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Arrêt
publié le 14 août 2012

Extrait de l'arrêt n° 54/2012 du 19 avril 2012 Numéro du rôle : 5153 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 38, § 3, du décret de la Région wallonne du 12 avril 2001 relatif à l'organisation du marché régional de l'éle La Cour constitutionnelle, composée des présidents R. Henneuse et M. Bossuyt, et des juges E. De(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 54/2012 du 19 avril 2012 Numéro du rôle : 5153 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 38, § 3, du décret de la Région wallonne du 12 avril 2001 relatif à l'organisation du marché régional de l'électricité, tel qu'il a été modifié par l'article 13 du décret du 4 octobre 2007, posée par le Conseil d'Etat.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents R. Henneuse et M. Bossuyt, et des juges E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, J. Spreutels, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul et F. Daoût, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président R. Henneuse, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par arrêt n° 213.404 du 24 mai 2011 en cause de la SA « I.B.V. & Cie » (Industrie du bois de Vielsalm & Cie) contre la Région wallonne, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 1er juin 2011, le Conseil d'Etat a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 38, § 3, du décret wallon du 12 avril 2001 relatif au marché régional de l'électricité, tel que modifié par l'article 13 du décret du 4 octobre 2007 modifiant le décret du 12 avril 2001 relatif au marché régional de l'électricité, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution en instaurant une différence de traitement entre des installations valorisant principalement de la biomasse dès lors qu'il exclut du bénéfice du mécanisme de soutien des doubles certificats verts les installations de cogénération biomasse valorisant du bois ou des déchets de bois alors qu'il y inclut les installations de cogénération biomasse valorisant tous autres types de déchets ? ». (...) III. En droit (...) B.1.1. Tel qu'il a été remplacé par l'article 13 du décret du 4 octobre 2007, l'article 38 du décret de la Région wallonne du 12 avril 2001 « relatif à l'organisation du marché régional de l'électricité » dispose : « § 1er. Après avis de la CWaPE, le Gouvernement détermine les conditions d'attribution et fixe les modalités et la procédure d'octroi des certificats verts attribués à l'électricité verte produite en Région wallonne dans le respect des dispositions suivantes. § 2. Un certificat vert sera attribué pour un nombre de kWh produits correspondant à 1 MWh divisé par le taux d'économie de dioxyde de carbone.

Le taux d'économie de dioxyde de carbone est déterminé en divisant le gain en dioxyde de carbone réalisé par la filière envisagée par les émissions de dioxyde de carbone de la filière électrique classique dont les émissions sont définies et publiées annuellement par la CWaPE. Ce taux d'économie de dioxyde de carbone est limité à 1 pour la production générée par installation au-delà de la puissance de 5 MW. En dessous de ce seuil, il est plafonné à 2. § 3. Toutefois, lorsqu'une installation valorisant principalement de la biomasse à l'exception du bois, issue d'activités industrielles développées sur le lieu de l'installation de production, met en oeuvre un processus particulièrement innovant et s'inscrit dans une perspective de développement durable, le Gouvernement peut, après avis de la CWaPE sur le caractère particulièrement innovant du processus utilisé, décider de limiter à 2 le taux d'économie de dioxyde de carbone pour l'ensemble de la production de l'installation résultant de la somme des puissances développées sur le même site de production, dans une limite inférieure à 20 MW. § 4. Les émissions de dioxyde de carbone envisagées aux paragraphes 2 et 3 sont celles produites par l'ensemble du cycle de production de l'électricité verte, englobant la production et le transport du combustible, les émissions lors de la combustion éventuelle et, le cas échéant, le traitement des déchets. Dans une installation hybride, il est tenu compte de l'ensemble des émissions de l'installation.

Les différents coefficients d'émission de dioxyde de carbone de chaque filière considérée sont approuvés par la CWaPE. § 5. Après avis de la CWaPE, le Gouvernement peut diminuer le nombre de certificats verts octroyés conformément aux paragraphes 1er et 2 en fonction de l'âge de l'installation de production d'électricité verte, de sa rentabilité et de la filière de production. § 6. Par dérogation au paragraphe 2, le Gouvernement peut, après avis de la CWaPE, appliquer un coefficient multiplicateur, le cas échéant dégressif en fonction du temps, au nombre de certificats verts octroyés conformément aux paragraphes 1er et 2 pour l'électricité produite à partir de panneaux solaires photovoltaïques, selon les modalités qu'il détermine. § 7. La CWaPE attribue les certificats verts aux producteurs d'électricité verte. Ces certificats sont transmissibles. § 8. En ce qui concerne les installations de production hydroélectriques, de cogénération de qualité ou de production d'électricité à partir de biomasse, les certificats verts sont attribués à l'électricité produite par ces installations jusqu'à une puissance électrique de 20 MW ».

B.1.2. Cet article fait partie du chapitre X du décret, intitulé « Promotion des sources d'énergie renouvelables et de la cogénération de qualité ».

B.1.3. Le système des certificats verts mis en oeuvre par le décret en cause est destiné à encourager l'utilisation de sources d'énergie renouvelables ainsi que le processus de cogénération. Il fonctionne selon les règles d'un marché. Un certificat vert est un titre transmissible octroyé aux producteurs d'électricité verte, définie par l'article 2, 11°, du décret comme « l'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables ou de cogénération de qualité dont la filière de production génère un taux minimum de 10 % d'économie de dioxyde de carbone par rapport aux émissions de dioxyde de carbone, définies et publiées annuellement par la CWaPE, d'une production classique dans des installations modernes de référence visées à l'article 2, 7° ».

B.1.4. Après quelques années, le Gouvernement wallon a constaté que « certains projets particuliers, qui sont porteurs pour la filière des énergies renouvelables en Région wallonne et font appel à des technologies innovantes en la matière, pourraient nécessiter un soutien supplémentaire » (Doc. parl., Parlement wallon, 2006-2007, n° 639/1, p. 3). L'article 38, § 3, du décret précité « vise à permettre au Gouvernement d'encourager particulièrement les projets importants, mettant en oeuvre une technologie de pointe et qui s'inscrivent dans une perspective de développement durable » (ibid., p. 10), en accordant à ces projets un nombre plus élevé de certificats verts.

B.2. L'article 57 du décret du 17 juillet 2008 « modifiant le décret du 12 avril 2001 relatif à l'organisation du marché régional de l'électricité » dispose : « L'article 38, § 3, du même décret [du 12 avril 2001] est interprété en ce sens que l'exclusion des installations valorisant le bois du bénéfice du régime qu'il prévoit, s'entend des installations valorisant toute matière ligno-cellulosique issue de l'arbre, de tout feuillus et de tout résineux sans exception (y compris les taillis à courte ou très courte rotation), avant et/ou après tout type de transformation ».

Par son arrêt n° 180/2009 du 12 novembre 2009, la Cour a jugé que l'article 57 précité donnait « au terme ' bois ' le sens que celui-ci pouvait raisonnablement recevoir dès l'adoption de l'article 38, § 3, du décret électricité et que le législateur décrétal wallon a voulu lui donner. L'effet rétroactif de la disposition attaquée, tel qu'il est dénoncé par la partie requérante, est en conséquence justifié par son caractère interprétatif » (B.9).

B.3. Le Conseil d'Etat interroge la Cour sur la compatibilité avec les articles 10 et 11 de la Constitution de l'article 38, § 3, du décret du 12 avril 2001 précité en ce qu'il exclut de son champ d'application les installations de cogénération valorisant du bois ou des déchets de bois, à la différence des installations de cogénération valorisant tout autre type de déchets.

La disposition en cause a donc pour conséquence que la société requérante devant le Conseil d'Etat ne peut bénéficier du mécanisme des « doubles certificats verts » pour la production d'électricité qu'elle génère au-delà d'une puissance de 5 MW, tout en étant en mesure de bénéficier, pour cette production, du mécanisme de soutien prévu à l'article 38, § 2, du décret du 12 avril 2001 (mécanisme des « simples certificats verts »). Inversement, les installations de cogénération valorisant essentiellement de la biomasse, à l'exclusion toutefois du bois ou des déchets de bois, sont en mesure de se prévaloir du mécanisme des « doubles certificats verts » pour leur production d'électricité jusqu'à une limite de 20 MW, pour autant qu'elles satisfassent aux autres conditions prévues par la disposition en cause.

B.4.1. Au cours des travaux préparatoires, la différence de traitement contenue dans la disposition en cause fut justifiée de la manière suivante : « En vertu du décret du 12 avril 2001, le taux d'économie de dioxyde de carbone est limité à 1 pour les unités de production dans leur production supérieure à 5 MW; en dessous de ce seuil, il est plafonné à 2. En d'autres termes, une installation de production d'électricité verte ne peut se voir octroyer qu'un seul certificat vert pour la quantité d'électricité produite supérieure à 5 MW. Toutefois, certains projets particuliers, qui sont porteurs pour la filière des énergies renouvelables en Région wallonne et font appel à des technologies innovantes en la matière, pourraient nécessiter un soutien supplémentaire. Dans ce cadre, le projet de décret propose d'adapter la limite actuellement fixée des 5 MW et de la porter à 20 MW de puissance installée.

Pour éviter les effets pervers d'une telle mesure sur la filière industrielle du bois, déjà concurrencée par la filière bois-énergie, il est proposé de ne réserver cet avantage qu'à la biomasse hors bois.

Ce n'est pas un cas isolé, puisque les mécanismes de soutien à la production d'électricité à partir de sources d'énergie renouvelables, développés en Europe, sont très souvent différenciés selon les filières » (Doc. parl., Parlement wallon, 2006-2007, n° 639/1, p. 3).

B.4.2. Dans son avis du 5 avril 2007 « concernant le projet de décret modifiant le décret du 12 avril 2001 relatif au marché de l'électricité (volet électricité verte) », la Commission wallonne pour l'énergie (ci-après : la CWaPE) relève, à propos de l'exclusion des installations de cogénération valorisant principalement du bois du mécanisme des « doubles certificats verts » : « Sur les 4 projets identifiés par la CWaPE comme étant susceptibles d'être concernés par la mesure (et, pour certains d'entre eux, dont la concrétisation dépend strictement de la mise en place de cette mesure), 3 d'entre eux sont concernés par le bois et se retrouveraient donc exclus de la mesure si cette condition était requise, et cela alors que ces 3 projets prévoient d'utiliser de la biomasse issue du site. La note au Gouvernement motive la condition ' à l'exception du bois par : ' Pour éviter les effets pervers d'une telle mesure sur la filière industrielle utilisant le bois comme matériau, déjà en concurrence avec la filière bois-énergie, il est proposé en outre de n'attribuer un deuxième certificat vert jusqu'à 20 MW qu'à la biomasse provenant du site et hors bois-énergie, pour des projets innovants.

La CWaPE s'interroge sur ces effets pervers étant donné que tant les installations existantes de cogénération biomasse d'une certaine puissance à partir de bois, que celles concernées par les projets susmentionnés, sont toutes aux mains des entreprises de la filière industrielle utilisant le bois comme matière première (papetiers, panneautiers, et scieries). Des tensions sur le marché local du bois peuvent apparaître compte tenu d'une nouvelle concurrence entre les utilisateurs du matériau à des fins énergétiques et les utilisateurs du bois comme constituant d'un produit fini, mais la CWaPE est d'avis que l'évolution des prix du marché international du bois ne dépend pas des décisions prises dans un sens ou dans l'autre au niveau de la Région wallonne.

La CWaPE est également d'avis que, outre le problème évoqué pour la filière bois, des problèmes de concurrence peuvent, contrairement aux autres filières renouvelables, telles que le solaire, l'éolien, et l'hydraulique, toujours survenir au niveau de la filière biomasse, comme, par exemple, dans la biomasse agricole : l'utilisation de froment, betteraves, maïs, colza, palme, etc. à des fins énergétiques peut très bien avoir, à court ou moyen terme, des effets qui pourraient être qualifiés de pervers par rapport aux utilisations de ces ressources à des fins alimentaires. Qu'en est-il en effet de l'éventualité de devoir importer de la biomasse agricole à des fins alimentaires à la suite de l'affectation d'importantes quantités de biomasse agricole à des fins énergétiques ? Eu égard à la possible concurrence entre l'utilisation de biomasse à des fins énergétiques et d'autres utilisations, la CWaPE est d'avis que les problèmes de modifications des conditions de concurrence éventuellement générés par l'augmentation du parc d'installations SER et/ou COGEN, ne devraient pas être résolus par un accès différencié au système des certificats verts, accès différencié qui pourrait alors être qualifié de discriminatoire » (Doc. parl., Parlement wallon, 2006-2007, n° 639/1, p. 53).

B.4.3. Dans une note du 7 juin 2007, à laquelle le Gouvernement wallon fait allusion, le ministre en charge de l'Energie a exposé les raisons pour lesquelles le Gouvernement a estimé ne pas devoir suivre l'avis de la CWaPE. L'exclusion des installations de cogénération valorisant principalement du bois ou des déchets de bois est justifiée de la manière suivante : « - Force est de constater que le système actuel est suffisant pour assurer le développement de nombreux projets de cogénération biomasse à partir du bois, ce qui n'est pas le cas actuellement pour les projets innovants tels que Biowanze; - La discrimination est inhérente au système des certificats verts.

Ainsi, le fait de limiter la cogénération ou les centrales hydrauliques à 20 MW peut être vu comme discriminant. Il en va de même dans toute l'Europe : la France, l'Allemagne et bien d'autres pays accordent des soutiens différents selon la filière, le combustible ou encore la puissance installée. D'ailleurs, le décret du 12 avril 2001 prévoit déjà qu'un soutien particulier complémentaire aux certificats verts peut être accordé différemment selon les filières (voir article 40). - En outre, ouvrir l'opportunité aux projets bois de bénéficier de cette mesure ne sera pas sans impact sur la quantité de certificats générée et sur l'équilibre du marché et l'éventuelle nécessité d'augmenter les quotas qui résulterait d'une telle décision. Le Gouvernement s'est certes laissé la possibilité de modifier les quotas en 2009 mais il convient avant de prendre des mesures qui résultent en accroissements potentiellement significatifs des quotas d'en chiffrer le nombre ainsi que l'impact sur les consommateurs ».

B.5. En adoptant la disposition en cause, le législateur décrétal a entendu transposer partiellement la directive 2004/8/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 février 2004 « concernant la promotion de la cogénération sur la base de la demande de chaleur utile dans le marché intérieur de l'énergie et modifiant la directive 92/42/CEE » ainsi que la directive 2001/77/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 septembre 2001 « relative à la promotion de l'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables sur le marché intérieur de l'électricité » (Doc. parl., Parlement wallon, 2006-2007, n° 639/1, p.20).

B.6.1. Les considérants 26 et 31 de la directive 2004/8/CE disposent : « (26) Les Etats membres mettent en oeuvre différents mécanismes de soutien de la cogénération au niveau national, notamment des aides à l'investissement, des exonérations ou des réductions fiscales, des certificats verts et des régimes de soutien direct des prix. Un moyen important pour atteindre l'objectif de la présente directive est de garantir le bon fonctionnement de ces mécanismes, jusqu'à ce qu'un cadre communautaire harmonisé soit mis en oeuvre, de façon à conserver la confiance des investisseurs. La Commission a l'intention de surveiller la situation et de faire rapport sur l'expérience acquise dans l'application des régimes nationaux d'aide ». « (31) L'efficacité et la viabilité globales de la cogénération sont fonction de nombreux facteurs tels que la technologie utilisée, les types de combustible, les courbes de charge, la taille de l'unité ainsi que les caractéristiques de la chaleur. Pour des raisons pratiques et compte tenu du fait que différentes températures sont requises pour la chaleur produite en fonction des utilisations, et que le rendement de la cogénération varie selon cette température et selon d'autres facteurs, on pourrait distinguer les types de cogénération tels que ' cogénération industrielle ', ' cogénération de chauffage ' et ' cogénération agricole ' ».

B.6.2. L'article 1er de la directive 2004/8/CE précitée dispose : « L'objet de la présente directive est d'accroître l'efficacité énergétique et d'améliorer la sécurité d'approvisionnement en créant un cadre pour la promotion et le développement de la cogénération à haut rendement de chaleur et d'électricité fondée sur la demande de chaleur utile et d'économies d'énergie primaire dans le marché intérieur de l'énergie, compte tenu des particularités nationales, notamment en ce qui concerne les conditions climatiques et économiques ».

B.6.3. L'article 2 de la même directive dispose : « La présente directive s'applique à la cogénération telle que définie à l'article 3 et aux technologies de cogénération énumérées à l'annexe Ire ».

B.6.4. L'article 3 de la même directive dispose : « Aux fins de la présente directive, on entend par : a) ' cogénération ', la production simultanée, dans un seul processus, d'énergie thermique et électrique et/ou mécanique;b) ' chaleur utile ', la chaleur produite dans un processus de cogénération en vue de satisfaire une demande économiquement justifiable de production de chaleur ou de froid; [...] i) ' cogénération à haut rendement ', la cogénération satisfaisant aux critères décrits à l'annexe III; [...] Les définitions des directives 2003/54/CE et 2001/77/CE s'appliquent également ».

B.6.5. L'annexe III à la même directive dispose : « Les valeurs utilisées pour le calcul du rendement de la cogénération et des économies d'énergie primaire sont déterminées sur la base de l'exploitation attendue ou effective de l'unité dans des conditions normales d'utilisation. a) Cogénération à haut rendement Aux fins de la présente directive, la cogénération à haut rendement doit satisfaire aux critères suivants : - la production par cogénération des unités de cogénération doit assurer des économies d'énergie primaire, calculées conformément au point b), d'au moins 10 % par rapport aux données de référence de la production séparée de chaleur et d'électricité, - la production des petites unités de cogénération et des unités de microcogénération assurant des économies d'énergie primaire peut relever de la cogénération à haut rendement. [...] ».

B.6.6. L'article 7 de la même directive dispose : « 1. Les Etats membres veillent à ce que le soutien à la cogénération - unités existantes et futures - soit basé sur la demande de chaleur utile et les économies d'énergie primaire, à la lumière des opportunités qui s'offrent pour la réduction de la demande énergétique dans le cadre d'autres mesures économiquement réalisables ou bénéfiques pour l'environnement, telles que d'autres mesures d'efficacité énergétique. 2. Sans préjudice des articles 87 et 88 du traité, la Commission évalue l'application des mécanismes de soutien mis en oeuvre dans les Etats membres et permettant à un cogénérateur, conformément à des règlements édictés par les pouvoirs publics, de bénéficier d'une aide directe ou indirecte, et qui pourraient avoir pour effet de restreindre les échanges. La Commission examine si ces mécanismes contribuent à atteindre les objectifs définis à l'article 6 et à l'article 174, paragraphe 1er, du traité. 3. La Commission, dans le rapport visé à l'article 11, présente une analyse bien documentée sur l'expérience acquise dans l'application et la coexistence des différents mécanismes de soutien visés au paragraphe 2 du présent article.Le rapport évalue le succès, notamment la rentabilité, des systèmes de soutien aux fins de la promotion de l'utilisation de la cogénération à haut rendement en conformité avec les potentiels nationaux visés à l'article 6. Le rapport examine également la contribution des régimes de soutien à la création de conditions stables pour les investissements dans la cogénération ».

B.7.1. Les considérants 14 à 16 de la directive 2001/77/CE « relative à la promotion de l'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables sur le marché intérieur de l'électricité » précitée énonçaient : « (14) Les Etats membres appliquent différents mécanismes de soutien des sources d'énergie renouvelables au niveau national, notamment des certificats verts, une aide à l'investissement, des exonérations ou réductions fiscales, des remboursements d'impôt ou des régimes de soutien direct des prix. Un moyen important pour réaliser l'objectif de la présente directive est de garantir le bon fonctionnement de ces mécanismes, jusqu'à ce qu'un cadre communautaire soit mis en oeuvre, de façon à conserver la confiance des investisseurs. (15) Il est prématuré d'arrêter un cadre communautaire concernant les régimes de soutien, étant donné l'expérience limitée des régimes nationaux et la part actuellement assez faible de l'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables dont le prix est soutenu dans la Communauté.(16) Après une période transitoire suffisante, il est toutefois nécessaire d'adapter les régimes de soutien aux principes du marché intérieur de l'électricité en expansion.Il convient, par conséquent, que la Commission suive l'évolution de la situation et présente un rapport sur l'expérience acquise dans l'application des régimes nationaux. A la lumière des conclusions dudit rapport, la Commission devrait formuler, le cas échéant, une proposition de cadre communautaire relatif aux régimes de soutien de l'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables. Cette proposition devrait contribuer à la réalisation des objectifs indicatifs nationaux et être compatible avec les principes du marché intérieur de l'électricité; elle devrait tenir compte des caractéristiques des différentes sources d'énergie renouvelables ainsi que des différentes technologies et des différences géographiques; elle devrait également promouvoir l'utilisation des sources d'énergie renouvelables et être à la fois simple et le plus efficace possible, notamment en termes de coût, prévoir des périodes transitoires suffisantes d'une durée d'au moins sept ans, conserver la confiance des investisseurs et éviter les coûts échoués. Ce cadre permettrait de rendre compétitive l'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables par rapport à l'électricité produite à partir de sources d'énergie non renouvelables et de limiter les prix à la consommation, tout en réduisant, à moyen terme, les aides publiques devant être fournies ».

B.7.2. L'article 2 de la même directive disposait : « Aux fins de la présente directive, on entend par : a) ' sources d'énergie renouvelables ' : les sources d'énergie non fossiles renouvelables (énergie éolienne, solaire, géothermique, houlomotrice, marémotrice et hydroélectrique, biomasse, gaz de décharge, gaz des stations d'épuration d'eaux usées et biogaz);b) ' biomasse ' : la fraction biodégradable des produits, déchets et résidus provenant de l'agriculture (comprenant les substances végétales et animales), de la sylviculture et des industries connexes, ainsi que la fraction biodégradable des déchets industriels et municipaux; [...] ».

B.7.3. L'article 4 de la même directive disposait : « 1. Sans préjudice des articles 87 et 88 du traité, la Commission évalue l'application des mécanismes mis en oeuvre dans les Etats membres par lesquels un producteur d'électricité bénéficie, sur la base d'une réglementation édictée par les autorités publiques, d'aides directes ou indirectes, et qui pourraient avoir pour effet de limiter les échanges, en tenant compte du fait que ces mécanismes contribuent à la réalisation des objectifs visés aux articles 6 et 174 du traité. 2. La Commission présente, au plus tard le 27 octobre 2005, un rapport bien documenté sur l'expérience acquise concernant l'application et la coexistence des différents mécanismes visés au paragraphe 1er.Ce rapport évalue le succès, y compris le rapport coût-efficacité, des régimes d'aide visés au paragraphe 1er en ce qui concerne la promotion de la consommation d'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables, dans le respect des objectifs indicatifs nationaux visés à l'article 3, paragraphe 2. Ce rapport est accompagné, le cas échéant, d'une proposition de cadre communautaire relatif aux régimes de soutien de l'électricité produite à partir de sources renouvelables.

Tout cadre proposé devrait : a) contribuer à la réalisation des objectifs indicatifs nationaux;b) être compatible avec les principes du marché intérieur de l'électricité;c) tenir compte des caractéristiques des différentes sources d'énergie renouvelables ainsi que des différentes technologies, et des différences géographiques;d) permettre une réelle promotion de l'utilisation des sources d'énergie renouvelables et être à la fois simple et le plus efficace possible, notamment en termes de coût;e) prévoir des périodes transitoires suffisantes pour les régimes d'aide nationaux d'une durée d'au moins sept ans et conserver la confiance des investisseurs ». B.7.4. Les articles 2 et 4 de la directive 2001/77/CE ont été supprimés à compter du 1er avril 2010 en vertu de l'article 26, paragraphe 1, de la directive 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 « relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables et modifiant puis abrogeant les directives 2001/77/CE et 2003/30/CE ».

Conformément à l'article 26, paragraphe 3, de la même directive, la directive 2001/77/CE est totalement abrogée à compter du 1er janvier 2012.

B.8.1. Le considérant 24 de la directive 2009/28/CE précitée dispose : « Afin d'exploiter pleinement le potentiel offert par la biomasse, la Communauté et les Etats membres devraient favoriser une plus large exploitation des réserves de bois existantes et le développement de nouveaux modes de sylviculture ».

B.8.2. Le considérant 78 de la même directive dispose : « Il convient de surveiller l'incidence de la culture de la biomasse, telle que celle due aux changements dans l'affectation des sols, y compris au déplacement, à l'introduction d'espèces exotiques envahissantes et d'autres effets sur la biodiversité, ainsi que les effets sur la production alimentaire et la prospérité locale. La Commission devrait prendre en compte toutes les sources d'information utiles, notamment la carte de la faim de la FAO. Il convient de promouvoir les biocarburants de manière à encourager une plus grande productivité agricole et l'utilisation de terres dégradées ».

B.8.3. L'article 2 de la même directive dispose : « Aux fins de la présente directive, les définitions de la directive 2003/54/CE s'appliquent.

Les définitions suivantes s'appliquent également : a) ' énergie produite à partir de sources renouvelables ' : une énergie produite à partir de sources non fossiles renouvelables, à savoir : énergie éolienne, solaire, aérothermique, géothermique, hydrothermique, marine et hydroélectrique, biomasse, gaz de décharge, gaz des stations d'épuration d'eaux usées et biogaz; [...] e) ' biomasse ' : la fraction biodégradable des produits, des déchets et des résidus d'origine biologique provenant de l'agriculture (y compris les substances végétales et animales), de la sylviculture et des industries connexes, y compris la pêche et l'aquaculture, ainsi que la fraction biodégradable des déchets industriels et municipaux; [...] k) ' régime d'aide ' : tout instrument, régime ou mécanisme appliqué par un Etat membre ou un groupe d'Etats membres, destiné à promouvoir l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables grâce à une réduction du coût de cette énergie par une augmentation du prix de vente ou du volume d'achat de cette énergie, au moyen d'une obligation d'utiliser ce type d'énergie ou d'une autre mesure incitative;cela inclut, mais sans s'y limiter, les aides à l'investissement, les exonérations ou réductions fiscales, les remboursements d'impôt, les régimes d'aide liés à l'obligation d'utiliser de l'énergie produite à partir de sources renouvelables, y compris ceux utilisant les certificats verts, et les régimes de soutien direct des prix, y compris les tarifs de rachat et les primes; [...] ».

B.8.4. L'article 3 de la même directive dispose : « 1. Chaque Etat membre veille à ce que la part d'énergie produite à partir de sources renouvelables, calculée conformément aux articles 5 à 11, dans sa consommation finale d'énergie en 2020 corresponde au minimum à son objectif national global en ce qui concerne la part d'énergie produite à partir de sources renouvelables pour l'année 2020, comme le prévoit le tableau figurant dans la partie A de l'annexe Ire, troisième colonne. Ces objectifs contraignants nationaux globaux sont cohérents avec l'objectif d'une part d'au moins 20 % d'énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation finale brute d'énergie de la Communauté d'ici à 2020.

Pour faciliter la réalisation des objectifs visés dans le présent article, chaque Etat membre promeut et encourage l'efficacité énergétique et les économies d'énergie. 2. Les Etats membres mettent en place des mesures conçues de manière efficace pour garantir que leur part d'énergie produite à partir de sources renouvelables est au moins égale à celle prévue dans la trajectoire indicative établie dans l'annexe Ire, partie B.3. Afin d'atteindre les objectifs fixés aux paragraphes 1 et 2, les Etats membres peuvent notamment appliquer les mesures suivantes : a) régimes d'aide; [...] ».

B.8.5. L'article 22 de la même directive dispose : « 1. Le 31 décembre 2011 au plus tard, puis tous les deux ans, chaque Etat membre présente à la Commission un rapport sur les progrès réalisés dans la promotion et l'utilisation de l'énergie provenant de sources renouvelables. Le sixième rapport, qui est présenté le 31 décembre 2021 au plus tard, est le dernier rapport requis.

Le rapport présente notamment : [...] c) la manière dont, le cas échéant, l'Etat membre a structuré ses régimes d'aide pour y intégrer les applications d'énergies renouvelables qui présentent des avantages supplémentaires par rapport à d'autres applications comparables, mais peuvent également présenter des coûts plus élevés, y compris les biocarburants produits à partir de déchets, de résidus, de matières cellulosiques d'origine non alimentaire et de matières ligno-cellulosiques; [...] ».

B.9.1. Il ressort de l'arrêt de renvoi que les parties sont en désaccord sur le point de savoir si l'installation de cogénération de la société requérante devant le Conseil d'Etat satisfait aux conditions pour être considérée comme une installation de cogénération à haut rendement au sens de la directive 2004/8/CE. L'article 7 de ladite directive ne paraît toutefois pas limiter son champ d'application aux seules installations de cogénération à haut rendement.

En toute hypothèse, et dans la mesure où le Conseil d'Etat n'a pas tranché la question de savoir si l'installation de cogénération, en cause dans l'affaire pendante devant lui, pouvait ou non être considérée comme à haut rendement, il appartient à la Cour d'examiner la validité de la disposition en cause en ce qu'elle s'appliquerait tant à une installation de cogénération à haut rendement qu'à une installation de cogénération au rendement inférieur.

B.9.2. Dans la mesure où l'article 7 de la directive 2004/8/CE s'applique en l'espèce, la question se pose dès lors de savoir si la différence de traitement contenue dans la disposition en cause, quant au type de matières combustibles utilisées dans le processus de cogénération, est compatible avec cet article.

L'article 7 de la directive se limite à indiquer que les mesures de soutien adoptées par les Etats membres doivent être conçues en fonction « de la demande de chaleur utile et [des] économies d'énergie primaire », sans qu'il soit clair que les Etats membres sont autorisés à distinguer selon les matières combustibles utilisées et, notamment, selon le type de déchets servant à ladite combustion. En revanche, le considérant 31 de cette directive vise expressément le type de combustibles utilisé dans le processus de cogénération en tant que facteur d'efficacité de la cogénération. En outre, le considérant 16 de la directive 2001/77/CE précitée imposait à la Commission de prendre en compte les caractéristiques des différentes sources d'énergie renouvelables dans l'adaptation des régimes de soutien qui leur sont applicables. Enfin, l'article 22 de la directive 2009/28/CE précitée prévoit que les Etats membres doivent exposer à la Commission la manière dont ils ont notamment pris en compte les avantages supplémentaires que présentent certaines « applications d'énergies renouvelables » dans le cadre de leur politique de promotion de l'énergie renouvelable, alors que les considérants 24 et 78 de ladite directive invitent les Etats à « favoriser une plus large exploitation des réserves de bois existantes et le développement de nouveaux modes de sylviculture » tout en insistant sur la nécessité de « surveiller l'incidence de la culture de la biomasse » sur l'environnement, la « production alimentaire et la prospérité locale ».

B.10.1. La partie requérante devant le Conseil d'Etat demande à la Cour d'interroger la Cour de justice de l'Union européenne sur l'interprétation qu'il convient de donner, notamment, à l'article 7 de la directive 2004/8/CE précitée.

B.10.2. Même si la question préjudicielle ne porte que sur les articles 10 et 11 de la Constitution et non sur ces articles combinés avec des dispositions de droit de l'Union européenne, il y a lieu de constater que des divergences quant à l'interprétation par les juridictions d'actes de l'Union européenne et à la validité de la législation qui en constitue la mise en oeuvre en droit interne compromettraient l'unité de l'ordre juridique de l'Union et porteraient atteinte au principe général de sécurité juridique.

B.10.3. De surcroît, dans l'interprétation selon laquelle l'article 7 de la directive 2004/8/CE précitée impose au législateur décrétal de traiter moins favorablement les installations de cogénération valorisant du bois ou des déchets de bois par rapport à l'ensemble des autres installations de cogénération valorisant de la biomasse, la critique adressée à la disposition en cause vaudrait dans la même mesure à l'égard de l'article 7 de la directive 2004/8/CE précitée.

Or, lorsque la Cour constitutionnelle est saisie d'une question préjudicielle l'interrogeant sur la compatibilité avec les articles 10 et 11 de la Constitution d'une disposition législative transposant les dispositions impératives d'une directive dont la compatibilité avec le principe général d'égalité est mise en cause, il appartient à la Cour de justice de se prononcer préalablement sur la conformité de cette directive au principe général d'égalité reconnu par le droit de l'Union européenne (CJUE, grande chambre, 22 juin 2010, C-188/10, Melki et Abdeli, point 56).

B.10.4. Enfin, dans l'interprétation selon laquelle l'article 7 de la directive interdit le recours à une telle différence de traitement entre les types de combustibles susceptibles d'être utilisés dans la cogénération, il resterait à déterminer si cette interdiction est elle-même compatible avec le principe général d'égalité, reconnu par le droit de l'Union européenne et qui s'oppose à ce que des situations différentes soient traités de manière identique. Or, il ne relève pas de la compétence de la Cour de statuer sur cette question, seule la Cour de justice étant compétente pour déclarer invalide une disposition de droit dérivé.

B.11. Avant de statuer au fond, il convient de poser à la Cour de justice les questions préjudicielles reprises au dispositif.

Par ces motifs, la Cour, avant de statuer au fond, pose à la Cour de justice de l'Union européenne les questions préjudicielles suivantes : 1. L'article 7 de la directive 2004/8/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 février 2004 ' concernant la promotion de la cogénération sur la base de la demande de chaleur utile dans le marché intérieur de l'énergie et modifiant la directive 92/42/CEE ', combiné, le cas échéant, avec les articles 2 et 4 de la directive 2001/77/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 septembre 2001 ' relative à la promotion de l'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables sur le marché intérieur de l'électricité ' et avec l'article 22 de la directive 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 ' relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables et modifiant puis abrogeant les directives 2001/77/CE et 2003/30/CE ', doit-il être interprété, à la lumière du principe général d'égalité, de l'article 6 du Traité sur l'Union européenne et des articles 20 et 21 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, comme : a) ne s'appliquant qu'aux installations de cogénération à haut rendement, au sens de l'annexe III de la directive;b) imposant, permettant ou interdisant qu'une mesure de soutien, comme celle qui est contenue à l'article 38, § 3, du décret de la Région wallonne du 12 avril 2001 ' relatif à l'organisation du marché régional de l'électricité ', soit accessible à toutes les installations de cogénération valorisant principalement de la biomasse et qui répondent aux conditions fixées par cet article, à l'exception des installations de cogénération valorisant principalement du bois ou des déchets de bois ? 2.La réponse diffère-t-elle si l'installation de cogénération ne valorise principalement que du bois ou, au contraire, que des déchets de bois ? Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, à l'audience publique du 19 avril 2012.

Le greffier, F. Meersschaut Le président, R. Henneuse

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