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Arrêt
publié le 11 juillet 2012

Extrait de l'arrêt n° 40/2012 du 8 mars 2012 Numéro du rôle : 5162 En cause : les questions préjudicielles concernant l'article 3 de l'ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 27 avril 1995 relative aux services de taxis et aux servic La Cour constitutionnelle, composée des présidents R. Henneuse et M. Bossuyt, et des juges L. La(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 40/2012 du 8 mars 2012 Numéro du rôle : 5162 En cause : les questions préjudicielles concernant l'article 3 de l'ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 27 avril 1995 relative aux services de taxis et aux services de location de voitures avec chauffeur, posées par le Tribunal de première instance de Bruxelles.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents R. Henneuse et M. Bossuyt, et des juges L. Lavrysen, A. Alen, E. Derycke, J. Spreutels et P. Nihoul, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président R. Henneuse, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par jugement du 25 mai 2011 en cause de la SPRL « Taxis Fabbrimone » et autres contre la Région de Bruxelles-Capitale, en présence de la SA « Blue Cabs », dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 22 juin 2011, le Tribunal de première instance de Bruxelles a posé les questions préjudicielles suivantes : 1. « Interprété en ce sens que les taxis des exploitants disposant d'une autorisation délivrée en vertu de la réglementation flamande ou wallonne ne peuvent pas effectuer des courses dont le point de départ et le point d'arrivée se situent sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale lorsque leur véhicule s'y trouvent déjà, l'article 3 de l'ordonnance du 27 avril 1995 relative aux services de taxis et aux services de location de voitures avec chauffeur viole-t-il l'article 92bis, § 2, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, lequel impose un accord de coopération pour le règlement des questions relatives aux services de taxis qui s'étendent sur le territoire de plus d'une région ? »;2. « Interprété en ce sens qu'il empêche les taxis des exploitants dûment autorisés en Région flamande ou en Région wallonne d'effectuer des courses dont le point de départ et le point d'arrivée se situent sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale lorsque leur véhicule s'y trouvent déjà, l'article 3 de l'ordonnance du 27 avril 1995 relative aux services de taxis et aux services de location de voitures avec chauffeur viole-t-il l'article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles qui impose aux Régions d'exercer leurs compétences en matière économique dans le respect de la libre circulation des personnes, biens et services et capitaux et la liberté de commerce et d'industrie, ainsi que dans le respect du cadre normatif général de l'Union économique et de l'unité monétaire tel qu'il est établi par ou en vertu de la loi ? ». (...) III. En droit (...) B.1.1. L'article 3 de l'ordonnance du 27 avril 1995 relative aux services de taxis et aux services de location de voitures avec chauffeur dispose : « Nul ne peut, sans autorisation du Gouvernement, exploiter un service de taxis au moyen d'un ou de plusieurs véhicules au départ d'une voie publique ou de tout autre endroit non ouvert à la circulation publique, qui se situe sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale.

L'autorisation d'exploiter emporte celle de stationner sur n'importe quel point de stationnement réservé aux taxis et situé sur la voie publique, aux conditions déterminées par le Gouvernement ».

B.1.2. Il résulte de la motivation du jugement a quo que l'alinéa 2 de cette disposition n'est pas en cause.

B.2.1. Le Gouvernement wallon conteste la compétence de la Cour en faisant valoir qu'elle n'est pas compétente pour contrôler des dispositions de nature réglementaire. Or, l'interdiction évoquée par les questions préjudicielles découlerait, non pas de la disposition en cause, mais de dispositions réglementaires adoptées par le Gouvernement wallon et par le Gouvernement flamand qui imposent aux chauffeurs de taxis relevant d'un exploitant de taxi autorisé à exploiter un service de taxis sur le territoire de la Région wallonne ou sur celui de la Région flamande de retourner « à vide » sur le territoire de celle-ci après avoir effectué une course sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale.

Dans son mémoire en réponse, il conteste en outre la recevabilité des questions préjudicielles en faisant valoir qu'elles donnent de la disposition en cause une interprétation qui est fondée sur la rédaction qu'elle avait dans le projet de décret et qui est manifestement inexacte, le projet ayant ensuite été modifié.

B.2.2. Les objections soulevées par le Gouvernement wallon portent, l'une et l'autre, sur l'interprétation par le juge a quo de la disposition législative qu'il soumet au contrôle de la Cour.

Il n'appartient pas aux parties de contester une telle interprétation et, en règle, la Cour est tenue de la prendre en considération.

Les exceptions ne sont pas fondées.

B.2.3. Dans son mémoire en réponse, le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale conteste la recevabilité du mémoire des demandeurs devant le juge a quo en ce qu'il est introduit par deux d'entre eux dont l'intervention aurait été rejetée par le juge a quo.

B.2.4. L'article 87, § 1er, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle dispose : « Lorsque la Cour constitutionnelle statue, à titre préjudiciel, sur les questions visées à l'article 26, toute personne justifiant d'un intérêt dans la cause devant la juridiction qui ordonne le renvoi, peut adresser un mémoire à la Cour dans les trente jours de la publication prescrite par l'article 74. Elle est, de ce fait, réputée partie au litige ».

La circonstance que l'intervention des intéressés devant le juge a quo n'aurait pas été admise n'est pas de nature à leur interdire d'introduire un mémoire devant la Cour, cette faculté n'étant subordonnée qu'à la condition de leur intérêt. En l'espèce, leur intérêt peut être déduit de ce que la situation dans laquelle ils se trouvent est analogue à celle des demandeurs devant le juge a quo.

Quant à la première question préjudicielle B.3.1. Le juge a quo demande à la Cour si la disposition en cause viole l'article 92bis, § 2, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles si elle est interprétée comme ne permettant pas aux exploitants de taxis disposant d'une autorisation délivrée en vertu des réglementations régionales flamande ou wallonne d'effectuer des courses dont le point de départ et le point d'arrivée se situent sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale lorsque le véhicule s'y trouve déjà, alors pourtant qu'aucun accord de coopération préalable n'a été conclu entre les régions.

B.3.2. Le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale soutient que la question préjudicielle doit, compte tenu de l'objet du litige soumis au juge a quo, être reformulée pour indiquer qu'il s'agit non pas d'effectuer des courses sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale mais d'y exploiter, en fait, un service de taxis sans y être autorisé par le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale.

B.3.3. Il n'appartient pas aux parties de reformuler les questions préjudicielles que le juge adresse à la Cour. Par ailleurs, il apparaît, d'une part, du libellé de la question qu'en se référant à l'article 92bis, § 2, le juge a quo vise les « services de taxis » auxquels cette disposition se réfère et, d'autre part, de la motivation du jugement a quo que le litige porte sur l'absence d'autorisation d'exploitation délivrée par le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale.

B.4. La loi spéciale du 8 août 1988 a introduit dans la loi spéciale du 8 août 1980 un article 92bis dont le paragraphe 2 dispose que les régions « concluent en tout cas des accords de coopération pour le règlement des questions relatives : [...] c) aux services de transport en commun urbains et vicinaux et services de taxis qui s'étendent sur le territoire de plus d'une Région ».

B.5. Dès lors que l'absence de coopération dans une matière pour laquelle le législateur spécial prévoit une coopération obligatoire n'est pas compatible avec le principe de proportionnalité propre à tout exercice de compétence, la Cour peut vérifier le respect de l'obligation de conclure des accords de coopération, contenue à l'article 92bis de la loi spéciale du 8 août 1980.

B.6.1. La coopération rendue obligatoire par l'article 92bis, § 2, c), a été justifiée comme suit dans les travaux préparatoires de la loi spéciale du 8 août 1988 : « Le projet fixe le cadre légal permettant une coopération entre les autorités nationales, les Communautés et les Régions, y compris le maintien éventuel, la création et la gestion conjointe de services et d'institutions.

Vu la nature des matières, une collaboration s'impose en tout cas dans le domaine des voies transfrontalières, des voies d'eau, des forêts, des transports urbains et vicinaux et des normes communes » (Doc. parl., Chambre, S.E. 1988, n° 516/1, p. 30).

B.6.2. La section de législation du Conseil d'Etat a considéré, dans son avis sur l'avant-projet d'ordonnance « modifiant et complétant la loi du 27 décembre 1974 relative aux services de taxis », que : « en tant que l'ordonnance en projet se borne à organiser le transport rémunéré de personnes par taxis, au départ d'un point de stationnement sur la voie publique ou de tout autre endroit non ouvert à la circulation publique, qui se situent sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale, le texte ne règle manifestement pas des ' services de taxis qui s'étendent au territoire de plus d'une Région ' » (avis L.21.739/9 du 23 décembre 1992).

La section de législation du Conseil d'Etat a, en effet, précisé que l'article 92bis, § 2, c), de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles exige seulement un accord de coopération pour le règlement des questions relatives, non pas aux courses, mais aux services de taxis qui s'étendent sur le territoire de plus d'une région. Cette disposition s'oppose ainsi à ce qu'une autorité régionale prenne unilatéralement des dispositions ayant spécifiquement pour objet ou pour effet de régler des questions relatives à l'exercice, sur le territoire d'une région, des activités de services de taxis exploités au départ d'endroits qui ne sont pas situés sur le territoire de cette région (Doc. parl., Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, 1994-1995, n° 368/1, p. 44).

B.7.1. Il ressort du texte de l'article 3 de l'ordonnance en cause qu'une autorisation est requise pour l'exploitation de services de taxis dont le point de départ pour l'usager est situé sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale.

Cette disposition n'empêche cependant pas que les véhicules relevant des services de taxis disposant d'une autorisation d'exploitation délivrée sur la base de la réglementation flamande ou de la réglementation wallonne puissent poursuivre leurs courses sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale ou y pénétrer lorsqu'ils y sont appelés, sans qu'une autorisation de cette Région soit requise à cette fin (Doc. parl., Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, 1994-1995, n° A-368/1, pp. 5 et 6). C'est au juge qu'il appartient de vérifier si, ce faisant, les exploitants restent dans les limites ainsi imparties ou si, en s'en écartant pour exploiter un service de taxi sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale, ils enfreignent les dispositions de l'ordonnance en cause.

B.7.2. Il convient par ailleurs de considérer que le critère utilisé par les auteurs de l'ordonnance, à savoir le point de départ du service de taxi, constitue un critère de rattachement pertinent, permettant de localiser la matière réglée par cette ordonnance dans la sphère de compétence territoriale de la Région de Bruxelles-Capitale.

B.7.3. La première question préjudicielle appelle une réponse négative.

Quant à la seconde question préjudicielle B.8.1. Le juge a quo demande si la disposition en cause viole les principes de la libre circulation des personnes, biens et services et capitaux, la liberté du commerce et de l'industrie et le principe de l'union économique et monétaire. Il se réfère ainsi à l'article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, qui est applicable à la Région de Bruxelles-Capitale en vertu de l'article 4 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises.

B.8.2. Le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale demande la reformulation de la question préjudicielle pour les raisons indiquées en B.3.2. Il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande, pour les motifs indiqués en B.3.3.

B.8.3. Le Gouvernement wallon estime que la Cour n'est pas compétente pour connaître des griefs tirés de la violation de règles du droit européen adressés par les demandeurs devant le juge a quo à d'autres dispositions de l'ordonnance en cause que celle visée par la question préjudicielle.

Il est vrai que ni les parties, ni la Cour ne peuvent étendre la question préjudicielle à des dispositions qui ne sont pas visées par celle-ci. Cependant, tant les griefs avancés par les parties que la motivation de l'arrêt peuvent conduire à prendre en compte d'autres dispositions que celles visées par la question préjudicielle pour procéder à l'examen de ces dernières.

B.8.4. Pour les motifs indiqués en B.7.1 et B.7.2, la disposition en cause ne porte pas atteinte aux règles énoncées en B.8.1. Il en est d'autant plus ainsi que contrairement aux services de location de voitures avec chauffeur, les services de taxis sont des services d'utilité publique qu'il convient d'intégrer dans des mesures portant sur la régulation et la coordination des transports.

B.9.1. Dans leur mémoire, les demandeurs devant le juge a quo souhaitent que, si elle répond négativement à la question préjudicielle, la Cour interroge à titre préjudiciel la Cour de justice de l'Union européenne sur l'interprétation des articles 49 et 56 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).

B.9.2. L'article 267 du TFUE dispose : « La Cour de justice de l'Union européenne est compétente pour statuer, à titre préjudiciel : a) sur l'interprétation des traités, b) sur la validité et l'interprétation des actes pris par les institutions, organes ou organismes de l'Union. Lorsqu'une telle question est soulevée devant une juridiction d'un des Etats membres, cette juridiction peut, si elle estime qu'une décision sur ce point est nécessaire pour rendre son jugement, demander à la Cour de statuer sur cette question.

Lorsqu'une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles d'un recours juridictionnel de droit interne, cette juridiction est tenue de saisir la Cour.

Si une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale concernant une personne détenue, la Cour statue dans les plus brefs délais ».

B.9.3. L'obligation inscrite au troisième alinéa de cette disposition ne s'applique pas, dans les cas où n'est en cause que l'interprétation d'une norme de l'Union européenne, si cette juridiction nationale « [a] constaté que la question soulevée n'est pas pertinente ou que la disposition communautaire en cause a déjà fait l'objet d'une interprétation de la part de la Cour ou que l'application correcte du droit communautaire s'impose avec une telle évidence qu'elle ne laisse place à aucun doute raisonnable » (CJCE, 6 octobre 1982, C-283/81, CILFIT, point 21).

B.10.1. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que des restrictions à la libre prestation des services garantie par l'article 56 du TFUE, qui découlent de mesures indistinctement applicables aux nationaux et aux ressortissants de l'Union européenne, peuvent être acceptées si elles sont justifiées par des raisons impérieuses d'intérêt général, si elles sont propres à garantir la réalisation de l'objectif qu'elles visent et si elles ne vont pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l'atteindre. Il est requis, en outre, que les restrictions fondées sur de tels motifs et sur la nécessité de prévenir les troubles à l'ordre social soient propres à garantir la réalisation desdits objectifs (CJCE, 21 octobre 1999, C-67/98, Zenatti; 24 mars 1992, C-275/92, Schindler; 21 septembre 1999, C-124/97, Läärä; 11 septembre 2003, C-6/01, Anomar).

B.10.2. Les dispositions du TFUE sont cependant de nature à tempérer ces exigences dès lors que l'article 58 soustrait les services de transport aux dispositions garantissant la libre prestation des services et que les articles 92 et 93 dudit Traité prévoient : « Article 92.

Jusqu'à l'établissement des dispositions visées à l'article 91, paragraphe 1, et sauf adoption à l'unanimité par le Conseil d'une mesure accordant une dérogation, aucun des Etats membres ne peut rendre moins favorables, dans leur effet direct ou indirect à l'égard des transporteurs des autres Etats membres par rapport aux transporteurs nationaux, les dispositions diverses régissant la matière au 1er janvier 1958 ou, pour les Etats adhérents, à la date de leur adhésion.

Article 93.

Sont compatibles avec les traités les aides qui répondent aux besoins de la coordination des transports ou qui correspondent au remboursement de certaines servitudes inhérentes à la notion de service public ».

B.10.3. En ce qui concerne la liberté d'établissement, l'article 49 du TFUE s'oppose à toute entrave discriminatoire en raison de la nationalité ou du siège de l'entreprise au libre exercice de cette liberté sur le territoire d'un autre Etat membre, sauf pour ce dernier à démontrer que cette entrave poursuit de manière pertinente et proportionnée un objectif lié à l'ordre public, la sécurité publique ou la santé publique (article 52 du TFUE).

Ce même article prohibe également toute législation indistinctement applicable dans la mesure où elle est susceptible de gêner ou de rendre moins attrayant l'exercice de la liberté d'établissement, sauf si cette mesure poursuit, de manière pertinente et proportionnée, un objectif légitime compatible avec le Traité et se justifie par des raisons impérieuses d'intérêt général (CJCE, 31 mars 1993, C-19/92, Kraus, point 32; CJCE, 30 novembre 1995, C-55/94, Gebhard, point 37;

CJCE, 6 novembre 2003, précité, point 65).

Pour être jugées compatibles avec l'article 49 du TFUE, les mesures restrictives fondées sur de tels motifs doivent encore être propres à garantir la réalisation des objectifs visés et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour les atteindre (CJCE, 21 octobre 1999, précité, point 31; CJUE, 8 juillet 2010, C-447/08 et C-448/08, affaires jointes Otto Sjöberg et Anders Gerdin, point 36).

Il apparaît par ailleurs de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que cette liberté ne peut être invoquée sur la seule base de la nationalité d'un justiciable, lorsque celui-ci réside dans l'Etat d'accueil depuis un temps suffisant (CJCE, 16 décembre 2004, C-293-03, Gregorio My). Rien n'indique, en l'espèce, que tel ne serait pas le cas.

B.11.1. Compte tenu de ces différentes exigences, le législateur ordonnanciel a pu considérer que des mesures visant à faire face à l'augmentation croissante du trafic automobile, à organiser un « moyen de transport complémentaire disposant d'une place particulière entre le transport en commun et l'utilisation de la voiture individuelle mais intégré dans le cadre des transports organiques ou réglementés par l'Etat en raison de l'utilité publique du service rendu », à assurer « le confort et la disponibilité des véhicules, le professionnalisme des chauffeurs [et] la surveillance des exploitations » et à apporter une solution au problème du stationnement (Doc. parl., C.R.B.C., 1994-1995, n° A-368/1, pp. 1 et 2) pouvaient être compatibles avec des objectifs de régulation et de coordination des transports tels que ceux mentionnés en B.10.1 et B.10.3 et être justifiées par des raisons impérieuses d'intérêt général. En prévoyant que le Gouvernement fixera le nombre maximal de véhicules pour lesquels des autorisations d'exploiter peuvent être délivrées en fonction des besoins (objet de la critique des demandeurs devant le juge a quo tel qu'il apparaît du libellé de la question préjudicielle évoquée en B.9.1), le législateur ordonnanciel n'a pas pris une mesure excessive compte tenu de ce qu'il s'agit d'une habilitation et de ce que, par conséquent, c'est la conformité de la mesure d'exécution aux dispositions invoquées par les demandeurs devant le juge a quo qui doit être contrôlée par le juge compétent.

B.11.2. Il résulte de ce qui précède que la mesure en cause est raisonnablement justifiée au regard des exigences mentionnées en B.10.1 et B.10.2 et qu'aucune atteinte n'est portée aux droits que les intéressés tirent des articles 49 et 56 du TFUE. Dès lors, la Cour de justice de l'Union européenne ne doit pas être interrogée.

B.12. La seconde question préjudicielle appelle une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 3, alinéa 1er, de l'ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 27 avril 1995 relative aux services de taxis et aux services de location de voitures avec chauffeur ne viole ni l'article 92bis, § 2, c), ni l'article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, qui sont applicables à la Région de Bruxelles-Capitale en vertu des articles 4 et 42 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises.

Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, à l'audience publique du 8 mars 2012.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président, R. Henneuse.

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