1er, les différentes substances qui, en vertu de l'article 2 du même arrêté, constituent des stupéfiants; parmi ces substances figure, au point 15 de l'article 1er, le cannabis.

L'article 11 de l'arrêté précité énonce : « Nul ne peut importer, exporter, fabriquer, détenir, vendre ou offrir en vente, délivrer ou acquérir des stupéfiants à titre onéreux ou à titre gratuit, s'il n'en a obtenu l'autorisation préalable de Notre Ministre qui a la Santé publique dans ses attributions. Cette autorisation est personnelle. » L'article 28 du même arrêté prévoit enfin que : « Les infractions aux dispositions du présent arrêté seront punies des peines prévues par la loi du 24 février 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/02/1921 pub. 17/12/2004 numac 2004000617 source service public federal interieur Loi concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques. - Traduction allemande fermer, sans préjudice de celles comminées par le Code pénal. » B.1.3. La Cour n'est pas compétente pour contrôler la compatibilité avec les articles 10 et 11 de la Constitution des articles 1er, 11 et 28 de l'arrêté royal du 31 décembre 1930.

L'article 2bis, § 1er, de la loi du 24 février 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/02/1921 pub. 17/12/2004 numac 2004000617 source service public federal interieur Loi concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques. - Traduction allemande fermer contient une habilitation en application de laquelle le Roi peut établir une liste des substances soporifiques et stupéfiantes ainsi que des autres substances psychotropes susceptibles d'engendrer une dépendance.

La Cour examinera cette disposition afin d'apprécier si l'habilitation qu'elle confie au Roi est constitutionnelle.

Quant au fond B.2. L'article 12 de la Constitution dispose : « La liberté individuelle est garantie.

Nul ne peut être poursuivi que dans les cas prévus par la loi, et dans la forme qu'elle prescrit. [...]» B.3. En attribuant au pouvoir législatif la compétence de déterminer, notamment, les cas de poursuites, l'article 12, alinéa 2, de la Constitution garantit à tout citoyen qu'aucun comportement ne sera pénalement punissable qu'en vertu d'une décision prise par une assemblée délibérante démocratiquement élue. L'article 12, alinéa 2, de la Constitution ne va toutefois pas jusqu'à obliger le législateur à régler lui-même chaque aspect de la poursuite. Une délégation conférée au Roi n'est pas contraire au principe de légalité pour autant que l'habilitation soit définie de manière suffisamment précise et porte sur l'exécution de mesures dont les éléments essentiels sont fixés préalablement par le législateur.

B.4. L'article 2bis, § 1er, de la loi du 24 février 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/02/1921 pub. 17/12/2004 numac 2004000617 source service public federal interieur Loi concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques. - Traduction allemande fermer ne comporte pas une simple habilitation conférée au Roi en vue d'incriminer les actes qu'Il détermine. Il fait explicitement référence aux arrêtés royaux pris « en exécution de la présente loi » et renvoie également à d'autres dispositions de la même loi, que le Roi doit aussi respecter lorsqu'Il fait usage de l'habilitation.

L'article 1er de la loi du 24 février 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/02/1921 pub. 17/12/2004 numac 2004000617 source service public federal interieur Loi concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques. - Traduction allemande fermer énonce : « Le gouvernement est autorisé à réglementer et surveiller, dans l'intérêt de l'hygiène et de la santé publique, l'importation, l'exportation, la fabrication, la conservation, c'est-à-dire le stockage dans les conditions requises, l'étiquetage, le transport, la détention, la vente et l'offre en vente, la délivrance et l'acquisition, à titre onéreux ou à titre gratuit, des substances toxiques, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques, ainsi que la culture des plantes dont ces substances peuvent être extraites. [...]» C'est cet article qui détermine des comportements susceptibles d'être incriminés. En outre, il précise l'objectif de la politique pénale en posant comme principe essentiel en la matière le maintien de la « santé publique ».

Par ailleurs, la loi elle-même énonce en son article 2bis, § 1er, que les infractions aux arrêtés royaux pris en exécution de la loi « seront punies d'un emprisonnement de trois mois à cinq ans et d'une amende de mille à cent mille francs ou de l'une de ces peines seulement ».

Enfin, la disposition législative précitée impose comme condition supplémentaire que la politique répressive à mener porte exclusivement sur des « substances susceptibles d'engendrer une dépendance ».

B.5. Dès lors que sont précisés dans la loi l'objectif qu'elle poursuit, les comportements et la nature des substances qu'elle vise ainsi que les peines applicables, les composantes essentielles de l'incrimination sont fixées par la loi et il est de ce fait satisfait au principe de légalité contenu à l'article 12, alinéa 2, de la Constitution.

L'article 2bis, § 1er, de la loi du 24 février 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/02/1921 pub. 17/12/2004 numac 2004000617 source service public federal interieur Loi concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques. - Traduction allemande fermer ne privant aucune catégorie de citoyens de la garantie de l'article 12, alinéa 2, de la Constitution, il ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution lus en combinaison avec cette disposition.

B.6. Les questions préjudicielles ont en substance un double objet.

D'une part (trois premières branches de la question), elles portent sur la compatibilité avec le principe d'égalité de l'article 2bis, § 1er, de la loi du 24 février 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/02/1921 pub. 17/12/2004 numac 2004000617 source service public federal interieur Loi concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques. - Traduction allemande fermer en ce qu'il sanctionne de façon indifférenciée les différents comportements que la loi et l'arrêté visent sans distinguer selon que le prévenu y a recours en vue de sa seule consommation ou dans un but de revente, ne distingue pas le cannabis des autres substances visées à l'article 1er de l'arrêté royal du 31 décembre 1930 et pénalise le cannabis sans le faire à l'égard d'autres substances également nocives ou génératrices de dépendance.

D'autre part (dernière branche), les questions préjudicielles portent sur la compatibilité avec le principe d'égalité de la même disposition en ce qu'elle permet des politiques divergentes en matière de poursuites.

B.7. En ce qui concerne le premier de ces deux objets, la Cour constate que les différences alléguées portent sur les choix opérés par le Roi. S'il devait en résulter des discriminations contraires aux articles 10 et 11 de la Constitution, la Cour ne pourrait les sanctionner, ce contrôle relevant soit du Conseil d'Etat, soit des autres juridictions.

B.8. En ce qui concerne le second objet, la Cour constate que les éventuelles divergences trouvent leur source non dans l'article 2bis, § 1er, précité, et les peines que cette disposition prévoit, mais dans la politique criminelle mise en oeuvre en cette matière par le ministère public. A supposer de telles divergences établies, leur appréciation échappe à la compétence de la Cour.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : - L'article 2bis, § 1er, de la loi du 24 février 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/02/1921 pub. 17/12/2004 numac 2004000617 source service public federal interieur Loi concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques. - Traduction allemande fermer concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution. - Pour le surplus, les questions préjudicielles ne relèvent pas de la compétence de la Cour.

Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 18 novembre 1998.

Le greffier, L. Potoms.

Le président, M. Melchior.

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