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Rapport
publié le 16 octobre 2001

Décision n° 2001-C/C-38 du 26 juin 2001 AstraZeneca s.a. / Bio Therabel s.a. Vu la notification de l'opération de concentration déposée au secrétariat du Conseil de la concurrence le 11 mai 2001. Vu le Rapport du Corps des Rapporteurs du 11 j Entendu à l'audience du 26 juin 2001 : - le Rapporteur en son rapport; - le représentant comm(...)

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16/10/2001
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MINISTERE DES AFFAIRES ECONOMIQUES


Décision n° 2001-C/C-38 du 26 juin 2001 AstraZeneca s.a. / Bio Therabel s.a.

Vu la notification de l'opération de concentration déposée au secrétariat du Conseil de la concurrence le 11 mai 2001.

Vu le Rapport du Corps des Rapporteurs du 11 juin 2001.

Entendu à l'audience du 26 juin 2001 : - le Rapporteur en son rapport; - le représentant commun des parties notifiantes.

Les parties en cause L'acquéreur : AstraZeneca sa (ci-après AstraZeneca) est une société anonyme belge établie rue E. Van Ophem 110, à 1180 Bruxelles. Elle est active dans la commercialisation, la recherche et la production de produits pharmaceutiques (usine à Destelbergen) et emploie plus de 500 personnes. AstraZeneca commercialise notamment l'omeprazole sous la marque Losec.

AstraZeneca est une filiale du groupe anglais AstraZeneca plc. Ce dernier est actif dans la recherche, la production et la vente de produits pharmaceutiques. Son activité commerciale se concentre sur les besoins médicaux dans les domaines suivants : - le cancer; - le système cardiovasculaire; - le système nerveux central; - le système gastro-intestinal; - les infections, le contrôle de la douleur et l'anesthésie; - le système respiratoire.

Le vendeur : Therabel sa (ci-après Therabel) est une société pharmaceutique belge qui effectue la commercialisation et le marketing de spécialités pharmaceutiques. Elle est établie 108 rue E. Van Ophem, à 1180 Bruxelles.

La société cible : Bio Therabel sa (ci-après Bio Therabel) est une société anonyme belge établie rue E. Van Ophem 110, à 1180 Bruxelles. Elle met en vente le produit médical omeprazole sous la marque Logastric sur la base d'accords de commercialisation et de co-promotion conclus avec AstraZeneca, depuis 1989. Dans la mesure où cette société faisait partie du groupe Therabel, ses activités consistaient également à promouvoir (mais pas à vendre) de manière accessoire les produits pharmaceutiques du portefeuille du groupe Therabel. Cette activité reste en dehors de la concentration.

L'opération notifiée La notification a pour objet un projet d'accord de concentration qui concerne l'acquisition de toutes les actions de Bio Therabel par AstraZeneca. Après réalisation de l'opération, Bio Therabel changera de nom pour s'appeler Biothera.

La réalisation de l'opération de concentration permettra à AstraZeneca d'une part et Bio Therabel d'autre part de s'intégrer d'avantage et d'approfondir leur coopération existante (commercialisation conjointe des produits Losec et Logastric). Cette acquisition permettra en outre à AstraZeneca de développer sa présence en Belgique, en particulier en vue du lancement imminent d'un nouveau produit pharmaceutique (Nexiam) prévu pour le début de l'année prochaine.

Les sociétés précitées sont des entreprises au sens de l'article 1er de la loi et l'opération notifiée est une opération de concentration au sens de l'article 9 de la loi.

Sur la base des indications fournies par les parties, les seuils de chiffres d'affaires visés à l'article 11 de la loi sont atteints.

Les marchés concernés Le secteur économique concerné par la concentration est celui de la fabrication de médicaments.

L'opération concerne des produits pharmaceutiques et plus particulièrement des médicaments de prescription qui ne sont disponibles qu'en produisant une prescription médicale qui permet, pour la plupart des produits, leur remboursement par les programmes de sécurité sociale.

Dans sa jurisprudence constante, la Commission subdivise les médicaments en différentes classes thérapeutique en référence à la classification "Anatomical Thérapeutic Chemical (ATC) " conseillée par la "European Pharmaceutical Marketing Research Association" et "Intercontinental Medical Statistics (IMS)". L'ATC fonctionne de manière hiérarchique et distingue 14 catégories (A à V). Cette classification permet de regrouper les médicaments en fonction de leur composition et de leurs propriétés thérapeutiques. Chaque catégorie possède jusqu'à 4 niveaux. Le troisième niveau (ATC 3) permet de regrouper les médicaments d'après leurs indications thérapeutiques, c'est-à-dire en fonction de l'usage auquel ils sont destinés et peut être utilisé comme élément de définition du marché. Le quatrième niveau (ATC 4) est le plus détaillé.

Tant les parties que les concurrents suggèrent l'usage de la classification ATC afin de définir le marché de produits en cause.

Les parties considèrent qu'il est approprié d'utiliser la classification ATC 3 comme fondement de la définition du marché des produits en cause.

L'omeprazole est un anti-ulcérant classé dans la Catégorie de traitement A02B par la classification ATC 3.

En Belgique, le marché pour les produits anti-ulcérants comprend deux types de produits prescrits pour le traitement de l'acide et des maux d'estomac : - les "H2-Blockers"; - et les "Proton Pump Inhibitors" ("PPI").

Les H2-blockers sont des inhibiteurs constitués d'une substance chimique naturelle, l'histamine (H2) qui, dans l'estomac, réduit la sécrétion d'acide. Le premier H2-blocker fut mis sur le marché en 1977.

Les PPI réduisent la sécrétion acide par l'inhibition de pompes protons dans la couche intérieure de l'estomac. Les PPI ont été mis sur le marché au début des années nonante, et sont un traitement amélioré des problèmes d'acide.

Les produits commercialisés par AstraZeneca et Bio Therabel étant des PPI, le seul chevauchement dans leurs activités se trouve sur le marché A02B, ce qui en fait l'unique marché affecté par l'opération.

En effet, selon les parties, H2-blockers et PPI sont substituables et appartiennent au même marché : ces produits sont des substituts pour le traitement de maux similaires et ont des propriétés identiques. La différence de prix n'entrave pas l'interchangeabilité.

Les parties font, de plus, référence à l'affaire Glaxo Welcome/SmithKline Beecham dans laquelle la Commission européenne a remarqué, lors de son appréciation du marché pertinent, qu'en ce qui concerne la catégorie A02B, rien ne suggérait d'autre définition que celle fondée sur le critère ATC3.

Les concurrents Exel Pharma et Byk donnent leur accord sur la définition de marché proposée par les parties.

Dans sa réponse à la demande de renseignements du Service, la société concurrente Aventis a toutefois précisé que : "Les classes ATC déterminent des groupes de molécules dont l'activité pharmacologique est semblable mais elles ne délimitent pas les domaines d'utilisation possible de ces produits. Ainsi tant les antiacides que les PPI et les H2-blockers ont des indications dans l'ulcère gastrique et dans le reflux gastro-oesophagien. Par contre, ces produits ne sont pas automatiquement substituables d'une classe à l'autre. Ce n'est qu'au sein d'une même classe (4ème niveau) qu'on peut estimer substituables les produits appartenant à cette classe. » (cf. doc. 8) Aventis propose d'utiliser la classification ATC 4 et de considérer dès lors le marché concerné comme étant celui des PPI (A02B C), les H2-blockers (A02B A) n'appartenant pas à cette catégorie.

Dans plusieurs décisions, la Commission rappelle qu'il ne faut pas négliger les autres niveaux de la classification ATC et que dans certains cas il faut admettre une délimitation plus étroite (ou plus large) du marché. C'est notamment le cas, lorsque les médicaments en question ont des indications nettement différentes.

L'interchangeabilité des produits ne dépend donc pas fondamentalement de leur identité physique ou chimique mais de leur interchangeabilité fonctionnelle du point de vue du dispensateur.

Il n'est cependant pas nécessaire de trancher cette question dans la mesure où, quelle que soit la définition du marché de produits en cause qui serait retenue, celle-ci n'a pas d'incidence significative sur l'admissibilité de la concentration projetée.

En ce qui concerne le marché géographique en cause, il résulte d'une jurisprudence européenne constante que les marchés géographiques de produits pharmaceutiques doivent être définis comme étant de dimension nationale. Le marché géographique est dès lors l'ensemble du territoire belge.

Analyse concurrentielle Le marché total belge A02B tel que retenu par les parties se chiffre selon ces dernières, pour l'année 2000, à 116 millions d'euro, ce qui équivaut à 128,8 millions d'Unités de Compte (UC).

Les parties présentent leurs parts de marché (en volume et en valeur) ainsi que celles de leurs concurrents par les tableaux suivants (source IMS) : Pour la consultation du tableau, voir image Dans leur notification, les parties ont estimé que les parts en valeur présentées par le premier tableau exagèrent leur position réelle. Les parties estiment en effet que les parts de marché fondées sur le volume reflètent de manière plus précise la structure concurrentielle du marché, eu égard aux différents niveaux de prix des H2-blockers et des PPI (les PPI sont plus chers) ou encore à l'arrivée récente sur ce marché de produits génériques moins chers.

Les parties calculent leurs parts de marché en volume en UC (unité de compte). L'unité de compte se base sur le nombre de doses vendues et non sur le nombre d'unités (paquets).

L'UC élimine les distorsions causées par des différences dans les tailles de paquets en multipliant le nombre d'unités par le nombre de comprimés/capsules/injections par lot.

L'AGIM calcule le volume des parts de marché sur base de l'unité de mesure DDD (defined daily dose) qui permet de calculer les ventes en "jour/traitement. Selon les parties, la faiblesse de cette méthode réside dans le fait qu'elle ne permet pas de tenir compte de l'indication, une dose étant utilisée de façon indifférenciée.

Selon l'unité de mesure utilisée et la définition de marché proposée les parties ou certains concurrents les parts de marché peuvent varier de manière importante (de 40 % à 70 %...).

Les parties présentent le marché comme étant très actif en terme de nouveaux entrants. Il convient de distinguer trois types d'entrées : 1) l'entrée de nouveaux produits (ex.PPI) Les barrières à l'entrée d'un nouveau produit sont élevées. Elles consistent principalement en la durée nécessaire pour la recherche et le développement, aussi bien que pour les dépenses importantes nécessaires à la production de ces produits. Les parties estiment que la R&D d'un nouveau produit se chiffre à 490 millions d'euro. Les entrées futures sur le marché sont possibles pour les grandes sociétés pharmaceutiques.

Le produit Rabeprazole de J&J, nouveau PPI, est actuellement en phase de lancement.

Tant les parties que leurs concurrents identifient en outre, les barrières suivantes : nécessité d'obtenir une autorisation de mise sur le marché du Ministre de la santé (6 mois à 3 ans), avis de la commission de transparence (2 à 3 mois), approbation du prix de vente par le Ministre des affaires économiques (3 mois), remboursement par la sécurité sociale (9 à 30 mois). 2) l'entrée via de nouvelles doses thérapeutiques Une fois que le produit est sur le marché, une nouvelle entrée est possible en promouvant et fabriquant une nouvelle dose d'un médicament existant.3) l'entrée via des produits génériques Une fois que la protection du brevet est terminée, l'entrée sur le marché est moins coûteuse (enregistrement du produit générique plus simple, dossier simplifié, coûts de production moindres). Il faut également souligner dans le cadre de l'analyse de la présente opération que le brevet de l'omeprazole, substance active du Losec et du Logastric expirera fin de l'année 2002. De ce fait, la présence des produits génériques sur le marché augmentera substantiellement.

De manière générale, les concurrents interrogés considèrent que la concentration va renforcer la position de leader de l'omeprazole sur le marché et accroître la force d'introduction de la nouvelle société auprès du corps médical, ainsi qu'auprès des différentes instances publiques qui entrent en ligne de compte dans le circuit de la mise sur le marché de produits.

L'opération de concentration aboutit à un cumul de part de marché des parties.

Si on considère que le marché des produits en cause est la classe A02B, dans ce cas, la part de marché cumulée équivaut à 41,8 %. Par contre, si on retient pour la définition du marché le seul segment des PPI (classe A02B C), dans ce cas, les parties détiennent ensemble près de 70 % du marché. Quelle que soit la définition retenue, on aboutit après concentration à des parts de marché élevées.

Cela étant, l'existence d'une position dominante ne peut se présumer du seul montant de part de marché. Nonobstant l'existence de barrières à l'entrée importantes, les éléments suivants doivent être pris en considération : - L'opération de concentration n'aura pas pour effet d'évincer un concurrent. Les deux produits sont totalement identiques et la présence simultanée du Logastric (distribué par Bio Therabel mais fabriqué par AstraZeneca Suède) au côté du Losec (fabriqué et distribué par AstraZeneca) sur le marché résulte d'un accord de co-marketing et de co-promotion du produit omeprazole datant de 1989 et renouvelé en dernier lieu en 2000. A noter que depuis le début, cette stratégie commune inclut notamment une publicité commune. - L'absence d'effet de gamme : l'effet de gamme est une des manifestations de la puissance économique révélatrice d'un pouvoir de domination. La concentration ne permettra pas à AstraZeneca d'élargir la gamme de produits offerts. Les produits "Logastric" et "Losec" sont en effet dérivés d'une même molécule (l'omeprazole) et il n'existe pas de différence entre ces produits au niveau de l'utilisation ou du dosage. - L'existence d'une concurrence potentielle : dans le cas de l'industrie pharmaceutique, l'appréciation des conditions de concurrence exige pour être complète, un examen des produits qui ne sont pas encore sur le marché mais qui se trouvent à un stade de développement avancé (et ont nécessité normalement des investissements considérables). Outre le nouveau produit Nexiam qui sera prochainement présenté par AstraZeneca sur le marché, Janssen Cilag va introduire également le Pariet et pour rappel, le produit Rabeprazole de J&J, nouveau PPI, est actuellement en phase de lancement. On doit également s'attendre à voir arriver sur le marché avant la fin de l'année 2002 les premiers médicaments génériques de l'omeprazole, le brevet de l'omeprazole (substance active du Logastric et du Losec) arrivant à échéance à la fin de cette année. En effet, la récente modification législative (système des "prix de référence") favorisera probablement l'usage de ce type de médicaments. Par ailleurs, le Zurcale (Exel pharma) sera prochainement mis sur le marché sous forme de nouvelle dose (Zurcale 20). La concurrence potentielle est donc bien réelle. - La tendance du marché : Depuis plusieurs années, on assiste à une progression constante de la vente des PPI tandis que les ventes d'H2-blockers ne cessent de reculer. Ces derniers viennent de connaître récemment une modification de leur catégorie de remboursement. Jusqu'au 1er mars 2001, ces médicaments n'étaient remboursables qu'à condition que le patient se soumette à une endoscopie, comme c'est toujours le cas pour les PPI (segment A02BC inhibiteurs de la pompe à protons). Cette évolution pourrait entraîner un déplacement de la demande vers le segment A02BA, le groupe de médicaments accessibles directement, c'est-à-dire sans examen technique préalable. - L'incidence de l'opération de concentration sur la force de vente des parties : les parties signalent que la force de vente d'AstraZeneca est actuellement de 171 unités tandis que celle de Biotherabel s'élève à 28 unités. La concentration n'engendrera pas dans l'immédiat un renforcement significatif de la force de vente sur le marché concerné dans la mesure où les deux produits continueront à être commercialisés de manière distincte. Le renforcement ne portera pas sur le marché concerné mais sur les autres marchés où des produits AstraZeneca sont présents via une promotion supplémentaire de leurs produits. - Le contexte concurrentiel : le marché de produit retenu est un marché très ciblé. Au sein du secteur pharmaceutique, de nombreux autres marchés existent où sont présents des acteurs très puissants, capables de supporter les lourds frais de R&D propres à ce secteur. Il y a donc lieu de nuancer les fortes parts de marché détenues par les parties à l'issue de l'opération, dans la mesure où, d'une part, celles-ci ne sont propres qu'à un segment bien spécifique du secteur pharmaceutique et, d'autre part, elles ne sont pas figées : des innovations technologiques peuvent toujours remettre en cause à moyen terme ces parts de marché.

Il résulte de ce qui précède que la concentration notifiée n'aura pas pour effet l'acquisition ou le renforcement d'une position dominante qui entrave de manière significative une concurrence effective sur le marché belge concerné ou sur une partie substantielle de celui-ci.

Par ces motifs Le Conseil de la Concurrence Constate que la concentration tombe dans le champ d'application de la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer sur la protection de la concurrence économique et ne soulève pas de doutes sérieux quant à son admissibilité, conformément aux articles 10, § 3, et 33, § 2, 1.a, de la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer sur la protection de la concurrence économique.

Décide en conséquence de ne pas s'y opposer.

Ainsi décidé le 26 juin 2001 par la chambre du Conseil de la concurrence composée de Mme Marie-Claude Grégoire, Président, de M. Jacques Schaar, de M. Roger Ramaekers et de Mme Dominique Smeets, Membres.

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