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Arrêt
publié le 25 mars 2000

Extrait de l'arrêt n° 19/2000 du 9 février 2000 Numéro du rôle : 1826 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 1384, alinéa 4, du Code civil, et l'article 18 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, posée La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et G. De Baets, et des juges L. Françoi(...)

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25/03/2000
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COUR D'ARBITRAGE


Extrait de l'arrêt n° 19/2000 du 9 février 2000 Numéro du rôle : 1826 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 1384, alinéa 4, du Code civil, et l'article 18 de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer relative aux contrats de travail, posée par la Cour d'appel de Liège.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et G. De Baets, et des juges L. François, J. Delruelle, E. Cerexhe, A. Arts et M. Bossuyt, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle Par arrêt du 30 novembre 1999 en cause de N. Pauly contre A. Leskens et M. Debecker et en cause de A. Leskens et M. Debecker contre E. Laduron, C. Carels et N. Pauly, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 2 décembre 1999, la Cour d'appel de Liège a posé la question préjudicielle suivante : « N'y a-t-il pas violation des articles 10 et 11 de la Constitution dans la mesure où un enseignant du secteur public, organe de la puissance publique, peut faire l'objet d'une condamnation personnelle à des dommages et intérêts en faveur d'une victime sur base de l'article 1384, alinéa 4, du Code civil et donc sur base d'une faute si légère soit-elle, alors que dans l'enseignement privé, un enseignant engagé dans les liens d'un contrat d'emploi bénéficie de l'exonération prévue par l'article 18 de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer [relative aux contrats de travail], qui limite sa responsabilité aux seuls cas de dol, de faute lourde ou de faute légère habituelle ? » (...) IV. En droit (...) B.1. Par son arrêt du 30 novembre 1999, la Cour d'appel de Liège demande à la Cour d'arbitrage s'il n'y a pas violation des articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'un enseignant du secteur public, organe de la puissance publique, peut faire l'objet d'une condamnation personnelle à des dommages et intérêts en faveur d'une victime sur la base de l'article 1384, alinéa 4, du Code civil et donc sur la base d'une faute si légère soit-elle, alors que dans l'enseignement privé, un enseignant engagé dans les liens d'un contrat d'emploi bénéficie de l'exonération prévue par l'article 18 de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer relative aux contrats de travail, qui limite sa responsabilité aux seuls cas de dol, de faute lourde ou de faute légère habituelle.

B.2. L'article 1384, alinéa 4, du Code civil, dispose : « Les instituteurs et les artisans [sont responsables] du dommage causé par leurs élèves et apprentis pendant le temps qu'ils sont sous leur surveillance. » L'article 18 de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande fermer relative aux contrats de travail dispose : « En cas de dommages causés par le travailleur à l'employeur ou à des tiers dans l'exécution de son contrat, le travailleur ne répond que de son dol et de sa faute lourde.

Il ne répond de sa faute légère que si celle-ci présente dans son chef un caractère habituel plutôt qu'accidentel.

A peine de nullité, il ne peut être dérogé à la responsabilité fixée aux alinéas 1er et 2 que par une convention collective de travail rendue obligatoire par le Roi, et ce uniquement en ce qui concerne la responsabilité à l'égard de l'employeur.

L'employeur peut, dans les conditions prévues par l'article 23 de la loi du 12 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/04/1965 pub. 08/03/2007 numac 2007000126 source service public federal interieur Loi concernant la protection de la rémunération des travailleurs fermer concernant la protection de la rémunération des travailleurs, imputer sur la rémunération les indemnités et dommages-intérêts qui lui sont dus en vertu du présent article et qui ont été, après les faits, convenus avec le travailleur ou fixés par le juge. » B.3. Il résulte des dispositions précitées qu'en ce qui concerne la responsabilité civile résultant d'une faute légère occasionnelle, le législateur a établi une différence de traitement entre les membres du personnel statutaire occupés par les pouvoirs publics, d'une part, et les travailleurs contractuels en général, d'autre part, puisque seuls les premiers doivent répondre de leur faute légère. Cette différence de traitement n'est pas justifiée étant donné la similitude des relations de travail comparées, notamment sous l'angle de la subordination juridique.

B.4. La Cour relève par ailleurs que l'exonération de la responsabilité que l'article 18 précité accorde au travailleur à l'égard de tiers, n'enlève rien, comme l'admettent généralement la jurisprudence et la doctrine, à la responsabilité de l'employeur fondée sur l'article 1384, alinéa 3, du Code civil, pour autant que les conditions d'application de cette disposition soient remplies. La présomption de responsabilité établie par l'article 1384, alinéa 3, du Code civil est irréfragable, en sorte que l'employeur est objectivement responsable. L'exonération de responsabilité dans le chef du travailleur à la suite d'une faute légère occasionnelle n'empêche donc pas en principe que la victime soit indemnisée.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : Les articles 10 et 11 de la Constitution sont violés par le fait qu'un enseignant du secteur public, organe de la puissance publique, peut faire l'objet d'une condamnation personnelle à des dommages et intérêts en faveur d'une victime sur la base de l'article 1384, alinéa 4, du Code civil et donc sur la base d'une faute si légère soit-elle.

Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 9 février 2000.

Le greffier, L. Potoms.

Le président, M. Melchior.

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