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Loi
publié le 06 juillet 2002

Conseil de la Concurrence. - Décision n° 2001-V/M-61 du 19 novembre 2001 Affaires CONC-I/O-99/0007 et CONC-I/O-99/0013 Vu la demande de mesures provisoires déposée au Secrétariat du Conseil de la concurrence le 3 mars 1999 par les demandeurs rep Vu la plainte pour violation des articles 2, § 1 er , et 3, de la loi sur la protecti(...)

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06/07/2002
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MINISTERE DES AFFAIRES ECONOMIQUES


Conseil de la Concurrence. - Décision n° 2001-V/M-61 du 19 novembre 2001 Affaires CONC-I/O-99/0007 et CONC-I/O-99/0013 Vu la demande de mesures provisoires déposée au Secrétariat du Conseil de la concurrence le 3 mars 1999 par les demandeurs représentés par Me Misson, à l'encontre de la société anonyme ESSO Belgium, et enregistrée sous le numéro CONC-I/O-99/0007;

Vu la plainte pour violation des articles 2, § 1er, et 3, de la loi sur la protection de la concurrence économique (ci-après L.P.C.E. déposée au Service le 15 mars 1999 par les demandeurs et enregistrée sous le numéro CONC-I/ O-99/0009;

Vu la nouvelle demande de mesures provisoires déposée au Secrétariat du Conseil de la Concurrence le 22 mars 1999 par les demandeurs et enregistrée sous le numéro CONC-I/O-99/0013;

Vu le rapport motivé établi par la Division prix et concurrence le 7 juin 1999.

Entendu à l'audience du 19 avril 2001 : - Le Service de la concurrence, en la personne de MM. Géry Marlière et Alain Godfurnon, - Maître Patrick M'Baya, et M. J. Appeltants, demandeur en mesures provisoires, - Maître Alain Vanderlest, représentant d'ESSO. Quant à la première demande de mesures provisoires (CONC-I/O-99/0007) : Attendu que la recevabilité d'une demande de mesures provisoires est soumise à diverses conditions dont l'existence d'une instance au fond;

Que lorsque la première demande a été faite, aucune plainte n'avait encore été déposée par les demandeurs;

Que par conséquent, la première demande de mesures provisoires doit être déclarée irrecevable Quant à la seconde demande de mesures provisoires (CONC-I/O-99/0013) : Les parties La demanderesse, Mme Nicole Demol, domiciliée avenue des Acacias 61, à Horion-Hozémont, est exploitante indépendante d'une station d'essence de marque ESSO. Elle est liée à la défenderesse, ESSO Belgium S.A., par un contrat d'achat exclusif appelé contrat « revendeur », signé le [CONFIDENTIEL].

La défenderesse, la S.A. ESSO Belgium (ci-après ESSO), dont le siège social est établi à 2030 Antwerpen, Polderijkweg 3, exploite un réseau de stations services.

Objet de la demande La plaignante demande au Président du Conseil de la concurrence de constater qu'ESSO applique à l'égard de partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes en lui infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence, et en conséquence demande qu'il soit ordonné à la S.A. ESSO de cesser d'accorder à certains revendeurs des avantages [CONFIDENTIEL], et ce sous peine d'une astreinte de 100 000 francs belges par jour de retard.

Les faits La station service de Mme Demol est exploitée depuis 1959, d'abord par son époux, puis par elle-même.

Le [CONFIDENTIEL], Mme Demol signe un contrat dit « revendeur », contrat qui expire [CONFIDENTIEL]. Par cette convention, ESSO s'engage à fournir la station pour tous ses besoins en carburant et le revendeur s'engage à commander régulièrement et exclusivement à ESSO. La station de Mme Demol est située [CONFIDENTIEL]. Elle expose que depuis janvier 1999, plusieurs revendeurs ESSO « cassent » les prix à la pompe ce qui entraîne un déplacement de la clientèle vers ces points de vente au détriment de sa propre station. Elle cite deux revendeurs situés [CONFIDENTIEL].

Elle estime que la possibilité pour ces revendeurs de pratiquer des prix « cassés » provient des conditions nettement plus avantageuses qui leur sont consenties par ESSO. Parallèlement au dépôt de la plainte au Service de la concurrence, Mme Demol a adressé une série de courriers à ESSO en dénonçant ces pratiques discriminatoires et en réclamant un traitement équivalent à celui des pompes ESSO de [CONFIDENTIEL].

Elle dénonce un abus de position dominante dans le chef d'ESSO (article 3 de la L.P.C.E.) et un accord entre ESSO et certains revendeurs de son réseau (article 2, § 1er, de la L.P.C.E.).

En droit En vertu de l'article 35 de la L.P.C.E., le Président du Conseil de la concurrence peut, sur demande du plaignant, prendre des mesures provisoires destinées à suspendre les pratiques restrictives de concurrence faisant l'objet d'une instruction, s'il est urgent d'éviter une situation susceptible de provoquer un préjudice grave, imminent et irréparable aux entreprises dont les intérêts sont affectés par ces pratiques ou de nuire à l'intérêt économique général.

Recevabilité de la demande de mesures provisoires Attendu que la recevabilité de la demande n'est pas contestée;

Que les parties sont des entreprises et que la demanderesse justifie d'un intérêt direct et actuel.

Conditions à l'octroi de mesures provisoires Attendu que pour que le Président du Conseil de la concurrence puisse faire droit à une demande de mesures provisoires, il faut réunir trois conditions : l'existence d'une instance principale au fond, la probabilité d'un préjudice grave et irréparable, et l'existence prima facie d'une pratique anticoncurrentielle.

Attendu que la première condition est remplie, le Service ayant enregistré le 15 mars 1999 sous les références CONC-I/O-99/0009, une plainte émanant de Mme Demol à l'encontre d'ESSO;

Qu'il convient d'examiner l'existence prima facie d'une infraction.

Attendu que la plaignante invoque les articles 2, § 1er, d, et 3, c, de la L.P.C.E. et dénonce une entente entre ESSO et certains de ses revendeurs ainsi qu'un abus de position dominante. 1. L'article 2, § 1er, d, de la loi Attendu que selon cet article « sont interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser de manière sensible la concurrence sur le marché belge concerné (...) et notamment celles qui consistent (...) à appliquer à l'égard de partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence ».

Attendu que le Service considère que les accords conclus entre ESSO et les deux revendeurs visés par la plaignante ne sont pas, prima facie, restrictifs de concurrence et ne sont dès lors pas visés par l'article 2, § 1er, d, de la L.P.C.E. Attendu que même si ESSO accorde à certains de ses revendeurs des [CONFIDENTIEL], ces différentes ristournes sont justifiées par des différences objectives de situation des stations, soit selon leur environnement concurrentiel d'autres marques, soit qui font l'objet de négociations commerciales entre ESSO et ses revendeurs, en tenant compte d'une série d'éléments habituellement pris en compte dans ce genre de négociations;

Que l'instruction d'audience a démontré que Mme Demol avait conscience des différences objectives existant entre les différentes stations, notamment en volume d'achat de carburant, en investissements consentis, etc;

Que rien dans la loi n'interdit des différences de traitement entre partenaires commerciaux reposant sur des justifications objectives;

Qu'au contraire, pourraient être interdits des accords qui limitent la liberté des entreprises de négocier des conditions commerciales. 2. L'article 3, c, de la loi Attendu que la plaignante fait grief à ESSO d'abuser de sa position dominante en appliquant à l'égard de partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes. Attendu qu'il n'est pas démontré qu'ESSO dispose d'une position dominante sur le marché belge; qu'il existe de nombreux concurrents ayant des parts de marché équivalentes à celles de ESSO;

Qu'en l'absence de position dominante, les pratiques dénoncées ne peuvent être considérées comme un abus au sens de l'article 3, c , de la loi.

Attendu surabondamment que, comme le relève le Service, le Conseil de la concurrence est étranger aux pratiques et comportements d'entreprises qui n'ont aucun impact sur la structure ou le fonctionnement du marché dans lequel les entreprises en conflit opèrent et qui doivent rester de la compétence des tribunaux de l'ordre judiciaire, ce qui est manifestement le cas en l'espèce.

Attendu que le comportement reproché à ESSO ne révèle, prima facie, aucune infraction aux articles 2, § 1er, d, et 3, c, de la L.P.C.E.;

Qu'une des conditions de l'octroi des mesures provisoires faisant défaut, il n'y a aucun intérêt à examiner celles relatives au préjudice grave et irréparable, et à l'urgence.

Par ces motifs, Nous, Marie-Claude Grégoire, faisant fonction de Président du Conseil de la Concurrence, - décidons qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de mesures provisoires.

Ainsi décidé le 19 novembre 2001 par Marie-Claude Grégoire, faisant fonction de Président du Conseil de la Concurrence.

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