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Arrêt
publié le 10 juillet 2014

Extrait de l'arrêt n° 91/2014 du 12 juin 2014 Numéros du rôle : 5674 et 5676 En cause : les recours en annulation de l'article 13 du décret de la Région wallonne du 19 décembre 2012 contenant le budget général des recettes de la Région wallon La Cour constitutionnelle, composée des présidents J. Spreutels et A. Alen, et des juges J.-P. (...)

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10/07/2014
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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 91/2014 du 12 juin 2014 Numéros du rôle : 5674 et 5676 En cause : les recours en annulation de l'article 13 du décret de la Région wallonne du 19 décembre 2012 contenant le budget général des recettes de la Région wallonne pour l'année budgétaire 2013, introduits par l'union professionnelle « Belgian Gaming Association » et autres et par la SA « Circus Belgium » et autres.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents J. Spreutels et A. Alen, et des juges J.-P. Snappe, E. Derycke, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul et R. Leysen, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président J. Spreutels, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des recours et procédure Par requêtes adressées à la Cour par lettres recommandées à la poste le 21 et le 20 juin 2013 et parvenues au greffe le 24 juin 2013, des recours en annulation de l'article 13 du décret de la Région wallonne du 19 décembre 2012 contenant le budget général des recettes de la Région wallonne pour l'année budgétaire 2013 (publié au Moniteur belge du 21 décembre 2012 troisième édition) ont été introduits respectivement par l'union professionnelle « Belgian Gaming Association », la SA « Golden Palace Waterloo », la SA « European Amusement » et la SA « Center Jeux Automatiques », assistées et représentées par Me T. Afschrift, avocat au barreau de Bruxelles, et par la SA « Circus Belgium », la SA « Unibox Games » et l'ASBL « Union Professionnelle Belgian National Gaming Organisation », assistées et représentées par Me P. Vlaemminck et Me L. Falco, avocats au barreau de Bruxelles.

Ces affaires, inscrites sous les numéros 5674 et 5676 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) II. En droit (...) Quant à la disposition attaquée B.1.1. Les recours joints ont pour objet l'article 13 du décret de la Région wallonne du 19 décembre 2012 contenant le budget général des recettes de la Région wallonne pour l'année budgétaire 2013, qui dispose : « L'article 80, § 1er, du Code des taxes assimilées aux impôts sur les revenus est remplacé par la disposition suivante : ' § 1er. Le montant de la taxe est fixé comme suit :

Catégories des appareils

Montant de la taxe

A

3.000,00 EUR

B

1.194,80 EUR

C

380,17 EUR

D

271,55 EUR

E

162,93 EUR


Les montants de taxes précités sont adaptés, chaque année à partir de la période imposable 2014, en fonction des fluctuations de l'indice des prix à la consommation. La Direction générale opérationnelle de la Fiscalité du Service public de Wallonie publie chaque année à partir de l'année 2013, au Moniteur belge les montants de taxes à percevoir pour la période imposable débutant le 1er janvier de l'année suivante, adaptés dans la même proportion que l'évolution de l'indice des prix à la consommation entre les mois de juin de l'année de la publication et de l'année précédente '. ».

B.1.2. Il ressort du contenu des requêtes que les parties requérantes contestent l'augmentation de la taxe relative aux appareils de catégorie A, qui est portée par la disposition attaquée à 3.000 euros.

B.1.3. Les appareils de catégorie A sont, en vertu de l'article 79 du Code des taxes assimilées aux impôts sur les revenus tel qu'il est applicable en Région wallonne : « a. les billards électriques à mise variable, généralement dénommés ' Bingo ', dont le jeu consiste à loger plusieurs boules ou billes dans des trous pratiqués dans le plan horizontal de l'appareil, à l'effet d'éclairer, sur le panneau du plan vertical, plusieurs chiffres ou signes sur une ligne horizontale, verticale ou diagonale, ou encore dans une zone déterminée, selon le type de l'appareil; b. les billards électriques à mise variable, généralement dénommés ' One Ball ', dont le jeu consiste à loger sur le plan horizontal de l'appareil, une boule ou bille dans un des trous portant le même chiffre que celui qui est éclairé sur le panneau du plan vertical;c. les appareils automatiques de divertissement, y compris ceux visés sub 3° à 5° ci-après, lorsqu'ils permettent, même occasionnellement, au joueur ou à l'utilisateur de regagner, en espèces ou sous la forme de jetons, au moins le montant de sa mise et/ou de gagner des prix, en nature ou sous la forme de bons-primes, d'une valeur commerciale d'au moins 6,20 euros ». Quant au moyen pris de la violation des règles répartitrices de compétences B.2. Le troisième moyen dans l'affaire n° 5676 est pris de la violation de l'article 39 de la Constitution et des articles 1er, 4, 5, 6, 7, 7bis, 8 et 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles. Les parties requérantes font valoir que la réglementation du secteur des jeux de hasard est une compétence fédérale que le législateur fédéral a notamment exercée par l'adoption de la loi du 10 janvier 2010Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/01/2010 pub. 01/02/2010 numac 2010009070 source service public federal justice Loi portant modification de la législation relative aux jeux de hasard type loi prom. 10/01/2010 pub. 01/02/2010 numac 2010009071 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 7 mai 1999 sur les jeux de hasard, les établissements de jeux de hasard et la protection des joueurs, en ce qui concerne la Commission des jeux de hasard fermer portant modification de la législation relative aux jeux de hasard. Elles estiment que l'augmentation significative de la taxe sur les appareils automatiques de divertissement de catégorie A prévue par l'article 13 du décret du 19 décembre 2012 aura pour conséquence une diminution du nombre d'appareils de cette catégorie installés légalement et un déplacement corrélatif de l'activité des joueurs vers l'offre illégale de jeux, ce qui serait contraire à l'objectif du législateur fédéral de « canaliser » les joueurs vers l'offre légale.

B.3.1. L'article 3, alinéa 1er, de la loi spéciale du 16 janvier 1989 « relative au financement des Communautés et des Régions » dispose : « Les impôts suivants sont des impôts régionaux : [...] 2° la taxe sur les appareils automatiques de divertissement; [...] ».

L'article 4, § 1er, de la même loi spéciale dispose : « Les régions sont compétentes pour modifier le taux d'imposition, la base d'imposition et les exonérations des impôts visés à l'article 3, alinéa 1er, 1° à 4° et 6° à 9° ».

B.3.2. Par ailleurs, l'autorité fédérale est compétente pour régler les jeux et paris, pour déterminer les conditions auxquelles peuvent s'exercer les activités qu'elle autorise et pour en organiser le contrôle.

Dans l'exercice de cette compétence, l'autorité fédérale a adopté la loi du 10 janvier 2010Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/01/2010 pub. 01/02/2010 numac 2010009070 source service public federal justice Loi portant modification de la législation relative aux jeux de hasard type loi prom. 10/01/2010 pub. 01/02/2010 numac 2010009071 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 7 mai 1999 sur les jeux de hasard, les établissements de jeux de hasard et la protection des joueurs, en ce qui concerne la Commission des jeux de hasard fermer précitée dont l'objectif est défini comme suit dans les travaux préparatoires : « Les objectifs de la politique belge en matière de jeux de hasard sont axés sur la protection du joueur, la transparence financière et le contrôle des flux d'argent, le contrôle du jeu et l'identification et le contrôle des organisateurs.

La régulation des jeux de hasard est basée sur l'' idée de canalisation '. Pour satisfaire le besoin manifeste du jeu chez les personnes, l'offre illégale est combattue par l'autorisation d'une offre de jeux légale ' limitée '.

La régulation des jeux de hasard illégaux contribue à réfréner la participation aux jeux de hasard et est un moyen adapté et proportionné pour atteindre les objectifs qui constituent la base de la politique en matière de jeux de hasard. En limitant l'offre légale, on répond à l'un des piliers de cette politique, à savoir la protection du joueur contre l'addiction au jeu » (Doc. parl., Chambre, 2008-2009, DOC 52-1992/001, p. 4).

B.4.1. Toute mesure fiscale est susceptible d'avoir une influence sur le comportement des contribuables. Il ne s'ensuit pas que le législateur décrétal devrait, dans l'exercice de sa compétence fiscale, renoncer à toute disposition qui pourrait éventuellement influencer le comportement des contribuables dans un sens différent de celui que le législateur fédéral, dans l'exercice de sa compétence en matière de réglementation des jeux et paris, pourrait vouloir encourager. Tel ne serait le cas que si le législateur décrétal rendait à cette occasion impossible ou exagérément difficile l'exercice, par l'autorité fédérale, de sa compétence.

B.4.2. En l'espèce, il n'est pas démontré que l'augmentation attaquée de la taxe sur les appareils de divertissement de catégorie A aura pour effet de faire diminuer sensiblement le nombre d'appareils de ce type disponibles en Région wallonne. En outre, même si un tel effet devait se produire, il ne s'ensuivrait pas nécessairement que les buts poursuivis par le législateur fédéral s'en trouveraient compromis. En effet, le législateur fédéral entend autoriser une offre de jeux « limitée », dans un souci de protection des joueurs contre l'addiction.

B.4.3. Il résulte de ce qui précède qu'en adoptant la disposition attaquée, le législateur décrétal n'a pas rendu impossible ou exagérément difficile l'exercice, par le législateur fédéral, de sa compétence en matière de réglementation des jeux et paris.

B.4.4. Le troisième moyen dans l'affaire n° 5676 n'est pas fondé.

Quant au moyen pris de la violation du droit de propriété B.5. Le premier moyen dans l'affaire n° 5674 est pris de la violation de l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme et de l'article 16 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec les articles 10, 11, 170 et 172 de la Constitution.

Les parties requérantes soutiennent que le quasi-doublement de la taxe grevant les appareils automatiques de divertissement de catégorie A opéré par la disposition attaquée constitue une charge excessive ou exorbitante et discriminatoire dès lors qu'aucun autre secteur de l'économie n'est soumis à une telle charge.

B.6.1. L'article 16 de la Constitution dispose : « Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique, dans les cas et de la manière établis par la loi, et moyennant une juste et préalable indemnité ».

L'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme dispose : « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens.

Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes ».

Cette disposition de droit international ayant une portée analogue à celle de l'article 16 de la Constitution, les garanties qu'elle contient forment un ensemble indissociable avec celles qui sont inscrites dans cette disposition constitutionnelle, de sorte que la Cour en tient compte lors de son contrôle de la disposition attaquée.

B.6.2. Un impôt constitue, en principe, une ingérence dans le droit au respect des biens.

Cette ingérence n'est compatible avec ce droit que si elle est raisonnablement proportionnée au but poursuivi, c'est-à-dire si elle ne rompt pas le juste équilibre entre les exigences de l'intérêt général et celles de la protection de ce droit. Même si le législateur fiscal dispose d'une large marge d'appréciation, un impôt viole dès lors ce droit s'il fait peser sur le contribuable une charge excessive ou porte fondamentalement atteinte à sa situation financière (CEDH, 31 janvier 2006, Dukmedjian c. France, § § 52-54; décision, 15 décembre 2009, Tardieu de Maleissye e.a. c. France).

B.6.3. La taxe grevant les appareils automatiques de divertissement de catégorie A constitue une ingérence dans le droit au respect des biens des redevables de cette taxe.

B.6.4. Il ressort des travaux préparatoires de la disposition attaquée qu'en sus de l'objectif budgétaire que poursuit le législateur décrétal dans l'exercice de sa compétence fiscale, il a également voulu, d'une part, rapprocher le montant de la taxe wallonne sur les appareils de divertissement de catégorie A du montant des taxes similaires dans les deux autres régions et, d'autre part, dissuader le placement de nouveaux appareils automatiques de divertissement appartenant à la catégorie A, dans un souci de protection des joueurs (Doc. parl., Parlement wallon, 2012-2013, 4-IV a, n° 3; 4-IV bcd, n° 5, p. 19-20).

B.7.1. Les parties requérantes estiment que l'autonomie des entités fédérées fait obstacle à ce que le législateur décrétal puisse se prévaloir de l'objectif de rapprocher le montant de la taxe qu'il institue de celui des taxes similaires existant dans les autres régions de l'Etat fédéral.

Si l'autonomie des entités fédérées empêche la Cour d'établir une comparaison pertinente, au regard du principe d'égalité et de non-discrimination, entre les destinataires de législations adoptées par des entités fédérées différentes, elle n'interdit pas à un législateur décrétal de se donner pour objectif d'aligner le contenu de la législation qu'il adopte dans l'exercice de ses compétences sur le contenu de celles qui sont en vigueur dans d'autres entités. Un tel objectif est légitime et peut justifier notamment l'augmentation d'une taxe, comme en l'espèce, lorsque le législateur décrétal constate que les différences de taxation risquent d'avoir des conséquences négatives ou non souhaitables sur l'équilibre d'un secteur.

B.7.2. Ainsi qu'il a été observé par le législateur décrétal au cours des travaux préparatoires, cette augmentation « revient pour le secteur à cent euros par mois », donc « si l'on considère qu'une taverne est ouverte 22 jours par mois, cela fait [...] en moyenne 4,5 euros par jour », ou « si l'on pousse le raisonnement plus loin, cela fait 50 cents par heure d'exploitation », de sorte qu'il a pu raisonnablement déduire « de ces chiffres que l'impact de cette décision est quand même relativement limité » (Doc. parl., Parlement wallon, 2012-2013, 4-IV a, n° 3; 4-IV bcd, n° 5, p. 20). Par ailleurs, la taxe sur les appareils automatiques de divertissement est déductible à l'impôt des sociétés, ce qui contribue également à en diminuer l'incidence sur la situation financière des contribuables.

Il en découle que, compte tenu des objectifs poursuivis par le législateur décrétal, l'augmentation du montant de la taxe critiquée n'est pas disproportionnée au regard de la capacité contributive des redevables et qu'elle ne constitue pas une charge excessive pour ceux-ci.

B.7.3. Le premier moyen dans l'affaire n° 5674 n'est pas fondé.

Quant aux moyens pris de la violation du principe d'égalité en matière fiscale B.8. Le deuxième moyen dans l'affaire n° 5674 est pris de la violation des articles 10, 11, 170 et 172 de la Constitution. Les parties requérantes estiment qu'en augmentant uniquement le montant de la taxe sur les appareils automatiques de divertissement relevant de la catégorie A, le législateur décrétal crée une différence de traitement non justifiée entre les propriétaires d'appareils appartenant à la catégorie A et les propriétaires d'appareils appartenant aux autres catégories, qui n'ont pas à subir une augmentation comparable de la taxe.

B.9.1. En fixant des montants différents selon les catégories d'appareils concernés, le législateur décrétal a égard à l'article 79, § 2, du Code des taxes assimilées aux impôts sur les revenus, qui dispose que pour la classification d'un appareil déterminé, il est tenu compte de sa rentabilité, de la nature du jeu proposé et de la multiplicité de la mise.

B.9.2. Il apparaît des prévisions du rendement de la taxe sur les appareils automatiques de divertissement (Doc. parl., Parlement wallon, 2012-2013, 4-IV a, n° 1, annexe 3, p. 13) et des explications du Gouvernement wallon que les appareils de catégorie A sont les plus nombreux sur le territoire de la Région et qu'ils sont également ceux dont la rentabilité s'est le plus accrue au cours des dernières années. Il est dès lors pertinent, par rapport à l'objectif budgétaire poursuivi par le législateur décrétal, d'augmenter la taxe frappant cette catégorie d'appareils en vue de procurer à la Région des moyens supplémentaires sans augmenter nécessairement le montant de la taxe relative aux appareils relevant des autres catégories.

B.9.3. Par ailleurs, le législateur fiscal peut également souhaiter, par l'augmentation de la taxe frappant une catégorie déterminée d'appareils, lutter de manière plus précise contre les dangers associés aux jeux de hasard et protéger les joueurs vis-à-vis d'un type d'appareils présentant des caractéristiques spécifiques en ce qui concerne le risque d'assuétudes. Au regard de cet objectif, la différence de traitement attaquée par le moyen n'est pas sans justification raisonnable.

B.9.4. Le deuxième moyen dans l'affaire n° 5674 n'est pas fondé.

B.10. Le troisième moyen dans l'affaire n° 5674 est pris de la violation des articles 10, 11, 170 et 172 de la Constitution. Les parties requérantes font grief au législateur décrétal d'avoir, en fixant des montants différents selon les catégories d'appareils automatiques de divertissement, indirectement défini ces catégories sans consulter les unions professionnelles intéressées. Elles font valoir qu'en vertu de l'article 79, § 3, du Code des taxes assimilées aux impôts sur les revenus, le Gouvernement wallon est tenu de consulter les unions professionnelles intéressées lorsqu'il fixe ou modifie la catégorie dans laquelle un type d'appareils doit être classé. Elles en déduisent que le fait que le législateur décrétal pourrait augmenter la taxe sans consulter les unions professionnelles intéressées serait constitutif de discrimination.

B.11.1. L'article 13 du décret du 19 décembre 2012 n'a pas la portée que lui donnent les parties requérantes. Il remplace l'article 80, § 1er, du Code des taxes assimilées aux impôts sur les revenus pour la Région wallonne en modifiant le montant de la taxe frappant les appareils automatiques de divertissement appartenant à la catégorie A. Il n'a ni pour objet, ni pour effet de modifier, directement ou indirectement, le classement des différents appareils dans les catégories qui existaient avant son adoption.

B.11.2. Par ailleurs, la décision de fixer ou de modifier la classification d'un type d'appareils automatiques de divertissement, qui doit être précédée de la consultation des unions professionnelles intéressées, et la décision d'augmenter la taxe relative à une catégorie d'appareils ne sont pas des décisions comparables au regard de la nécessité de recueillir l'avis des représentants du secteur concerné. L'absence d'obligation de consulter les unions professionnelles intéressées préalablement à l'augmentation de la taxe n'est donc pas contraire aux dispositions citées au moyen.

B.11.3. Le troisième moyen dans l'affaire n° 5674 n'est pas fondé.

B.12. Le premier moyen dans l'affaire n° 5676 est pris de la violation des articles 10, 11 et 172 de la Constitution. Les parties requérantes dénoncent une différence de traitement injustifiable entre les redevables de la taxe grevant les appareils automatiques de divertissement appartenant à la catégorie A, qui voient cette taxe augmenter de manière importante, et les redevables de la taxe sur les paris reçus en Région wallonne sur les courses de chevaux, les compétitions canines et les compétitions sportives, dont le taux a été réduit par l'article 158 du décret du 22 décembre 2010 contenant le budget général des dépenses de la Région wallonne pour l'année budgétaire 2011.

B.13.1. Il existe, entre les appareils automatiques de divertissement et les jeux et paris sur les courses de chevaux, les compétitions canines et les compétitions sportives, des différences objectives qui autorisent le législateur décrétal, compte tenu du large pouvoir d'appréciation qui est le sien en matière fiscale, à établir des taxes distinctes tenant compte des spécificités de chaque secteur.

B.13.2. La diminution du taux d'imposition des jeux et paris « réels » doit, d'après l'exposé des motifs du décret attaqué, « s'accompagner d'une redynamisation du secteur de nature à générer une augmentation du chiffre d'affaires et ainsi ne pas altérer sensiblement les recettes fiscales », « cette dynamisation étant consécutive à la libération des jeux et paris en ligne et s'accompagnant d'un engagement du secteur en faveur de la filière hippique wallonne et de l'emploi dans les agences de paris » (Doc. parl., Parlement wallon, 2012-2013, 4-IV a, n° 1, annexe 3, p. 15).

Le secteur des appareils automatiques de divertissement se trouvant dans une situation objectivement différente, le législateur décrétal n'était pas tenu de faire évoluer les taxes le frappant de la même manière que la taxe sur les jeux et paris.

B.13.3. Par ailleurs, le législateur décrétal a également pu raisonnablement estimer que les deux secteurs concernés ne se trouvent pas dans la même situation au regard de l'objectif de lutter contre le danger des assuétudes au jeu.

B.13.4. Le premier moyen dans l'affaire n° 5676 n'est pas fondé.

B.14. Le deuxième moyen dans l'affaire n° 5676 est pris de la violation des articles 10, 11 et 172 de la Constitution, combinés avec le principe de la sécurité juridique. Les parties requérantes estiment que l'absence de dispositions transitoires, alors que le décret attaqué a été publié le 21 décembre 2012 et que l'augmentation de la taxe est effective et payable au 1er janvier 2013, est contraire au principe de la sécurité juridique.

B.15.1. Si le législateur décrétal estime qu'un changement de politique s'impose, il peut décider de lui donner un effet immédiat et il n'est pas tenu, en principe, de prévoir un régime transitoire. Les articles 10 et 11 de la Constitution ne sont violés que si le régime transitoire ou l'absence d'un tel régime entraîne une différence de traitement non susceptible de justification raisonnable ou s'il est porté une atteinte excessive au principe de la confiance légitime. Tel est le cas lorsqu'il est porté atteinte aux attentes légitimes d'une catégorie déterminée de justiciables sans qu'un motif impérieux d'intérêt général puisse justifier l'absence d'un régime transitoire établi à leur profit.

Il en va encore plus ainsi en matière fiscale, où le législateur décrétal dispose d'une large marge d'appréciation, en ce compris lorsqu'il décide d'augmenter le montant d'une taxe et apprécie si ladite augmentation nécessite l'aménagement d'un régime transitoire.

B.15.2. En l'espèce, les parties requérantes ne pouvaient raisonnablement escompter une diminution de la taxe sur les appareils automatiques de divertissement de classe A ni espérer que le montant de la taxe ne serait pas augmenté. Le fait qu'une telle diminution était intervenue dans le secteur des jeux et paris n'y change rien, dès lors que les circonstances, rappelées en B.13.2, ayant présidé à cette diminution n'étaient pas présentes dans le secteur des appareils automatiques de divertissement.

B.15.3. Le deuxième moyen dans l'affaire n° 5676 n'est pas fondé.

Par ces motifs, la Cour rejette les recours.

Ainsi rendu en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 12 juin 2014.

Le greffier, F. Meersschaut Le président, J. Spreutels

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