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Rapport
publié le 25 avril 1998

Conseil de la Concurrence Décision du Conseil de la Concurrence du 18 février 1998 n° 98-RPR-02, concernant la demande d'attestation négative de Canal+ Belgique S.A. Vu la demande introduite par la S.A. Canal+ Belgi(...) Vu le rapport déposé par le Service de la concurrence en date du 31 janvier 1996; Entendu la dem(...)

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25/04/1998
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MINISTERE DES AFFAIRES ECONOMIQUES


Conseil de la Concurrence Décision du Conseil de la Concurrence du 18 février 1998 n° 98-RPR-02, concernant la demande d'attestation négative de Canal+ Belgique S.A. (affaire CONC-E/A-95/0020) Vu la demande introduite par la S.A. Canal+ Belgique le 6 novembre 1995 conformément à l'article 6 de la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer sur la protection de la concurrence économique, relative à la notification d'un contrat de nouvelle formule d'abonnement proposée aux consommateurs;

Vu le rapport déposé par le Service de la concurrence en date du 31 janvier 1996;

Entendu la demanderesse et le Service lors de l'audience du 26 novembre 1996;

Canal+ Belgique est une société anonyme de droit belge sise Chaussée de Louvain 656, à 1030 Bruxelles. Créée à Bruxelles le 28 août 1988, elle a pour objet l'exploitation d'un service d'émissions télévisées destinées au public. Il s'agit d'une télévision privée à caractère commercial dont les émissions sont diffusées via le câble. Canal+ Belgique étant actuellement la seule télévision à péage en Communauté française, elle jouit d'un monopole de fait. Elle propose principalement deux types de programmes : des films en première diffusion télévisée et du sport, dont le championnat de Belgique de football en exclusivité.

En 1994, 95 % du chiffre d'affaires de Canal+ Belgique était réalisé par les abonnements et 4,5 % par la publicité. Bien que comptant au moment de l'introduction de la demande 165 000 abonnés, Canal+ Belgique estime n'être qu'à 30 000 abonnés au-dessus de son seuil de rentabilité, et ce dans un marché télévisuel appelé à devenir à très court terme de plus en plus concurrentiel, et demeurer une société fragile dont la rentabilité repose entièrement sur le recrutement de nouveaux abonnés. C'est dans cette perspective que s'inscrit la présente demande.

Dans le système en vigueur au jour de l'introduction de la présente demande, la personne qui souhaite s'abonner à Canal+ Belgique doit s'adresser à un distributeur agréé qui lui proposera, contre paiement d'un dépôt de garantie de 3 000 BEF (caution versée en échange du décodeur) et d'une première mensualité augmentée au prorata du mois en cours, un abonnement d'une durée initiale de 3 mois (une formule d'essai) ou de 12 mois. Le prix de l'abonnement est celui en vigueur au jour de la souscription ou aux dates de renouvellement soit 1 055 BEF/mois TVAC depuis le 1er novembre 1995.

Sauf dénonciation par écrit un mois avant son expiration, l'abonnement est automatiquement reconduit par tacite reconduction pour des périodes successives de 12 mois.

Si l'abonné a résilié son abonnement, deux situations peuvent se présenter : 1. L'abonné restitue son décodeur auprès du distributeur agréé dans un délai d'un mois.Le dépôt de garantie (3 000 BEF) lui sera restitué dans un délai d'un mois à compter de la réception par Canal+ Belgique d'un bon de restitution dûment complété par le distributeur agréé. 2. L'abonné ne restitue pas son décodeur dans le délai prévu.Dans ce cas, Canal+ Belgique percevra jusqu'à la date de remise effective du décodeur, une indemnité journalière d'immobilisation égale à un dixième du prix mensuel de l'abonnement.

Si Canal+ Belgique ou un de ses mandataires se voient obligés de récupérer eux-mêmes le décodeur chez l'abonné, celui-ci sera redevable d'une indemnité forfaitaire de récupération du décodeur de 3 000 BEF. La deuxième formule d'abonnement que Canal+ Belgique souhaite proposer (formule sur laquelle porte la demande d'attestation négative) permettrait aux nouveaux abonnés d'être dispensés du paiement de la garantie au moment du retrait du décodeur chez le distributeur agréé Canal+ Belgique en contrepartie d'une majoration de prix de 140 BEF par mois, ce qui porterait le prix mensuel d'abonnement à 1 195 BEF/mois TVAC. L'abonnement serait d'office d'une durée initiale de 12 mois, la formule d'essai de 3 mois n'étant pas prévue.

A l'issue de la première période d'abonnement de 12 mois, l'abonné qui souhaiterait changer de formule d'abonnement pourrait repasser à la formule d'abonnement classique, soit le paiement d'une garantie de 3 000 BEF et une redevance mensuelle de 1 055 BEF, pour une période de 12 mois.

Il résulte de ce qui précède qu'actuellement, la personne qui souhaite s'abonner à Canal+ Belgique a le choix entre deux formules : Pour la consultation du tableau, voir image La reconduction de l'abonnement se ferait par périodes successives de 12 mois.

S'interrogeant sur la compatibilité de cette formule aux règles de la concurrence, Canal+ Belgique craint que lui soit objecté que sa situation prépondérante lui permette d'obtenir des abonnés qui ne sont pas capables de payer immédiatement la garantie de 3 000 BEF le paiement d'un prix supérieur à celui pratiqué dans la formule classique, soit une pratique abusive de sa part consistant à imposer de façon directe ou indirecte des prix d'achat ou de vente ou d'autres conditions de transaction non équitables, interdite par l'article 3 de la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer.

L'article 2, § 1er, de l'arrêté royal du 23 mars 1993 relatif aux demandes et notifications visées aux articles 6 et 7 de la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer sur la protection de la concurrence économique précise que : « est habilitée à présenter une demande (d'attestation négative) (...) toute entreprise (...) participant à des accords, décisions ou pratiques visées aux articles 2 et 3 de la loi ».

L'article 1er, littera a, de la loi définit l'entreprise comme « toute personne physique ou morale poursuivant de manière durable un but économique ».

La société Canal+ Belgique est une entreprise au sens de la loi et la demande d'attestation négative relative à l'instauration d'une deuxième formule d'abonnement à la chaîne de télévision Canal+ Belgique a été introduite par l'intéressée elle-même.

Par conséquent, la demande d'attestation négative introduite par Canal+ Belgique est recevable.

En vertu des articles 2, § 1er, et 3, de la loi, les pratiques restrictives de concurrence doivent affecter le marché belge concerné ou une partie substantielle de celui-ci.

L'exposé des motifs de la loi précise la notion de marché géographique de la manière suivante : « le marché géographique est constitué par le territoire à l'intérieur de la Belgique sur lequel les entreprises concernées par l'accord, (...), interviennent dans l'offre et la demande de biens et de services. (...) Ce territoire sera plus limité que le territoire national notamment lorsque la nature et les propriétés du produit concerné, (...) en réduisent la mobilité. ».

Canal+ Belgique n'émet que sur la partie francophone de la Belgique.

Le marché géographique concerné par la nouvelle formule d'abonnement est limité au territoire de la Communauté française considéré comme une partie substantielle du territoire belge.

Le marché concerné peut se définir soit de façon restrictive (Canal+ Belgique étant une chaîne de télévision à péage qui nécessite l'installation d'un décodeur pour décrypter les programmes, ceux-ci ne sont pas accessibles automatiquement aux abonnés du câble et le marché concerné serait celui de la télévision à péage en Communauté française sur lequel Canal+ Belgique est la seule chaîne présente actuellement, à l'exception de la chaîne de télévision Filmnet qui est diffusée en Région bruxelloise, soit une partie réduite du territoire de la Communauté française), soit de façon extensive (les chaînes de télévision disponibles sur le câble en Communauté française).

La position dominante de Canal+ Belgique sur le marché ne paraît pas, dans l'état actuel du dossier, de nature à lui permettre de faire obstacle au maintien d'une concurrence effective en lui fournissant la possibilité de comportements indépendants dans une mesure appréciable vis-à-vis de ses concurrents, de ses clients ou de ses fournisseurs.

Il convient en effet d'observer que d'une part, le consommateur-abonné dispose du libre choix entre les deux formules d'abonnement puisque la formule dite actuelle reste toujours en vigueur; la nouvelle formule proposée s'ajoute à celle disponible en sorte que le consommateur peut opter pour le système de son choix selon ses possibilités financières.

En outre, dans un souci de parfaite information du consommateur, Canal+ Belgique s'engage à veiller d'une part à ce que le contrat d'abonnement lui-même renseigne l'existence de deux formules d'abonnement et d'autre part qu'il résulte clairement des termes utilisés, qu'en cas de non-paiement de la garantie aucune somme ne serait remboursée au terme du contrat.

De la sorte Canal+ Belgique fournit au consommateur la possibilité de faire un choix économique rationnel entre deux formules proposées et d'adhérer aux conditions de l'abonnement en connaissance de cause.

D'autre part, Canal+ Belgique basant sa politique de commercialisation sur deux pôles essentiels de sa programmation, à savoir le cinéma et le sport, il est permis de considérer que toutes les chaînes de télévision disponibles en Communauté française sont des concurrentes potentielles car elles proposent également des programmes de fiction (films, séries, téléfilms) et/ou des programmes sportifs. En outre, certaines programmations de Canal+ Belgique sont diffusées « en clair », c'est-à-dire accessibles également aux abonnés du câble non-détendeurs d'un décodeur : « Les guignols de l'info », « Nulle Part Ailleurs », « J'aime autant de t'ouvrir les yeux », etc.

Canal+ Belgique se situe ainsi dans un environnement extrêmement concurrentiel sur un marché câble à presque 95 % et proposant 24 à 35 chaînes pour un abonnement de + 5 000 BEF (Canal+ Belgique = 12 660 BEF/an pour la seule chaîne Canal+ Belgique).

En Communauté française, trois chaînes dépassent 15 % de l'audience de l'ensemble des chaînes captables : RTL-TVi, RTBF et TF1. Leur audience cumulée avec celle de Télé 21, France 2 et France 3 est de 80 %.

Canal+ Belgique se situe à 0,8 %.

A ce niveau également, le consommateur établi en Communauté française dispose d'un choix très large entre un nombre élevé de chaînes qui offrent toutes du cinéma et/ou du sport.

A ces causes, Le Conseil de la concurrence, Constate qu'il n'y a pas pour lui, en fonction des éléments dont il a connaissance, d'inconvénients à l'égard du contrat notifié par la SA Canal+ Belgique.

Ainsi statué le 18 février 1998 par la chambre du Conseil de la concurrence composée de M. Bernard Dauchot, Président, Mme Marie-Claude Grégoire, MM. Aurelio Pappalardo et Bernard Remiche, membres.

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