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Arrêt
publié le 05 juillet 2016

Extrait de l'arrêt n° 51/2016 du 24 mars 2016 Numéro du rôle : 6205 En cause : la question préjudicielle relative aux articles 1 er , 2 et 46 de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail, posée par le Tribunal de première La Cour constitutionnelle, composée des présidents E. De Groot et J. Spreutels, et des juges L. (...)

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Extrait de l'arrêt n° 51/2016 du 24 mars 2016 Numéro du rôle : 6205 En cause : la question préjudicielle relative aux articles 1er, 2 et 46 de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail, posée par le Tribunal de première instance de Flandre orientale, division Termonde.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents E. De Groot et J. Spreutels, et des juges L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Moerman, E. Derycke et F. Daoût, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président E. De Groot, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par jugement du 17 avril 2015 en cause du ministère public et A.D. et E.D., parties civiles, contre A.V. et la SPRL « VDA & Co », dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 22 mai 2015, le Tribunal de première instance de Flandre Orientale, division Termonde, a posé la question préjudicielle suivante : « Les articles 1er, 2 et 41 [lire : 46] de la loi sur les accidents du travail violent-ils le principe d'égalité et de non-discrimination, garanti par la Constitution coordonnée aux articles 10 et 11, s'ils sont interprétés en ce sens que : - un employeur dont le travailleur ou apprenti est victime d'un accident du travail peut, sur la base de l'article 46 de la loi sur les accidents du travail, invoquer une immunité civile (la ' règle de l'immunité '); - un employeur qui occupe une personne sur la base d'un contrat de formation professionnelle individuelle, tel qu'il est réglé par l'article 95 de l'arrêté du Gouvernement flamand du 5 juin 2009 portant organisation de l'emploi et de la formation professionnelle, ne peut invoquer le régime d'immunité prévu à l'article 46 de la loi sur les accidents du travail, alors que cet employeur doit également conclure un contrat avec un assureur qui est tenu d'offrir les mêmes garanties que celles prévues par la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail, et que la nature des accidents qui donnent lieu aux actions en réparation du dommage qui en découle et la portée des garanties qui doivent être offertes par les assureurs sont identiques ou analogues et que la pression financière sur l'employeur est identique ? ». (...) III. En droit (...) B.1. Bien que la question préjudicielle renvoie aux articles 1er, 2, et 41 de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail (ci-après : la loi sur les accidents du travail), il ressort de cette question et de la motivation de la décision de renvoi que sont en réalité visés les articles 1er, 2 et 46 de cette loi.

Ces articles disposent : «

Art. 1er.La présente loi est applicable à toutes les personnes qui, en qualité d'employeur, de travailleur ou de personne assimilée, sont assujetties pour tout ou en partie, à : 1° la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs; 2° [...]; 3° l'arrêté-loi du 7 février 1945 concernant la sécurité sociale des marins de la marine marchande.

Art. 2.La présente loi est également applicable aux armateurs qui exploitent leur propre bâtiment; ils sont réputés être à la fois employeur et travailleur ». «

Art. 46.§ 1er. Indépendamment des droits découlant de la présente loi, une action en justice peut être intentée, conformément aux règles de la responsabilité civile, par la victime ou ses ayants droit : 1° contre l'employeur qui a causé intentionnellement l'accident du travail ou causé intentionnellement un accident ayant entraîné un accident du travail;2° contre l'employeur, dans la mesure où l'accident du travail a causé des dommages aux biens du travailleur;3° contre le mandataire ou le préposé de l'employeur qui a causé intentionnellement l'accident du travail;4° contre les personnes autres que l'employeur, ses mandataires ou préposés, qui sont responsables de l'accident;5° contre l'employeur, ses mandataires ou préposés, lorsque l'accident est survenu sur le chemin du travail.6° contre l'employeur, ses mandataires ou préposés lorsque l'accident est un accident de roulage.Par accident de roulage, on entend tout accident de la circulation routière impliquant un ou plusieurs véhicules, automoteurs ou non, et lié à la circulation sur la voie publique. 7° contre l'employeur qui, ayant méconnu gravement les obligations que lui imposent les dispositions légales et réglementaires relatives au bien-être des travailleurs lors de l'exécution de leur travail, a exposé les travailleurs au risque d'accident du travail, alors que les fonctionnaires désignés pour surveiller l'application desdites dispositions en application des articles 43 à 49 du Code pénal social lui ont par écrit : a) signalé le danger auquel il expose ces travailleurs;b) communiqué les infractions qui ont été constatées;c) prescrit des mesures adéquates;d) communiqué que s'il néglige de prendre les mesures visées sous c), la victime ou son ayant droit a, en cas d'accident éventuel, la possibilité d'intenter une action civile en responsabilité. La mise en demeure écrite mentionne les infractions aux prescriptions en matière de sécurité et d'hygiène du travail qui ont été constatées, le risque spécifique d'accident du travail ainsi créé, les mesures concrètes de prévention à prendre ainsi que le délai dans lequel ces mesures doivent être réalisées, sous peine de donner à la victime ou à ses ayants droit la possibilité d'intenter une action en responsabilité civile dans l'éventualité d'un accident.

L'action en responsabilité civile ne peut pas être intentée contre l'employeur qui prouve que l'accident est également dû au non-respect, par le travailleur victime de l'accident, des instructions de sécurité que l'employeur lui a préalablement notifiées par écrit, alors que les moyens de sécurité nécessaires ont été mis à sa disposition. § 2. Indépendamment des dispositions du § 1er, l'entreprise d'assurances reste tenue du paiement des indemnités résultant de la présente loi, dans les délais fixés aux articles 41 et 42.

La réparation en droit commun qui ne peut se rapporter à l'indemnisation des dommages corporels, telle qu'elle est couverte par la présente loi, peut se cumuler avec les indemnités résultant de la présente loi ».

B.2. Il est demandé à la Cour si ces dispositions sont compatibles avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lorsqu'elles sont interprétées en ce sens que l'employeur ne peut invoquer le régime de l'immunité civile prévu à l'article 46 de la loi sur les accidents du travail lorsque la victime de l'accident du travail est une personne qui suit chez cet employeur une formation professionnelle individuelle, au sens des articles 90 et suivants de l'arrêté du Gouvernement flamand du 5 juin 2009 portant organisation de l'emploi et de la formation professionnelle, alors qu'il peut invoquer cette immunité lorsque la victime est un travailleur ou un apprenti.

B.3.1. En vertu de l'article 46 de la loi sur les accidents du travail, les victimes d'accidents du travail ou leurs ayants droit ne peuvent introduire une action en responsabilité civile contre l'employeur que dans les cas énumérés dans cet article. Cette disposition a pour conséquence que l'employeur dispose en principe d'une immunité civile en cas d'accident du travail.

B.3.2. Cette immunité civile de l'employeur est une des lignes de force de la loi sur les accidents du travail.

La loi sur les accidents du travail remonte à la loi du 24 décembre 1903 sur la réparation des dommages résultant des accidents du travail, qui prévoyait la réparation forfaitaire du dommage résultant d'un accident du travail, le caractère forfaitaire de l'indemnité s'expliquant notamment par une réglementation de la responsabilité s'écartant du droit commun, basée non pas sur la notion de « faute », mais sur celle de « risque professionnel » et sur une répartition de ce risque entre l'employeur et la victime de l'accident du travail.

D'une part, l'employeur était, même en l'absence de toute faute dans son chef, toujours rendu responsable du dommage résultant de l'accident du travail subi par la victime. Ainsi non seulement celle-ci était dispensée de la preuve, souvent très difficile à apporter, de la faute de l'employeur ou de son préposé et de l'existence d'un lien causal entre cette faute et le dommage subi, mais sa propre faute (non intentionnelle) ne faisait pas obstacle à la réparation et n'entraînait pas sa responsabilité si cette faute causait un accident de travail à un tiers. D'autre part, la victime de l'accident du travail percevait une indemnité forfaitaire, qui ne l'indemnisait que partiellement pour le dommage subi. A la suite de plusieurs modifications de la loi, le niveau d'indemnisation des 50 % originaires de la « rémunération de base » a été porté à 66 % et à 100 %.

Lors de l'élaboration de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail, le système a été modifié par l'instauration de l'assurance obligatoire, en vertu de laquelle le travailleur ne s'adresse plus à l'employeur mais à « l'assureur-loi ». C'est dès lors le préjudice du travailleur qui est assuré et non plus la responsabilité de l'employeur, de sorte que le système se rapproche d'un mécanisme d'assurances sociales.

B.3.3. L'objectif du système forfaitaire est non seulement d'assurer une protection du revenu du travailleur contre un risque professionnel mais aussi de préserver la paix sociale dans les entreprises en excluant la multiplication des procès en responsabilité.

La réparation forfaitaire sera, dans certains cas, plus importante que ce que la victime aurait pu obtenir en intentant une action de droit commun contre l'auteur de la faute qui a causé l'accident et, dans certains cas, moins importante.

Le financement du système forfaitaire est assuré par les employeurs, qui sont obligés, depuis 1971, de souscrire une assurance en matière d'accidents du travail et de supporter le coût des primes. Le souci de ne pas alourdir la charge économique qui en résulte par une éventuelle obligation de réparer issue du droit commun a conduit le législateur à restreindre le champ des hypothèses susceptibles d'engager la responsabilité civile de l'employeur.

B.4. Le régime de la loi sur les accidents du travail déroge donc au régime de droit commun de la responsabilité.

Ainsi que la Cour l'a déjà jugé à plusieurs reprises (cf. les arrêts nos 115/2002, 102/2004, 124/2004 et 64/2008), ce régime dérogatoire se justifie dans son principe et, pour cette raison, il est admissible que sa comparaison trait pour trait avec celui du droit commun fasse apparaître des différences de traitement tantôt dans un sens, tantôt dans l'autre, sous la réserve que chacune des règles en cause doit être conforme à la logique du système auquel elle appartient.

B.5.1. Les articles 1er et 2 de la loi sur les accidents du travail concernent le champ d'application de cette loi.

En vertu de l'article 1er de la loi sur les accidents du travail, celle-ci est applicable à toutes les personnes qui, en qualité d'employeur, de travailleur ou de personne assimilée, sont assujetties pour tout ou en partie, à (1) la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs et (2) l'arrêté-loi du 7 février 1945 concernant la sécurité sociale des marins de la marine marchande.

En vertu de l'article 2, la loi est également applicable aux armateurs qui exploitent leur propre bâtiment; ils sont réputés être à la fois employeur et travailleur.

B.5.2. Les faits de la cause pendante devant le juge a quo font apparaître qu'en l'espèce, seul l'article 1er, 1°, de la loi sur les accidents du travail - qui renvoie à la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs - est pertinent. Les parties à la présente affaire ne sont en effet ni des marins de la marine marchande, ni des armateurs exploitant leur propre bâtiment.

B.5.3. En vertu de l'article 1er, § 1er, alinéa 1er, de la loi précitée du 27 juin 1969, celle-ci est applicable aux travailleurs et aux employeurs liés par un contrat de louage de travail.

Sont par ailleurs assimilés aux travailleurs, pour l'application de cette loi : les apprentis et les personnes auxquelles le Roi étend cette application en exécution de l'article 2, § 1er, 1°. Sont assimilées aux employeurs : les personnes qui occupent au travail des apprentis et les personnes désignées par le Roi en application de l'article 2, § 1er, 1° (article 1er, § 1er, alinéa 2, de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, dans sa version applicable au litige soumis au juge a quo).

Il ressort de l'article 2, § 1er, 1°, de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer que le Roi ne peut assimiler des personnes à des employeurs que pour autant que des prestations de travail soient effectuées sous leur autorité moyennant le paiement d'une rémunération (Cass., 12 septembre 1994, Pas., 1994, n° 370).

B.6.1. En Communauté flamande, la formation professionnelle individuelle est régie par l'arrêté du Gouvernement flamand du 5 juin 2009 portant organisation de l'emploi et de la formation professionnelle, pris en exécution du décret du 7 mai 2004 relatif à la création de l'agence autonomisée externe de droit public « Vlaamse Dienst voor Arbeidsbemiddeling en Beroepsopleiding ».

B.6.2. En vertu de l'article 90 de cet arrêté, on entend par formation professionnelle individuelle : « la formation professionnelle, visée à l'article 61, 1°, si elle est dispensée dans une entreprise, par une association sans but lucratif ou une autorité administrative ».

En vertu des articles 91 et 92, l'Office flamand de l'Emploi et de la Formation professionnelle (ci-après : « VDAB ») décide si un demandeur d'emploi peut suivre une formation professionnelle individuelle, fixe, dans les limites définies à l'article 92, la durée de cette formation et décide de la prolongation ou de la cessation prématurée de la formation professionnelle individuelle.

En vertu de l'article 93, l'apprenant qui suit une formation professionnelle individuelle bénéficie d'une « prime de productivité », dont le montant s'exprime en principe par un pourcentage de l'écart entre le salaire normal de la profession et le revenu auquel l'apprenant peut prétendre pour cause de chômage, de revenu d'intégration ou d'aide sociale financière. La prime de productivité est payée à l'apprenant par le VDAB, mais l'entreprise dans laquelle l'apprenant suit la formation est tenue de verser chaque mois au VDAB un montant correspondant à l'écart entre le salaire normal de la profession et l'allocation de chômage moyenne.

En vertu de l'article 94, l'employeur s'engage à occuper l'apprenant consécutivement à sa formation professionnelle individuelle dans son entreprise dans les liens d'un contrat de travail à durée en principe indéterminée.

B.6.3. Il en ressort que l'apprenant qui suit une formation professionnelle individuelle dans une entreprise ne peut travailler pour cette entreprise contre rémunération et n'est pas lié à l'entreprise par un contrat de travail. L'apprenant ne saurait dès lors être considéré comme un travailleur au sens de la loi sur les accidents du travail. Bien que le Roi puisse, en vertu de l'article 3 de la loi sur les accidents du travail, étendre le champ d'application de cette loi à d'autres catégories de personnes, il ne l'a pas fait en ce qui concerne les apprenants qui suivent une formation professionnelle individuelle.

B.7. C'est précisément en raison du fait que les personnes qui suivent une formation professionnelle individuelle dans une entreprise ne relèvent pas du champ d'application de la loi sur les accidents du travail que le Gouvernement flamand a prévu, à l'article 95 de l'arrêté précité du 5 juin 2009, que l'employeur doit assurer l'apprenant contre les accidents survenant au cours de la formation et les accidents sur le chemin du lieu de formation. Cette assurance doit accorder les mêmes garanties que celles qui figurent dans la loi sur les accidents du travail et ses arrêtés d'exécution. En cas d'accident, l'indemnité est calculée sur la base du traitement auquel a droit un travailleur majeur travaillant comme salarié dans la profession à apprendre.

B.8. Il découle également du fait que la relation entre l'employeur et l'apprenant n'est pas régie par un contrat de travail et de l'absence de dispositions étendant le champ d'application de la loi sur les accidents du travail à l'apprenant et à l'employeur chez qui la formation individuelle est suivie que l'employeur ne peut se prévaloir du régime d'immunité civile prévu à l'article 46 de la loi sur les accidents du travail, lorsque la victime d'un accident du travail est un apprenant qui suit une formation professionnelle individuelle.

Les dispositions en cause font donc naître une différence de traitement entre, d'une part, l'employeur d'un travailleur ou d'un apprenti qui est victime d'un accident du travail et, d'autre part, l'employeur chez qui un apprenant suit une formation professionnelle individuelle et est victime d'un tel accident.

B.9. Comme il est dit en B.4, une comparaison plus approfondie du régime contenu dans la loi sur les accidents du travail et du régime de droit commun de la responsabilité, qui, en l'espèce, reste d'application pour l'employeur chez qui un apprenant suivant une formation professionnelle individuelle est victime d'un accident du travail, peut faire apparaître des différences de traitement, tantôt dans un sens, tantôt dans l'autre. Sous la réserve que chacune des règles en cause soit conforme à la logique du régime auquel appartient cette règle, de telles différences ne sont pas incompatibles avec le principe d'égalité et de non-discrimination.

B.10.1. Il est conforme à la logique du régime de la loi sur les accidents du travail que le champ d'application de cette dernière soit, en ce qui concerne les employeurs, limité en principe à ceux qui occupent des personnes qui bénéficient de la protection de cette loi.

Cette loi contient en effet un ensemble équilibré de règles qui, prises isolément, sont tantôt en faveur tantôt au détriment des employeurs ou des travailleurs.

De manière plus générale, il est conforme à la logique du régime fédéral de la sécurité sociale des travailleurs que le champ d'application de ce dernier soit déterminé entre autres par le critère de l'assujettissement ou non aux cotisations de sécurité sociale.

Cette obligation de payer des cotisations de sécurité sociale - affectées, entre autres, au financement du Fonds des accidents du travail - est régie par la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer précitée, dont le champ d'application est en principe défini par l'existence d'un contrat de travail entre un employeur et un travailleur.

B.10.2. La formation professionnelle individuelle concerne une mesure prise par la Communauté flamande dans le cadre de ses compétences en matière de reconversion et de recyclage professionnels, au sens de l'article 4, 16°, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles. Etant donné que la mesure visée porte sur la formation professionnelle de demandeurs d'emploi et non sur l'occupation de ces personnes, il est en principe conforme à la logique de ce régime que les personnes concernées ne soient pas liées par un contrat de travail à l'employeur chez qui elles suivent cette formation.

B.11. Le non-assujettissement de l'employeur à la sécurité sociale des travailleurs en ce qui concerne l'apprenant qui suit une formation individuelle a notamment pour effet que l'employeur ne doit payer aucune cotisation de sécurité sociale pour cet apprenant et qu'il ne contribue donc pas au financement du Fonds des accidents du travail, entre autres. L'employeur se trouve dès lors, vis-à-vis d'un apprenant qui suit une formation individuelle, dans une situation qui diffère de celle dans laquelle il se trouve vis-à-vis d'un travailleur ou d'un apprenti.

En outre, l'employeur n'est pas tenu de rémunérer l'apprenant. Bien qu'il doive payer une prime de productivité et assurer l'apprenant contre les accidents pouvant survenir pendant la formation ou sur le chemin du lieu de formation, les charges financières qui incombent à l'employeur vis-à-vis d'un apprenant suivant une formation individuelle doivent être considérées comme moins lourdes par rapport aux charges qui lui incombent vis-à-vis d'un travailleur.

B.12. Eu égard aux différences précitées entre, d'une part, les apprenants qui suivent une formation professionnelle individuelle et, d'autre part, les travailleurs et les apprentis, eu égard à la nature différente des obligations qui en découlent pour l'employeur et compte tenu de la spécificité des régimes contenus dans la loi sur les accidents du travail et de la formation professionnelle individuelle, la différence de traitement mentionnée dans la question préjudicielle n'est pas sans justification raisonnable.

B.13. La question préjudicielle appelle une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : Les articles 1er, 2 et 46 de la loi du 10 avril 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1971 pub. 23/03/2018 numac 2018030615 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 17/10/2014 numac 2014000710 source service public federal interieur Loi sur les accidents du travail type loi prom. 10/04/1971 pub. 11/06/1998 numac 1998000213 source ministere de l'interieur Loi sur les accidents du travail - Traduction allemande fermer sur les accidents du travail ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que l'employeur ne peut invoquer le régime d'immunité civile prévu à l'article 46 lorsque la victime d'un accident du travail est une personne qui suit chez lui une formation professionnelle individuelle, au sens des articles 90 et suivants de l'arrêté du Gouvernement flamand du 5 juin 2009 portant organisation de l'emploi et de la formation professionnelle.

Ainsi rendu en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 24 mars 2016.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, E. De Groot

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