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Arrêt
publié le 06 août 2008

Extrait de l'arrêt n° 101/2008 du 10 juillet 2008 Numéros du rôle : 4199 et 4274 En cause : les recours en annulation des articles 6, 7, 8, 10, 14 et 16 du décret de la Région flamande du 15 décembre 2006 portant modification du décret du 1 La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Melchior et M. Bossuyt, et des juges P. Ma(...)

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Extrait de l'arrêt n° 101/2008 du 10 juillet 2008 Numéros du rôle : 4199 et 4274 En cause : les recours en annulation des articles 6, 7, 8, 10, 14 et 16 du décret de la Région flamande du 15 décembre 2006 portant modification du décret du 15 juillet 1997 contenant le Code flamand du Logement, introduits par le Gouvernement de la Communauté française et par l'ASBL « Liga voor Mensenrechten » et l'ASBL « Vlaams Overleg Bewonersbelangen ».

La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Melchior et M. Bossuyt, et des juges P. Martens, R. Henneuse, E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, J. Spreutels et T. Merckx-Van Goey, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des recours et procédure a. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 25 avril 2007 et parvenue au greffe le 26 avril 2007, le Gouvernement de la Communauté française a introduit un recours en annulation des articles 6, 7, 8, 10, 14 et 16 du décret de la Région flamande du 15 décembre 2006 portant modification du décret du 15 juillet 1997 contenant le Code flamand du Logement (publié au Moniteur belge du 19 février 2007). La demande de suspension des mêmes dispositions décrétales, introduite par la même partie requérante, a été rejetée par l'arrêt n° 104/2007 du 12 juillet 2007, publié au Moniteur belge du 11 septembre 2007. b. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 14 août 2007 et parvenue au greffe le 16 août 2007, un recours en annulation des articles 6, 7 et 8 du décret de la Région flamande du 15 décembre 2006 portant modification du décret du 15 juillet 1997 contenant le Code flamand du Logement (publié au Moniteur belge du 19 février 2007) a été introduit par l'ASBL « Liga voor Mensenrechten », dont le siège social est établi à 9000 Gand, Van Stopenberghestraat 2, et l'ASBL « Vlaams Overleg Bewonersbelangen », dont le siège social est établi à 2600 Berchem, Diksmuidelaan 50. Ces affaires, inscrites sous les numéros 4199 et 4274 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) II. En droit (...) Quant aux dispositions attaquées B.1.1. Les recours visent les articles 6, 7, 8, 10, 14 et 16 du décret de la Région flamande du 15 décembre 2006 portant modification du décret du 15 juillet 1997 contenant le Code flamand du Logement.

Les dispositions attaquées modifient les dispositions du titre VII du Code flamand du Logement, qui réglemente la location de logements dans le secteur social. De manière générale, le législateur décrétal entend apporter une réponse aux problèmes de qualité de la vie et de l'habitat qui existent dans certains complexes de logements sociaux en Flandre, afin de garantir le droit au logement de l'ensemble des habitants. Pour cela, les nouvelles dispositions du décret définissent plus clairement qu'auparavant les obligations du locataire et du bailleur et mettent à la disposition de ce dernier les instruments qui devraient lui permettre de réagir rapidement et adéquatement vis-à-vis des locataires qui créent des nuisances et détériorent la qualité de la vie et de l'habitat dans les logements sociaux (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, pp. 3-4).

En application des articles 75 et 76 de l'arrêté du Gouvernement flamand du 12 octobre 2007 réglementant le régime de location sociale et portant exécution du titre VII du Code flamand du Logement, le décret du 15 décembre 2006 est entré en vigueur le 1er janvier 2008.

B.1.2. L'article 6 du décret du 15 décembre 2006 remplace l'article 92 du décret du 15 juillet 1997 contenant le Code flamand du Logement par la disposition suivante : «

Article 92.§ 1er. Une habitation sociale de location est louée sur la base d'un contrat de location écrit comportant au minimum les données et dispositions reprises ci-après : 1° la date de mise à disposition de l'habitation et d'entrée en vigueur du contrat de location;2° l'identité du locataire de l'habitation de location sociale, ainsi que des enfants mineurs co-habitants;3° en dérogation à l'article 3 de la division II du livre III, titre VIII, chapitre II, du Code civil en matière de loyer, la durée du bail et la possibilité de résiliation du contrat de location, ainsi que la période d'essai d'au maximum 2 ans aux conditions à arrêter par le Gouvernement flamand.La période d'essai a pour but d'évaluer le locataire pendant cette période d'essai, ainsi que de le suivre minutieusement et éventuellement de le corriger. L'article 98, § 3, s'applique intégralement pendant la période d'essai. A la fin de la période d'essai, le contrat de location est, à défaut d'une évaluation négative par le bailleur d'une habitation sociale par rapport à ses obligations, visées au § 3, [...] continué sous forme d'un contrat de location de durée indéterminée. En cas d'une évaluation négative, conduisant à une cessation du contrat de location sociale, il ne peut pas exister de disproportions manifestes entre les faits qui se sont produits pendant la durée de la période d'essai et la cessation du contrat de location sur la base de ces faits; 4° les obligations, d'une part, du bailleur, et d'autre part, du locataire de l'habitation sociale de location;5° les éléments de calcul des montants que le locataire de l'habitation sociale de location doit payer, à qui il doit les payer et le mode de paiement;6° en dérogation à l'article 1762bis du Code civil, les conditions résolutoires;7° le tribunal territorialement compétent en cas de litige. Le Gouvernement flamand arrête un contrat de location type. Il ne peut être dérogé au contrat de location type que dans les cas arrêtés par le Gouvernement flamand. § 2. Le bailleur d'une habitation sociale de location respecte les obligations suivantes : 1° lors de la conclusion du contrat de location, communiquer, de bonne foi et immédiatement, le loyer à payer au locataire ainsi que lui donner une indication des charges locatives;2° mettre l'habitation sociale de location qui répond aux exigences, visées à l'article 5, à la disposition du locataire et prendre soin que l'habitation sociale de location continue à répondre aux exigences, visées à l'article 5, pendant toute la durée du contrat de location;3° entretenir l'habitation sociale de location dans un état tel qu'elle puisse servir à l'utilisation pour laquelle elle a été destinée et exécuter les réparations pour lesquelles le bailleur est responsable suivant le contrat type de location. § 3. Le locataire d'une habitation sociale de location respecte les obligations suivantes : 1° occuper l'habitation sociale de location, le cas échéant conjointement avec les enfants mineurs dont la garde lui a été attribuée.Toute modification de personnes occupant l'habitation sociale de location de façon durable, doit immédiatement être communiquée au bailleur concerné; 2° avoir son adresse principale à l'habitation sociale de location et y être domicilié;3° payer le loyer;4° communiquer les éléments nécessaires au calcul du loyer au bailleur si ce dernier le demande;5° entretenir l'habitation sociale de location en bon père de famille;6° pour autant que le locataire occupe une habitation sociale qui n'est pas située dans une commune de la périphérie ou de la frontière linguistique, tel que mentionné dans les lois coordonnées du 18 juillet 1966 sur l'emploi des langues en matière administrative, avoir la volonté d'apprendre le néerlandais.Lors de l'apprentissage du néerlandais, le but est d'atteindre un niveau correspondant à la valeur directive A.1. du Cadre européen commun de Référence pour Langues. Le Gouvernement flamand arrête les modalités pour constater cette volonté. Les personnes pouvant prouver qu'elles répondent déjà à cette valeur directive pour le néerlandais, sont exemptées aux conditions à arrêter par le Gouvernement flamand. Le Gouvernement flamand désigne également les catégories des personnes qui sont exemptées de cette obligation. La personne pouvant prouver à l'aide d'une attestation médicale qu'elle est grièvement malade ou qu'elle a un handicap mental ou physique l'empêchant en permanence d'obtenir la valeur directive A.1., est exemptée de cette obligation; 7° pour autant que le locataire occupe une habitation sociale qui n'est pas [lire : qui est] située dans une commune de la périphérie ou de la frontière linguistique, tel que mentionné dans les lois coordonnées du 18 juillet 1966 sur l'emploi des langues en matière administrative, sans porter préjudice aux facilités linguistiques, avoir la volonté d'apprendre le néerlandais.Lors de l'apprentissage du néerlandais, le but est d'atteindre un niveau correspondant à la valeur directive A.1. du Cadre européen commun de Référence pour Langues. Le Gouvernement flamand arrête les modalités pour constater cette volonté. Les personnes pouvant prouver qu'elles répondent déjà à cette valeur directive pour le néerlandais, sont exemptées aux conditions à arrêter par le Gouvernement flamand. Le Gouvernement flamand désigne également les catégories des personnes qui sont exemptées de cette obligation. La personne pouvant prouver à l'aide d'une attestation médicale qu'elle est grièvement malade ou qu'elle a un handicap mental ou physique l'empêchant en permanence d'obtenir la valeur directive A.1., est en tout cas exemptée de cette obligation; 8° pour autant que le décret du 28 février 2003 relatif à la politique flamande d'intégration civique s'applique, suivre ou avoir suivi le trajet d'intégration civique;9° occuper l'habitation sociale de location d'une telle manière que la viabilité ne soit pas compromise et qu'aucune nuisance exagérée n'est causée pour les voisins et les alentours immédiats. Lorsque les obligations, visées au premier alinéa, ne sont pas respectées, le bailleur peut, aux conditions à arrêter par le Gouvernement flamand, accompagner ou faire accompagner le locataire de l'habitation sociale de location, si ce dernier y consent, en matière du respect de ses obligations ».

B.1.3. L'article 7 du décret du 15 décembre 2006 insère, à l'article 93, § 1er, du décret du 15 juillet 1997 contenant le Code flamand du Logement, deux nouveaux alinéas après l'alinéa 1er. Le premier de ces alinéas, qui est visé par les recours, dispose : « Au moment de l'enregistrement, le candidat-locataire doit, aux conditions à arrêter par le Gouvernement flamand démontrer : 1° qu'il répond aux conditions en matière de propriété immobilière et de revenu arrêtées par le Gouvernement flamand;2° pour autant que le locataire veut occuper une habitation sociale qui n'est pas située dans une commune de la périphérie ou de la frontière linguistique, tel que mentionné dans les lois coordonnées du 18 juillet 1966 sur l'emploi des langues en matière administrative, avoir la volonté d'apprendre le néerlandais.Lors de l'apprentissage du néerlandais, le but est d'atteindre un niveau correspondant à la valeur directive A.1. du Cadre européen commun de Référence pour Langues. Le Gouvernement flamand arrête les modalités pour constater cette volonté. Les personnes pouvant prouver qu'elles répondent déjà à cette valeur directive pour le néerlandais, sont exemptées aux conditions à arrêter par le Gouvernement flamand. Le Gouvernement flamand désigne également les catégories des personnes qui sont exemptées de la condition de volonté d'apprendre le néerlandais. La personne pouvant prouver à l'aide d'une attestation médicale qu'elle est grièvement malade ou qu'elle a un handicap mental ou physique l'empêchant en permanence d'obtenir la valeur directive A.1., est en tout cas exemptée de cette obligation; 3° pour autant qu'il veuille occuper une habitation sociale qui n'est pas [lire : qui est] située dans une commune de la périphérie ou de la frontière linguistique, tel que mentionné dans les lois coordonnées du 18 juillet 1966 sur l'emploi des langues en matière administrative, sans porter préjudice aux facilités linguistiques, avoir la volonté d'apprendre le néerlandais.Lors de l'apprentissage du néerlandais, le but est d'atteindre un niveau correspondant à la valeur directive A.1. du Cadre européen commun de Référence pour Langues. Le Gouvernement flamand arrête les modalités pour constater cette volonté. Les personnes pouvant prouver qu'elles répondent déjà à cette valeur directive pour le néerlandais, sont exemptées aux conditions à arrêter par le Gouvernement flamand. Le Gouvernement flamand désigne également les catégories des personnes qui sont exemptées de la condition de volonté d'apprendre le néerlandais. La personne pouvant prouver à l'aide d'une attestation médicale qu'elle est grièvement malade ou qu'elle a un handicap mental ou physique l'empêchant en permanence d'obtenir la valeur directive A.1., est en tout cas exemptée de cette obligation; 4° pour autant que le décret du 28 février 2003 relatif à la politique flamande d'intégration civique s'applique, il a la volonté de suivre ou il a suivi le trajet d'intégration civique conformément au même décret ». B.1.4. L'article 8 du décret du 15 décembre 2006 remplace l'article 95 du décret du 15 juillet 1997 contenant le Code flamand du Logement par la disposition suivante : «

Article 95.§ 1er. Le candidat-locataire, ainsi qu'au moment de l'accès au contrat de location courant, la personne, visée à l'article 2, § 1er, premier alinéa, 34°, c) et d), ne peut être admis à une habitation sociale de location que lorsqu'il prouve : 1° qu'il répond aux conditions en matière de propriété immobilière et de revenu arrêtées par le Gouvernement flamand;2° pour autant qu'il veuille occuper une habitation sociale qui n'est pas située dans une commune de la périphérie ou de la frontière linguistique, tel que mentionné dans les lois coordonnées du 18 juillet 1966 sur l'emploi des langues en matière administrative, avoir la volonté d'apprendre le néerlandais.Lors de l'apprentissage du néerlandais, le but est d'atteindre un niveau correspondant à la valeur directive A.1. du Cadre européen commun de Référence pour Langues. Le Gouvernement flamand arrête les modalités pour constater cette volonté. Les personnes pouvant prouver qu'elles répondent déjà à cette valeur directive pour le néerlandais, sont exemptées aux conditions à arrêter par le Gouvernement flamand. Le Gouvernement flamand désigne également les catégories des personnes qui sont exemptées de la condition de volonté d'apprendre le néerlandais. La personne pouvant prouver à l'aide d'une attestation médicale qu'elle est grièvement malade ou qu'elle a un handicap mental ou physique l'empêchant en permanence d'obtenir la valeur directive A.1., est en tout cas exemptée de cette obligation; 3° pour autant qu'il veuille occuper une habitation sociale qui n'est pas [lire : qui est] située dans une commune de la périphérie ou de la frontière linguistique, tel que mentionné dans les lois coordonnées du 18 juillet 1966 sur l'emploi des langues en matière administrative, sans porter préjudice aux facilités linguistiques, avoir la volonté d'apprendre le néerlandais.Lors de l'apprentissage du néerlandais, le but est d'atteindre un niveau correspondant à la valeur directive A.1. du Cadre européen commun de Référence pour Langues. Le Gouvernement flamand arrête les modalités pour constater cette volonté. Les personnes pouvant prouver qu'elles répondent déjà à cette valeur directive pour le néerlandais, sont exemptées aux conditions à arrêter par le Gouvernement flamand. Le Gouvernement flamand désigne également les catégories des personnes qui sont exemptées de la condition de volonté d'apprendre le néerlandais. La personne pouvant prouver à l'aide d'une attestation médicale qu'elle est grièvement malade ou qu'elle a un handicap mental ou physique l'empêchant en permanence d'obtenir la valeur directive A.1., est en tout cas exemptée de cette obligation; 4° pour autant que le décret du 28 février 2003 relatif à la politique flamande d'intégration civique s'applique, il a la volonté de suivre ou il a suivi le trajet d'intégration civique conformément au même décret. [...] ».

B.1.5. L'article 10 du décret du 15 décembre 2006 remplace, notamment, le paragraphe 3 de l'article 98 du décret du 15 juillet 1997 contenant le Code flamand du Logement par la disposition suivante : « § 3. Le bailleur ne peut terminer le contrat de location que dans les cas suivants : 1° lorsque le locataire d'une habitation sociale de location ne répond plus aux conditions arrêtées conformément à l'article 96, § 1er;2° en cas d'un défaut grave ou persistant de la part du locataire d'une habitation sociale de location ayant trait à ses obligations. Une infraction aux dispositions visées à l'article 92, § 3, 1° et 2°, est assimilée à un défaut grave.

Le délai de résiliation comprend six mois. En cas d'un défaut grave ou persistant, le délai de résiliation comprend trois mois.

Lorsque le délai mentionné au premier alinéa, 2°, résulte du fait que le locataire d'une habitation sociale est insolvable, le contrat de location ne peut être terminé qu'après concertation avec le CPAS ».

B.1.6. L'article 14 du décret du 15 décembre 2006 insère un nouvel article 102bis dans le décret du 15 juillet 1997 contenant le Code flamand du Logement, qui dispose : «

Article 102bis.§ 1er. Sans préjudice de l'application des sanctions mentionnées ci-après, les mesures administratives suivantes peuvent être imposées au bailleur et au locataire d'une habitation sociale de location qui ne respectent pas les conditions fixées au présent titre ou conformément au présent titre ou qui ne respectent pas leurs obligations : 1° la cessation ou l'exécution ou l'imposition de travaux, opérations ou activités;2° [l']imposition de l'interdiction de l'utilisation de l'installation, des appareils ou de garder des animaux lorsque ces derniers causent des nuisances exagérées. Les mesures administratives comprennent la date finale de leur exécution imposée. Lors de la fixation du délai d'exécution, il est tenu compte du temps qui est raisonnablement nécessaire à leur exécution.

Les fonctionnaires chargés de l'imposition des mesures administratives, sont les fonctionnaires visés au § 2.

Les mesures administratives peuvent prendre la forme d'un ordre ou d'un acte effectif, au frais du contrevenant présumé, soit, en vue de terminer l'infraction, soit, en éliminant entièrement ou partiellement ses conséquences, soit, en évitant sa répétition.

Le Gouvernement flamand peut arrêter les modalités de la procédure et du contenu des mesures administratives. § 2. [...] § 3. Une amende administrative peut être imposée au locataire d'une habitation sociale de location qui ne respecte pas une obligation prévue à l'article 92, § 3, à la condition que l'intéressé ait été dûment entendu ou convoqué. Cette amende administrative ne peut ni être inférieure à 25 euros ni supérieure à 5.000 euros.

En cas de l'imposition de l'amende administrative, il ne peut pas exister de disproportion manifeste entre les faits qui sont à la base de l'amende administrative et l'amende imposée sur la base de ces faits.

Une amende administrative ne peut pas être imposée : 1° lorsqu'une amende administrative avait déjà été imposée auparavant pour le fait en question;2° lorsque le juge de répression a déjà prononcé un jugement en première instance en matière du fait en question. [...] § 9. Sans préjudice de l'application des dispositions pénales des articles 269 à 274 du Code pénal, une personne est punie : 1° d'un emprisonnement de huit jours à trois mois ou d'une peine de travail ayant une durée maximale de 250 heures ou d'une amende de 26 à 500 euros lorsqu'elle ne respecte pas les obligations visées à l'article 92, § 3, 1° ou 2°; 2° d'un emprisonnement de huit jours à un an ou d'un peine de travail ayant une durée maximale de 250 heures ou d'une amende de 1.000 à 5.000 euros lorsqu'elle empêche le contrôle régulier en vertu du chapitre III du titre VII et de leurs arrêtés d'exécution ».

B.1.7. L'article 16 du décret du 15 décembre 2006 dispose : « Les obligations, visées à l'article 92, § 3, 6°, 7° et 8°, et la période d'essai, visée à l'article 92, § 1er, 3°, du décret du 15 juillet 1997 contenant le Code flamand du Logement, tel que modifié par le présent décret, ne s'appliquent pas au locataire qui au moment de l'entrée en vigueur du présent décret est déjà locataire d'une habitation sociale de location. Le Gouvernement flamand peut, en ce qui concerne ce locataire, prendre des mesures stimulantes de sorte que le locataire puisse respecter les obligations, visées à l'article 93, § 3, 6°, 7° et 8°, du décret du 15 juillet 1997 contenant le Code flamand du Logement, tel que modifié par le présent décret ».

Quant à la recevabilité des recours En ce qui concerne l'affaire n° 4199 B.2.1. Le Gouvernement flamand estime que le recours introduit par le Gouvernement de la Communauté française doit être déclaré irrecevable parce que, la requête ne contenant pas d'exposé des faits, il ne serait pas satisfait à l'article 6 de la loi spéciale du 6 janvier 1989.

B.2.2. En vertu de l'article 6 de la loi spéciale du 6 janvier 1989, la requête doit indiquer l'objet du recours et contenir un exposé des faits et moyens. Cette exigence n'est pas de pure forme. Elle doit en effet permettre aux autorités visées à l'article 76 de la même loi spéciale de décider en connaissance de cause si elles interviendront dans la procédure, et, si elles interviennent, de répondre utilement aux moyens d'annulation.

B.2.3. Bien qu'elle ne contienne pas de paragraphe consacré à l'exposé des faits, la requête introduite par le Gouvernement de la Communauté française contient, dans les développements des moyens, suffisamment d'indications relatives au contexte et aux circonstances entourant l'adoption du décret attaqué pour permettre à la Cour et aux parties intervenantes de cerner l'objet du litige.

B.2.4. Il ressort d'ailleurs des mémoires échangés par les parties qu'elles ont pu faire valoir leurs arguments en ayant une compréhension correcte de l'objet du recours et des moyens formulés par la partie requérante.

B.2.5. L'exception est rejetée.

En ce qui concerne l'affaire n° 4274 B.3.1. Le Gouvernement flamand soulève plusieurs exceptions d'irrecevabilité du recours introduit par la « Liga voor Mensenrechten » et par le « Vlaams Overleg Bewonersbelangen ».

B.3.2. La première exception est déduite de la violation de l'article 6 de la loi spéciale du 6 janvier 1989, en ce que la requête manquerait de clarté en de nombreux endroits.

B.3.3. La requête indique les dispositions du décret visées, les dispositions qui seraient violées et contient un développement de l'argumentation pour chaque moyen d'annulation. Elle satisfait à l'article 6 de la loi spéciale du 6 janvier 1989.

B.3.4. Il ressort d'ailleurs à suffisance des mémoires échangés dans cette affaire que le Gouvernement flamand a pu faire valoir ses arguments en ayant une compréhension correcte des moyens formulés par les parties requérantes.

B.3.5. Le Gouvernement flamand conteste ensuite l'intérêt des parties requérantes.

B.3.6. Lorsqu'une association sans but lucratif qui n'invoque pas son intérêt personnel agit devant la Cour, il est requis que son objet social soit d'une nature particulière et, dès lors, distinct de l'intérêt général; qu'elle défende un intérêt collectif; que la norme attaquée soit susceptible d'affecter son objet social; qu'il n'apparaisse pas, enfin, que cet objet social n'est pas ou n'est plus réellement poursuivi.

B.3.7. Les dispositions attaquées ont pour objet de réglementer l'accès au logement social en Région flamande. Elles déterminent les conditions de cet accès ainsi que les cas dans lesquels le bailleur peut mettre fin au contrat de location. Les parties requérantes estiment que ces dispositions ont pour conséquence de restreindre le droit à un logement décent garanti notamment par l'article 23 de la Constitution.

B.3.8. En vertu de l'article 3 de ses statuts, la « Liga voor Mensenrechte » a pour objet de combattre toute injustice et toute atteinte aux droits des personnes ou des collectivités. Elle défend les principes d'égalité, de liberté et d'humanisme sur lesquels se fondent les sociétés démocratiques et qui ont été proclamés notamment par la Constitution belge et par la Convention européenne des droits de l'homme. Sans qu'une telle définition de l'objet social d'une ASBL doive être comprise comme un moyen qu'elle se donne d'attaquer n'importe quelle norme sous le prétexte que toute norme a une incidence sur les droits de quelqu'un, il peut être admis qu'un lien suffisant existe entre cet objet social et les dispositions attaquées du décret du 15 décembre 2006.

B.3.9. D'après l'article 5 de ses statuts, le « Vlaams Overleg Bewonersbelangen » se donne pour objectif de promouvoir le droit au logement de tous, et en particulier des groupes d'habitants les plus vulnérables socialement. En ce qu'elle soutient que les dispositions qu'elle attaque portent atteinte au droit au logement, spécialement, des personnes défavorisées, cette association justifie de l'intérêt exigé par la Constitution et par la loi spéciale du 6 janvier 1989 pour demander leur annulation.

B.4. Enfin, les parties requérantes ont fait parvenir à la Cour une copie de la publication aux annexes du Moniteur belge de leurs statuts respectifs et les extraits des procès-verbaux des réunions de leurs conseils d'administration comportant la décision d'agir en annulation devant la Cour, de sorte qu'il est satisfait à l'article 7 de la loi spéciale du 6 janvier 1989.

B.5. Les exceptions sont rejetées.

Quant au fond I. Quant à la violation des règles répartitrices de compétence En ce qui concerne la violation des articles 39 et 128, § 1er, de la Constitution et des articles 5, § 1er, II, 3°, et 6, § 1er, IV, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles B.6. Dans son deuxième moyen, le Gouvernement de la Communauté française soutient que les articles 6, 7, 8 et 16 du décret du 15 décembre 2006 violent les articles 39 et 128, § 1er, de la Constitution, de même que les articles 5, § 1er, II, 3°, et 6, § 1er, IV, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.

B.7.1. L'article 39 de la Constitution dispose : « La loi attribue aux organes régionaux qu'elle crée et qui sont composés de mandataires élus, la compétence de régler les matières qu'elle détermine, à l'exception de celles visées aux articles 30 et 127 à 129, dans le ressort et selon le mode qu'elle établit. Cette loi doit être adoptée à la majorité prévue à l'article 4, dernier alinéa ».

L'article 128, § 1er, de la Constitution dispose : « Les Parlements de la Communauté française et de la Communauté flamande règlent par décret, chacun en ce qui le concerne, les matières personnalisables, de même qu'en ces matières, la coopération entre les Communautés et la coopération internationale, y compris la conclusion de traités.

Une loi adoptée à la majorité prévue à l'article 4, dernier alinéa, arrête ces matières personnalisables, ainsi que les formes de coopération et les modalités de conclusion de traités ».

L'article 5, § 1er, II, 3°, de la loi spéciale du 8 août 1980 dispose : « Les matières personnalisables visées à l'article [128, § 1er] de la Constitution, sont : [...] II. En matière d'aide aux personnes : [...] 3° La politique d'accueil et d'intégration des immigrés ». L'article 6, § 1er, IV, de la loi spéciale du 8 août 1980 dispose : « Les matières visées à l'article [39] de la Constitution sont : [...] IV. En ce qui concerne le logement : Le logement et la police des habitations qui constituent un danger pour la propreté et la salubrité publiques ».

B.7.2. Il se déduit des dispositions précitées que les régions sont compétentes pour régler l'ensemble de la matière du logement et que les communautés sont compétentes pour l'accueil et l'intégration des immigrés.

B.8. Le Gouvernement de la Communauté française estime que le législateur régional flamand a outrepassé ses compétences, d'une part, en prévoyant, aux articles 6, 7 et 8 du décret du 15 décembre 2006, que le locataire ou le candidat-locataire d'un logement social doit prouver sa disposition à apprendre le néerlandais pour accéder au logement et pour le conserver et d'autre part, en disposant, à l'article 16 du même décret, que le Gouvernement flamand peut prendre des mesures stimulantes à l'égard des personnes à qui cette condition ne s'impose pas, parce qu'elles étaient déjà locataires d'un logement social au moment de l'entrée en vigueur du décret, pour leur permettre néanmoins d'y satisfaire. Il considère que, par ces dispositions, le législateur régional poursuit en réalité un objectif d'intégration des personnes qui ne maîtrisent pas le néerlandais, parmi lesquelles se trouvent notamment des personnes immigrées, ce qui relève de la compétence des communautés.

B.9.1. D'après l'exposé des motifs, le décret s'inscrit dans la mise en oeuvre de la politique flamande du logement. Un des objectifs poursuivis par celle-ci est l'amélioration constante de la qualité de la vie dans les quartiers, la promotion de l'intégration des habitants dans leur environnement social et la promotion de chances égales pour chacun. Un des moyens mis en oeuvre à cette fin est l'encouragement de la mixité sociale. Dans cette optique, la connaissance de base du néerlandais permet d'améliorer la communication entre le locataire et le bailleur et augmente en conséquence la convivialité et la sécurité dans les logements (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, p. 5).

B.9.2. L'avant-projet de décret soumis à l'avis du Conseil d'Etat annonçait, dans son article 1er, que le décret réglait une matière « régionale et communautaire » (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, p. 33), en raison de la présence dans le texte d'obligations en matière d'apprentissage de la langue et d'inscription dans le parcours d'intégration civique organisé par le décret du 28 février 2003. La section de législation du Conseil d'Etat a considéré que « cette manière de voir ne [pouvait] être suivie ». Il a estimé que « l'obligation visée est en effet une obligation à laquelle il doit être satisfait pour pouvoir être inscrit en qualité de candidat-locataire ou pour pouvoir louer une habitation sociale de location, et s'inscrit par conséquent dans le cadre de la compétence de la Région flamande en matière de logement » (ibid., p. 49).

Afin de se conformer à cet avis du Conseil d'Etat, le législateur décrétal a adopté les dispositions attaquées au titre de ses compétences régionales, en application de l'article 6, § 1er, IV, de la loi spéciale du 8 août 1980.

B.10.1. La circonstance qu'une norme décrétale, adoptée par le législateur régional dans l'exercice de ses compétences, peut avoir pour effet de contribuer à la réalisation d'un objectif par ailleurs poursuivi par le législateur communautaire dans l'exercice de ses compétences propres ne peut entraîner, à elle seule, une violation des règles répartitrices de compétence par le législateur régional. Il en irait toutefois autrement si, en adoptant une telle mesure, le législateur régional rendait impossible ou exagérément difficile l'exercice, par le législateur communautaire, de ses compétences.

B.10.2. En l'espèce, le législateur régional flamand, en vertu de sa compétence en matière de logement, a pu adopter des dispositions qui règlent l'accès au logement social, notamment pour prévoir que les locataires et candidats-locataires doivent faire la preuve de leur volonté d'apprendre le néerlandais, dès lors qu'une connaissance minimale par tous les locataires de la langue utilisée par les services du bailleur contribue à améliorer la communication avec ceux-ci et en conséquence la qualité de l'habitat pour l'ensemble des habitants des logements concernés.

La circonstance que l'apprentissage du néerlandais pourra également avoir un effet positif sur les possibilités d'intégration sociale et professionnelle des personnes concernées, et par conséquent sur les objectifs poursuivis par la Communauté flamande en matière d'intégration des personnes immigrées, ne saurait faire obstacle à l'exercice, par la Région, de sa compétence en matière de logement.

B.11. Le moyen n'est pas fondé.

En ce qui concerne la violation de l'article 16bis de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles B.12.1. Le premier moyen pris par le Gouvernement de la Communauté française vise, en sa première branche, les articles 6, 7, 8, 10 et 14 du décret du 15 décembre 2006 en ce qu'ils insèrent respectivement l'article 92, § 3, alinéa 1er, 7°, l'article 93, § 1er, alinéa 2, 3°, l'article 95, § 1er, alinéa 1er, 3°, et l'article 102bis dans le décret du 15 juillet 1997 contenant le Code flamand du Logement. Il vise également l'article 16 du décret du 15 décembre 2006.

B.12.2. La partie requérante fait valoir que les dispositions attaquées violent l'article 16bis de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, combiné ou non avec l'article 30 de la Constitution, en ce que pour pouvoir entrer en ligne de compte pour un logement social situé dans les communes périphériques et les communes de la frontière linguistique, les candidats-locataires et les locataires sont obligés de démontrer qu'ils sont disposés à apprendre le néerlandais.

B.13.1. L'article 16bis de la loi spéciale du 8 août 1980 dispose : « Les décrets, règlements et actes administratifs ne peuvent porter préjudice aux garanties existantes au moment de l'entrée en vigueur de la présente disposition dont bénéficient les francophones dans les communes citées à l'article 7 des lois sur l'emploi des langues en matière administrative, coordonnées le 18 juillet 1966, ainsi que celles dont bénéficient les néerlandophones, les francophones et germanophones dans les communes citées à l'article 8 des mêmes lois ».

B.13.2. Les travaux préparatoires relatifs à cette disposition indiquent qu'elle « vise à garantir aux communes de la périphérie et aux communes à facilités que les garanties existant actuellement seront maintenues intégralement, même après la régionalisation de la loi communale organique et électorale » (Doc. parl., Sénat, 2000-2001, n° 2-709/1, p.21), et que, par l'utilisation du terme « garanties », le législateur visait « l'ensemble des dispositions actuellement en vigueur qui organisent un régime spécifique au profit des particuliers cités dans le texte et, de manière générale, toute disposition qui peut être identifiée comme protégeant les particuliers et, notamment, les mandataires publics dans les communes visées aux articles 7 et 8 des lois coordonnées » (Doc. parl., Chambre, 2000-2001, DOC 50-1280/003, p. 10).

B.13.3. L'article 30 de la Constitution dispose : « L'emploi des langues usitées en Belgique est facultatif; il ne peut être réglé que par la loi, et seulement pour les actes de l'autorité publique et pour les affaires judiciaires ».

B.14. Les lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière administrative sont applicables aux bailleurs d'habitations sociales de location qui sont des « services » au sens de l'article 1er de ces lois.

B.15. En imposant aux locataires et aux candidats-locataires l'obligation de démontrer qu'ils sont disposés à apprendre le néerlandais, le législateur décrétal, comme le relève également la section de législation du Conseil d'Etat dans son avis relatif à l'avant-projet de décret, ne règle pas l'emploi des langues (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, pp. 49 et 50), de sorte qu'en raison de son objet, le décret attaqué ne pourrait pas, en principe, porter atteinte aux facilités linguistiques accordées aux particuliers par les lois sur l'emploi des langues en matière administrative.

La Cour examinera néanmoins si le décret, en imposant cette obligation, porte atteinte aux garanties dont bénéficient les francophones dans les communes citées aux articles 7 et 8 des lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière administrative.

B.16. L'article 92, § 3, alinéa 1er, 7°, l'article 93, § 1er, alinéa 2, 3°, et l'article 95, § 1er, alinéa 1er, 3°, disposent explicitement que l'obligation pour le locataire ou le candidat-locataire d'une habitation sociale de prouver qu'il a la volonté d'apprendre le néerlandais est imposée « sans porter préjudice aux facilités linguistiques ». L'exposé des motifs précise à ce sujet : « Le projet de décret prévoit une disposition distincte [...] pour les francophones qui occupent un logement locatif social dans les communes périphériques ou de la frontière linguistique situées dans la région de langue néerlandaise. La condition selon laquelle il faut être disposé à apprendre le néerlandais vaut également pour ces personnes.

L'imposition de la condition d'être disposé à apprendre le néerlandais ne porte pas atteinte aux facilités linguistiques. [...] Par conséquent, l'imposition de la condition d'être disposé à apprendre le néerlandais ne prive en aucun cas les francophones de leurs facilités linguistiques dans les communes de la frontière linguistique et de la périphérie. Les francophones peuvent encore toujours, dans ces communes, demander à chaque fois au bailleur d'être traités en français » (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, pp. 19-20).

B.17.1. Il découle de ce qui précède que, selon la volonté expresse du législateur décrétal, les bailleurs d'habitations sociales de location qui sont des services au sens de l'article 1er des lois sur l'emploi des langues en matière administrative doivent, pour ce qui concerne les communes périphériques et les communes à facilités, se conformer aux lois coordonnées aussi bien, d'une part, dans leurs rapports oraux et écrits avec les locataires ou candidats-locataires qui souhaitent se prévaloir des facilités linguistiques qui leur sont accordées que, d'autre part, en ce qui concerne les avis, communications et formulaires destinés au public ainsi que les autres documents qu'ils utilisent le cas échéant.

B.17.2. Pour les candidats-locataires et locataires francophones établis dans les communes à facilités, cela signifie que les avis et communications qui sont destinés au public et qui émanent des bailleurs visés ci-dessus doivent être établis non seulement en néerlandais mais également en français. C'est également le cas dans les communes périphériques pour les formulaires utilisés par les bailleurs (article 11, § 2, et article 24, alinéa 1er, des lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière administrative).

Si les candidats-locataires ou locataires établis dans les communes à facilités le demandent, les contacts écrits et oraux avec les bailleurs visés ci-dessus doivent se dérouler en français (article 12 et article 25 des lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière administrative). Les certificats, déclarations et autorisations délivrés dans les communes périphériques par les bailleurs doivent être établis en français si les candidats-locataires ou locataires le demandent (article 26 des lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière administrative). La même réglementation s'applique aux certificats délivrés par les bailleurs dans les communes de la frontière linguistique (article 14 des lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière administrative).

Les actes qui sont délivrés, le cas échéant, par ces bailleurs doivent être établis en français dans les communes périphériques visées à l'article 28 des lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière administrative, à la demande des candidats-locataires ou locataires.

Dans les autres communes périphériques et dans les communes de la frontière linguistique, les actes sont établis en néerlandais mais tout intéressé peut s'en faire délivrer gratuitement une traduction certifiée exacte en français, valant expédition ou copie conforme (article 13, § 1er, et article 30 des lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière administrative).

Les dispositions en cause ne portent donc pas atteinte aux garanties dont bénéficient les francophones en vertu de ces lois dans les communes mentionnées aux articles 7 et 8 des lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière administrative.

B.18.1. Par ailleurs, les dispositions attaquées, en imposant au locataire ou au candidat-locataire d'une habitation sociale située dans une des communes citées aux articles 7 et 8 des lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière administrative de démontrer qu'il a la volonté d'apprendre le néerlandais, ne l'obligent nullement à utiliser cette langue, ni dans ses rapports avec les autres particuliers, ni dans ses rapports avec le bailleur de l'habitation sociale.

Elles ne portent donc pas atteinte à la liberté d'emploi des langues, telle qu'elle est garantie par l'article 30 de la Constitution.

B.18.2. Dans son mémoire, le Gouvernement flamand précise, comme l'a fait le rapport sur le décret attaqué (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/5, p. 12), que les dispositions attaquées créent une obligation de moyen et non une obligation de résultat.

A cet égard, l'article 92, § 3, alinéa 1er, 7°, l'article 93, § 1er, alinéa 2, 3°, et l'article 95, § 1er, alinéa 1er, 3°, disposent que le Gouvernement flamand arrête les modalités pour constater cette volonté d'apprendre le néerlandais.

Ces « modalités », qu'il appartiendra au juge compétent de contrôler, ne peuvent donc aboutir à créer pour les francophones des communes à facilités une obligation de résultat d'apprendre le néerlandais. Elles ne peuvent impliquer l'obligation pour les francophones des communes à facilités de démontrer la connaissance de la langue néerlandaise, ni la faculté pour l'autorité de vérifier cette connaissance, comme condition mise à la location d'une habitation sociale.

B.19. Il découle de ce qui précède que les dispositions attaquées ne portent pas atteinte aux garanties dont jouissent les locataires ou les candidats-locataires francophones qui occupent ou qui souhaitent obtenir une habitation sociale située sur le territoire d'une des communes citées aux articles 7 et 8 des lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière administrative, en vertu des dispositions existantes lors de l'entrée en vigueur de l'article 16bis de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles. Le moyen pris de la violation de cette dernière disposition, lue isolément ou combinée avec l'article 30 de la Constitution, n'est pas fondé.

II. Quant à la violation des articles 10, 11, 22 et 23 de la Constitution, combinés ou non avec certaines dispositions de droit européen et international En ce qui concerne la période d'essai et la résiliation du contrat de bail B.20. Les parties requérantes dans l'affaire n° 4274 prennent un premier moyen de la violation, par les articles 6 et 16 du décret attaqué, de l'article 23 de la Constitution, lu isolément ou combiné avec l'article 11 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, avec l'article 31 de la Charte sociale européenne et avec l'article 34, paragraphe 3, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

Elles reprochent à l'article 92, § 1er, 3° et 6°, du Code flamand du Logement d'occasionner un recul sensible et non justifié dans la protection du droit au logement en ce que ces dispositions prévoient : - une période d'essai de maximum deux ans et la possibilité de résiliation extrajudiciaire du contrat de bail pendant ou à la fin de cette période d'essai en cas d'évaluation négative, sans délai de préavis ou avec un délai de préavis plus court qu'auparavant, les obligations du locataire étant par ailleurs plus nombreuses que sous l'empire de la législation ancienne et les possibilités de résiliation à tout moment par le bailleur pour défaut grave et persistant étant étendues; - l'inscription de clauses résolutoires expresses dans le contrat de bail.

B.21.1. L'article 23 de la Constitution dispose : « Chacun a le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine.

A cette fin, la loi, le décret ou la règle visée à l'article 134 garantissent, en tenant compte des obligations correspondantes, les droits économiques, sociaux et culturels, et déterminent les conditions de leur exercice.

Ces droits comprennent notamment : [...] 3° Le droit à un logement décent; [...] ».

B.21.2. L'article 11 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels dispose : « Les Etats parties au présent Pacte reconnaissent le droit de toute personne à un niveau de vie suffisant pour elle-même et sa famille, y compris une nourriture, un vêtement et un logement suffisants, ainsi qu'à une amélioration constante de ses conditions d'existence. Les Etats parties prendront des mesures appropriées pour assurer la réalisation de ce droit [...] ».

B.21.3. L'article 31 de la Charte sociale européenne dispose : « En vue d'assurer l'exercice effectif du droit au logement, les Parties s'engagent à prendre des mesures destinées : 1. à favoriser l'accès au logement d'un niveau suffisant;2. à prévenir et à réduire l'état de sans-abri en vue de son élimination progressive;3. à rendre le coût du logement accessible aux personnes qui ne disposent pas de ressources suffisantes ». B.21.4. L'article 34, paragraphe 3, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne dispose : « Afin de lutter contre l'exclusion sociale et la pauvreté, l'Union reconnaît et respecte le droit à une aide sociale et à une aide au logement destinées à assurer une existence digne à tous ceux qui ne disposent pas de ressources suffisantes, selon les modalités établies par le droit communautaire et les législations et pratiques nationales ».

A défaut d'inscription de la Charte dans un texte normatif de valeur contraignante qui s'imposerait à la Belgique, le moyen est irrecevable dans la mesure où il est pris de la violation de l'article 23 de la Constitution combiné avec l'article 34, paragraphe 3, de la Charte.

Toutefois, en ce que la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne affirme l'existence de valeurs communes de l'Union européenne qui se retrouvent également pour l'essentiel dans des dispositions de la Constitution, la Cour peut la prendre en considération dans son examen.

B.22.1. Le nouvel article 92, § 1er, alinéa 1er, 3°, du Code flamand du Logement prévoit que les nouveaux contrats de bail relatifs à un logement social seront assortis d'une période d'essai d'une durée maximale de deux ans. Cette période d'essai a pour but « d'évaluer le locataire [...], de le suivre minutieusement et éventuellement de le corriger ». Durant cette période, toutes les obligations du locataire sont applicables. A défaut d'évaluation négative à la fin de la période d'essai, le contrat de bail est poursuivi pour une durée indéterminée. En cas d'évaluation négative à la fin de la période d'essai, il y a résiliation du contrat de bail. La disposition précise que l'article 98, § 3, s'applique intégralement pendant la période d'essai.

B.22.2. En vertu de l'article 98, § 3, 2°, nouveau, du Code flamand du Logement, le bailleur peut mettre fin au contrat de bail en cas de défaut grave et persistant de la part du locataire ayant trait à ses obligations. La même disposition précise que le délai de préavis en cas de résiliation par le bailleur est de six mois, et qu'en cas de défaut grave et persistant, le délai est réduit à trois mois.

B.22.3. Le nouvel article 92, § 1er, alinéa 1er, 6°, du Code flamand du Logement prévoit que les baux afférents aux habitations sociales contiennent, « en dérogation à l'article 1762bis du Code civil, les conditions résolutoires ».

Il ressort des travaux préparatoires du décret que le législateur décrétal a voulu prévoir la possibilité jde faire figurer une clause résolutoire expresse dans le contrat de bail, de sorte que le bailleur puisse, en cas de manquement du locataire, mettre fin au contrat de bail sans intervention judiciaire préalable (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, p. 14).

B.22.4. Bien que le texte de l'article 92, § 1er, 6°, du Code flamand du Logement soit formulé en des termes généraux, il apparaît des travaux préparatoires que la clause résolutoire expresse qui peut être introduite dans les nouveaux contrats de bail est liée à la période d'essai et ne pourra être mise en oeuvre que durant cette période ou à la fin de celle-ci : « Pour ces raisons, une possibilité de clause résolutoire expresse durant ou à la fin de la période d'essai est prévue, par dérogation à l'article 1762bis du Code civil [...]. Dans ce cas, le bailleur peut mettre fin au contrat, dans certaines circonstances déterminées, de façon extra-judiciaire (c'est-à-dire sans intervention du juge de paix). Les conditions seront précisées dans le contrat de bail type.

En cas de résiliation, il est en principe mis fin immédiatement au contrat. Toutefois, dans un cadre sui generis comme celui de la législation relative au logement social, la résiliation peut être accompagnée d'un délai de préavis de par exemple un mois pour permettre au locataire social de chercher un nouveau logement » (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, p. 14).

B.22.5. Bien que les parties requérantes demandent l'annulation de l'article 92, § 1er, alinéa 1er, 3° et 6°, du Code flamand du Logement, il ressort de leur requête que leurs griefs ne sont pas dirigés contre la période d'essai en tant que telle, mais bien contre le fait que les dispositions attaquées permettent que le contrat de bail puisse être dissous tant pendant la période d'essai qu'à l'issue de celle-ci par une décision unilatérale du bailleur et sans intervention préalable du juge.

B.22.6. L'article 1762bis a été introduit dans le Code civil par la loi du 30 mai 1931 portant des modifications au titre VIII du livre III du Code civil. Le législateur a entendu interdire la condition résolutoire expresse, appelée aussi pacte commissoire, parce qu'elle permet une résiliation qui opère de plein droit, sans égard « à la gravité de l'inexécution ou aux circonstances qui peuvent justifier ou expliquer l'inexécution ou le retard », parce que « ce pacte est dangereux aux mains du créancier qui entend pousser l'exercice de ses droits à toute rigueur » et parce qu'il paraît « inique dans les contrats dont l'exécution est destinée à se développer pendant un long terme, comme dans le bail à loyer » (Doc. parl., Chambre, 1928-1929, n° 64, p.4).

Le législateur a donc prévu « qu'en matière de baux à loyer, le contrat de bail ne pourra être résolu que par décision de justice et après que le juge aura, en tout hypothèse, apprécié si la gravité de l'inexécution par l'une des parties de ses engagements contractuels justifie la résolution poursuivie devant lui par l'autre partie (Code civil, art. 1184) ». Il a considéré que « les propriétaires ne seront pas fondés à [se] plaindre [de cette mesure], puisqu'en cas de lésion de leurs droits, le juge sera appelé à intervenir et autorisé à prononcer la résiliation du bail » (Doc. parl., Sénat, 1929-1930, n° 127, p. 3).

B.23.1. Compétent pour régler l'ensemble de la matière du logement, ainsi qu'il a été dit en B.7.2, le législateur régional flamand est compétent pour apprécier si, en matière de logement social, il convient de déroger à des règles inscrites dans le Code civil telles que celle de son article 1762bis.

B.23.2. Il n'empêche que le législateur décrétal ne peut porter atteinte à la sécurité du logement dans le secteur du logement social qui est un élément fondamental de la concrétisation du droit à un logement décent garanti par l'article 23 de la Constitution et confié aux différents législateurs. Or, la possibilité de faire figurer une clause résolutoire expresse dans le contrat de bail prive les locataires de la garantie de l'intervention préalable d'un juge en cas de dissolution du bail par le bailleur pour manquement à leurs obligations.

B.23.3. Sans doute la Cour doit-elle, dans le domaine de la politique du logement, respecter l'appréciation des législateurs régionaux quant à l'intérêt général, sauf si cette appréciation est manifestement déraisonnable (arrêt n° 33/2007, B.5.3; arrêt n° 62/2007, B.5.3; arrêt n° 155/2007, B.6), mais ce pouvoir d'appréciation est moins large lorsque cette politique de logement risque d'entraîner pour une certaine catégorie de personnes la perte de leur logement, ce qui est effectivement considéré comme une des ingérences les plus extrêmes dans le droit au respect du logement (CEDH, 13 mai 2008, McCann c.

Royaume-Uni, § 50).

B.24.1. Contrairement à ce qui est prévu par le droit commun, le contrat de bail peut être dissous sur la seule appréciation par le bailleur des manquements du locataire, de leur gravité et de leur caractère persistant, sans contrôle préalable d'un juge indépendant et impartial, tiers à la relation contractuelle.

B.24.2. D'après les travaux préparatoires du décret, cette dérogation au droit commun est « nécessaire afin d'atteindre les objectifs de la politique du logement social. » Il s'agit en effet de répondre au « besoin d'un instrument efficace pour garantir la qualité de la vie dans les projets de logements sociaux, ou pour ne pas la compromettre. » A cette fin, « la période d'essai est un instrument positif pour soutenir les nouveaux locataires » (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, p. 13). Au cours des travaux préparatoires, le ministre du Logement a indiqué qu'il s'agissait d'une mesure dirigée « contre les gens qui, de façon désespérante, créent continuellement des problèmes » et permettant aux sociétés de logement social de les écarter des habitations. Il a précisé qu'il s'agissait d'une sanction ultime, et que l'objectif était de protéger la qualité de l'habitat des autres locataires (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/5, p. 5).

B.25.1. L'objectif d'assurer une qualité de la vie et de l'habitat la meilleure possible pour tous les habitants des logements sociaux peut certes justifier qu'un accompagnement soit prévu pour les nouveaux locataires et que leurs obligations leur soient rappelées. Des sanctions proportionnées doivent pouvoir être prises à l'égard des locataires qui, négligeant de se conformer à leurs obligations contractuelles, causent par là des désagréments ou des nuisances à l'ensemble des personnes occupant les logements. Il est dès lors légitime que le législateur décrétal prévoie un ensemble de mesures et de sanctions permettant aux bailleurs de logements sociaux de réagir adéquatement et de manière proportionnée aux agissements indésirables ou aux manquements des locataires. A cette fin, l'article 102bis du Code flamand du Logement met un certain nombre de sanctions à la disposition des sociétés de logements sociaux.

Par ailleurs, dans certains cas, le comportement des locataires peut justifier qu'il soit mis fin au contrat de bail. Dans ces hypothèses, l'article 98, § 3, du Code flamand du Logement prévoit la possibilité de résiliation du bail, moyennant préavis de trois ou de six mois selon les cas. En application du droit commun, la résiliation du bail pour manquement du locataire à ses obligations contractuelles peut toujours être prononcée par le juge de paix. Les bailleurs de logements sociaux ne sont dès lors pas dépourvus de moyens d'action à l'encontre des locataires qui refusent de se conformer à leurs obligations et compromettent par là la qualité de vie des autres habitants.

B.25.2. Compte tenu de l'obligation que l'article 23 de la Constitution met à charge des législateurs compétents de promouvoir le droit à un logement décent pour tous, compte tenu de l'importance, pour la réalisation effective de ce droit pour les personnes les plus démunies, du secteur du logement social, et de l'insécurité quant à ce droit qu'elle crée, la possibilité pour le bailleur de mettre fin au contrat de bail sans contrôle judiciaire préalable, en application d'une clause résolutoire expresse, n'est toutefois pas proportionnée à l'objectif d'assurer la qualité de l'habitat dans les quartiers de logements sociaux.

Les bailleurs de logements sociaux n'étant, ainsi qu'il vient d'être dit, pas dépourvus de moyens d'action à l'encontre des locataires qui refusent de se conformer à leurs obligations, il n'est pas nécessaire, pour atteindre le but poursuivi, de priver les locataires sociaux de la garantie que représente à cet égard l'intervention du juge avant qu'il puisse être mis fin au contrat de bail.

B.25.3. Il est vrai qu'un contrôle judiciaire peut toujours intervenir a posteriori, après qu'il a été mis fin au contrat de bail en application d'une clause résolutoire expresse. L'intervention du juge à ce moment, lorsque le locataire a perdu son logement et que celui-ci a pu être attribué à une autre personne, ne saurait toutefois compenser le défaut d'intervention du juge pour mettre fin au contrat, puisque, s'il devait s'avérer que le bailleur a commis une erreur d'appréciation, il ne peut être garanti que le locataire privé de son logement le retrouverait.

B.26. Il découle de ce qui précède que la possibilité de faire figurer une clause résolutoire expresse dans le contrat de bail, au détriment des locataires de logements sociaux, n'est pas raisonnablement justifiée par rapport au droit à un logement décent, garanti par l'article 23 de la Constitution.

L'article 92, § 1er, alinéa 1er, 6°, doit être annulé. Doivent également être annulés, à l'avant-dernière phrase de l'article 92, § 1er, alinéa 1er, 3°, les mots : « à défaut d'une évaluation négative par le bailleur d'une habitation sociale par rapport à ses obligations, visées au § 3 », ainsi que la dernière phrase de la même disposition.

En ce qui concerne les dispositions relatives à la volonté d'apprendre le néerlandais et à l'obligation de suivre ou d'avoir suivi le trajet d'intégration civique B.27. L'article 92, § 3, alinéa 1er, 6° et 7°, l'article 93, § 1er, alinéa 1er, 2° et 3°, et l'article 95, § 1er, 2° et 3°, du Code flamand du Logement, insérés par les articles 6, 7 et 8 du décret du 15 décembre 2006, imposent aux candidats-locataires et aux locataires d'une habitation sociale une nouvelle obligation qui consiste à « avoir la volonté d'apprendre le néerlandais ». Cette condition s'applique lors de l'inscription en tant que candidat à la location d'une habitation sociale (article 93, § 1er) et lors de l'octroi de l'accès au logement (article 95, § 1er). Elle figure également parmi les obligations du locataire (article 92, § 3).

B.28. Dans son troisième moyen, le Gouvernement de la Communauté française fait grief à ces dispositions, dans une première branche, de violer les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'elles traitent différemment, sans justification raisonnable, des catégories de personnes, notamment dans la mise en oeuvre des droits sociaux consacrés par l'article 23 de la Constitution, et, dans une seconde branche, de violer l'article 23 de la Constitution, qui interdit aux autorités publiques qu'il concerne de légiférer à rebours des droits qui y sont garantis, et notamment du droit à un logement décent.

B.29. Les requérants dans l'affaire n° 4274 estiment également que la condition d'être disposé à apprendre le néerlandais crée une différence de traitement contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution entre les candidats-locataires qui connaissent déjà le néerlandais et ceux qui ne possèdent pas le niveau de connaissance requis.

B.30. Les requérants dans l'affaire n° 4274, dans la deuxième branche de leur troisième moyen, considèrent que l'article 92, § 3, alinéa 1er, 8°, l'article 93, § 1er, alinéa 2, 4°, et l'article 95, § 1er, alinéa 1er, 4°, qui subordonnent l'inscription, l'admissibilité et l'accès à un logement social à la condition d'avoir suivi le parcours d'intégration civique pour les candidats-locataires concernés par le décret du 28 février 2003 relatif à la politique flamande d'intégration civique, créent également une différence de traitement contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution entre les personnes obligées par ce décret à suivre un parcours d'intégration et les autres candidats-locataires.

B.31. Les nouvelles conditions d'accès à un logement social sont de nature à porter atteinte au droit à un logement décent, puisqu'elles impliquent que les candidats-locataires qui n'y satisfont pas peuvent se voir privés du droit d'occuper un logement social. Les personnes concernées par la location de logements sociaux se trouvant en général parmi celles qui appartiennent aux couches les plus précarisées de la population, le risque qu'en l'absence d'accès à un logement social elles se trouvent privées de tout logement décent est réel.

La Cour doit dès lors rechercher si ces mesures sont raisonnablement justifiées.

B.32.1. D'après l'exposé des motifs du décret attaqué, « la connaissance du néerlandais émancipe le locataire, améliore la communication entre le locataire et le bailleur, et augmente la sécurité dans les complexes de logements. » C'est pourquoi « il faut promouvoir l'apprentissage d'une langue commune au locataire et au bailleur, à savoir le néerlandais », ce qui améliorera également la convivialité dans les quartiers de logements sociaux (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, p. 5). Le législateur décrétal flamand a eu égard à l'expérience passée, qui montre que dans certaines habitations sociales, des problèmes ont pu être causés par le manque de moyen de communication entre des locataires qui ne parlaient pas le néerlandais et les services du bailleur, dans la mesure où ces locataires ne comprenaient pas les consignes données par le bailleur (ibid, p. 17). L'obligation imposée à chaque candidat-locataire et locataire d'être prêt à apprendre le néerlandais devrait remédier à ce genre de problèmes.

B.32.2. Les travaux préparatoires du décret attaqué soulignent par ailleurs que « la volonté d'apprendre le néerlandais » ne doit pas être confondue avec la capacité de parler le néerlandais et qu'il n'entre absolument pas dans l'intention du législateur décrétal de donner une quelconque priorité dans l'accès au logement social aux néerlandophones. L'objectif du législateur décrétal est de permettre à chaque locataire de logements sociaux d'atteindre un niveau de connaissance élémentaire, défini en référence au niveau A.1. du « Cadre européen commun de référence pour les langues ». La preuve de la volonté d'apprendre le néerlandais, pour ceux qui ne satisfont pas à ce niveau élémentaire, peut être rapportée, notamment, par l'inscription aux cours de langue qui sont offerts gratuitement aux personnes concernées (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, p. 21).

B.32.3. Enfin, ces objectifs doivent être mis en relation avec ceux du décret du 28 février 2003 relatif à la politique flamande d'intégration civique, tel qu'il a été modifié par les décrets du 14 juillet 2006 et du 1er février 2008.

L'article 2 de ce décret définit l'intégration civique comme « un processus interactif au cours duquel les autorités proposent, au sens de l'article 5, § 1er, II, 3°, de la loi spéciale du 8 août [1980] de réformes institutionnelles, aux immigrants un programme spécifique qui, d'une part, leur permet de renforcer leur autonomie et, d'autre part, contribue à leur reconnaissance, par la société, en tant que citoyens à part entière, dans le but d'arriver à une pleine participation active et une citoyenneté partagée par tous, et l'obtention d'une cohésion sociale suffisante ».

Parmi le « groupe-cible » de ce décret, qui comprend notamment tout étranger majeur inscrit dans une commune de langue néerlandaise, l'« intégrant » qui est locataire ou candidat-locataire d'un logement social en Région flamande figure parmi les catégories prioritaires pour le parcours d'intégration primaire, conformément à l'article 3, § 4, 4°, du décret du 28 février 2003.

B.32.4. L'article 13, § 1er, du même décret décrit ce parcours dans les termes suivants : « Dans le parcours primaire d'intégration civique, le programme de formation se compose de trois paquets de formation, à savoir l'orientation sociale, le néerlandais comme seconde langue et l'orientation de la trajectoire de vie.

L'orientation sociale a pour but de renforcer le fonctionnement autonome, d'une part en stimulant la connaissance des droits et devoirs et la connaissance et la compréhension de notre société et de ses valeurs fondamentales et, d'autre part, en entamant le développement de quelques compétences nécessaires à l'autonomie des intégrants.

Le paquet de cours de néerlandais comme seconde langue a pour but de stimuler l'acquisition rapide d'aptitudes de base du néerlandais, en vue d'un cours complémentaire proposé aux intégrants.

L'orientation de la trajectoire a pour but de soutenir et d'accompagner un processus individuel, au cours duquel l'intégrant prend en charge sa trajectoire de vie, acquiert notamment une connaissance du marché du travail et du système de l'enseignement, ses compétences déjà présentes étant transposées dans le cadre de notre société ».

B.33.1. Il ressort des travaux préparatoires relatifs à l'article 23 de la Constitution que le Constituant ne souhaitait pas « confiner les citoyens dans un rôle passif ou [...] les inciter à adopter une attitude passive », mais qu'au contraire, il entendait affirmer que « quiconque a des droits, a également des devoirs », partant de l'idée que « le citoyen a pour devoir de collaborer au progrès social et économique de la société dans laquelle il vit » (Doc. parl., Sénat, S.E. 1991-1992, n° 100-2/4°, pp. 16-17). C'est pourquoi il a permis aux législateurs auxquels il confie la charge de garantir les droits économiques, sociaux et culturels de tenir compte des « obligations correspondantes », selon les termes de l'alinéa 2 de l'article 23.

B.33.2. Les citoyens bénéficiaires des droits économiques, sociaux et culturels énoncés à l'article 23 de la Constitution peuvent donc se voir imposer des obligations pour accéder à ces droits. Les mots « à cette fin », placés en tête de cet alinéa 2, indiquent toutefois que ces obligations doivent être liées à l'objectif général inscrit à l'alinéa 1er de l'article 23, qui est de permettre à chacun de mener une vie conforme à la dignité humaine par la jouissance des droits énumérés à l'alinéa 3 du même article. Ces obligations doivent permettre aux personnes à qui elles sont imposées de contribuer à la réalisation effective de cet objectif pour elles-mêmes ainsi que pour les autres bénéficiaires des droits énumérés à l'article 23, et doivent être proportionnées à l'objectif ainsi défini.

B.34.1. Le législateur décrétal a pu juger que le but général poursuivi par les dispositions attaquées, qui est d'améliorer la qualité de la vie et de l'habitat des complexes de logement sociaux, ne pouvait être atteint si chaque locataire ne participait pas activement à sa réalisation. Il a pu estimer que la condition d'être prêt à apprendre le néerlandais de façon à atteindre un niveau de maîtrise élémentaire de cette langue pouvait être considérée comme une « obligation correspondante » au sens de l'article 23 de la Constitution. Il peut en effet être admis que « le fait d'être disposé à apprendre le néerlandais est donc un moyen permettant d'augmenter l'implication du locataire dans la réalisation, avec le bailleur, d'un logement social décent », spécialement dans les quartiers où cohabitent des personnes de nombreuses origines différentes (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, p. 21).

B.34.2. L'obligation de montrer sa volonté d'apprendre le néerlandais n'est pas disproportionnée à cet objectif, dès lors qu'elle ne porte que sur une connaissance élémentaire de la langue, que des cours sont mis gratuitement à la disposition des personnes intéressées (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, p. 19), que celles-ci sont néanmoins libres de montrer leur volonté d'apprendre le néerlandais par tout autre moyen (ibid. ) et qu'aucune obligation de résultat ne peut leur être imposée, de sorte que ni la connaissance effective de la langue ni son usage après que des cours ou une autre forme d'apprentissage ont été suivis ne peuvent être ni exigés, ni vérifiés par le bailleur (ibid., p. 16).

B.34.3. Celui qui ne peut démontrer être disposé à apprendre le néerlandais peut être sanctionné par le refus d'inscription en qualité de candidat-locataire d'un logement social, par le refus d'accès au logement, ou, pour les personnes qui occupent un logement, par une sanction administrative infligée par le bailleur ou par la résiliation du contrat de bail. Il a été précisé, au cours des travaux préparatoires, que « la sanction infligée doit toujours être en rapport avec la gravité du manquement », qu'il sera évalué « au cas par cas » si le refus d'apprendre le néerlandais constitue un manquement grave et persistant et que ce pourrait être le cas si le locataire en venait à ne pas ou à ne plus pouvoir respecter ses autres obligations (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, pp. 18-19). En ce qui concerne les amendes administratives, le texte précise qu'« il ne peut pas exister de disproportion manifeste entre les faits qui sont à la base de l'amende administrative et l'amende imposée sur la base de ces faits » (article 102bis, § 3, du Code flamand du Logement, introduit par l'article 14 du décret attaqué).

B.34.4. Il se déduit de ce qui précède, ainsi que l'a relevé la section de législation du Conseil d'Etat, que serait manifestement disproportionnée une résiliation du contrat de bail qui serait demandée par le bailleur pour cause de négligence ou de refus de la part du locataire dans l'apprentissage de la langue, alors qu'il ne pourrait être prouvé par le bailleur que cette négligence ou ce refus ont causé des nuisances graves ou des atteintes réelles à la qualité de la vie et de l'habitat pour les autres locataires (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, p. 58).

B.34.5. Quant à l'obligation de suivre le parcours d'intégration civique, elle inscrit l'obligation précédente dans l'objectif plus vaste de contribuer à l'intégration des locataires étrangers dans les logements sociaux. Elle se fonde sur les mêmes justifications et sa méconnaissance appelle les mêmes précisions que celles qui sont rappelées en B.34.4.

B.34.6. Dès lors que doivent être annulées les dispositions du décret relatives aux clauses résolutoires expresses, il appartiendra dans chaque cas au juge saisi de constater la réalité des « nuisances graves » et des « atteintes réelles » et de vérifier si celles-ci ont pour cause le refus du locataire de satisfaire aux conditions mentionnées en B.27 et B.30.

B.35. Sous réserve que les sanctions éventuelles du refus d'apprendre le néerlandais ou de suivre le parcours d'intégration civique soient proportionnées aux nuisances ou dégradations causées par ces refus et qu'elles ne puissent justifier la résiliation du bail que moyennant un contrôle judiciaire préalable, ces conditions imposées aux candidats-locataires et aux locataires d'un logement social ne sont pas incompatibles avec l'article 23 de la Constitution, lu isolément ou combiné avec les dispositions conventionnelles mentionnées aux moyens et elles n'établissent pas de différences de traitement incompatibles avec les articles 10 et 11 de la Constitution.

B.36.1. Les parties requérantes dans l'affaire n° 4274 soutiennent toutefois que, en ce qui concerne en particulier l'article 92, § 3, alinéa 1er, 7°, l'article 93, § 1er, alinéa 2, 3°, et l'article 95, § 1er, alinéa 1er, 3°, qui visent les locataires d'une habitation sociale sise dans une commune périphérique ou une commune de la frontière linguistique, « on voit difficilement comment un locataire qui invoque le droit à une communication en français avec son bailleur influence de ce fait défavorablement la qualité de la vie, dès lors que ce droit lui est garanti par les lois sur l'emploi des langues ».

Elles ajoutent qu'« on ne comprend pas davantage pourquoi la volonté d'apprendre le néerlandais serait pour ces locataires également une condition d'inscription et d'admission à une habitation sociale de location dans les communes périphériques ou les communes de la frontière linguistique ».

Le Gouvernement de la Communauté française, dans le premier moyen, seconde branche, dans l'affaire n° 4199, soutient que l'obligation faite aux locataires francophones de logements sociaux situés dans les communes à facilités de démontrer qu'ils sont disposés à apprendre le néerlandais constitue une ingérence dans leur vie privée incompatible avec l'article 22 de la Constitution et avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme.

B.36.2. Ainsi qu'il est dit en B.17.1, les bailleurs d'habitations sociales de location qui sont des services au sens de l'article 1er des lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière administrative doivent, pour ce qui concerne les communes à facilités, se conformer à ces lois coordonnées. La communication, telle qu'elle est décrite en B.17.2, entre le bailleur et le locataire doit, si celui-ci en fait la demande, avoir lieu en français. Cette garantie, qui découle des lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière administrative, est expressément affirmée par le législateur décrétal à l'article 92, § 3, alinéa 1er, 7°, à l'article 93, § 1er, alinéa 2, 3°, et à l'article 95, § 1er, alinéa 1er, 3°, qui précisent que la condition d'avoir la volonté d'apprendre le néerlandais est imposée « sans porter préjudice aux facilités linguistiques ». En conséquence, les candidats-locataires et les locataires qui bénéficient de ces facilités ne sont pas obligés d'utiliser le néerlandais, ni dans leurs rapports avec le bailleur de l'habitation sociale, ni, comme il est rappelé en B.18.1, dans leurs rapports avec les autres particuliers.

B.36.3. A l'égard des candidats-locataires et des locataires que la loi autorise à communiquer en français avec la société de logement social, la condition d'être prêt à apprendre le néerlandais ne peut être considérée comme une obligation correspondante, au sens de l'article 23 de la Constitution, qui pourrait leur être imposée sous peine de ne pas obtenir le logement ou de le perdre alors qu'ils satisfont à toutes les autres conditions pour y avoir droit.

B.36.4. L'avant-projet de décret ne contenait aucune disposition spécifique relative aux communes à facilités, ce qui avait amené la section de législation du Conseil d'Etat à faire l'observation suivante : « L'imposition de l'exigence d'être disposé à apprendre le néerlandais aux personnes qui souhaitent faire appel aux facilités linguistiques que la loi sur l'emploi des langues leur reconnaît, n'est pas pertinente dans la mesure où l'objectif de garantir une bonne communication entre le bailleur et le locataire de l'habitation de location sociale est également atteint lorsque les contacts entre ces parties se déroulent effectivement en français. Le projet doit être en conséquence adapté sur ce point » (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, p. 59).

Pour répondre à cette observation, le législateur décrétal a inséré, dans les dispositions attaquées, les mots : « sans porter préjudice aux facilités linguistiques ».

B.37. Compte tenu de ce qui est mentionné en B.36.2, pour être compatibles avec les dispositions mentionnées aux moyens, et pour que les mots « sans porter préjudice aux facilités linguistiques » aient une portée réelle, les dispositions décrétales qui prévoient l'obligation « d'avoir la volonté d'apprendre le néerlandais » et les sanctions qui s'y attachent ne peuvent être interprétées que comme ne s'appliquant pas aux candidats-locataires et aux locataires de logements sociaux visés par le décret attaqué, situés dans les communes de la périphérie ou de la frontière linguistique, et qui entendent bénéficier de ces facilités linguistiques.

En ce qui concerne les moyens pris de la violation de l'article 23 de la Constitution (principe de légalité) B.38.1. La partie requérante dans l'affaire n° 4199 fait grief aux articles 6, 7, 8 et 16 du décret attaqué de violer le principe de légalité garanti par l'article 23 de la Constitution en ce qu'ils contiennent des délégations au Gouvernement flamand portant sur : - les modalités pour constater l'existence de la volonté d'apprendre le néerlandais; - les conditions d'exemption pour les personnes possédant déjà le niveau de connaissance requis; - la détermination des catégories de personnes exemptées pour d'autres motifs; - l'adoption de mesures stimulantes destinées aux personnes qui sont déjà locataires au moment de l'entrée en vigueur du décret attaqué.

B.38.2. Les parties requérantes dans l'affaire n° 4274 estiment, dans les deux premières branches de leur moyen, que l'article 6 du décret attaqué viole le principe de légalité impliqué par l'article 23 de la Constitution en ce que : - l'article 92, § 1er, alinéa 1er, 3°, nouveau du Code flamand du Logement néglige de préciser à quelles conditions le bailleur peut procéder à une dissolution dans le cadre du moment d'évaluation à la fin de la période d'essai; - l'article 92, § 1er, alinéa 1er, 6°, nouveau du Code flamand du Logement néglige de préciser quelles sont les clauses résolutoires expresses.

Les dispositions visées devant être annulées dans la mesure indiquée en B.26, il n'y a pas lieu d'examiner les deux premières branches de ce moyen, qui ne pourraient conduire à une annulation plus étendue.

B.38.3. Les mêmes parties requérantes considèrent, dans la troisième branche de ce moyen, que les articles 6, 7 et 8 du décret attaqué violent le principe de légalité contenu dans l'article 23 de la Constitution en ce que le législateur décrétal néglige : - de fixer les modalités sur la base desquelles la volonté d'apprendre le néerlandais sera déterminée; - de préciser les catégories de personnes qui seront exemptées de cette condition pour des motifs autres que médicaux.

B.39. L'article 23, alinéa 3, 3°, de la Constitution fait obligation aux législateurs compétents de garantir le droit à un logement décent, en précisant qu'ils tiennent compte des « obligations correspondantes », et leur permet de déterminer les conditions d'exercice de ce droit.

Cet article n'interdit pas d'accorder des délégations à un gouvernement, pour autant qu'elles portent sur l'exécution de mesures dont l'objet a été déterminé par le législateur compétent.

B.40.1. L'avant-projet de décret soumis à l'avis de la section de législation du Conseil d'Etat prévoyait uniquement, en ce qui concerne la condition relative à l'apprentissage du néerlandais, que le locataire ou le candidat-locataire devait « être disposé à apprendre le néerlandais », et chargeait le Gouvernement flamand « de déterminer les règles plus précises pour constater cette volonté » (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, pp. 36-37). Le Conseil d'Etat a fait remarquer à cet égard que l'ampleur de la délégation ainsi accordée au pouvoir exécutif était difficilement conciliable avec le principe de légalité contenu dans l'article 23 de la Constitution et compliquait également l'examen de la conformité de cette condition par rapport aux droits fondamentaux concernés (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, p. 54).

B.40.2. En réponse à cette critique du Conseil d'Etat, le législateur décrétal a précisé dans le texte du décret le niveau de connaissance qui forme l'objectif de référence, le principe de l'exemption des personnes pouvant démontrer qu'elles possèdent déjà ce niveau et le principe de l'exemption des personnes qui ne peuvent, en raison d'une maladie grave ou d'un handicap mental ou physique, atteindre ce niveau. Le législateur décrétal a ainsi déterminé lui-même les principes régissant cette condition d'accès au logement social. Il a pour le surplus chargé le Gouvernement flamand de déterminer les modalités pour constater la volonté d'apprendre le néerlandais, ainsi que les modalités permettant aux personnes qui souhaitent démontrer qu'elles possèdent déjà un niveau suffisant de connaissance de la langue d'être exemptées de cette condition. Il l'a également chargé de désigner d'autres catégories de personnes qui peuvent être exemptées, en plus de celles qui le sont pour des raisons médicales. En raison de ces précisions, la délégation qu'il a accordée au Gouvernement flamand n'est pas incompatible avec l'article 23 de la Constitution.

B.40.3. En outre, en accordant une telle délégation, le législateur décrétal n'a pu habiliter le Gouvernement flamand à adopter des dispositions qui entraîneraient une violation du droit constitutionnel à un logement décent. Les travaux préparatoires du décret précisent explicitement que seule la volonté d'apprendre le néerlandais est exigée, et que la connaissance effective de la langue ne peut être vérifiée, sauf dans le chef des personnes qui demandent à être exemptées au motif qu'elles possèdent déjà un niveau de connaissance de la langue suffisant (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/5, p. 12). Il appartiendra au juge compétent de vérifier si le Gouvernement flamand n'a pas fait un usage illégal de la délégation qui lui est accordée.

B.40.4. Enfin, l'article 16 du décret attaqué précise expressément que la condition relative à la volonté d'apprendre le néerlandais n'est pas applicable aux personnes qui, au moment de l'entrée en vigueur du décret, sont déjà locataires d'un logement social. De ce que cette disposition permet ensuite au Gouvernement flamand de prendre « des mesures stimulantes » à l'égard de ces locataires pour leur permettre de respecter ces obligations, il ne peut être déduit que le Gouvernement serait habilité à créer une obligation nouvelle à leur charge. Les mesures qu'il prendra à cet égard ne peuvent, en application de la disposition décrétale, qu'être incitatives, sans être contraignantes, dans le chef des locataires concernés. A nouveau, il reviendra au juge compétent de contrôler l'usage fait par le Gouvernement de cette délégation.

B.41. Les moyens ne sont pas fondés.

En ce qui concerne le moyen pris de la violation des articles 10, 11 et 23 de la Constitution combinés avec des dispositions de droit européen B.42.1. Le Gouvernement de la Communauté française prend un cinquième moyen de la violation des articles 10, 11, et 23 de la Constitution, combinés avec les articles 18, 39 et 43 du Traité CE et avec les articles 7 et 9 du règlement (CEE) n° 1612/68 du Conseil du 15 octobre 1968 relatif à la libre circulation des travailleurs à l'intérieur de la Communauté. Il fait grief aux articles 6, 7, 8, 10 et 14 du décret attaqué, en ce qu'ils imposent au candidat-locataire et au locataire la condition de faire preuve de sa volonté d'apprendre le néerlandais pour accéder au logement social et pour le conserver, et à l'article 16 du même décret, en ce qu'il permet que le Gouvernement flamand prenne des mesures stimulantes à l'égard des locataires à qui cette condition ne s'impose pas, de créer une discrimination entre citoyens de l'Union européenne et citoyens belges dans la jouissance du droit à la libre circulation des travailleurs, garanti par les dispositions précitées.

B.42.2. Le Gouvernement wallon propose, à titre subsidiaire, d'interroger la Cour de justice des Communautés européennes à ce sujet.

B.43.1. Le droit à la libre circulation des travailleurs comprend, ainsi que le rappelle l'article 9 du règlement n° 1612/68 précité, le droit à l'accès au logement à l'égal des nationaux.

B.43.2. Les dispositions attaquées sont applicables à tous les candidats-locataires et locataires qui souhaitent occuper un logement social en Région flamande, quelle que soit leur nationalité. Elles n'établissent dès lors aucune distinction de traitement sur la base de la nationalité.

Dans le cadre de l'appréciation des dispositions attaquées, il y a lieu de souligner qu'il ne peut être exigé des intéressés qu'ils connaissent ou parlent le néerlandais ni lors de l'inscription des candidats-locataires, ni lors de l'admission des locataires à un logement. Qu'il soit ou non citoyen de l'Union européenne, nul ne peut donc se voir refuser un logement social pour ce motif.

Il est toutefois demandé aux candidats-locataires ou aux locataires qui ne peuvent démontrer qu'ils satisfont, pour la connaissance du néerlandais, au critère A.1. du Cadre européen commun de référence pour les langues, qu'ils s'engagent à montrer leur volonté d'apprendre le néerlandais. Comme il est exposé en B.18.2, il ne s'agit pas à cet égard d'une obligation de résultat, mais uniquement d'une obligation de moyen, à laquelle le locataire peut facilement satisfaire, de sorte qu'il ne serait pas possible de mettre fin au contrat de bail au seul motif que les intéressés ne connaissent pas ou ne parlent pas le néerlandais.

B.44.1. Le droit à la libre circulation des travailleurs et le principe de non-discrimination qui s'y attache n'interdisent pas aux autorités d'établir certaines conditions, notamment linguistiques, pour l'accès à certains droits liés au principe de libre circulation.

Selon la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, « les mesures nationales restrictives de l'exercice des libertés fondamentales garanties par le Traité ne peuvent être justifiées que si elles remplissent quatre conditions : s'appliquer de manière non discriminatoire, répondre à des raisons impérieuses d'intérêt général, être propres à garantir la réalisation de l'objectif qu'elles poursuivent et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour l'atteindre » (C.J.C.E., S. Haim, 4 juillet 2000, C-424/97, § 57). Il appartient en principe aux juridictions nationales de vérifier que ces conditions sont réunies, sans préjudice de leur possibilité d'interroger la Cour de justice quant à l'interprétation des dispositions de droit communautaire applicables (ibid., § 58).

B.44.2. Sans qu'il soit nécessaire d'examiner si la condition d'être prêt à apprendre le néerlandais constitue une mesure restrictive de l'exercice de la liberté de circulation, il suffit de constater en l'espèce que les dispositions en cause sont applicables à tous les locataires et candidats-locataires d'un logement social, quelle que soit leur nationalité, que pour les motifs exprimés en B.34.1 à B.34.4, elles poursuivent un objectif qui peut être considéré comme d'intérêt général, qu'elles sont propres à en garantir la réalisation et qu'elles sont, compte tenu de l'interprétation indiquée en B.35 qui doit leur être donnée par le Gouvernement flamand appelé à les mettre en oeuvre, proportionnées à cet objectif.

B.45. Il n'y a dès lors pas lieu de poser à la Cour de justice des Communautés européennes la question suggérée par le Gouvernement wallon.

B.46. Le moyen n'est pas fondé.

Par ces motifs, la Cour 1. Annule : - l'article 92, § 1er, alinéa 1er, 6°, du décret du 15 juillet 1997 contenant le Code flamand du Logement, modifié par l'article 6 du décret du 15 décembre 2006; - à l'avant-dernière phrase de l'article 92, § 1er, alinéa 1er, 3°, du même décret, les mots « à défaut d'une évaluation négative par le bailleur d'une habitation sociale par rapport à ses obligations, visées au § 3 » et la dernière phrase de la même disposition; 2. Rejette les recours pour le surplus sous réserve de l'interprétation mentionnée en B.35 et sous réserve que l'obligation « d'avoir la volonté d'apprendre le néerlandais » et les sanctions qui s'y attachent soient interprétées comme ne s'appliquant pas aux candidats-locataires et aux locataires de logements sociaux visés par le décret précité situés dans les communes de la périphérie ou de la frontière linguistique, et qui entendent bénéficier des facilités linguistiques.

Ainsi prononcé en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989, à l'audience publique du 10 juillet 2008.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président, M. Melchior.

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