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Arrêt
publié le 13 novembre 2015

Extrait de l'arrêt n° 115/2015 du 17 septembre 2015 Numéro du rôle : 5950 En cause : le recours en annulation de l'article 21 de la loi-programme du 26 décembre 2013 (statut social des artistes), introduit par l'ASBL « Concertation Perman(...) La Cour constitutionnelle, composée des présidents J. Spreutels et A. Alen, et des juges J.-P. S(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 115/2015 du 17 septembre 2015 Numéro du rôle : 5950 En cause : le recours en annulation de l'article 21 de la loi-programme (I) du 26 décembre 2013 (statut social des artistes), introduit par l'ASBL « Concertation Permanente des Employeurs des Arts de la Scène en Communauté française de Belgique » et autres.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents J. Spreutels et A. Alen, et des juges J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, P. Nihoul et R. Leysen, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président J. Spreutels, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 30 juin 2014 et parvenue au greffe le 1er juillet 2014, un recours en annulation de l'article 21 de la loi-programme (I) du 26 décembre 2013 (statut social des artistes), publiée au Moniteur belge du 31 décembre 2013, deuxième édition, a été introduit par l'ASBL « Concertation Permanente des Employeurs des Arts de la Scène en Communauté française de Belgique », l'ASBL « Réunion des Auteurs chorégraphes », Paul Biot et Alexandre Wajnberg, assistés et représentés par Me S. Capiau, avocat au barreau de Bruxelles. (...) II. En droit (...) Quant à la recevabilité B.1.1. Le Conseil des ministres soulève une exception d'irrecevabilité de la requête tirée du défaut d'exposé clair et précis des moyens.

B.1.2. Les moyens indiquent quelles sont les normes de référence que les parties requérantes estiment violées. Ils sont suffisamment compréhensibles et le Conseil des ministres a d'ailleurs été en mesure d'y répondre de façon circonstanciée dans son mémoire en réponse.

L'exception est rejetée.

Quant à la disposition attaquée B.2.1. Le recours en annulation porte sur l'article 21 de la loi-programme (I) du 26 décembre 2013, qui remplace les deux premiers paragraphes de l'article 1erbis de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs.

Cet article 1erbis, inséré dans la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer par la loi-programme du 24 décembre 2002Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 24/12/2002 pub. 31/12/2002 numac 2002021488 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme (1) type loi-programme prom. 24/12/2002 pub. 31/12/2002 numac 2002021495 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme (1) fermer, établit une présomption d'assujettissement à la sécurité sociale des travailleurs salariés des artistes qui fournissent des prestations ou produisent des oeuvres sur commande, contre rémunération, tout en n'étant pas liés par un contrat de travail avec le donneur d'ordre. La présomption d'assujettissement à la sécurité sociale des travailleurs salariés peut être renversée par l'artiste lorsqu'il prouve que les prestations ou productions ne sont pas fournies dans des conditions socio-économiques similaires à celles dans lesquelles se trouve un travailleur par rapport à son employeur. L'artiste est alors assujetti à la sécurité sociale des travailleurs indépendants.

B.2.2. En raison du caractère atypique de leur activité professionnelle, beaucoup d'artistes se trouvaient, avant l'entrée en vigueur de l'article 1erbis précité, dans l'impossibilité d'être assujettis à la sécurité sociale des travailleurs salariés, alors que leur situation ne correspondait pas à celle d'un travailleur indépendant. C'est donc en vue d'améliorer la protection sociale des artistes qui ne pouvaient s'insérer dans aucun des statuts classiques de la sécurité sociale que le législateur a créé, par l'article 1erbis de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, un statut spécifique pour les artistes.

B.2.3. L'exposé des motifs de la loi-programme du 24 décembre 2002Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 24/12/2002 pub. 31/12/2002 numac 2002021488 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme (1) type loi-programme prom. 24/12/2002 pub. 31/12/2002 numac 2002021495 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme (1) fermer indique en effet, au sujet de l'article 1erbis : « Après trois décennies d'insécurité juridique, après deux décennies de protection sociale imparfaite pour certains artistes et après plus d'une décennie d'impossibilité d'affiliation comme artiste de spectacles indépendant, l'adaptation de l'actuelle assimilation ' irréfragable ' poursuit l'objectif suivant : intégrer à nouveau les artistes dans un régime de sécurité sociale efficace, soit le régime des travailleurs salariés, soit le régime des travailleurs indépendants, soit les deux (par exemple sur la base d'une activité indépendante accessoire).

En raison de ce que l'on appelle la liberté artistique des artistes, il est généralement admis que la condition d'autorité ou de subordination juridique peut parfois être difficilement démontrée en ce qui concerne les activités des artistes.

Cet article permet toutefois d'étendre le champ d'application du régime de sécurité sociale des travailleurs salariés aux artistes qui fournissent leurs prestations artistiques ou qui créent leurs oeuvres artistiques contre paiement d'une rémunération. Cette extension n'est toutefois pas applicable lorsque l'artiste démontre que cette activité n'est pas exercée dans des 'conditions socioéconomiques similaires' à celles dans lesquelles se trouve un travailleur par rapport à son employeur.

Contrairement à une relation de travail ordinaire, l'existence d'une autorité ou d'une subordination juridique ne doit donc pas être démontrée pour les activités d'un artiste. Il suffit de constater que l'artiste fournit des prestations artistiques et/ou crée des oeuvres artistiques pour que l'assimilation soit applicable » (Doc. parl., Chambre, 2002-2003, DOC 50-2124/001, pp. 35-36).

B.2.4. Ce statut concerne tous les artistes, qu'ils soient interprètes ou créateurs, qui travaillent contre rémunération sur commande d'un donneur d'ordre mais qui ne sont pas liés par un contrat de travail avec celui-ci, en raison de la nature particulière de la relation qui existe entre eux, relation généralement caractérisée par son caractère intuitu personae et par l'absence de subordination hiérarchique.

B.2.5. Avant leur remplacement par la disposition attaquée, les paragraphes 1er et 2 de l'article 1erbis de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer précitée, introduits par l'article 170 de la loi-programme (I) du 24 décembre 2002, disposaient : « § 1er. La présente loi est également applicable aux personnes qui, sans être liées par un contrat de travail, fournissent des prestations artistiques et/ou produisent des oeuvres artistiques contre paiement d'une rémunération pour le compte du donneur d'ordre, personne physique ou morale, à moins que la personne qui fournit ces prestations artistiques et/ou produit ces oeuvres artistiques ne prouve que ces prestations et/ou ces oeuvres artistiques ne sont pas fournies dans des conditions socio-économiques similaires à celles dans lesquelles se trouve un travailleur par rapport à son employeur.

Cette disposition n'est toutefois pas applicable lorsque la personne qui fournit la prestation artistique ou qui produit l'oeuvre artistique fournit cette prestation artistique ou produit cette oeuvre artistique à l'occasion d'événements de sa famille.

La personne physique ou morale de qui la personne qui fournit la prestation artistique ou qui produit l'oeuvre artistique reçoit la rémunération est considérée comme étant l'employeur. § 2. Par ' fourniture de prestations artistiques et/ou production des oeuvres artistiques ' il faut entendre la création et/ou l'exécution ou l'interprétation d'oeuvres artistiques dans le secteur de l'audiovisuel et des arts plastiques, de la musique, de la littérature, du spectacle, du théâtre et de la chorégraphie ».

B.2.6. La disposition attaquée remplace ces paragraphes 1er et 2 de l'article 1erbis de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer par les dispositions suivantes : « § 1er. La présente loi est également applicable aux personnes qui, ne pouvant être liées par un contrat de travail parce qu'un ou plusieurs des éléments essentiels à l'existence dudit contrat au sens de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail fermer relative aux contrats de travail sont inexistants, fournissent des prestations ou produisent des oeuvres de nature artistique, contre paiement d'une rémunération pour le compte d'un donneur d'ordre, personne physique ou morale. Dans ce cas, le donneur d'ordre est assimilé à l'employeur et doit assumer les obligations visées aux articles 21 et suivants.

Le caractère artistique de ces prestations ou oeuvres doit être attesté par le biais d'un visa artiste délivré par la commission Artistes.

A condition que, lors de sa demande de visa artiste, le demandeur adresse à la commission Artistes une déclaration sur l'honneur attestant que la condition visée à l'alinéa précédent est satisfaite, il est présumé exercer son activité conformément au présent article.

Cette présomption vaut pour une durée de trois mois renouvelable une fois et ce, dès réception d'un accusé de réception délivré par la commission Artistes attestant de la recevabilité de sa demande. En cas de refus du visa avant l'expiration de la période susvisée, la présomption tombe à partir de la date du refus.

Lorsque ces prestations ne sont pas fournies dans des conditions socio-économiques similaires à celles dans lesquelles se trouve un travailleur par rapport à son employeur, la commission Artistes peut délivrer à l'intéressé qui en fait la demande une déclaration d'activités indépendantes.

La présente disposition n'est toutefois pas applicable lorsque la personne fournit la prestation de nature artistique à l'occasion d'évènements de sa famille. § 2. Pour déterminer le caractère artistique d'une prestation ou oeuvre, il est tenu compte, notamment, du secteur d'activités dans lequel la prestation ou l'oeuvre a été créée ou exécutée. Outre ce critère, la Commission Artistes évalue, sur la base d'une méthodologie déterminée dans son règlement d'ordre intérieur confirmé par un arrêté royal délibéré en Conseil des ministres, si l'intéressé fournit des 'prestations ou produit des oeuvres de nature artistique' au sens du présent article ».

L'article 21 de la loi du 20 juillet 2015Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/2015 pub. 21/08/2015 numac 2015203871 source service public federal securite sociale Loi portant dispositions diverses en matière sociale fermer portant dispositions diverses en matières sociales (Moniteur belge, 21 août 2015, deuxième édition) modifie cet article 1erbis. Ces modifications entrent en vigueur le 1er juillet 2015. L'article 21 de la loi-programme (I) du 26 décembre 2013 ayant pu produire des effets antérieurement à cette date, le recours n'a pas perdu son objet.

B.2.7. L'exposé des motifs de la loi-programme (I) du 26 décembre 2013 indique, au sujet de la disposition attaquée, qu'elle s'inscrit dans un chapitre qui « a pour but de donner suite aux avis n° 1.744 et 1.810 du Conseil national du travail concernant le secteur artistique » (Doc. parl., Chambre, 2013-2014, DOC 53-3147/001, p. 16). Ces avis relevaient qu'« un certain nombre d'abus à la réglementation » (avis n° 1.744, p. 1) avaient été constatés quant au statut social spécifique des artistes et que celui-ci présentait un certain nombre de lacunes (ibid., p. 6).

B.2.8. Il ressort encore des travaux préparatoires que la modification de l'article 1erbis de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer par la disposition attaquée vise à « éclaircir les conditions d'occupation des artistes professionnels de spectacle et créateurs qui ne peuvent être occupés dans le cadre d'un contrat de travail, ni dans les liens d'un contrat entrant dans le cadre de la loi du 24 juillet 1987 sur le travail temporaire, le travail intérimaire ou la mise de travailleurs à disposition d'utilisateurs, ni sous le statut de travailleur indépendant » (Doc. parl., Chambre, 2013-2014, DOC 53-3147/010, p. 7).

B.2.9. La disposition attaquée maintient la présomption d'affiliation à la sécurité sociale des travailleurs salariés des artistes interprètes ou créateurs qui fournissent des prestations ou produisent des oeuvres contre rémunération pour le compte d'un donneur d'ordre avec lequel ils ne sont pas liés par un contrat de travail. Comme par le passé, la présomption peut être renversée par l'artiste lorsqu'il prouve que les prestations ne sont pas fournies dans des conditions socio-économiques similaires à celles dans lesquelles se trouve un travailleur par rapport à son employeur. Dans ce cas, l'artiste est assujetti à la sécurité sociale des travailleurs indépendants.

B.2.10. Les principales modifications introduites par la disposition attaquée concernent l'instauration du « visa artiste » et le rôle de la « Commission Artistes ». Le « visa artiste » permet à son titulaire de prouver sa qualité d'assujetti à la sécurité sociale des travailleurs salariés sous couvert du régime de l'article 1erbis de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer. Il est délivré aux artistes qui en font la demande par la Commission Artistes, créée par l'article 172 de la loi-programme du 24 décembre 2002Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 24/12/2002 pub. 31/12/2002 numac 2002021488 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme (1) type loi-programme prom. 24/12/2002 pub. 31/12/2002 numac 2002021495 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme (1) fermer. En vue de la délivrance de ce visa, la Commission Artistes doit déterminer si les prestations ou oeuvres du demandeur revêtent un caractère artistique en tenant compte, d'une part, du secteur d'activités dans lequel elles s'inscrivent et, d'autre part, de la méthodologie fixée par son règlement d'ordre intérieur, lequel doit être confirmé par arrêté royal délibéré en Conseil des ministres.

Par ailleurs, alors que l'article 1erbis, avant sa modification par la disposition attaquée, désignait la personne qui payait la rémunération à l'artiste comme étant l'employeur pour l'accomplissement des obligations lui incombant, c'est désormais le donneur d'ordre qui revêt cette qualité.

Quant au fond En ce qui concerne le premier moyen B.3. Les parties requérantes prennent un premier moyen de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution. Elles font grief à la disposition attaquée, en ce qu'elle institue le « visa artiste » et l'obligation de l'obtenir pour pouvoir bénéficier de l'assujettissement à la sécurité sociale des travailleurs salariés sans être lié par un contrat de travail, de créer une discrimination entre artistes en fonction du secteur d'activités dans lequel ils travaillent. Elles reprochent également à la disposition attaquée de ne pas garantir l'absence de discrimination entre artistes parce que le champ d'application du statut créé par l'article 1erbis de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer est laissé à l'appréciation de la Commission Artistes, laquelle évalue la nature artistique de leur activité sur la base d'une méthodologie déterminée par cette commission dans son règlement d'ordre intérieur confirmé par un arrêté royal délibéré en Conseil des ministres. Enfin, elles font encore grief à la disposition attaquée de ne pas garantir l'absence de discrimination entre artistes selon leur rôle linguistique.

B.4.1. Avant sa modification par la disposition attaquée, l'article 1erbis de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer ne chargeait aucune instance spécifique de vérifier le caractère artistique des prestations ou oeuvres produites par les personnes assujetties à la sécurité sociale des travailleurs salariés sans être liées par un contrat de travail. Le champ d'application de cette disposition était uniquement délimité par une énumération exhaustive des secteurs concernés, à savoir « le secteur de l'audiovisuel et des arts plastiques, de la musique, de la littérature, du spectacle, du théâtre et de la chorégraphie ».

La Commission Artistes voyait ses missions limitées à l'information des artistes, à l'examen, d'initiative ou sur demande, de la situation réellement indépendante des artistes affiliés auprès d'une caisse sociale pour indépendants et à la délivrance de déclarations d'activité indépendante aux artistes qui en faisaient la demande. Elle ne se prononçait donc jamais sur le caractère artistique des prestations fournies ou des oeuvres produites par les artistes relevant du statut de l'article 1erbis de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer.

B.4.2. Dans son avis n° 1.744 du 13 octobre 2010, le Conseil national du travail a relevé plusieurs lacunes entachant le statut social de l'artiste. Une partie de ces lacunes découlait, selon le Conseil, de l'article 1erbis de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer lui-même, et ce, « en raison de la difficulté de circonscrire la notion de prestation artistique » (p. 6), ce qui a eu pour conséquence « de faire entrer des prestations n'ayant pas de caractère artistique dans le champ d'application de l'article 1erbis précité sous prétexte que le secteur dans lequel cette prestation est fournie est le secteur artistique » (p. 10).Ainsi qu'il ressort des travaux préparatoires cités en B.2.7, la disposition attaquée a pour objet de répondre à ces constatations du Conseil national du travail.

B.5.1. Confronté à la difficulté d'établir dans un texte législatif les critères précis permettant de différencier les activités artistiques de celles qui ne le sont pas, le législateur a confié à une autorité administrative le pouvoir de décider, cas par cas, si les personnes affiliées à la sécurité sociale des travailleurs salariés sur la base de l'article 1erbis de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer pouvaient prétendre à ce statut. Ce faisant, il a délégué à cette autorité le pouvoir de déterminer le champ d'application de cette disposition.

B.5.2. A ce sujet, le Conseil d'Etat avait observé : « Cette commission se voit ainsi attribuer un pouvoir réglementaire étendu qui n'est pas conciliable avec les modalités selon lesquelles le pouvoir réglementaire doit être exercé en vertu de la Constitution.

Il faut dès lors conclure que le législateur doit lui-même prévoir au moins un certain nombre de critères permettant d'apprécier si une activité déterminée doit ou non être considérée comme une prestation ou une oeuvre ayant un caractère artistique et que la mise en oeuvre de ce dispositif ne peut en principe être déléguée qu'au Roi, le cas échéant après avoir recueilli l'avis de la Commission Artistes. La commission susvisée ne peut toutefois en aucun cas être chargée de l'ensemble de cette matière » (Doc. parl., Chambre, 2013-2014, DOC 53-3147/001, p. 77).

B.5.3. En réponse à cette observation, le législateur a précisé, d'une part, que la Commission Artistes devait tenir compte du secteur d'activités dans lequel s'exerçait l'activité de l'artiste et, d'autre part, qu'elle devait préciser la méthodologie qu'elle met en oeuvre dans son règlement d'ordre intérieur, lequel doit être confirmé par arrêté royal délibéré en Conseil des ministres.

B.6.1. Contrairement à la disposition antérieure, l'article 1erbis de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, tel qu'il a été modifié par la disposition attaquée, n'établit plus de liste de secteurs d'activités dans lesquels des activités artistiques doivent se déployer pour donner accès à leur auteur ou créateur au statut social des artistes.

L'exposé des motifs de la disposition attaquée cite toutefois, à titre d'exemple, « le secteur de l'audiovisuel et des arts plastiques, de la musique, de la littérature, du spectacle, du théâtre et de la chorégraphie » (Doc. parl., Chambre, 2013-2014, DOC 53-3147/001, p. 17), qui sont les secteurs qui étaient cités par la disposition antérieure.

Il en résulte que la notion de « secteur artistique » peut être interprétée, compte tenu de celle qui était mise en oeuvre sous l'ancienne législation et à laquelle le législateur s'est ainsi référé, comme visant les différentes disciplines dans lesquelles les artistes déploient leurs activités et il ne s'agit dès lors pas, contrairement à ce que soutiennent les parties requérantes, d'une notion indéterminée qui pourrait renvoyer « aux secteurs économiques » ou encore « au champ de compétences des commissions paritaires ».

B.6.2. En conséquence, l'utilisation par le législateur de la notion de « secteurs d'activité » comme critère devant être pris en considération par la Commission Artistes ne crée pas de différence de traitement entre artistes selon le secteur dans lequel ils exercent leur art. Une éventuelle différence de traitement sur la base du secteur d'activité concerné ne pourrait découler que de l'exécution de la disposition attaquée par la Commission Artistes, soit par l'adoption de son règlement d'ordre intérieur, soit à l'occasion du refus d'octroi du visa artistes.

B.6.3. En outre, la circonstance que les secteurs considérés comme artistiques pour l'application de l'article 1erbis de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer ne sont plus énumérés de manière exhaustive dans la loi permet que des formes d'expressions artistiques novatrices, ne se déployant pas dans un de ces secteurs traditionnels, ouvrent l'assujettissement au régime de la sécurité sociale des travailleurs salariés, alors que cela n'aurait pas été possible sous l'ancienne législation. La prise en compte du « secteur d'activité » par la Commission Artistes ne crée donc pas, en elle-même, de différence de traitement entre artistes selon le secteur dans lequel ils s'expriment.

B.7. En prévoyant que la Commission Artistes prend ses décisions d'octroi ou de refus de visa artiste sur la base d'une méthodologie déterminée par son règlement d'ordre intérieur, la disposition attaquée ne crée pas non plus de différences de traitement entre artistes. Il reviendrait, le cas échéant, au Conseil d'Etat, section du contentieux administratif, d'annuler l'arrêté royal confirmant ledit règlement dans l'hypothèse où celui-ci contiendrait une discrimination.

Par ailleurs, les décisions prises par la Commission Artistes sont susceptibles de recours devant le tribunal du travail (article 23, 2° de la loi-programme (I) du 26 décembre 2013 introduisant un paragraphe 5 dans l'article 172 de la loi-programme (I) du 24 décembre 2002). Il reviendrait, le cas échéant, à cette juridiction de juger d'une éventuelle discrimination commise à l'occasion du refus d'un visa artiste.

B.8.1. Enfin, le grief relatif à l'absence de garantie contre les discriminations éventuelles entre les artistes selon leur rôle linguistique est étranger à la disposition attaquée. Celle-ci ne prévoit en effet aucune différence de traitement entre artistes selon la langue qu'ils pratiquent puisqu'au contraire, elle vise la Commission dans son ensemble et prévoit que celle-ci adopte une méthodologie dans son règlement d'ordre intérieur. La disposition attaquée ne permet dès lors pas l'adoption de critères ou de méthodologies différents selon la langue de l'artiste demandeur.

L'organisation de la Commission en chambres linguistiques, laquelle, au demeurant, n'implique pas nécessairement que des différences de traitement entre artistes seraient créées par celles-ci, est fixée par l'article 4, § 1er, de l'arrêté royal du 26 mars 2014 « complétant le statut social des artistes et fixant les modalités d'octroi du visa artiste et de la carte artiste », dont l'examen échappe à la compétence de la Cour.

B.8.2. A nouveau, il reviendrait, le cas échéant, au Conseil d'Etat ou aux juridictions du travail de se prononcer sur d'éventuelles discriminations selon le régime linguistique créées soit par le règlement d'ordre intérieur de la commission, soit par les décisions individuelles prises par celle-ci.

B.9. Pour le surplus, dans la mesure où elles invoquent la violation de l'article 23 de la Constitution dans leur mémoire en réponse, les parties requérantes soulèvent un moyen nouveau qui, pour ce motif, n'est pas recevable.

B.10. Le premier moyen n'est pas fondé.

En ce qui concerne le deuxième moyen B.11. Les parties requérantes prennent un deuxième moyen de la violation des articles 10, 11 et 23 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 16 et 34 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne (ci-après : la Charte) et avec les articles 18, 45 et 46 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (ci-après : TFUE).

B.12. Elles font d'abord grief à la disposition attaquée de soumettre l'exercice d'une activité artistique, professionnelle ou non, à une autorisation administrative individuelle, ce qui constituerait une restriction à la liberté de choisir une activité professionnelle associée à un statut social spécifique.

B.13.1. La disposition attaquée n'a ni pour objet ni pour effet de soumettre l'exercice d'une activité artistique à une autorisation administrative individuelle. En instituant le visa artiste, l'article 1erbis de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer n'empêche aucunement l'expression artistique quelle qu'elle soit. Le refus d'un visa artiste n'interdit pas au demandeur d'exercer son activité artistique. Il signifie uniquement que ce demandeur ne répond pas aux critères institués par l'article 1erbis précité pour être affilié à la sécurité sociale des travailleurs salariés sur la base de cette disposition, soit parce que les éléments essentiels à l'existence d'un contrat de travail au sens de la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail fermer relative aux contrats de travail sont présents dans la relation qui le lie au donneur d'ordre, soit parce qu'il ne fournit pas les prestations ou l'oeuvre dans des conditions socio-économiques similaires à celles dans lesquelles se trouve un travailleur par rapport à son employeur. Dans le premier cas, il doit être affilié à la sécurité sociale des travailleurs salariés comme tout autre travailleur lié par un contrat de travail à son employeur, dans le second cas, il doit être affilié à la sécurité sociale des travailleurs indépendants.

En ce qu'il fait grief à la disposition attaquée de soumettre l'exercice d'une activité artistique à une autorisation administrative individuelle, le moyen n'est pas fondé.

B.13.2. L'article 23, alinéa 3, de la Constitution, garantit notamment « le droit au travail et au libre choix d'une activité professionnelle » et « le droit à la sécurité sociale ».

L'article 34 de la Charte dispose notamment que « l'Union reconnaît et respecte le droit d'accès aux prestations de sécurité sociale [...] selon les règles établies par le droit de l'Union et les législations et pratiques nationales ». La même disposition garantit à toute personne qui réside et se déplace légalement à l'intérieur de l'Union le droit aux prestations de sécurité sociale et aux avantages sociaux, conformément au droit de l'Union et aux législations et pratiques nationales. L'article 18 du TFUE prohibe toute discrimination fondée sur la nationalité dans le domaine d'application des traités.

B.13.3. Aucune de ces dispositions ne garantit, comme telles, la liberté de choisir un système de protection sociale déterminé ou la liberté de choisir une activité professionnelle associée à un statut social spécifique.

Pour le surplus, la disposition attaquée n'a ni pour objet ni pour effet de priver certaines personnes du droit à la sécurité sociale.

Elle crée un statut spécifique, à côté des statuts existants et qui demeurent accessibles aux artistes qui se trouvent dans une situation socio-économique correspondant à ces statuts. Ce faisant, le législateur entend améliorer l'accès à la sécurité sociale des artistes qui, comme il est exposé en B.2.2, ne peuvent s'inscrire dans un régime existant. Il ne saurait lui être reproché d'avoir veillé à ce que ce statut spécifique s'applique à la catégorie de personnes à laquelle il est destiné en mettant en oeuvre un mécanisme d'identification de ces personnes.

En ce qu'il fait grief à la disposition attaquée de limiter la liberté de choisir une activité professionnelle associée à un statut social spécifique, le moyen n'est pas fondé.

B.14. Les parties requérantes font encore grief à la disposition attaquée de créer une discrimination contraire aux articles 45, 46 et 56 du TFUE à l'égard des artistes établis dans un autre Etat membre de l'Union qui viennent exercer temporairement en Belgique une activité artistique, dans la mesure où la sécurité sociale belge leur est applicable en vertu des règlements européens. Elles considèrent que, étant donné la durée de la procédure d'octroi du visa artiste, l'obtention de celui-ci par les artistes étrangers est illusoire, de sorte qu'ils ne pourraient pas exercer leur activité en Belgique sous le couvert de l'article 1erbis de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer. Elles ajoutent qu'il en découle également une restriction à la liberté d'entreprise dans le chef des organisateurs de spectacles et des donneurs d'ordre, qui ne pourraient engager en dehors des liens d'un contrat de travail sous l'article 1erbis que des artistes qui ont préalablement obtenu le visa artiste.

B.15.1. Les articles 45 et 46 du TFUE garantissent le droit à la libre circulation dans l'Union.

L'article 56 du même traité interdit les restrictions à la libre prestation des services.

L'article 16 de la Charte dispose : « La liberté d'entreprise est reconnue conformément au droit de l'Union et aux législations et pratiques nationales ».

B.15.2. La disposition attaquée ne contient aucune différence de traitement sur la base de la nationalité. Dans les cas où cette disposition serait applicable, en vertu des dispositions de droit européen pertinentes, aux artistes résidant dans un autre Etat membre de l'Union européenne et travaillant occasionnellement en Belgique, le système du visa artiste qu'elle met en place n'est pas de nature à représenter un obstacle à l'accès, par ces artistes, au statut spécifique de sécurité sociale qu'elle institue. En effet, l'article 1erbis, § 1er, alinéa 3, de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer prévoit que l'artiste qui fait la demande de visa est présumé répondre aux conditions de l'assujettissement à la sécurité sociale des travailleurs salariés à condition qu'il adresse à la Commission Artistes une déclaration sur l'honneur en ce sens. Cette présomption est valable trois mois renouvelables une fois et permet à l'artiste de travailler sous ce statut social dès qu'il obtient l'accusé de réception de la Commission Artistes.

Rien ne s'oppose, dans la disposition attaquée, à ce que des artistes fassent une demande de visa au départ de l'étranger, en prévision de l'exécution d'une prestation ou d'une oeuvre commandée par un donneur d'ordre résidant en Belgique. Par ailleurs, le visa artiste a une durée de validité de cinq ans renouvelables, de sorte que les artistes résidant dans un autre Etat membre et travaillant régulièrement en Belgique peuvent, le cas échéant, bénéficier de l'assujettissement précité dans les conditions de la disposition attaquée comme les artistes résidant en Belgique.

B.15.3. Dès lors que la disposition attaquée ne forme pas d'obstacle à l'obtention du visa artiste par les artistes résidant dans un autre Etat membre de l'Union européenne qui seraient soumis, en vertu des dispositions pertinentes du droit européen, à la sécurité sociale belge, elle n'entraîne aucune limitation à la liberté d'entreprise dans le chef des donneurs d'ordre qui souhaitent faire travailler ces artistes pour leur compte.

B.15.4. Eu égard à ce qui précède, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande des parties requérantes d'interroger la Cour de justice de l'Union européenne.

B.16. Le deuxième moyen n'est pas fondé.

En ce qui concerne le troisième moyen B.17.1. Les parties requérantes prennent un troisième moyen de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec le principe de sécurité juridique et avec les articles 12 et 14 de la Constitution. Elles font grief à la disposition attaquée, en ce qu'elle désigne « le donneur d'ordre » comme étant « l'employeur » et donc la personne à qui incombent les obligations découlant de l'affiliation au statut social des travailleurs salariés, d'utiliser une notion « floue », de sorte qu'elle ne permettrait pas de désigner avec précision la personne redevable des cotisations de sécurité sociale.

B.17.2. Les articles 12 et 14 de la Constitution établissent le principe de légalité en matière pénale, qui comprend notamment une exigence de clarté de la loi pénale.

Ce principe procède de l'idée que la loi pénale doit être formulée en des termes qui permettent à chacun de savoir, au moment où il adopte un comportement, si celui-ci est ou non punissable. Il exige que le législateur indique, en des termes suffisamment précis, clairs et offrant la sécurité juridique, quels faits sont sanctionnés, afin, d'une part, que celui qui adopte un comportement puisse évaluer préalablement, de manière satisfaisante, quelle sera la conséquence pénale de ce comportement et afin, d'autre part, que ne soit pas laissé au juge un trop grand pouvoir d'appréciation.

B.17.3. Les articles 218 à 220 du Code pénal social punissent d'une sanction de niveau 2, qui peut être une amende pénale, les employeurs, leurs préposés ou leurs mandataires qui n'ont pas versé les cotisations de sécurité sociale conformément à leurs obligations légales.

La détermination de l'employeur, qui est la personne à qui incombe l'obligation de payement des cotisations, relève donc du principe de légalité en matière pénale.

B.18.1. Avant sa modification par la disposition attaquée, l'article 1erbis de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer désignait la personne qui payait la rémunération à l'artiste comme étant l'employeur. Cette personne n'étant pas nécessairement le donneur d'ordre, il en résultait, dans certains cas, une relation impliquant trois personnes différentes, l'artiste, le donneur d'ordre et l'employeur.

Dans son avis n° 1.744 précité, le Conseil national du travail indique qu'il a observé que « l'hypothèse de relation triangulaire dans le cadre de la relation de travail de nature artistique induite implicitement par l'article 1erbis précité crée une certaine confusion dans le secteur artistique, quant à la notion d'employeur » et qu'« un usage abusif est né de cette confusion dès lors que le donneur d'ordre n'est pas nécessairement considéré comme l'employeur car le premier réunit uniquement dans son chef le lien d'autorité avec l'artiste dans la mesure où il définit ce qu'il souhaite obtenir comme oeuvre ou prestation artistique et que le second se limite à rémunérer l'artiste sans avoir de lien d'autorité avec l'artiste » (p. 9).

B.18.2. Comme il est dit en B.2.7, les modifications apportées à l'article 1erbis de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer visent à remédier aux problèmes d'application du statut exposés par le Conseil national du travail dans l'avis précité. Le législateur pouvait, pour rencontrer la difficulté évoquée, mettre fin à la relation triangulaire en désignant le donneur d'ordre comme étant l'employeur de l'artiste pour l'application de cette législation.

B.19. La notion de donneur d'ordre n'est ni floue ni indéterminée.

Même si, selon les situations, il peut s'agir de personnes ayant des professions diverses, il ressort clairement de l'économie du système mis en place par la disposition attaquée que le donneur d'ordre est la personne qui commande la prestation ou l'oeuvre de l'artiste contre une rémunération déterminée et qui définit les caractéristiques qu'elle en attend.

Le principe de légalité en matière pénale et le principe de sécurité juridique ne sont pas violés par la désignation du donneur d'ordre comme étant l'employeur au sens de la loi du 27 juin 1969Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1969 pub. 24/01/2011 numac 2010000730 source service public federal interieur Loi révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs. - Coordination officieuse en langue allemande fermer.

B.20.1. Pour le surplus, la critique des parties requérantes selon laquelle la disposition ne prévoit aucun critère objectif et pertinent permettant de déterminer son champ d'application se confond avec le premier moyen et n'est pas fondée pour les motifs indiqués en B.6 à B.8.

B.20.2. Enfin, le système du visa artiste créé par la disposition attaquée induit une augmentation de la sécurité juridique dans le chef des donneurs d'ordre dès lors qu'il indique que l'artiste qui en est titulaire est assujetti à la sécurité sociale des travailleurs salariés et que, en corollaire, le donneur d'ordre qui lui commande une oeuvre ou une prestation est tenu aux obligations découlant de ce statut mises à charge de l'employeur.

B.21. Le troisième moyen n'est pas fondé.

Par ces motifs, la Cour rejette le recours.

Ainsi rendu en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 17 septembre 2015.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, J. Spreutels

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