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Arrêt
publié le 19 octobre 2006

Extrait de l'arrêt n° 145/2006 du 28 septembre 2006 Numéro du rôle : 3807 En cause : le recours en annulation partielle de l'article 25 du décret de la Région flamande du 22 avril 2005 portant diverses mesures en matière d'environnement et La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges P. Martens, R.(...)

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COUR D'ARBITRAGE


Extrait de l'arrêt n° 145/2006 du 28 septembre 2006 Numéro du rôle : 3807 En cause : le recours en annulation partielle de l'article 25 du décret de la Région flamande du 22 avril 2005 portant diverses mesures en matière d'environnement et d'agriculture, introduit par l'ASBL FEBELCEM et autres.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges P. Martens, R. Henneuse, M. Bossuyt, E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke et J. Spreutels, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président A. Arts, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 10 novembre 2005 et parvenue au greffe le 14 novembre 2005, un recours en annulation partielle de l'article 25 du décret de la Région flamande du 22 avril 2005 portant diverses mesures en matière d'environnement et d'agriculture (publié au Moniteur belge du 13 mai 2005) a été introduit par l'ASBL FEBELCEM, dont le siège social est établi à 1050 Bruxelles, rue Volta 8, la SA Holcim (Belgique), dont le siège social est établi à 7034 Obourg, rue des Fabriques 2, la SA Compagnie des Ciments belges, dont le siège social est établi à 7530 Gaurain-Ramecroix, Grand-Route 260, la SA Cimenteries CBR, dont le siège social est établi à 1170 Bruxelles, chaussée de La Hulpe 185, la SA Scoribel, dont le siège social est établi à 7034 Obourg, rue des Fabriques 2, et la SA RECYFUEL, dont le siège social est établi à 1170 Bruxelles, chaussée de La Hulpe 185. (...) II. En droit (...) Quant à la disposition attaquée B.1.1. Les parties requérantes demandent l'annulation partielle de l'article 25 du décret du 22 avril 2005 portant diverses mesures en matière d'environnement et d'agriculture.

Cette disposition est libellée comme suit : « Dans l'article 47, § 2, du [...] décret [du 2 juillet 1981 concernant la prévention et la gestion des déchets], remplacé par le décret du 20 décembre 1989 et modifié par les décrets des 21 décembre 1990, 25 juin 1992, 18 décembre 1992, 22 décembre 1993, 21 décembre 1994, 22 décembre 1995, 20 décembre 1996, 19 décembre 1997, 19 décembre 1998, 6 juillet 2001, 21 décembre 2001, 5 juillet 2002 et 20 décembre 2002, il est inséré un point 29, rédigé comme suit : '29° par dérogation à 28° : a) 3 euros par tonne, pour la coïncinération de déchets autres que des déchets dangereux dans une installation autorisée à cet effet;b) 4 euros par tonne, pour la coïncinération de déchets dangereux dans une installation autorisée à cet effet. Pour la coïncinération de déchets de bois dans une installation autorisée à cet effet, aucune autorisation n'est requise;' ».

B.1.2. La disposition attaquée instaure une taxe sur la coïncinération des déchets. Cette disposition a été justifiée comme suit : « La proposition porte par ailleurs sur une clarification du régime de taxation de la coïncinération des déchets. Pour la coïncinération des déchets dans une installation autorisée, le taux est fixé à un montant forfaitaire de 3 euros par tonne. Pour les déchets dangereux, il est de 4 euros par tonne. La coïncinération des déchets est certes considérée comme une valorisation, mais une taxe d'environnement réduite est malgré tout prévue parce que les déchets sont définitivement détruits. La taxe moins élevée sur la coïncinération des déchets que la taxe sur l'incinération des déchets permet de respecter la hiérarchie du traitement des déchets. Cette modification est également la conséquence de la transposition de la directive européenne sur l'incinération des déchets, qui établit une distinction claire entre incinération et coïncinération des déchets. Cette distinction a été établie dans les définitions insérées, lors de la transposition de la directive, dans le titre II du VLAREM. Ceci met également fin au débat concernant la taxation ou non de l'incinération de déchets dans l'industrie cimentière. La taxe d'environnement n'est clairement due que pour les déchets qui sont introduits dans un processus de coïncinération en raison de leur valeur calorifique. La valorisation des déchets dont l'objectif principal est de remplacer des matières premières dans le processus n'est pas soumise à la taxe, même si ces déchets contiennent des éléments organiques.

Le projet adapte également à la réglementation actuelle l'exonération dont bénéficie l'incinération ou la coïncinération de résidus du traitement de déchets animaux » (Doc. parl., Parlement flamand, 2004-2005, n° 192/1, p. 7).

Quant au premier moyen B.2.1. Dans un premier moyen, les parties requérantes dénoncent la violation de l'article 23 de la Constitution, combiné avec les articles 2, 3, 6, 10, 174 et 175 du Traité C.E., avec les articles 3 et 4 de la directive 75/442/CEE du Conseil du 15 juillet 1975 relative aux déchets (ci-après : la directive-cadre relative aux déchets), avec l'article 1.2.1 du décret du 5 avril 1995 contenant des dispositions générales concernant la politique de l'environnement et avec l'article 5 du décret du 2 juillet 1981 relatif à la prévention et à la gestion des déchets (ci-après : le décret sur les déchets).

B.2.2. Selon le Gouvernement flamand, le moyen serait irrecevable, en tant qu'il dénonce la violation des articles 2, 3, 6, 10, 174 et 175 du Traité C.E., des articles 3 et 4 de la directive-cadre relative aux déchets, de l'article 1.2.1 du décret du 5 avril 1995 contenant des dispositions générales concernant la politique de l'environnement et de l'article 5 du décret sur les déchets, la Cour n'étant pas compétente pour effectuer un contrôle au regard de ces dispositions.

B.2.3. Il ressort de la requête et de l'exposé du moyen que la Cour n'est pas invitée à effectuer un contrôle direct au regard des dispositions précitées, mais bien au regard de l'article 23 de la Constitution, combiné avec ces dispositions. Les parties requérantes faisant valoir que l'article 25 du décret du 22 avril 2005 réduirait le niveau actuel de protection de l'environnement en violation de l'article 23 de la Constitution, la Cour est compétente pour vérifier si ce décret est compatible avec cette disposition de la Constitution, combinée avec les articles précités du Traité C.E. et de la directive-cadre relative aux déchets.

B.2.4. L'exception est rejetée.

B.3. Selon les parties requérantes, la disposition attaquée violerait l'article 23 de la Constitution en ce qu'une taxe est instaurée sur la coïncinération des déchets, sans que les taxes existantes sur l'incinération des déchets soient augmentées. De ce fait, l'incitation à la « valorisation des déchets » par leur coïncinération dans des fours à ciment au lieu de leur élimination par incinération et/ou dépôt serait substantiellement réduite. Dans certains cas, cette incitation serait même supprimée dans la mesure où les formes d'élimination visées à l'article 47, § 2, 38° à 42°, sont soumises à une taxe moins élevée que la coïncinération de ces déchets. Ceci violerait l'obligation de standstill contenue dans la disposition constitutionnelle précitée.

B.4. L'article 23 de la Constitution énonce : « Chacun a le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine.

A cette fin, la loi, le décret ou la règle visée à l'article 134 garantissent, en tenant compte des obligations correspondantes, les droits économiques, sociaux et culturels, et déterminent les conditions de leur exercice.

Ces droits comprennent notamment : [...] 4° le droit à la protection d'un environnement sain; [...] ».

B.5.1. L'article 23 de la Constitution implique, en ce qui concerne la protection de l'environnement, une obligation de standstill, qui s'oppose à ce que le législateur compétent réduise sensiblement le niveau de protection offert par la législation en vigueur, sans qu'existent pour ce faire des motifs liés à l'intérêt général.

B.5.2. La Cour doit dès lors vérifier si la taxe sur la coïncinération des déchets instaurée par la disposition attaquée est compatible avec l'article 23 de la Constitution, compte tenu des articles précités du Traité C.E. et de la directive-cadre relative aux déchets.

B.6.1. La taxe sur la coïncinération des déchets instaurée par la disposition attaquée est dictée par des motifs liés à la protection de l'environnement. Cette taxe a été justifiée par la considération, d'une part, que par la coïncinération des déchets, « les déchets sont définitivement détruits » (Doc. parl., Parlement flamand, 2004-2005, n° 192/4, p.7, voir également Doc. parl., Parlement flamand, 2004-2005, n° 192/4, p. 5) et, d'autre part, que, bien qu'il s'agisse d'une valorisation, la coïncinération des déchets pollue l'environnement par l'émission de matières polluantes (Doc. parl., Parlement flamand, 2004-2005, n° 192/4, p. 11).

B.6.2. Eu égard au large pouvoir d'appréciation dont dispose le législateur décrétal pour arrêter sa politique en matière de protection de l'environnement, il n'est pas déraisonnable de soumettre la coïncinération des déchets à une taxe d'environnement.

B.7.1. Avant l'entrée en vigueur de la disposition attaquée, la coïncinération des déchets était exonérée de toute taxe d'environnement, contrairement à l'incinération des déchets dans un four autorisé pour l'incinération des déchets industriels. La différence entre les montants de la taxe sur les deux formes de traitement des déchets s'élevait ainsi à 7,19 euros.

On ne saurait toutefois déduire de l'article 23 de la Constitution que l'instauration d'une taxe sur la coïncinération des déchets doit nécessairement s'accompagner d'une hausse équivalente de la taxe sur l'incinération des déchets. La diminution de la différence entre les montants de la taxe sur les deux formes de traitement des déchets n'entraîne pas nécessairement une modification des méthodes de traitement utilisées.

B.7.2. De surcroît, la taxe sur la coïncinération des déchets instaurée par la disposition attaquée est moins élevée que la taxe due sur l'incinération de déchets dans un four autorisé pour les déchets industriels, avec récupération d'énergie et/ou de matières premières.

Conformément à l'article 47, § 2, 28°, du décret sur les déchets, la taxe pour cette catégorie s'élève à 7,19 euros par tonne. Conformément à l'article 47, § 2, 29°, du même décret, qui déroge explicitement à ladite disposition, la taxe attaquée s'élève à 3 euros par tonne pour la coïncinération de déchets autres que des déchets dangereux dans une installation autorisée à cet effet et à 4 euros par tonne pour la coïncinération de déchets dangereux dans une installation autorisée à cet effet.

Bien que la différence entre les deux taxes diminue du fait de la disposition attaquée, le législateur décrétal continue donc de promouvoir une forme de valorisation des déchets par rapport à une forme d'élimination des déchets. Lors des travaux préparatoires, les considérations suivantes ont été émises à ce sujet : « La taxe moins élevée sur la coïncinération des déchets que sur l'incinération des déchets permet de respecter la hiérarchie du traitement des déchets » (Doc. parl., Parlement flamand, 2004-2005, n° 192/1, p. 7).

B.8.1. Les parties requérantes objectent que dans certains cas, l'élimination des déchets serait favorisée au préjudice de leur valorisation, en ce que l'élimination des déchets mentionnés à l'article 47, § 2, 38° à 42°, du décret sur les déchets serait soumise à une taxe moins élevée que la coïncinération de ces mêmes déchets.

B.8.2. Conformément à l'article 3, paragraphe 1, b), de la directive-cadre relative aux déchets et de la directive 2006/12/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2006 relative aux déchets, les Etats membres doivent prendre des mesures appropriées pour promouvoir la valorisation des déchets par recyclage, réemploi, récupération ou toute autre action visant à obtenir des matières premières secondaires, ou l'utilisation des déchets comme source d'énergie. Dans la directive, on entend par « valorisation » toute opération prévue à l'annexe II B (article 1er, f), de la directive-cadre relative aux déchets et de la directive 2006/12/CE du 5 avril 2006).

Sur la base dudit article 3 de la directive-cadre relative aux déchets, l'article 5 du décret sur les déchets détermine la hiérarchie des instruments politiques à utiliser. Cette disposition énonce : « La politique des déchets a pour but de préserver la santé de l'homme et l'environnement contre la nocivité des déchets et de combattre le gaspillage des matières premières et de l'énergie par : 1° en premier lieu, la prévention ou la réduction de la production des déchets et de leur nocivité;2° en deuxième lieu, la promotion de la valorisation des déchets;3° en dernier lieu, l'organisation de l'élimination des déchets dont la prévention ou la valorisation se révèle impossible ». Selon l'article 2 du décret sur les déchets, on entend par « valorisation », dans ce décret, « la récupération de matières premières, de produits ou d'énergie des déchets, l'utilisation directe et légale des déchets ainsi que les opérations fixées comme telles par le Gouvernement flamand conformément aux prescriptions européennes en vigueur ». L'article 1.4.1 de l'arrêté du Gouvernement flamand du 5 décembre 2003 fixant le règlement flamand relatif à la prévention et à la gestion des déchets énumère une série d'opérations considérées comme des opérations de valorisation.

B.8.3. Force est de constater en l'espèce que le législateur décrétal, par la disposition attaquée, entend encourager d'autres formes de valorisation dont il considère qu'elles sont moins polluantes que la coïncinération des déchets. Il a été déclaré ce qui suit lors des travaux préparatoires de la disposition attaquée : « Cette taxe peut également constituer une incitation à continuer à trier et à recycler les flux résiduels à haute valeur calorifique, comme les déchets de tapis. Le développement de nouvelles techniques de recyclage restera impossible tant que l'option bon marché de l'incinération dans l'industrie cimentière se maintiendra » (Doc. parl., Parlement flamand, 2004-2005, n° 192/4, p. 12).

Ceci concorde avec la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, selon laquelle « parmi les différents modes de valorisation, le recyclage doit constituer une part importante de celle-ci et, avec la réutilisation, recevoir la préférence » (C.J.C.E., arrêt du 19 juin 2003, The Queen, à la demande de Mayer Parry Recycling Ltd, et Environment Agency, Secretary of State for the Environment, Transport and the Regions, C-444/00, Rec., 2003, I-6163, considérant 72).

B.8.4. Dans la mesure où d'autres formes de valorisation sont soumises à une taxe moins élevée que les formes d'incinération des déchets auxquelles les parties requérantes font référence, ou sont dispensées de toute taxe, on ne saurait faire grief à la disposition attaquée d'encourager des formes d'élimination des déchets au préjudice de formes de valorisation de ces déchets.

B.9.1. La mesure contenue dans l'article 25 du décret du 22 avril 2005 ne réduit dès lors pas le niveau de protection offert par la législation applicable.

B.9.2. Le premier moyen n'est pas fondé.

Quant au deuxième moyen B.10. Dans un deuxième moyen, les parties requérantes dénoncent la violation des articles 10 et 11, combinés ou non avec l'article 23 de la Constitution.

B.11.1. Dans une première branche, les parties reprochent au législateur décrétal de porter atteinte au « niveau actuel des conditions du marché corrigées par voie de taxe d'environnement entre, d'une part, ceux qui proposent des services en matière de gestion des déchets par le biais d'une valorisation par coïncinération et, d'autre part, ceux qui proposent des services en matière de gestion de ces mêmes déchets par le biais de leur élimination ».

B.11.2. Comme la Cour l'a constaté en B.7.1, on ne saurait déduire de l'article 23 de la Constitution que la différence de niveau entre, d'une part, une taxe sur une forme de valorisation des déchets et, d'autre part, une taxe sur une forme d'élimination des déchets, doive être permanente ou qu'une augmentation de la première taxe doive nécessairement s'accompagner d'une augmentation équivalente de la seconde taxe. Il en est de même en ce qui concerne les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec la disposition constitutionnelle précitée.

B.11.3. En tant que les parties requérantes font valoir qu'elles bénéficiaient d'une inégalité correctrice qui serait réduite à néant par la disposition attaquée, il convient d'observer, à supposer qu'il ait pu être question d'une inégalité correctrice, que cette mesure doit être de nature temporaire.

Pour le surplus, il suffit de constater que, bien que la disposition attaquée réduise la différence entre, d'une part, la taxe sur la coïncinération de déchets dans une installation autorisée à cet effet et, d'autre part, la taxe sur l'incinération de déchets dans un four autorisé pour les déchets industriels, avec récupération d'énergie et/ou de matières premières, la première taxe demeure inférieure à la seconde. En tant que certaines autres formes d'incinération des déchets sont soumises à une taxe inférieure à celle qui frappe la coïncinération de déchets dangereux ou non dans une installation autorisée à cet effet, cette différence est raisonnablement justifiée, pour les motifs mentionnés en B.8.3.

B.12.1. Dans une seconde branche, les parties requérantes soutiennent que la disposition attaquée, en violation des articles 10 et 11, combinés ou non avec l'article 23, de la Constitution, ferait régresser « le niveau de protection de l'environnement et de développement durable garanti en droit, qui constituait le but de ces conditions de marché corrigées par voie de taxe ».

B.12.2. En tant que cette branche fait grief à la disposition attaquée de réduire le niveau de protection offert par la législation antérieure, elle se confond avec le premier moyen et doit être rejetée pour les mêmes motifs.

B.13. Le deuxième moyen n'est pas fondé.

Quant au troisième moyen B.14. Dans un troisième moyen, les parties requérantes dénoncent la violation des articles 170 et 172 de la Constitution, en ce que la disposition attaquée aurait omis de définir avec précision le terme « coïncinération ». Cette disposition laisserait ainsi au pouvoir exécutif le soin de déterminer une composante essentielle d'un impôt, à savoir la matière imposable.

B.15. Il se déduit des articles 170, § 2, et 172, alinéa 2, de la Constitution qu'aucun impôt ne peut être levé et qu'aucune exemption d'impôt ne peut être accordée sans qu'ait été recueilli le consentement des contribuables, exprimé par leurs représentants. Il s'ensuit que la compétence fiscale autonome des régions est une compétence que la Constitution réserve à la règle visée à l'article 134 de la Constitution et que toute délégation qui porte sur la détermination de l'un des éléments essentiels de l'impôt est, en principe, inconstitutionnelle.

B.16.1. Les parties requérantes se réfèrent à des déclarations faites lors des travaux préparatoires de la disposition attaquée, selon lesquelles la taxe ne frapperait que la coïncinération dont l'objet est de remplacer des combustibles primaires par des déchets, mais non la coïncinération dont l'objet est de remplacer des matières premières. Sur la base de ces déclarations, certains redevables seraient exonérés de la taxe.

B.16.2. Dans l'exposé des motifs du projet de décret qui a conduit à la disposition attaquée, il a en effet été déclaré ce qui suit : « La taxe d'environnement n'est clairement due que pour les déchets qui sont introduits dans un processus de coïncinération en raison de leur valeur calorifique. La valorisation des déchets dont l'objet principal est de remplacer des matières premières dans le processus n'est pas soumise à la taxe, même si ces déchets contiennent des éléments organiques » (Doc. parl., Parlement flamand, 2004-2005, n° 192/4, p. 7; voy. également Doc. parl., Parlement flamand, 2004-2005, n° 192/4, p.5, et Hand., Parlement flamand, 13 avril 2005, n° 13, p. 22).

B.16.3. Une déclaration faite lors des travaux préparatoires ne peut toutefois servir à accorder une exonération fiscale qui ne trouve aucun fondement juridique dans un décret.

B.16.4. Il convient d'observer en l'espèce que la disposition attaquée ne fait aucune distinction selon que les déchets sont coïncinérés pour remplacer des combustibles primaires par des déchets ou pour remplacer des matières premières.

Conformément à cette disposition, est soumise à une taxe d'environnement, « la coïncinération dans une installation autorisée à cet effet » de déchets dangereux ou non, à l'exception des déchets de bois.

B.17.1. Pour le surplus, la notion de « coïncinération » est restreinte par le fait qu'il s'agit d'une valorisation des déchets. La « valorisation » est définie comme suit à l'article 2, 7°, du décret sur les déchets : « la récupération des matières premières, de produits ou d'énergie des déchets, l'utilisation directe et légale des déchets ainsi que les opérations fixées comme telles par le Gouvernement flamand conformément aux prescriptions européennes en vigueur ».

La coïncinération de déchets en tant que forme de valorisation est par conséquent axée sur l'obtention de matières premières, de produits ou d'énergie ou sur tout autre usage des déchets relevant de la disposition précitée.

B.17.2. En outre, la coïncinération s'opère dans « une installation autorisée à cet effet ». Cette notion vise les installations non spécialisées qui incinèrent des déchets en même temps que des combustibles réguliers et qui disposent d'une autorisation à cette fin. Conformément à l'article 3, point 5, de la directive 2000/76/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 décembre 2000 sur l'incinération des déchets, une installation de coïncinération est définie comme suit : « une installation fixe ou mobile dont l'objectif essentiel est de produire l'énergie ou des produits matériels et : - qui utilise des déchets comme combustible habituel ou d'appoint, ou - dans laquelle les déchets sont soumis à un traitement thermique en vue de leur élimination.

Si la coïncinération a lieu de telle manière que l'objectif essentiel de l'installation n'est pas de produire de l'énergie ou des produits matériels, mais plutôt d'appliquer aux déchets un traitement thermique, l'installation doit être considérée comme une installation d'incinération au sens du point 4. [...] ».

Cette définition a été reprise à l'article 1.1.2 de l'arrêté du Gouvernement flamand du 1er juin 1995 fixant les dispositions générales et sectorielles en matière d'hygiène de l'environnement (titre II du VLAREM).

B.17.3. Etant donné que, conformément à l'article 47, § 1er, du décret sur les déchets, la taxe est due par les exploitants des établissements soumis à autorisation visés à l'article 47, § 2, 29°, il n'y a aucun doute quant au point de savoir qui est redevable.

Puisque, dans une installation de coïncinération, seuls peuvent être incinérés les déchets mentionnés dans l'autorisation précitée, il n'y a pas non plus de doute quant à savoir quelle est la matière imposable.

B.17.4. Par conséquent, il est satisfait au principe de légalité contenu dans les articles 170, § 2, et 172, alinéa 2, de la Constitution.

B.18. Le troisième moyen n'est pas fondé.

Par ces motifs, la Cour rejette le recours.

Ainsi prononcé en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage à l'audience publique du 28 septembre 2006.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président, A. Arts.

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