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Arrêt
publié le 27 mars 2008

Extrait de l'arrêt n° 53/2008 du 13 mars 2008 Numéro du rôle : 4218 En cause : le recours en annulation de la loi du 28 mars 2007 modifiant la loi ordinaire du 16 juillet 1993 visant à achever la structure fédérale de l'Etat, introduit par La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Melchior et M. Bossuyt, et des juges P. Ma(...)

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Extrait de l'arrêt n° 53/2008 du 13 mars 2008 Numéro du rôle : 4218 En cause : le recours en annulation de la loi du 28 mars 2007Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/03/2007 pub. 10/04/2007 numac 2007003168 source service public federal finances Loi modifiant la loi ordinaire du 16 juillet 1993 visant à achever la structure fédérale de l'Etat fermer modifiant la loi ordinaire du 16 juillet 1993 visant à achever la structure fédérale de l'Etat, introduit par l'ASBL « Fédération royale de l'Industrie des Eaux et des Boissons rafraîchissantes » et autres.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Melchior et M. Bossuyt, et des juges P. Martens, R. Henneuse, E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, J. Spreutels et T. Merckx-Van Goey, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 11 juin 2007 et parvenue au greffe le 12 juin 2007, un recours en annulation de la loi du 28 mars 2007Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/03/2007 pub. 10/04/2007 numac 2007003168 source service public federal finances Loi modifiant la loi ordinaire du 16 juillet 1993 visant à achever la structure fédérale de l'Etat fermer modifiant la loi ordinaire du 16 juillet 1993 visant à achever la structure fédérale de l'Etat (publiée au Moniteur belge du 10 avril 2007) a été introduit par l'ASBL « Fédération royale de l'Industrie des Eaux et des Boissons rafraîchissantes », dont le siège social est établi à 1040 Bruxelles, avenue des Arts 43, la SA « Nestlé Waters Marketing & Distribution », dont le siège social est établi à 1070 Bruxelles, boulevard Industriel 198, et la SA « Danone Waters & Beverages Belux », dont le siège social est établi à 1160 Bruxelles, avenue Jules Cockx 6. (...) II. En droit (...) Quant à l'objet du recours B.1. Les parties requérantes demandent l'annulation de la loi du 28 mars 2007Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/03/2007 pub. 10/04/2007 numac 2007003168 source service public federal finances Loi modifiant la loi ordinaire du 16 juillet 1993 visant à achever la structure fédérale de l'Etat fermer modifiant la loi ordinaire du 16 juillet 1993 visant à achever la structure fédérale de l'Etat. Il apparaît des développements de la requête que le recours porte sur l'article 3 de cette loi. Les articles 2 et 3 de celle-ci énoncent : «

Art. 2.Dans l'article 369 de la loi ordinaire du 16 juillet 1993 visant à achever la structure fédérale de l'Etat, sont apportées les modifications suivantes : a) le point 17° est remplacé par la disposition suivante : ' 17° cotisation d'emballage : cotisation qui frappe les récipients pour boissons;' b) le point 18° est remplacé par la disposition suivante : ' 18° récipient individuel : tout récipient, quel qu'en soit le matériau constitutif, destiné à être livré au consommateur final, sans avoir à subir un changement de conditionnement.' c) un point 19°, libellé comme suit, est ajouté : ' 19° récipient individuel réutilisable : tout récipient visé au 18°, dont la personne physique ou morale qui met à la consommation des boissons conditionnées qu'il contient fournit la preuve que ce récipient peut être rempli au moins sept fois et que ce récipient est récupéré via un système de consigne et est effectivement réutilisé.Le montant de la consigne est au minimum de 0,16 EUR pour les récipients d'une contenance de plus de 0,5 litre et de 0,08 EUR pour ceux d'une contenance inférieure ou égale à 0,5 litre '.

Art. 3.L'article 371 de la même loi est remplacé par la disposition suivante : '

Art. 371.§ 1er. Une cotisation d'emballage est due : 1° lors de la mise à la consommation en matière d'accise des boissons visées à l'article 370, conditionnées dans des récipients individuels;2° lors de la mise sur le marché belge des boissons susvisées conditionnées en récipients individuels lorsque ce conditionnement a lieu postérieurement à la mise à la consommation en matière d'accise de ces boissons. Cette cotisation s'élève à : - 1,4100 EUR par hectolitre de produit contenu dans des récipients individuels réutilisables; - 9,8600 EUR par hectolitre de produit contenu dans des récipients individuels non réutilisables ' ».

B.2. L'article 369, 19°, précité, de la loi du 16 juillet 1993Documents pertinents retrouvés type loi prom. 16/07/1993 pub. 25/03/2016 numac 2016000195 source service public federal interieur Loi ordinaire visant à achever la structure fédérale de l'Etat. - Coordination officieuse en langue allemande d'extraits fermer a été modifié ensuite par l'article 155 de la loi-programme du 27 avril 2007 mais les parties requérantes estiment que cette nouvelle disposition ne leur porte aucun préjudice et ne doit donc pas être intégrée à leur recours.

Dès lors que la disposition attaquée est entrée en vigueur le jour de la publication de la loi du 28 mars 2007Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/03/2007 pub. 10/04/2007 numac 2007003168 source service public federal finances Loi modifiant la loi ordinaire du 16 juillet 1993 visant à achever la structure fédérale de l'Etat fermer au Moniteur belge (en vertu de l'article 5 de cette loi), soit le 10 avril 2007, et qu'elle a donc pu avoir des effets avant son remplacement par l'article 155 de la loi-programme précitée (entrée en vigueur le 1er juillet 2007), le recours en annulation conserve un objet en ce qui concerne cette disposition.

Quant au fond En ce qui concerne le premier moyen B.3. Dans un premier moyen, pris de la violation des articles 10, 11, 23 et 172 de la Constitution, combinés ou non avec les principes de bonne gestion, de l'utilisation prudente et rationnelle des ressources naturelles (ou principe de parcimonie), de la correction, par priorité à la source, des atteintes à l'environnement et avec le principe de proportionnalité, les parties requérantes font valoir, d'une part, que les dispositions attaquées créent une discrimination entre les redevables soumis à une cotisation de 1,4100 euro par hectolitre en ce qui concerne les récipients individuels réutilisables et les redevables soumis à une cotisation de 9,8600 euros par hectolitre en ce qui concerne les récipients individuels non réutilisables, même lorsqu'ils sont recyclables; elles font valoir, d'autre part, que ces mêmes dispositions créent une identité de traitement discriminatoire en soumettant au même taux de 9,8600 euros par hectolitre tous les emballages non réutilisables, qu'ils soient ou non recyclables. Le législateur aurait ainsi établi une différence de traitement en ce qui concerne les emballages recyclables et les emballages réutilisables et aurait poursuivi un objectif purement budgétaire sans procéder au « bilan environnemental global » requis par la jurisprudence de la Cour.

B.4. Contrairement à ce que soutient le Conseil des Ministres à propos de l'aspect du moyen qui concerne la différence de traitement, les catégories qui font l'objet de celle-ci sont comparables puisqu'il s'agit dans les deux cas de producteurs d'emballages soumis à une cotisation dont le taux est défini de manière variable.

B.5. La loi du 28 mars 2007Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/03/2007 pub. 10/04/2007 numac 2007003168 source service public federal finances Loi modifiant la loi ordinaire du 16 juillet 1993 visant à achever la structure fédérale de l'Etat fermer constitue une loi de réparation, adoptée à la suite de l'annulation, par l'arrêt n° 9/2007 du 11 janvier 2007, de l'article 371 de la loi du 16 juillet 1993Documents pertinents retrouvés type loi prom. 16/07/1993 pub. 25/03/2016 numac 2016000195 source service public federal interieur Loi ordinaire visant à achever la structure fédérale de l'Etat. - Coordination officieuse en langue allemande d'extraits fermer précitée, modifié par l'article 2 de la loi du 20 juillet 2006Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/2006 pub. 07/08/2006 numac 2006003374 source service public federal finances Loi modifiant la loi ordinaire du 16 juillet 1993 visant à achever la structure fédérale de l'Etat type loi prom. 20/07/2006 pub. 28/07/2006 numac 2006202314 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi portant des dispositions diverses fermer.

B.6.1. Dans sa version antérieure à la loi-programme du 22 décembre 2003Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/2003 pub. 31/12/2003 numac 2003021248 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme fermer, l'article 371 de la loi ordinaire du 16 juillet 1993 visant à achever la structure fédérale de l'Etat disposait : « § 1er. Une cotisation d'emballage est perçue, lors de la mise à la consommation de boissons conditionnées dans des récipients individuels, au taux de 11,6262 EUR par hectolitre de produit contenu dans ces récipients. § 2. Les récipients réutilisables ne sont pas soumis à la cotisation d'emballage, moyennant le respect des conditions suivantes : a) la personne physique ou morale qui met à la consommation des boissons conditionnées dans des récipients individuels fournit la preuve que ces récipients sont réutilisables, c'est-à-dire qu'ils peuvent être remplis au moins sept fois, et que ces récipients sont récupérés via un système de consigne et sont effectivement réutilisés;b) le montant de la consigne est au minimum de 0,16 euro pour les récipients d'une contenance de plus de 0,5 litre et de 0,08 EUR pour les récipients d'une contenance inférieure ou égale à 0,5 litre; [...] § 3. Sont exonérés de la cotisation d'emballage : [...] 2° les emballages de boissons principalement constitués par un des matériaux visés à l'annexe 18;3° les emballages de boissons constitués, par type de matériau, d'une quantité minimale de matériaux recyclés, dont le pourcentage est fixé par arrêté royal délibéré en Conseil des Ministres, confirmé ensuite par la loi. § 4. L'exonération visée au paragraphe 3 est octroyée aux conditions ci-après : a) la personne physique ou morale qui met à la consommation des boissons conditionnées dans des récipients individuels fournit la preuve que ces récipients répondent aux conditions fixées par le Roi; [...] § 5. Un organisme de contrôle indépendant, agréé par le Ministre de l'Economie, vérifie la teneur en matériaux recyclés des emballages pour boissons sur la base des volumes de matériaux recyclés et de matières premières vierges qui sont utilisées pour produire les récipients pour boissons susceptibles de bénéficier de l'exonération ».

B.6.2. L'article 358, a), de la loi-programme du 22 décembre 2003Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/2003 pub. 31/12/2003 numac 2003021248 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme fermer a réduit le taux de la cotisation d'emballage à un montant de 9,8537 euros par hectolitre.

L'article 358, b), a abrogé le 3° du paragraphe 3 de l'article 371 précité, tandis que les litterae c) et d) ont abrogé respectivement les paragraphes 4 et 5 de ce même article 371.

Ces modifications aboutissaient à la suppression de la possibilité pour les emballages non réutilisables de bénéficier de l'exonération de la cotisation prévue par l'article 371.

Par ailleurs, l'article 359 de la loi-programme du 22 décembre 2003Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/2003 pub. 31/12/2003 numac 2003021248 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme fermer insérait dans la loi ordinaire du 16 juillet 1993 un article 371bis habilitant le Roi à prévoir une exonération de la cotisation d'emballage pour les emballages de boissons à usage unique, constitués d'une quantité de matières recyclées dont Il fixait le pourcentage minimal.

B.7. Par son arrêt n° 186/2005 du 14 décembre 2005, la Cour a annulé les articles 358, b), c) et d), et 359 de la loi-programme du 22 décembre 2003Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/2003 pub. 31/12/2003 numac 2003021248 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme fermer, maintenu les effets de l'article 358, b), c) et d), annulés, jusqu'au 24 juillet 2004 et maintenu les effets de l'article 359 annulé jusqu'au 30 juin 2006.

La Cour a considéré que l'habilitation conférée au Roi par l'article 371bis de la loi ordinaire du 16 juillet 1993 violait l'article 172, alinéa 2, de la Constitution. En ce qui concerne l'article 371, elle a constaté que la loi-programme du 22 décembre 2003Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 22/12/2003 pub. 31/12/2003 numac 2003021248 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme fermer supprimait l'exonération de la cotisation due pour les emballages de boissons constitués, par type de matériau, d'une quantité minimale de matériaux recyclés.

B.8. A la suite de cet arrêt, l'article 2 de la loi du 20 juillet 2006Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/2006 pub. 07/08/2006 numac 2006003374 source service public federal finances Loi modifiant la loi ordinaire du 16 juillet 1993 visant à achever la structure fédérale de l'Etat type loi prom. 20/07/2006 pub. 28/07/2006 numac 2006202314 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi portant des dispositions diverses fermer a remplacé l'article 371 précité afin de prévoir un taux de 0 euro par hectolitre pour les types d'emballages réutilisables, un taux de 9,8537 euros par hectolitre pour les types d'emballages jetables et une non-soumission à la cotisation d'emballage pour les récipients constitués de bois, de grès, de porcelaine ou de cristal comme c'était déjà le cas depuis le début de la mise en oeuvre de la loi. Cette modification visait, tout à la fois, à ne pas menacer les effets budgétaires de la cotisation d'emballage et à prendre en compte le souci exprimé par la Cour dans son arrêt (Doc. parl., Chambre, 2005-2006, DOC 51-2596/001, p. 5).

B.9. L'arrêt n° 9/2007 précité a annulé l'article 371, remplacé par la loi du 20 juillet 2006Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/2006 pub. 07/08/2006 numac 2006003374 source service public federal finances Loi modifiant la loi ordinaire du 16 juillet 1993 visant à achever la structure fédérale de l'Etat type loi prom. 20/07/2006 pub. 28/07/2006 numac 2006202314 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi portant des dispositions diverses fermer précitée. La Cour décide à cet égard (B.6.4, alinéa 2) : « Même si la loi attaquée témoigne, selon le Conseil des Ministres, d'un changement de politique du législateur qui entendrait en revenir à l'objectif environnemental initial de la loi du 16 juillet 1993Documents pertinents retrouvés type loi prom. 16/07/1993 pub. 25/03/2016 numac 2016000195 source service public federal interieur Loi ordinaire visant à achever la structure fédérale de l'Etat. - Coordination officieuse en langue allemande d'extraits fermer et, par conséquent, promouvoir les emballages réutilisables et même si elle est présentée comme une loi de réparation, par laquelle le législateur entend en outre sauvegarder les impératifs budgétaires dont il a la charge, la loi attaquée ne prend pas en compte les conditions, évoquées par l'arrêt n° 186/2005 (B.15.5), auxquelles le bilan environnemental global peut se révéler positif pour certains emballages non réutilisables mais qui sont dans une large mesure recyclés, et auxquelles, compte tenu des données scientifiques disponibles, ces emballages peuvent entrer en ligne de compte pour un régime plus favorable que celui auquel ils sont actuellement soumis.

La référence à l'objectif environnemental évoqué par le Conseil des Ministres ne saurait dispenser d'avoir égard, actuellement, à de telles données. Or, les travaux préparatoires de la loi attaquée n'indiquent pas que le législateur a examiné et jugé irréalisables les conditions auxquelles, compte tenu desdites données scientifiques, un tel régime aurait pu être octroyé aux redevables intéressés ».

B.10. L'exposé des motifs de la loi attaquée indique : « Tenant compte de cette observation de la Cour d'arbitrage et sachant que la loi du 16 juillet 1993Documents pertinents retrouvés type loi prom. 16/07/1993 pub. 25/03/2016 numac 2016000195 source service public federal interieur Loi ordinaire visant à achever la structure fédérale de l'Etat. - Coordination officieuse en langue allemande d'extraits fermer a défini les emballages réutilisables comme étant des emballages qui peuvent être remplis au moins sept fois, qui sont récupérés via un système de consigne et qui sont effectivement réutilisés, il paraît opportun de mettre sur un pied d'égalité les emballages réutilisables et les emballages à usage unique.

Partant de ce fait, les emballages réutilisables, au cours de leur vie d'emballage avant d'être récupérés une dernière fois et ensuite recyclés, seront mis, en présence de leur contenu, au moins sept fois à la consommation. Dans le même temps, l'emballage à usage unique, avant d'être récupéré et ensuite recyclé, ne sera mis qu'une seule fois à la consommation. Il faut donc que ces deux emballages subissent la même taxation au cours de leur durée de vie.

C'est la raison pour laquelle, en tenant compte du taux appliqué actuellement aux emballages à usage unique, à savoir 9,8600 EUR/hectolitre, on peut fixer une cotisation d'emballage correspondant à un septième de ce montant, à savoir 1,4100 EUR/hectolitre pour les emballages réutilisables » (Doc. parl., Chambre, 2006-2007, DOC 51-2894/001, pp. 4 et 5).

Le rapport fait au nom de la commission des Finances et du Budget de la Chambre des représentants indique encore : « Le secrétaire d'Etat fait observer que le critère ' réutilisable sept fois ' en tant qu'élément permettant de distinguer les emballages réutilisables ou non a été instauré dans notre législation en matière de cotisations d'emballage en 1993 par le gouvernement de l'époque [...]. Selon lui, l'arrêt de la Cour d'arbitrage du 11 janvier 2007 n'a aucune incidence budgétaire, étant donné que les secteurs concernés n'ont pas cessé leurs paiements. [...] Le secrétaire d'Etat rappelle également que la législation précédente, qui a été annulée, instaurait un taux zéro pour ceux qui voulaient travailler de manière responsable sur le plan écologique. Le gouvernement exécutera cependant l'arrêt de la Cour d'arbitrage, qui a pour effet que chacun devra payer la cotisation d'emballage. La taxe sur les emballages réutilisables sera cependant beaucoup plus faible que celle sur les emballages non réutilisables » (Doc. parl., Chambre, 2006-2007, DOC 51-2894/002, p. 5).

B.11. Les dispositions attaquées sont fondées, comme l'indiquent les travaux préparatoires précités et comme le soutient le Conseil des Ministres, sur un critère qui est fonction de la durée d'utilisation des emballages en cause : les emballages réutilisables, qui sont définis comme permettant d'écouler au moins sept fois plus de produit que les emballages non réutilisables, sont soumis à une cotisation qui est proportionnellement moindre. Une telle mesure est pertinente au regard de l'objectif poursuivi par le législateur puisqu'elle permet, tout à la fois, d'atteindre un objectif budgétaire en soumettant tous les emballages à la cotisation attaquée et d'atteindre un objectif environnemental en prévoyant un taux proportionnellement réduit en faveur de ceux qui sont plus performants, en ce qui concerne la production de déchets solides, parce qu'ils sont réutilisables au moins sept fois. Contrairement à ce que soutiennent les parties requérantes, le législateur pouvait accorder le bénéfice du taux réduit en ce qui concerne les récipients pouvant être réutilisés au moins sept fois sans être tenu d'arrêter des mesures permettant de le vérifier dès lors, d'une part, que la loi dispose de manière générale et ne peut être tenue de régir chacune des situations particulières auxquelles elle s'applique et, d'autre part, que le législateur a pu considérer que l'entreprise qui adapte sa production de manière à employer des emballages réutilisables ne serait vraisemblablement pas amenée à cesser de les utiliser avant d'en avoir amorti la charge.

B.12.1. Dans la loi du 30 décembre 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/12/2002 pub. 17/04/2003 numac 2002003575 source service public federal finances Loi portant diverses dispositions fiscales en matière d'écotaxes et d'écoréductions fermer portant diverses dispositions fiscales en matière d'écotaxes et d'écoréductions, le législateur avait opté pour un régime qui aboutissait à faire une double différence de traitement, d'une part, entre emballages réutilisables, dispensés de la cotisation, et emballages non réutilisables et, d'autre part, parmi ces derniers, entre emballages recyclables et emballages non recyclables. Il apparaît des travaux préparatoires de la loi attaquée, cités en B.10, que le législateur entend désormais que tous les emballages, réutilisables ou non, soient soumis à une cotisation, la différence subsistant, quant au montant de la cotisation, étant fonction de leur caractère réutilisable ou non.

B.12.2. Un arrêt de la Cour et la motivation de celui-ci n'ont pas pour conséquence, en principe, que le législateur ne puisse modifier sa politique en matière de taxation. Il a décidé de soumettre à une taxe tous les emballages, réutilisables ou non, une différence subsistant quant au montant de la cotisation en fonction de leur caractère réutilisable ou non et a décidé de ne plus prendre en considération leur caractère recyclable ou non - la faculté de recyclage étant actuellement assurée pour la plupart des emballages - ou l'influence dans l'élaboration des emballages de l'utilisation de matériaux recyclés. Ces nouvelles options relèvent du pouvoir d'appréciation du législateur.

B.13. Il s'ensuit que le premier moyen n'est fondé ni en ce qu'il dénonce une différence de traitement quant au taux de la cotisation applicable, respectivement, aux récipients individuels réutilisables et aux récipients individuels non réutilisables, ni en ce qu'il dénonce une identité de traitement réservée aux emballages recyclables et aux emballages non recyclables.

En ce qui concerne le deuxième moyen B.14.1. Dans un deuxième moyen, pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, combinés ou non avec l'article 87 du Traité CE, les parties requérantes font valoir que les dispositions attaquées, tout en prétendant poursuivre un objectif environnemental, accordent un bénéfice aux emballages réutilisables alors que l'article 87 précité interdit les aides d'Etat.

B.14.2. Dans leur mémoire en réponse, les parties requérantes se réfèrent en outre à l'article 88 du Traité CE. Il peut être admis que les arguments qui en sont tirés ne constituent pas un moyen nouveau - contrairement à ce que soutient le Conseil des Ministres - dès lors que l'article 88 se borne à prévoir la procédure permettant de censurer les aides que l'article 87 a pour objet de prohiber.

B.15. Les articles 87 et 88 du Traité instituant la Communauté européenne disposent que, sauf dérogations prévues par le Traité, les aides accordées par les Etats qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions sont incompatibles avec le marché commun. Ces dispositions prévoient une procédure suivant laquelle la Commission européenne est chargée, en même temps que les Etats membres, de l'examen permanent des régimes d'aide existants dans les Etats. Si elle constate, après avoir mis les intéressés en demeure de présenter leurs observations, qu'une aide n'est pas compatible avec le marché commun, elle « décide que l'Etat intéressé doit la supprimer ou la modifier dans le délai qu'elle détermine ». Cette décision n'a pas d'effet rétroactif.

En vertu des mêmes dispositions, les aides nouvelles doivent être notifiées à la Commission avant leur exécution, et la Commission juge de leur compatibilité avec les dispositions de droit européen. En cas de défaut de notification par l'Etat concerné, il appartient aussi, en dernière instance, à la Commission, sous le contrôle des juridictions européennes, de décider de la compatibilité de cette aide avec le marché commun.

B.16. Il résulte de cette procédure qu'une mesure qualifiée d'aide d'Etat au sens des articles 87 et 88 du Traité précité ne saurait être considérée a priori, sans décision de la Commission européenne, comme contraire au marché commun. Lorsque la Commission décide que tel est le cas concernant une aide existante, celle-ci est supprimée ou modifiée dans un délai déterminé par elle. Lorsqu'une aide nouvelle mise à exécution sans notification - hypothèse à laquelle les parties requérantes se réfèrent, non dans leur requête mais dans leur mémoire en réponse - est jugée contraire au marché commun par la Commission, celle-ci en exige en principe la récupération; en l'espèce, il apparaît des travaux préparatoires que la Commission a été informée des dispositions du projet de loi peu après le dépôt de celui-ci (Doc. parl., Chambre, 2006-2007, DOC 51-2894/002, p. 5).

Le deuxième moyen n'est pas fondé.

En ce qui concerne le troisième moyen B.17. Dans un troisième moyen, pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 90 du Traité CE et avec la directive 94/62/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 1994, relative aux emballages et déchets d'emballages, les parties requérantes font valoir que les dispositions attaquées poursuivent un objectif budgétaire alors que les dispositions européennes précitées interdisent les discriminations résultant d'impositions intérieures et n'admettent les cotisations d'emballage que dans un but de protection de l'environnement.

B.18. L'article 90 a pour but d'assurer la libre circulation des marchandises entre les Etats membres dans des conditions normales de concurrence par l'élimination de toute forme de protection pouvant résulter de l'application d'impositions intérieures discriminatoires à l'égard des produits originaires d'autres Etats membres (C.J.C.E., 3 mars 1988, affaire 252/86, Rec. 1988, pp. 1343 et suivantes). Cette disposition ne s'oppose pas à ce qu'un Etat membre établisse des régimes fiscaux différenciés pour autant que ceux-ci reposent sur des critères objectifs et puissent être justifiés comme étant nécessaires pour réaliser des objectifs compatibles avec les exigences du droit communautaire primaire et dérivé et que leurs conditions d'application évitent toute forme de discrimination à l'égard des produits étrangers.

B.19. Les dispositions attaquées, qui déterminent de manière objective quels sont les emballages bénéficiant d'un taux réduit de taxation, poursuivent un objectif qui, comme il est indiqué en B.11, est tout à la fois budgétaire et environnemental : le taux réduit, qui est applicable aux emballages dont le caractère réutilisable favorise une meilleure protection de l'environnement, contribue à la réalisation d'un objectif qui est compatible avec les exigences du droit communautaire primaire et dérivé et n'est pas discriminatoire à l'égard des produits étrangers puisque ce taux réduit peut être octroyé aux entreprises belges comme aux entreprises étrangères.

B.20. Quant à la directive 94/62/CE précitée, elle ne contient aucune obligation inconditionnelle quant au choix d'un système de valorisation des déchets d'emballage.

Il apparaît ainsi que, bien que ladite directive permette aux Etats membres de favoriser tant la réutilisation que le recyclage, elle ne s'oppose cependant pas à une réglementation nationale - comme la législation attaquée - qui favoriserait par principe la réutilisation.

La réutilisation constitue en effet, en vertu de l'article 1er de cette directive, un des principes fondamentaux de cette directive d'harmonisation, au même titre que le recyclage et les autres formes de valorisation des déchets d'emballages.

Une législation qui, comme en l'espèce, prévoit un taux réduit de taxation pour les emballages réutilisables ne peut donc être considérée comme contraire à l'exigence impérative de protection de l'environnement, qui constitue par ailleurs un objectif présent dans les directives européennes, conformément à l'article 174, paragraphe 1, du Traité C.E. B.21. Si la réutilisation est de nature à entraîner des coûts supplémentaires en matière de transports et peut causer d'autres formes de pollution, ceci est la conséquence de l'option en faveur de la réutilisation, que le droit européen autorise en vertu de l'article 5 de la directive 94/62/CE du 20 décembre 1994 précitée.

B.22. Le troisième moyen n'est pas fondé.

Par ces motifs, la Cour rejette le recours.

Ainsi prononcé en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989, à l'audience publique du 13 mars 2008.

Le greffier, Le président, P.-Y. Dutilleux. M. Melchior.

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