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Arrêt
publié le 20 février 2008

Extrait de l'arrêt n° 152/2007 du 12 décembre 2007 Numéro du rôle : 4092 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 8, § 1 er , alinéa 2, de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail, posées par l La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Bossuyt et M. Melchior, des juges P. Marte(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 152/2007 du 12 décembre 2007 Numéro du rôle : 4092 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 8, § 1er, alinéa 2, de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail, posées par la Cour du travail de Gand.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Bossuyt et M. Melchior, des juges P. Martens, R. Henneuse, E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke et J. Spreutels, et, conformément à l'article 60bis de la loi spéciale du 6 janvier 1989, du président émérite A. Arts, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président émérite A. Arts, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par arrêt du 7 décembre 2006 en cause de Colette Baeyens et autres contre la SA « Fortis Insurance Belgium », dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 13 décembre 2006, la Cour du Travail de Gand a posé les questions préjudicielles suivantes : 1. « L'article 8, § 1er, alinéa 2, première phrase, de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail viole-t-il les principes d'égalité et de non-discrimination contenus dans les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'il exige, lorsque l'accident survient sur le chemin du travail, que le trajet entre le lieu de résidence et le lieu de travail soit ' normal ', alors que cette exigence de normalité n'est pas posée pour la notion légale d'accident du travail stricto sensu (donc au sens strict du mot) dans les articles 9 et 7 de la loi sur les accidents du travail, en particulier en ce qui concerne l'exécution du contrat de travail ? »;2. « L'article 8, § 1er, de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail viole-t-il les principes d'égalité et de non-discrimination contenus dans les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'il ne prévoit pas de présomption réfragable (donc sauf preuve contraire) d'accident survenu sur le chemin du travail (plus précisément qu'un accident survenu sur le chemin du travail est, sauf preuve contraire, réputé survenu par le fait de l'exécution du contrat de travail) et en ce que la charge d'administrer la preuve du motif justifiant une pause éventuelle (ou un éventuel détour) incombe à la victime ou (en cas d'accident mortel) à ses ayants droit, alors que pour la notion légale d'accident du travail stricto sensu (donc au sens strict du mot), il existe une présomption réfragable selon laquelle l'accident survenu pendant l'exécution du contrat de travail est, sauf preuve contraire, réputé survenu par le fait de l'exécution de ce contrat (cf.article 7, alinéa 2, de la loi sur les accidents du travail) ? »; 3. « En ce qui concerne la pause (également appelée interruption), la distinction entre, primo, la pause insignifiante, secundo, la pause peu importante, et, tertio, la pause importante (pour l'interprétation du ' trajet normal ' chronologique entre le lieu de résidence et le lieu de travail, visé à l'article 8, § 1er, alinéa 2, première phrase, de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail) viole-t-elle les principes d'égalité et de non-discrimination contenus dans les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce que la victime ou ses ayants droit doivent, selon la distinction qui est appliquée à leur cas et la qualification qui est donnée à la nature de cette pause, prouver ou non pour justifier la pause, l'existence d'un motif légitime ou l'existence de la force majeure ? »;4. « Les principes d'égalité et de non-discrimination contenus dans les articles 10 et 11 de la Constitution sont-ils violés en ce que, pour la notion de 'trajet normal' entre le lieu de résidence et le lieu de travail (visé à l'article 8, § 1er, alinéa 2, première phrase, de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents de travail), dans l'interprétation relative à la pause, également appelée interruption, la victime ou ses ayants droit ne doivent pas fournir la preuve, lorsque le chemin du travail présente une pause peu importante, qu'il existe un motif légitime justifiant cette pause peu importante, alors que, dans l'interprétation relative au détour, la victime ou ses ayants droit doivent, lorsque le chemin du travail présente un détour peu important, prouver l'existence du motif légitime justifiant ce détour peu important ? ». (...) III. En droit (...) B.1. Les questions préjudicielles portent sur l'article 8, § 1er, alinéa 2, de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail, et en particulier sur la première phrase de ce deuxième alinéa, qui dispose : « Le chemin du travail s'entend du trajet normal que le travailleur doit parcourir pour se rendre de sa résidence au lieu de l'exécution du travail, et inversement ».

La loi du 17 mai 2007Documents pertinents retrouvés type loi prom. 17/05/2007 pub. 14/06/2007 numac 2007002093 source service public federal personnel et organisation Loi modifiant la loi du 3 juillet 1967 sur la prévention ou la réparation des dommages résultant des accidents du travail, des accidents survenus sur le chemin du travail et des maladies professionnelles dans le secteur public et la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail type loi prom. 17/05/2007 pub. 21/05/2008 numac 2008000443 source service public federal interieur Loi modifiant la loi du 3 juillet 1967 sur la prévention ou la réparation des dommages résultant des accidents du travail, des accidents survenus sur le chemin du travail et des maladies professionnelles dans le secteur public et la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail. - Traduction allemande fermer, qui modifie, entre autres, la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail (Moniteur belge du 14 juin 2007, deuxième édition) n'a pas d'incidence sur les dispositions actuellement en cause.

Quant à l'exception de non-comparabilité B.2.1. Selon le Conseil des Ministres, la victime d'un accident du travail stricto sensu ou ses ayants droit ne pourraient être valablement comparés à la victime d'un accident sur le chemin du travail ou ses ayants droit, comme le font les deux premières questions préjudicielles. En effet, ce n'est que dans le cas d'un accident du travail stricto sensu que la victime serait sous l'autorité de son employeur, de sorte que les deux catégories de personnes précitées se trouveraient dans une situation totalement différente.

B.2.2. Eu égard aux différences de traitement - en particulier en ce qui concerne la charge de la preuve - qui sont soulevées dans les deux premières questions préjudicielles, la victime d'un accident du travail stricto sensu ou ses ayants droit peuvent être comparés à la victime d'un accident sur le chemin du travail ou ses ayants droit. La circonstance que la victime se trouve ou non sous l'autorité de son employeur ne permet pas de conclure que les deux catégories de victimes se trouvent dans des situations à ce point différentes qu'elles ne pourraient être comparées, dans le cadre du contrôle au regard du principe d'égalité et de non-discrimination, en ce qui concerne la réglementation relative à la charge de la preuve.

B.2.3. L'exception est rejetée.

Quant à l'ensemble des questions préjudicielles B.3. Le juge a quo interroge la Cour sur la compatibilité de la disposition en cause avec le principe d'égalité et de non-discrimination.

Les deux premières questions préjudicielles se rapportent à la différence de traitement qu'instaure le législateur entre, d'une part, l'accident du travail stricto sensu et, d'autre part, l'accident sur le chemin du travail, en particulier pour ce qui concerne la charge de la preuve.

Les deux dernières questions préjudicielles portent sur l'interprétation que donne la jurisprudence à la notion de « trajet normal ».

B.4. L'article 7 de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail définit l'accident du travail comme suit : « Pour l'application de la présente loi, est considéré comme accident du travail tout accident qui survient à un travailleur dans le cours et par le fait de l'exécution du contrat de louage de travail et qui produit une lésion.

L'accident survenu dans le cours de l'exécution du contrat est présumé, jusqu'à preuve du contraire, survenu par le fait de cette exécution. » L'article 8, § 1er, ajoute, en son alinéa 1er : « Est également considéré comme accident du travail l'accident survenu sur le chemin du travail ». Il définit, en son alinéa 2, première phrase, le chemin du travail comme le « trajet normal que le travailleur doit parcourir pour se rendre de sa résidence au lieu de l'exécution du travail, et inversement ». L'article 8, § 1er, alinéa 2, deuxième phrase, énumère les cas dans lesquels le trajet demeure normal lorsque le travailleur effectue les détours nécessaires et raisonnablement justifiables. Le travailleur est réputé se trouver également sur le lieu du travail entre autres dans certaines circonstances énumérées à l'article 8, § 1er, alinéa 3. Le trajet de la résidence au lieu du travail commence dès que le travailleur franchit le seuil de sa résidence principale ou secondaire et finit dès qu'il en franchit à nouveau le seuil (article 8, § 1er, alinéa 4). L'article 8, § 2, mentionne les trajets assimilés au chemin du travail.

L'article 9 dispose enfin : « Lorsque la victime ou ses ayants droit établissent, outre l'existence d'une lésion, celle d'un événement soudain, la lésion est présumée, jusqu'à preuve du contraire, trouver son origine dans un accident ».

B.5.1. Les travaux préparatoires de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer commentent certains aspects des dispositions précitées : la notion d'« accident du travail », la charge de la preuve, la notion de « trajet normal », l'interruption du chemin du travail.

Pour ce qui concerne les éléments qui différencient l'« accident du travail » de l'« accident », le gouvernement affirme : « l'expression ' exécution du travail ' [...] est plus restreinte que l'expression ' exécution d'un contrat de louage de travail ', expression que le Gouvernement propose de conserver dans le texte de la loi. Telle quelle, l'expression suffit à faire accepter comme accident du travail, l'accident qui survient pendant une interruption du travail lorsqu'il appert des données de fait, que l'autorité de l'employeur s'est maintenue sans restriction ou que l'employeur a pu l'exercer. [...] La jurisprudence et la doctrine, confrontées avec les faits quotidiens, doivent veiller à ce que conformément à la volonté du législateur, l'interprétation de la notion, orientée vers une protection aussi complète que possible de l'intégrité physique (ce qui suppose la conservation de toutes les qualités mentales), soit continuellement adaptée à la réalité.

Le texte du projet se limite à indiquer les éléments essentiels de la notion d'accident du travail » (Doc. parl., Sénat, 1969-1970, n° 328, pp. 9-10).

Le ministre a déclaré : « [l']article [7] ainsi que l'article 8 constituent les articles de base de l'ensemble du projet. La caractéristique la plus importante du présent article est bien la souplesse. En effet, on a intentionnellement évité de définir de manière explicite tous les éléments de la notion d'' accident du travail ' dans le texte de la loi, et ce en vue de permettre à la jurisprudence et à la doctrine de poursuivre l'interprétation de la notion dans un sens élargi et favorable au travailleur salarié. Telle est en effet la tendance que l'on constate depuis 1903 » (Doc. parl., Sénat, 1970-1971, n° 215, p. 42).

B.5.2. En ce qui concerne le deuxième alinéa de l'article 7, le ministre a affirmé : « Seul le renversement du fardeau de la preuve en matière des éléments qui constituent l'accident, peut, en cas de doute, protéger du préjudice la partie la plus faible.

Tel est le but de la modification de l'alinéa 2. Afin de pouvoir bénéficier d'une indemnité, la victime ou les ayants droit devront uniquement fournir la preuve des éléments suivants : 1. l'existence d'une lésion;2. un événement soudain survenu à la victime;3. au cours de l'exécution du contrat. Ces éléments sont des voies de fait qui peuvent aisément être démontrées et que le Gouvernement accepte comme éléments constituants.

La preuve du rapport de cause à effet entre la lésion et le travail et celle de la distinction entre la maladie et l'accident sont transmises de cette façon à l'assureur » (Doc. parl., Sénat, 1970-1971, n° 215, p. 45). B.5.3. La notion de « trajet normal » fait l'objet du commentaire suivant : « Aux termes du projet, le chemin du travail s'entend du ' trajet normal ', sans plus. La disposition de l'article 1er, dernier alinéa, et de l'article 2, de l'arrêté-loi du 13 décembre 1945, qui voulait que l'accident soit dû à un risque inhérent au trajet, n'a pas été reprise » (Doc. parl., Sénat, 1969-1970, n° 328, p. 11). « Le ' trajet normal ' est le trajet que le travailleur doit parcourir entre sa résidence et le lieu indiqué par l'employeur et vice-versa.

Les circonstances font qu'il ne s'agit pas nécessairement du trajet le plus direct ou le plus court. ' Trajet normal ' ne signifie pas non plus ' trajet ininterrompu '. [...] Le Gouvernement estime qu'il appartiendra au juge d'apprécier si l'accident est survenu sur le chemin normal. Il n'aura pas à examiner si le risque était inhérent à ce chemin, parce que le travailleur est de toute évidence exposé à une série de risques qui n'ont rien à voir avec sa qualité de travailleur, mais auxquels il est toutefois exposé parce qu'il se trouve sur ce chemin, en tant que travailleur : ses déplacements résultent des obligations imposées par son statut.

Cette conception découle en fin de compte de la conception générale, qui devient le fondement de la loi : protéger le plus possible le travailleur et ses ayants droit » (Doc. parl., Sénat, 1970-1971, n° 215, p. 6). « Le Ministre se réfère à la jurisprudence qui admet que le chemin ' normal ' n'est pas l'équivalent du chemin ' le plus court '. La jurisprudence donne une interprétation très large à la notion de ' chemin normal '. ' Normal ', appliqué au chemin, doit donc s'interpréter plutôt comme le chemin qui est justifié et non comme le chemin traditionnel ou le plus court » (Doc. parl., Sénat, 1970-1971, n° 215, p.52; ibid., pp. 57-58; voy. également : Doc. parl., Chambre, 1970-1971, n° 887, p. 3).

B.5.4. A propos d'un amendement qui visait à prévoir une réglementation de l'« interruption » de l'exécution du contrat de travail, les travaux préparatoires précisent : « Le Conseil d'Etat signale notamment que la portée des termes ' interrompt l'exécution du contrat de louage de travail ' n'est pas parfaitement claire. Le Conseil se demande s'il s'agit plutôt d'une interruption brève ou bien de toute interruption, quelle qu'elle soit, s'étendant même à plusieurs journées consécutives.

Le Ministre estime qu'il serait utopique de vouloir préciser l'interruption et que cette interprétation plus large de la notion de ' chemin ' suscite au moins autant de problèmes qu'elle n'en veut écarter. [...] L'article 8 doit être interprété avec souplesse, estime le Ministre; les cas prévus par la loi sont certainement couverts; pour tous les autres cas, il appartient à la jurisprudence de décider s'il s'agit ou non d'un accident donnant lieu à réparation. Ce qui revient à dire que la loi énumère, à titre d'exemple, une série de cas dans lesquels le dédommagement est dû. Quant au reste, c'est à la jurisprudence de se prononcer.

L'auteur se rallie à la thèse du Ministre et retire son amendement » (Doc. parl., Sénat, 1970-1971, n° 215, p. 63).

B.5.5. L'article 9 a été adopté à la suite d'un amendement du gouvernement. Cet amendement est justifié comme suit : « Cet amendement du Gouvernement reprend une suggestion du Conseil d'Etat.

Cette suggestion a été faite lors de l'avis donné par le Conseil au sujet des amendements [...] relatifs aux articles 7 et 8. Ces amendements visaient à alléger le fardeau de la preuve en faveur de la victime, en introduisant la présomption que la lésion est provoquée par un accident, lorsque l'existence d'un événement soudain peut être admise.

L'assureur devra prouver l'absence de relation entre les deux phénomènes (c'est-à-dire la lésion et l'événement soudain invoqué).

L'avis du Conseil d'Etat concernant les amendements précités parlait d'un renversement de la preuve incombant à l'assureur pour établir l'absence de lien entre lésion et travail.

Ce texte doit être interprété dans ce sens que l'assureur se trouve devant deux présomptions qui valent jusqu'à preuve du contraire : 1. l'article 7, alinéa 2, 2.l'article [9] » (Doc. parl., Sénat, 1970-1971, n° 215, p. 65).

A une question concernant la portée précise de l'article 9, le ministre répond : « l'article crée une présomption 'juris tantum ' en ce qui concerne le rapport de cause à effet entre l'accident et la lésion. L'assureur sera éventuellement admis à prouver qu'il n'existe aucun rapport entre la lésion et l'accident » (Doc. parl., Chambre, 1970-1971, n° 887/6, p. 11). B.6. En ce qui concerne le « trajet normal » qui doit être parcouru pour qu'il puisse être question d'un accident sur le chemin du travail, la jurisprudence souligne que le « trajet normal » est déterminé dans l'espace et dans le temps. Selon la jurisprudence, il faut d'abord établir, lorsque l'on détermine si un détour (« géographique ») relève du chemin du travail normal ou lorsque l'on établit si une interruption du chemin du travail se justifie (« chronologiquement »), si ce détour ou cette interruption sont importants. En fonction de ce critère, une distinction est établie selon que le détour ou l'interruption sont insignifiants, peu importants ou importants : un détour ou une interruption insignifiants font partie du chemin du travail; un détour ou une interruption peu importants doivent être justifiés par un motif légitime, un détour ou une interruption importants doivent être justifiés par la force majeure.

Quant à la première question préjudicielle B.7. La première question préjudicielle porte sur la compatibilité de l'article 8, § 1er, alinéa 2, première phrase, de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail avec le principe d'égalité et de non-discrimination en ce que cette disposition exige, en matière d'accident sur le chemin du travail, que le trajet entre le lieu de résidence et le lieu du travail soit « normal », alors que cette exigence de « normalité » n'est pas posée pour l'accident du travail stricto sensu dans les articles 9 et 7 de cette loi, en particulier en ce qui concerne l'exécution du contrat de travail.

B.8.1. La différence de traitement en cause découle de la distinction que le législateur a instaurée aux articles 7 et 8 de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail en ce qui concerne la notion d'« accident du travail », entre, d'une part, un accident du travail stricto sensu et, d'autre part, un accident sur le chemin du travail, c'est-à-dire un accident qui est considéré comme accident du travail lorsqu'il se produit sur le chemin du travail.

Il ressort des travaux préparatoires cités en B.5.1 que le législateur a sciemment voulu éviter de définir, dans le texte de la loi, tous les éléments de la notion d'« accident du travail », et ce afin de permettre à la jurisprudence de donner une interprétation large de cette notion dans un sens favorable au travailleur.

Pour qualifier un accident d'accident du travail - qu'il s'agisse d'un accident du travail stricto sensu ou d'un accident sur le chemin du travail - le juge du fond dispose d'un large pouvoir d'appréciation.

Eu égard à la grande diversité des situations auxquelles il est confronté à cet égard, cette qualification devra se faire en particulier sur la base des éléments concrets de chaque cas.

B.8.2. Dans le cas d'un accident du travail stricto sensu, l'accident doit être survenu dans le cours et par le fait de l'exécution du contrat de louage de travail (article 7, alinéa 1er); pour un accident survenu sur le chemin du travail, cette exigence est remplacée par une autre : l'accident doit s'être produit sur le trajet « normal » que le travailleur doit parcourir pour se rendre de sa résidence au lieu de l'exécution du travail, et inversement (article 8, § 1er, alinéa 1er et alinéa 2, première phrase).

Cette distinction, qui fait qu'il n'y a lieu d'appliquer la condition de « normalité » qu'à l'égard des accidents sur le chemin du travail, découle des caractéristiques spécifiques, propres à chacune des deux sortes d'accidents : - un accident du travail stricto sensu se produit en principe dans le cours de l'exécution du contrat de louage de travail, le travailleur étant en règle générale sous l'autorité de l'employeur; un tel accident peut se produire aussi bien sur le lieu de travail que sur le chemin, pour autant que le trajet parcouru s'inscrive dans l'exécution du contrat de travail; - un accident sur le chemin du travail se produit en principe en dehors de l'exécution du contrat de travail, le travailleur ne se trouvant pas, en règle générale, sous l'autorité de l'employeur; un tel accident ne peut en principe se produire que sur le chemin. Dans ces conditions, il peut être admis que l'exigence de la « normalité » du chemin du travail soit effectivement imposée.

Ces caractéristiques peuvent raisonnablement justifier que le législateur ait prévu une réglementation différente pour les deux catégories d'accidents et qu'il n'ait exigé la « normalité » en ce qui concerne le chemin du travail que pour l'accident sur le chemin du travail.

B.8.3. La première question préjudicielle appelle une réponse négative.

Quant à la deuxième question préjudicielle B.9. Le juge a quo interroge la Cour sur la compatibilité de l'article 8, § 1er, de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail avec le principe d'égalité et de non-discrimination, en ce que cette disposition ne prévoit pas de présomption réfragable en vertu de laquelle un accident survenu sur le chemin du travail est réputé survenu par le fait de l'exécution du contrat de travail et en ce que la charge de la preuve quant au motif justifiant une pause éventuelle (ou un éventuel détour) incombe à la victime ou à ses ayants droit, alors que pour un accident du travail stricto sensu, une telle présomption réfragable existe.

B.10.1. La deuxième question préjudicielle porte sur la différence de traitement en matière de charge de la preuve, selon qu'il s'agit d'un accident du travail stricto sensu ou d'un accident sur le chemin du travail.

B.10.2. Pour pouvoir être considéré comme un accident du travail stricto sensu, l'accident qui cause une lésion doit se produire dans le cours et par le fait de l'exécution du contrat de louage de travail (article 7, alinéa 1er). Une présomption - réfragable - est instaurée à cet égard à l'avantage de la victime, présomption en vertu laquelle l'accident survenu dans le cours de l'exécution du contrat est présumé survenu par le fait de cette exécution (article 7, alinéa 2). En outre, la victime bénéficie d'une autre présomption - également réfragable - : lorsqu'elle établit, outre l'existence d'une lésion, celle d'un événement soudain, la lésion est présumée trouver son origine dans un accident (article 9).

Il ressort de ces dispositions ainsi que des travaux préparatoires cités en B.5.2 et B.5.5 que la charge de la preuve est répartie comme suit entre, d'une part, la victime ou ses ayants droit et, d'autre part, l'assureur-loi : - la victime ou ses ayants droit doivent prouver les trois éléments suivants : l'existence d'une lésion; un événement soudain; la survenance de l'accident dans le cours et par le fait de l'exécution du contrat de travail.

La victime ou ses ayants droit bénéficient des deux présomptions légales précitées, visées à l'article 7, alinéa 2, et à l'article 9; - l'assureur-loi peut fournir la preuve contraire des deux présomptions légales précitées.

B.10.3. Comme un accident du travail stricto sensu, un accident sur le chemin du travail exige un événement soudain qui cause une lésion. La présomption légale - réfragable - contenue à l'article 9 de la loi sur les accidents du travail s'applique également aux accidents sur le chemin du travail.

Alors que pour l'accident du travail stricto sensu, il est requis que l'accident soit survenu dans le cours et par le fait du contrat de travail, la règle veut, pour un accident sur le chemin du travail, que l'accident survienne sur le chemin du travail (article 8, § 1er, alinéa 1er); il faut entendre par là le trajet normal de la résidence du travailleur au lieu de l'exécution du travail, et inversement (article 8, § 1er, alinéa 2, première phrase).

La charge de la preuve est répartie comme suit entre, d'une part, la victime ou ses ayants droit et, d'autre part, l'assureur des accidents du travail : - la victime ou ses ayants droit doivent prouver les trois éléments suivants : l'existence d'une lésion; un événement soudain; la survenance de l'accident sur le trajet normal du chemin du travail; - l'assureur-loi peut fournir la preuve contraire de la présomption légale prévue à l'article 9.

B.10.4. La présomption légale prévue à l'article 7, alinéa 2, ne s'applique pas aux accidents sur le chemin du travail.

Dans les travaux préparatoires, il est observé à ce sujet ce qui suit : « La règle suivant laquelle l'accident survenu au cours de l'exécution du contrat de louage de travail est présumé, jusqu'à preuve du contraire, survenu par le fait de l'exécution de ce contrat [...] ne peut être invoquée lorsque l'accident se produit sur le chemin. Le travailleur n'exécute pas à ce moment son contrat de louage de travail.

Il est donc entendu que la règle s'applique effectivement lorsque le transport fait partie intégrante du contrat de louage de travail » (Doc. parl., Chambre, 1970-1971, n° 887/6, p. 4).

Dès lors que pour un accident sur le chemin du travail, il n'est en principe pas question de l'exécution du contrat de travail, la présomption légale prévue par l'article 7, alinéa 2, ne saurait s'appliquer. Si un accident de roulage s'inscrivait par contre dans l'exécution d'un contrat de travail, il ne s'agirait pas d'un accident sur le chemin du travail mais d'un accident du travail stricto sensu.

B.10.5. La deuxième question préjudicielle, en ce qu'elle vise la différence de traitement prévue par l'article 7, alinéa 2, pour ce qui concerne l'existence ou non d'une présomption réfragable, selon qu'il s'agit d'un accident de travail stricto sensu ou d'un accident sur le chemin du travail, appelle une réponse négative.

B.10.6. Le fait que la victime ou ses ayants droit ne doive justifier le motif d'une pause éventuelle ou d'un détour éventuel que lorsqu'il s'agit d'un accident sur le chemin du travail, alors que pour un accident du travail stricto sensu, il y a lieu d'appliquer la présomption réfragable, prévue par l'article 7, alinéa 2, ne saurait aboutir à une autre conclusion.

Comme il est indiqué en B.8.2, les caractéristiques de chacune des deux catégories d'accidents justifient raisonnablement qu'un règlement différent soit prévu. Cela vaut également pour le règlement propre à la charge de la preuve.

B.10.7. La deuxième question préjudicielle appelle une réponse négative.

Quant à la troisième question préjudicielle B.11. La troisième question préjudicielle concerne la compatibilité, avec le principe d'égalité et de non-discrimination, de la notion de « trajet normal », dont il est question à l'article 8, § 1er, alinéa 2, première phrase, de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail, interprétée en ce sens qu'une distinction est opérée en ce qui concerne la pause - en termes de durée - entre la pause insignifiante, peu importante et importante, la victime ou ses ayants droit devant respectivement ne fournir aucune justification, prouver l'existence d'un motif légitime ou démontrer l'existence de la force majeure.

B.12.1. L'article 8, § 1er, alinéa 2, première phrase, énonce que le chemin du travail s'entend du « trajet normal » que le travailleur doit parcourir pour se rendre de sa résidence au lieu de l'exécution du travail, et inversement. Le législateur énumère un certain nombre de cas dans lesquels le trajet reste normal si le travailleur effectue les détours nécessaires et raisonnablement justifiables (article 8, § 1er, alinéa 2, deuxième phrase); il fixe également un certain nombre de trajets qui sont, entre autres, assimilés au chemin du travail (article 8, § 2).

Il ressort des travaux préparatoires cités en B.5.3 que le législateur a laissé au juge le soin d'établir si, dans le cas concret, l'accident s'est produit sur le chemin normal du travail. Le ministre se référait à la jurisprudence qui considère que le « chemin normal » n'équivaut pas au « chemin le plus court ».

B.12.2. Par référence à l'interprétation extensive que fait la jurisprudence de la notion de « chemin normal », il convient donc d'interpréter plutôt le « chemin normal » comme un chemin justifié.

Le caractère justifié ou non du chemin du travail suppose nécessairement une appréciation. Le législateur a entendu réserver cette appréciation au juge, eu égard à la diversité des situations qui peuvent se présenter. Pour définir la notion de « trajet normal », la jurisprudence a développé plusieurs critères et a établi une distinction entre l'interruption « insignifiante », « peu importante » et « importante », cette interruption devant, respectivement, ne pas être justifiée, être justifiée par un motif légitime ou être justifiée par la force majeure.

En raison de la généralité des lois et de la diversité des situations auxquelles s'appliquent les dispositions en cause, il ne peut être reproché au législateur, au nom de la sécurité juridique, de ne pas avoir établi, en l'espèce, des critères à ce point précis que le juge ne disposerait plus d'aucune liberté d'appréciation. Chaque situation concrète ne saurait en effet être appréhendée dans un texte cohérent.

En règle générale, ce n'est que dans le cadre d'un examen concret des circonstances de fait qu'il est possible d'établir si un accident s'est produit sur le trajet normal du chemin du travail. Les éventuelles disparités jurisprudentielles qui pourraient résulter de la généralité des critères légaux peuvent être corrigées par l'exercice des recours.

B.12.3. Dans la troisième question préjudicielle, le juge a quo soumet en réalité une interprétation donnée par la jurisprudence - en particulier celle de la Cour de Cassation - à la notion de « trajet normal », vue sous l'angle de la durée.

B.12.4. La distinction qu'opère la jurisprudence entre une pause « insignifiante », « peu importante » et « importante » se fonde sur un critère de distinction objectif et pertinent, à savoir la durée de l'interruption du trajet parcouru. Au demeurant, en l'absence d'un tel critère, un certain nombre d'accidents de roulage qui, selon l'esprit de la loi sur les accidents du travail, ne peuvent entrer en ligne de compte pourraient être qualifiés d'accidents sur le chemin du travail.

Il ressort de la jurisprudence que, pour déterminer si une pause est justifiée, les éléments suivants interviennent généralement : on examine d'abord l'importance de l'interruption, en appréciant objectivement sa durée; on peut ensuite prendre également en compte les faits qui ont une incidence directe, concrète et objective sur la durée de l'interruption; enfin, le juge examinera le motif de la pause.

En ce qui concerne la différence de durée de l'interruption, il peut raisonnablement être admis que la charge de la preuve puisse également être différente dans les trois cas, reconnus par la jurisprudence.

Sans violer le principe d'égalité et de non-discrimination, il peut donc être admis qu'une pause insignifiante ne soit pas justifiée, qu'une interruption peu importante soit justifiée par un motif légitime et qu'une pause importante soit justifiée par la force majeure pour qu'il puisse être question d'un trajet normal quant à la durée.

B.12.5. La troisième question préjudicielle appelle une réponse négative.

Quant à la quatrième question préjudicielle B.13. La quatrième question préjudicielle porte sur la compatibilité, avec le principe d'égalité et de non-discrimination, de la notion de « trajet normal », dont il est question à l'article 8, § 1er, alinéa 2, première phrase, de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail, interprétée en ce sens qu'en ce qui concerne l'interruption peu importante - aspect temporel -, la victime ou ses ayants droits ne devraient pas fournir la preuve d'un motif légitime justifiant cette pause, alors qu'en ce qui concerne le détour peu important - aspect spatial - ils devraient prouver l'existence du motif légitime justifiant ce détour.

B.14.1. Le texte de la disposition en cause ne fait aucune différence entre l'interruption et le détour. Les travaux préparatoires ne permettent pas de justifier une telle distinction. On y lit en effet, en ce qui concerne la notion de trajet normal : « Le ' trajet normal ' est le trajet que le travailleur doit parcourir entre sa résidence et le lieu indiqué par l'employeur et vice-versa.

Les circonstances font qu'il ne s'agit pas nécessairement du trajet le plus direct ou le plus court. ' Trajet normal ' ne signifie pas non plus ' trajet interrompu ' [lire : ininterrompu]. Prêter secours (devoir civil et moral), interruptions en raison de la distance, de l'état atmosphérique, d'une défectuosité technique ou mécanique, etc., n'enlèvent pas au ' trajet ' son caractère ' normal ' » (Doc. parl., Sénat, 1970-1971, n° 215, p. 6).

B.14.2. La Cour de Cassation considère, de manière constante, que le trajet parcouru par le travailleur pour se rendre de sa résidence au lieu de l'exécution de son travail, et inversement, est « normal » au sens de la disposition en cause s'il est normal quant à l'espace et quant à la durée (Cass., 25 avril 1994, Pas. 1994, I, n° 196; Cass., 8 septembre 1997, Pas. 1997, I, n° 340). L'écart par rapport au trajet normal doit lorsqu'il n'est pas important, être justifié par un motif légitime qu'il s'agisse d'un détour ou d'une interruption (Cass., 13 avril 1992, Pas. 1982, I, n° 433; Cass., 17 janvier 1994, Pas. 1994, I, n° 24; Cass., 13 novembre 1995, Pas. 1995, I, n° 490; Cass., 5 mai 1999, Pas. 1999, I, n° 320; Cass., 8 novembre 1999, Pas. 1999, I, n° 591; Cass., 24 février 2003 (S.01.0190.F); Cass., 4 avril 2005 (S.04.0126.F); Cass. 5 mars 2007 (S.06.0074.N)).

B.14.3. Le juge a quo fait observer que l'arrêt de la Cour de Cassation du 6 novembre 1978 était précédé de conclusions contraires du ministère public, selon lesquelles le détour est différent de l'interruption, et que cette position était déjà celle du ministère public précédant l'arrêt de la Cour de Cassation du 11 mai 1977 (Pas. 1977, I, p. 918).

B.14.4. Si les conclusions précédant l'arrêt du 6 novembre 1978 faisaient une distinction entre l'interruption et le détour, c'était pour en conclure que ne serait pas pertinente la distinction entre l'interruption peu importante et l'interruption importante mais, dans les deux hypothèses, il était soutenu que le motif légitime doit être démontré. Quant aux conclusions précédant l'arrêt du 11 mai 1977, elles exprimaient l'hésitation de son auteur quant à savoir si la distinction relative aux causes de justification en cas de détour était « applicable aussi à l'interruption de trajet », mais elles contenaient également l'affirmation suivante : « Un point est certain et ne souffre pas de discussion : c'est qu'un trajet est considéré comme normal notamment (je souligne ce mot pour prévenir l'interprétation a contrario ) lorsqu'une interruption dont la durée n'est pas importante est justifiée par une cause légitime ».

B.14.5. La jurisprudence constante, rappelée en B.14.2, n'a jamais été remise en cause par le législateur, bien qu'il ait apporté à plusieurs reprises des modifications à l'article 8 de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer (loi du 22 juillet 1981 modifiant l'article 8, § 2; article 36 de la loi-programme du 22 décembre 1989Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/1989 pub. 14/11/2011 numac 2011000693 source service public federal interieur Loi-programme fermer, modifiant également l'article 8, § 2; loi du 12 juillet 1991, modifiant l'article 8, § 1er, deuxième alinéa; loi du 13 juillet 2006Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/07/2006 pub. 01/09/2006 numac 2006022848 source service public federal securite sociale Loi portant des dispositions diverses en matière de maladies professionnelles et d'accidents du travail et en matière de réinsertion professionnelle fermer, complétant l'article 8, § 1er, alinéa 3).

Si la loi du 12 juillet 1991 avait pour objet de permettre de tenir compte du covoiturage pour apprécier la notion de trajet normal, les travaux préparatoires précisent : « Par ailleurs, le texte de la proposition ne peut entraîner la remise en question de la jurisprudence existante concernant le chemin normal du travail ainsi que les détours admis dans d'autres situations que celles qui sont visées dans la proposition » (Doc. parl., Chambre, 1990-1991, n° 1494/5, p. 5).

B.14.6. Dès lors que la quatrième question préjudicielle se fonde sur une différence de traitement qui ne correspond ni au texte de la loi, ni à la volonté du législateur, ni à la lecture qu'en fait une jurisprudence constante de la Cour de Cassation, cette question n'appelle pas de réponse.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 8, § 1er, alinéa 2, de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.

Ainsi prononcé en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989, à l'audience publique du 12 décembre 2007, par le président M. Bossuyt en remplacement du président émérite A. Arts, légitimement empêché.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président, M. Bossuyt.

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