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Arrêt
publié le 13 avril 2007

Extrait de l'arrêt n° 29/2007 du 21 février 2007 Numéro du rôle : 3966 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 1410, § 1 er , 4°, du Code judiciaire, tel qu'il était applicable avant l'entrée en vigueur d La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges P. Martens, R.(...)

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2007200998
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13/04/2007
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COUR D'ARBITRAGE


Extrait de l'arrêt n° 29/2007 du 21 février 2007 Numéro du rôle : 3966 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 1410, § 1er, 4°, du Code judiciaire, tel qu'il était applicable avant l'entrée en vigueur de la loi du 27 décembre 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/12/2005 pub. 30/12/2005 numac 2005021183 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi portant des dispositions diverses fermer, posées par la Cour d'appel de Gand.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges P. Martens, R. Henneuse, M. Bossuyt, E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke et J. Spreutels, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président A. Arts, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par arrêt du 11 avril 2006 en cause de l'Etat belge contre A. Van Coillie, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 26 avril 2006, la Cour d'appel de Gand a posé les questions préjudicielles suivantes : - « L'article 1410, § 1er, 4°, du Code judiciaire, combiné avec l'article 1409, § 1erbis, § 2 et § 3, du Code judiciaire, dans la version antérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 27 décembre 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/12/2005 pub. 30/12/2005 numac 2005021183 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi portant des dispositions diverses fermer, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution en tant qu'il est ainsi établi une différence de traitement entre le bénéficiaire d'une indemnité au sens de l'article 1410, § 1er, 4°, du Code judiciaire et le bénéficiaire de revenus au sens de l'article 1409bis du Code judiciaire, qui dispose notamment d'un accès souple et rapide au juge des saisies et d'une possibilité de contrôle par celui-ci, et qu'une demande visant à conserver les revenus nécessaires peut être adressée par le débiteur à cette instance selon la procédure qui y est prévue, même lorsqu'il s'agit de sommes saisies sur un compte, alors que les bénéficiaires cités en premier lieu ne disposent pas de cette possibilité de contrôle ? »; - « L'article 1410, § 1er, 4°, du Code judiciaire, combiné avec les articles 1409 et suivants du même Code, dans la version antérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 27 décembre 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/12/2005 pub. 30/12/2005 numac 2005021183 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi portant des dispositions diverses fermer, et interprété en ce sens que les restrictions contenues à l'article 1409 du Code judiciaire ne sont pas applicables dès que les allocations d'invalidité litigieuses sont créditées sur un compte en banque - en l'espèce, les parties ne mettent pas en cause le fait que le compte en banque litigieux de l'intimé faisant l'objet de la saisie par l'appelant était exclusivement alimenté au moyen de son allocation d'invalidité -, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, en tant qu'il est ainsi établi une différence de traitement entre le bénéficiaire de cette allocation que cette personne reçoit ou peut recevoir sur un compte au sein de la société ou de la personne morale qui verse cette allocation, ou au comptant ou par chèque circulaire, et les bénéficiaires dont ces allocations sont créditées sur un compte en banque ? ». (...) III. En droit (...) B.1.1. L'article 1410, § 1er, 4°, du Code judiciaire énonce : « § 1er. L'article 1409, § 1erbis, § 2 et § 3, est en outre applicable : [...] 4° aux indemnités pour incapacité de travail et aux allocations d'invalidité payées en vertu de la législation relative à l'assurance maladie-invalidité ou, de la loi du 16 juin 1960 portant notamment garantie des prestations sociales assurées en faveur des anciens employés du Congo belge et du Ruanda Urundi et de la législation relative à la sécurité sociale d'outre-mer;».

B.1.2. L'article 1409, § 1erbis, § 2 et § 3, du Code judiciaire énonçait, avant sa modification par l'article 15, 2°, de la loi du 20 juillet 2006Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/2006 pub. 28/07/2006 numac 2006202314 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi portant des dispositions diverses fermer portant des dispositions diverses : « § 1erbis. Les revenus d'autres activités que celles visées au § 1er, peuvent être cédés ou saisis sans limitation pour la partie du montant total de ces sommes qui dépassent 35 000 francs par mois civil.

La partie de ces sommes supérieure à 29 000 francs et n'excédant pas 35 000 francs par mois civil, ne peut être cédée ni saisie pour plus de deux cinquièmes au total; la partie supérieure à 27 000 francs et n'excédant pas 29 000 francs par mois civil, ne peut être cédée ni saisie pour plus d'un cinquième au total.

La partie de ces sommes qui ne dépasse pas 27 000 francs par mois civil ne peut être cédée ni saisie.

Lorsque des personnes, bénéficiant de revenus visés à l'alinéa 1er, ont un ou plusieurs enfants à charge, les montants mentionnés aux alinéas précédents sont majorés de 2 000 francs par enfant à charge.

Le Roi détermine par un arrêté royal délibéré en Conseil des Ministres ce qu'il y a lieu d'entendre par enfant à charge.

Il détermine également, par un arrêté délibéré en Conseil des Ministres les règles gouvernant la charge de la preuve, en ce compris la force probante et la durée de validité des preuves, ainsi que les règles de la procédure. A cette fin, Il peut, jusqu'au 31 décembre 2004, établir et modifier des dispositions légales, même dans les matières qui sont expressément réservées à la loi par la Constitution à l'exception des matières pour lesquelles la majorité prescrite à l'article 4, alinéa 3, de la Constitution est exigée. Avant le 1er janvier 2005 le Roi introduit à la Chambre des représentants un projet de loi de ratification des arrêtés établis par application de cet alinéa qui établissent ou modifient des dispositions légales. Les arrêtés qui ne sont pas ratifiés avant le 1er janvier 2006 sont sans effet. § 2. Chaque année, le Roi adapte les montants fixés aux § 1er et § 1erbis compte tenu de l'indice des prix à la consommation du mois de novembre de chaque année.

L'indice de départ pour les montants visés aux trois premiers alinéas des § 1er et § 1erbis est celui du mois de novembre 1989. L'indice de départ pour le montant visé à l'alinéa 4 des § 1er et § 1erbis est celui du mois de la publication au Moniteur belge de la loi du 24 mars 2000Documents pertinents retrouvés type loi prom. 24/03/2000 pub. 04/05/2000 numac 2000009377 source ministere de la justice Loi modifiant les articles 1409, 1409bis, 1410 et 1411 du Code judiciaire, en vue d'adapter la quotité non cessible ou non saisissable de la rémunération fermer modifiant les articles 1409, 1409bis, 1410 et 1411 du Code judiciaire, en vue d'adapter la quotité non cessible ou non saisissable de la rémunération.

Chaque augmentation ou diminution de l'indice entraîne une augmentation ou une diminution des montants, conformément à la formule suivante : le nouveau montant est égal au montant de base, multiplié par le nouvel indice et divisé par l'indice de départ. Le résultat est arrondi à la centaine supérieure.

Le montant minimal ainsi adapté ne peut jamais être inférieur au montant déterminé à l'article 2, § 1er, 1°, de la loi du 7 août 1974Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/08/1974 pub. 28/10/1998 numac 1998000076 source ministere de l'interieur Loi instituant le droit à un minimum de moyens d'existence - Traduction allemande fermer instituant le droit à un minimum de moyens d'existence, en vigueur au 1er janvier de l'année suivant celle de l'adaptation, arrondi au millier supérieur.

Dans les quinze premiers jours du mois de décembre de chaque année, les nouveaux montants sont publiés au Moniteur belge . Ils entrent en vigueur le 1er janvier de l'année suivant celle de leur adaptation. § 3. Le Roi peut, en outre, adapter les montants prévus aux § 1er et § 1erbis, après avis du Conseil national du travail, en tenant compte de la situation économique.

L'arrêté entre en vigueur le 1er janvier de l'année suivant sa publication au Moniteur belge ».

B.2.1. Selon le juge a quo, ces dispositions doivent, avant l'entrée en vigueur des articles 1411bis à 1411quater du Code judiciaire insérés par les articles 4 à 6 de la loi du 27 décembre 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/12/2005 pub. 30/12/2005 numac 2005021183 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi portant des dispositions diverses fermer portant des dispositions diverses, être interprétées en ce sens que la limitation de saisie visée aux articles 1409, § 1erbis, et 1410, § 1er, 4°, du Code judiciaire n'est pas applicable lorsque les sommes en question sont créditées sur un compte en banque.

B.2.2. C'est dans cette interprétation que la Cour répond aux questions préjudicielles.

Quant à la première question préjudicielle B.3. Dans la première question préjudicielle, la Cour est interrogée au sujet de la compatibilité avec les articles 10 et 11 de la Constitution de l'article 1410, § 1er, 4°, du Code judiciaire, combiné avec l'article 1409, § 1erbis, § 2 et § 3, du même Code, en tant que les bénéficiaires des indemnités et allocations mentionnées dans cette disposition seraient privés de la possibilité, mentionnée à l'article 1409bis du même Code, d'intenter une action devant le juge des saisies aux fins d'entendre déclarer que les revenus nécessaires au débiteur et à sa famille sont insaisissables.

B.4. L'article 1409bis du Code judiciaire énonce : « Le débiteur qui ne dispose pas de revenus visés à l'article 1409 peut conserver pour lui et sa famille les revenus nécessaires calculés conformément aux articles 1409, § 1er, et 1411.

Toute prétention du débiteur fondée sur l'alinéa 1er est soumise au juge des saisies conformément à l'article 1408, § 3. Celui-ci peut limiter la durée pendant laquelle le débiteur bénéfice de cette insaisissabilité ».

B.5. La différence de traitement repose sur un critère objectif, à savoir la nature des revenus en cause. La disposition en cause porte sur des indemnités pour incapacité de travail et sur des allocations d'invalidité. L'article 1409bis du Code judiciaire concerne d'autres revenus que ceux mentionnés à l'article 1409 du même Code, à savoir les revenus qui ne sont pas issus du travail ou qui ne sont pas des revenus de remplacement.

B.6. Contrairement à la protection prévue par la disposition en cause, la limitation de saisie définie à l'article 1409bis du Code judiciaire portant sur les revenus visés dans cette disposition, n'est pas automatique. Elle n'est applicable que pour autant que le débiteur qui bénéficie de ces revenus prétende à ces revenus en saisissant le juge des saisies par application de l'article 1409bis, alinéa 2, du Code judiciaire.

Par contre, la limitation de saisie visée par la disposition en cause s'applique sans que les bénéficiaires des indemnités pour incapacité de travail et allocations d'invalidité doivent prétendre à cette limitation. Ces personnes ne doivent donc pas saisir le juge des saisies pour bénéficier de la protection prévue par cette disposition.

La différence de traitement n'est donc pas dépourvue de justification raisonnable.

B.7. Par ailleurs, ce qui précède n'empêche pas que, lorsqu'un conflit survient au sujet de la légalité ou de la régularité d'une saisie de la partie saisissable d'une indemnité pour incapacité de travail ou d'une allocation d'invalidité, le bénéficiaire de cette indemnité ou allocation saisisse le juge des saisies qui, conformément à l'article 1395 du Code judiciaire, est compétent pour toutes les actions notamment relatives aux saisies conservatoires et aux voies d'exécution.

B.8. La première question préjudicielle appelle une réponse négative.

Quant à la seconde question préjudicielle B.9. Dans la seconde question préjudicielle, la Cour est interrogée au sujet de la compatibilité avec les articles 10 et 11 de la Constitution de l'article 1410, § 1er, 4°, du Code judiciaire, combiné avec les articles 1409 et suivants du même Code, en tant que la limitation de saisie prévue par cette disposition ne serait pas applicable lorsque les indemnités et allocations mentionnées dans cette disposition sont créditées sur un compte en banque. Le juge a quo demande de comparer cette situation avec celle du bénéficiaire qui reçoit la même indemnité ou allocation en espèces ou par chèque circulaire.

B.10. Ainsi qu'il a été mentionné en B.2.1, dans l'interprétation du juge a quo, avant l'entrée en vigueur des articles 1411bis à 1411quater du Code judiciaire, les limitations prévues par les articles 1409, §§ 1erbis, 2 et 3, et 1410, § 1er, 4°, du même Code ne sont pas applicables aux montants visés dans ces articles s'ils sont crédités sur un compte en banque. Du fait de ce versement, les indemnités et allocations visées dans la disposition en cause ne sont plus dues par les organismes qui les versent mais font partie du patrimoine du bénéficiaire, où elles se confondent avec les autres avoirs sur le compte en question.

B.11. Il en va de même lorsque le bénéficiaire reçoit l'indemnité ou l'allocation en espèces ou par chèque circulaire. Etant donné que, dans cette hypothèse, il n'est plus question de créance à l'égard de l'organisme qui verse l'indemnité ou l'allocation et que ces sommes font partie du patrimoine du bénéficiaire, où elles ne se distinguent plus du reste de son patrimoine, les limitations et exclusions prévues par les articles 1409, § 1erbis, et 1410, § 1er, 4°, du Code judiciaire ne sont également plus applicables.

Par conséquent, la différence de traitement est inexistante.

B.12. La seconde question préjudicielle appelle une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 1410, § 1er, 4°, du Code judiciaire ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.

Ainsi prononcé en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 21 février 2007.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président, A. Arts.

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