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Arrêt De La Cour Constitutionelle
publié le 07 avril 1998

Arrêt n° 25/98 du 10 mars 1998 Numéro du rôle : 1062 En cause : le recours en annulation de l'article 21, § 2, du décret de la Communauté flamande du 8 juillet 1996 relatif à l'enseignement VII, introduit par J. Nelissen. La Cour d'ar composée des présidents L. De Grève et M. Melchior, et des juges H. Boel, P. Martens, G. De Baets, (...)

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Arrêt n° 25/98 du 10 mars 1998 Numéro du rôle : 1062 En cause : le recours en annulation de l'article 21, § 2, du décret de la Communauté flamande du 8 juillet 1996 relatif à l'enseignement VII, introduit par J. Nelissen.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents L. De Grève et M. Melchior, et des juges H. Boel, P. Martens, G. De Baets, E. Cerexhe et H. Coremans, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président L. De Grève, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 3 mars 1997 et parvenue au greffe le 4 mars 1997, J. Nelissen, demeurant à 3960 Bree, Heuvelstraat 48, a introduit un recours en annulation de l'article 21, § 2, du décret de la Communauté flamande du 8 juillet 1996 relatif à l'enseignement VII (publié au Moniteur belge du 5 septembre 1996).

II. La procédure Par ordonnance du 4 mars 1997, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.

Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.

Le recours a été notifié conformément à l'article 76 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 20 mars 1997.

L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 21 mars 1997.

Le Gouvernement flamand, place des Martyrs 19, 1000 Bruxelles, a introduit un mémoire par lettre recommandée à la poste le 5 mai 1997.

Ce mémoire a été notifié conformément à l'article 89 de la loi organique, par lettre recommandée à la poste le 16 mai 1997.

J. Nelissen a introduit un mémoire en réponse par lettre recommandée à la poste le 17 juin 1997.

Par ordonnances du 25 juin 1997 et du 25 février 1998, la Cour a prorogé respectivement jusqu'aux 3 mars 1998 et 3 septembre 1998 le délai dans lequel l'arrêt doit être rendu.

Par ordonnance du 21 janvier 1998, la Cour a déclaré l'affaire en état et fixé l'audience au 11 février 1998.

Cette ordonnance a été notifiée aux parties ainsi qu'à leurs avocats, par lettres recommandées à la poste le 22 janvier 1998.

A l'audience publique du 11 février 1998 : - ont comparu : . Me B. Meganck, avocat au barreau de Termonde, pour J. Nelissen; . Me P. Devers, avocat au barreau de Gand, pour le Gouvernement flamand; - les juges-rapporteurs G. De Baets et P. Martens ont fait rapport; - les avocats précités ont été entendus; - l'affaire a été mise en délibéré.

La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.

III. En droit - A - Requête En ce qui concerne la disposition entreprise A.1. Le décret du 17 juillet 1991 relatif à l'inspection et aux services d'encadrement pédagogique a instauré un nouveau régime concernant l'inspection de l'enseignement fondamental, qui modifie le recrutement des inspecteurs. Pour ce qui est de l'accès à la fonction, l'article 22 du décret prévoit une épreuve dont le contenu est fixé par le Gouvernement flamand. A l'inverse du régime antérieur, il n'a pas été prévu une réserve de recrutement proprement dite. La disposition transitoire de l'article 109 contient toutefois une réglementation pour un nombre limité de membres du personnel, dont le résultat est le même. Les membres du personnel qui étaient lauréats d'un examen d'aptitude pour une fonction d'inspecteur ou qui étaient titulaires d'un brevet de promotion d'aptitude pour la fonction d'inspecteur cantonal de l'enseignement fondamental devaient uniquement être entendus par le jury d'examen, ce jury se fondant sur les éléments de l'examen antérieur. Ces membres du personnel étaient et restent dispensés de l'examen.

Le décret entrepris a modifié cette réglementation : pour la nomination en qualité d'inspecteur, il faut à nouveau subir des épreuves, mais il est en outre prévu des réserves de recrutement d'inspecteurs de l'enseignement fondamental.

En ce qui concerne l'intérêt A.2.1. La requérante est inspectrice temporaire de l'enseignement fondamental du département de l'enseignement du ministère de la Communauté flamande. Sous le régime du décret du 17 juillet 1991, elle a réussi l'examen organisé en vue d'une nomination dans l'un des quatre emplois vacants d'inspecteur de l'enseignement fondamental.

Elle et les candidats qui bénéficient de la disposition transitoire de l'article 109 du décret du 17 juillet 1991 ainsi que les autres candidats lauréats ont été classés par le jury compétent. Bien qu'elle ait réussi l'épreuve, elle ne fut pas admise dans une réserve de recrutement, celle-ci n'étant pas prévue dans ce régime.

Le 1er septembre 1994, elle fut admise à un stage pour l'emploi d'inspecteur de l'enseignement fondamental, mais cet arrêté fit l'objet d'une demande de suspension et d'un recours en annulation introduits auprès du Conseil d'Etat par deux titulaires du brevet de promotion d'inspecteur cantonal, qui avaient été entendus par le jury d'examen en 1994. Le Conseil d'Etat suspendit l'arrêté, manifestement parce qu'il convenait, à l'estime du Conseil d'Etat, d'accorder la préférence aux candidats qui pouvaient bénéficier de la disposition transitoire et qui avaient fait valoir devant le Conseil d'Etat des « prétentions sensiblement plus importantes ». Sur ce, le ministre de l'Enseignement rapporta l'arrêté admettant la requérante au stage. Par arrêté du 24 octobre 1995, la requérante fut à nouveau temporairement désignée au titre d'inspectrice de l'enseignement fondamental à partir du 1er septembre 1995.

Cela n'empêcha évidemment pas la requérante de ne pas être nommée et de ne pas être admise dans une réserve de recrutement, puisque celle-ci n'existait pas.

A.2.2. En vertu de la disposition entreprise du décret du 8 juillet 1996, une nouvelle épreuve doit être organisée pour la nomination au titre d'inspecteur, mais cet examen donnerait lieu à la constitution d'une réserve de recrutement. La requérante participa au nouvel examen, mais ne passa pas le cap des épreuves écrites et ne fut donc pas convoquée à l'épreuve orale.

Etant donné qu'aucune disposition transitoire n'est prévue pour les candidats qui ont réussi l'examen organisé par application de la disposition décrétale originaire, contrairement à ce qui a été prévu par le décret du 17 juillet 1991 pour les lauréats de l'examen organisé sous le régime précédent, la requérante est directement et défavorablement affectée.

Quant au fond A.3.1. La requérante dénonce la violation des articles 10 et 11 de la Constitution par l'article 21, § 2, du décret du 8 juillet 1996 en ce que celui-ci ne prévoit aucune disposition transitoire pour les candidats ayant réussi l'examen sous l'empire du décret du 17 juillet 1991, alors que les candidats (lauréats et titulaires d'un brevet) qui avaient réussi l'examen avant l'entrée en vigueur de ce dernier décret bénéficiaient d'une disposition transitoire figurant à l'article 109 du décret du 17 juillet 1991.

A.3.2. Selon la requérante, il n'est pas satisfait aux critères posés par la Cour pour qu'un traitement distinct puisse résister à un contrôle au regard des articles 10 et 11 de la Constitution. L'exposé des motifs du décret du 8 juillet 1996 précise que l'alinéa 3 de l'article 28 du décret du 17 juillet 1991, tel qu'il a été modifié par l'article 21, § 2, du décret du 8 juillet 1996, « prévoit la possibilité de constituer, par le biais de l'épreuve d'accès à la fonction d'inspecteur de l'enseignement fondamental, une réserve de recrutement pour des candidats à la fonction d'inspecteur de l'enseignement fondamental. L'organisation répétée d'épreuves pour ce corps est ainsi largement limitée. [...] L'alinéa 4 prévoit la possibilité que les lauréats de l'épreuve organisée pour une réserve de recrutement antérieure ne perdent pas leurs droits de présentation dans un délai de quatre ans, même si une nouvelle réserve de recrutement était entre-temps constituée ».

A.3.3. Cet exposé des motifs révèle, selon la requérante, que l'objectif de ces réserves de recrutement était de limiter l'organisation répétée d'épreuves. En ne prévoyant pas de disposition transitoire pour les personnes qui étaient lauréates sous le régime du décret du 17 juillet 1991, le législateur décrétal a manqué l'objectif qu'il poursuivait, de sorte que la lacune dans la législation décrétale constitue une inégalité.

Mémoire du Gouvernement flamand Quant à la disposition entreprise A.4.1. Le décret du 17 juillet 1991 a institué une nouvelle inspection de l'enseignement, l'inspection de l'enseignement de la Communauté flamande. L'accès à la fonction d'inspecteur est subordonné à une épreuve, dont le contenu est déterminé par le Gouvernement flamand et dont les résultats sont appréciés par un jury qui présente deux candidats en ordre d'aptitude, par emploi vacant, par une décision motivée. Un arrêté du Gouvernement flamand admet les candidats au stage. Les membres du personnel admis au stage peuvent, le cas échéant, être nommés à titre définitif à la fonction d'inspecteur pour laquelle ils ont posé leur candidature.

A.4.2. Les articles 108 et 109 du décret contiennent des dispositions transitoires, d'une part pour les membres de l'inspection qui, avant leur nomination à cette fonction, étaient membres nommés à titre définitif des services d'inspection énumérés et qui exercent un mandat, et d'autre part pour les membres du personnel lauréats d'un examen d'aptitude à une fonction d'inspecteur ainsi que pour les membres du personnel détenteurs d'un brevet de promotion d'inspecteur.

Dans sa proposition, le jury doit également prendre en compte les membres du personnel précités en se basant sur les éléments de l'examen subi antérieurement et entendre les intéressés. La disposition transitoire instaurée au profit des lauréats et des détenteurs d'un brevet a été justifiée par l'argument selon lequel ces certificats d'aptitude constituaient la condition d'accès aux anciennes fonctions d'inspecteur, alors même que la nouvelle épreuve diffère en de nombreux points des anciennes épreuves et que le jury est également constitué sur une autre base. L'audition des intéressés a été prévue dans le décret en vertu des considérations suivantes : « D'une part, les détenteurs d'un brevet ne peuvent être soumis à un nouvel examen ou à une épreuve supplémentaire. D'autre part, les intéressés doivent entrer en contact de façon organisée avec le jury avant que celui-ci établisse le classement des candidats. » A.4.3. Le décret du 8 juillet 1996 visait, par l'épreuve d'accès à la fonction d'inspecteur de l'enseignement fondamental, à constituer une réserve de recrutement pour les candidats à cette fonction et à limiter de la sorte l'organisation répétée d'épreuves pour ce corps.

L'alinéa 5 de l'article attaqué prévoit la possibilité que les lauréats de l'épreuve provenant d'une réserve de recrutement antérieure ne perdent pas leurs droits de présentation dans un délai de quatre ans, même si une nouvelle réserve de recrutement était constituée dans l'intervalle.

Quant à l'intérêt de la requérante A.5.1. La requérante, qui a été classée sixième sous le régime du décret du 17 juillet 1991 parmi huit candidats à quatre emplois vacants d'inspecteur de l'enseignement fondamental et qui a été désignée temporairement comme inspectrice de l'enseignement fondamental par arrêté ministériel du 24 octobre 1995, a vu mettre un terme à sa désignation temporaire en date du 1er mai 1997, après l'entrée en service des nouveaux inspecteurs stagiaires, recrutés en vertu de la nouvelle procédure prescrite par le décret du 8 juillet 1996.

A.5.2. Le Gouvernement flamand conteste l'intérêt de la requérante en vertu de la jurisprudence de la Cour concernant l'intérêt. La requérante fonde son intérêt sur son statut (juridique) de lauréate de l'épreuve d'inspecteur de l'enseignement fondamental visée aux articles 22 et 28 (ancienne version) du décret relatif à l'inspection.

Elle puise sa qualité de « lauréate » dans la circonstance que, suite à une procédure de sélection régie par le décret du 17 juillet 1991, le jury l'a classée dans la liste de présentation qu'il devait établir. La circonstance qu'elle a été admise au stage après cette présentation n'est pas pertinente en droit, étant donné que la requérante n'a pas contesté l'arrêté de retrait pris après la suspension de sa désignation par le Conseil d'Etat.

A.5.3. Elle dénonce la distinction opérée entre ceux qui étaient lauréats sous le régime précédant l'entrée en vigueur du décret du 17 juillet 1991 et ceux qui ont réussi l'examen après le décret du 17 juillet 1991. Il n'est pas fait état d'une distinction (illicite en droit) quant aux candidats à la fonction d'inspecteur de l'enseignement fondamental selon qu'ils sont classés, après le 1er septembre 1995, sous le régime du décret relatif à l'inspection complété par la norme entreprise ou selon qu'ils figureront au contraire sur la liste à soumettre au Gouvernement flamand.

A.5.4. Sous le régime originaire du décret relatif à l'inspection, le statut (juridique) de la requérante n'était pas celui de « lauréate » mais bien de « classée », donc celui de candidat présenté au sens de l'article 28, alinéa 2, du décret relatif à l'inspection. Après qu'il eut été décidé par arrêté devenu définitif quels candidats présentés étaient admis au stage, semblable présentation, pour autant qu'elle n'était pas (finalement) suivie d'un arrêté ministériel d'admission au stage, ne produisait (plus) aucun effet juridique.

Pour démontrer son intérêt, la requérante ne peut plus invoquer sa qualité de « lauréate », étant donné qu'elle n'a pas contesté l'arrêté de retrait du 27 mars 1995 relatif à son admission au stage. Elle n'a donc aucun droit lié à la qualité de « candidat présenté » sous l'ancien système de sélection du décret relatif à l'inspection.

Par conséquent, la requérante ne prouve pas qu'elle a un intérêt, dès lors qu'elle ne fait état d'aucune distinction (illicite en droit) par rapport aux candidats présentés sous le régime complété du décret relatif à l'inspection ou par rapport à ceux qui figurent sur la liste dont il est question dans le régime qui a été complété.

Quant au fond A.6.1. Quant au fond, le Gouvernement flamand conteste en premier lieu la comparabilité des catégories. La présentation par le jury, prévue par le décret du 17 juillet 1991, qui n'est pas suivie par l'admission au stage ne crée en effet aucun droit et ne met pas les personnes présentées dans une autre situation que ceux qui satisfont aux conditions d'admission de l'article 22 du décret relatif à l'inspection et qui peuvent poser leur candidature lors d'une vacance d'emploi ultérieure. L'autorité n'a pas davantage suscité l'espoir que la personne simplement présentée soit traitée différemment en droit, lors d'une épreuve ultérieure, à l'occasion d'une vacance d'emploi nouvelle, des personnes qui poseraient pour la première fois leur candidature à cette même occasion. La situation des « personnes presentées » n'est pas comparable à celle des lauréats et des détenteurs d'un brevet de promotion lors de l'entrée en vigueur du décret du 17 juillet 1991. Cette aptitude a été constatée indépendamment d'une procédure de sélection ou d'une vacance d'emploi quelconque et sa validité dans le temps était illimitée, si bien que, pour les emplois devenus vacants, l'on a puisé dans la liste de ces détenteurs de brevet, sur la base des résultats qu'ils avaient obtenus lors des examens.

Les deux catégories, si différentes, également dans le temps - en raison des règles différentes qui leur sont applicables -, sont insuffisamment comparables entre elles.

A.6.2. Sur la base de ce raisonnement, le Gouvernement flamand fait valoir que, s'il était conclu à la comparabilité des deux catégories, le statut de chacune - les lauréats et détenteurs de brevet d'une part, et les « candidats présentés », d'autre part - est à ce point différent que cela seul justifie déjà un traitement distinct.

A.6.3. La distinction repose sur un critère objectif, à savoir le régime différent sous lequel les candidats ont posé leur candidature à la fonction d'inspecteur de l'enseignement fondamental.

A.6.4. Cette distinction est légitime, étant donné qu'elle découle de la position statutaire dans laquelle les lauréats et les détenteurs d'un brevet se trouvaient lors de l'entrée en vigueur du décret du 17 juillet 1991 et elle découle des attentes suscitées par l'autorité, alors que les « candidats présentés » ne pouvaient invoquer aucun statut particulier.

A.6.5. La distinction est également adéquate et proportionnée, puisque les lauréats et les détenteurs d'un brevet ne bénéficiaient nullement, par suite de la disposition transitoire, d'un droit de priorité à une présentation par le jury. Ils entraient en ligne de compte pour une présentation en même temps que les candidats aux épreuves organisées et ont été réévalués en même temps que les lauréats des épreuves organisées à ce moment-là, ce qui a pu avoir pour effet qu'ils n'aient pas été classés en ordre utile. Ces détenteurs d'un brevet ont effectivement été entendus et devaient également introduire un dossier soumis au jury pour appréciation.

De la sorte, le législateur décrétal a recherché un équilibre entre les attentes légitimes des détenteurs d'un brevet et la sauvegarde des intérêts de l'autorité. L'on ne voit pas quel aurait pu être le fondement juridique d'un régime transitoire comparable et donc nécessairement limité au profit des « candidats présentés » sous le régime originaire du décret du 17 juillet 1991.

A.6.6. Il n'est pas pertinent de comparer deux réglementations applicables à des époques différentes, à des catégories de personnes différentes, alors même que la politique a été modifiée dans l'intervalle. Il n'aurait pas été possible, par rapport à la catégorie des lauréats et des détenteurs d'un brevet, d'instaurer par la norme entreprise une disposition transitoire analogue pour les « candidats présentés », compte tenu du changement de politique opéré par le décret du 17 juillet 1991. Le groupe du personnel des détenteurs d'un brevet de promotion est en effet nécessairement voué à s'éteindre, dès lors que le système d'examen est abrogé par le décret du 17 juillet 1991, tandis que la norme entreprise maintient intégralement le système des épreuves du décret relatif à l'inspection et en affine uniquement le résultat. Il existe en outre une différence de contenu entre l'examen afférent aux lauréats ou aux détenteurs d'un brevet et les épreuves relevant du décret relatif à l'inspection, que le système attaqué ne fait que compléter mais ne modifie pas quant au contenu.

Mémoire de la partie requérante En ce qui concerne l'intérêt A.7.1. La requérante maintient sa position en ce qui concerne son intérêt. Etant donné qu'elle a été retenue comme « classée » lors de la procédure de sélection, cela implique qu'elle devait par définition être considérée comme « lauréate ». En effet, elle a réussi l'épreuve organisée en vertu de la circulaire du 26 janvier 1994 - seuls les « lauréats » pouvant par la suite être « classés » - et elle a finalement été classée, en même temps que les détenteurs d'un brevet, par le jury compétent.

A.7.2. La circonstance que la requérante n'ait pas attaqué l'arrêté ministériel de retrait concernant son admission au stage n'est pas pertinente pour ce qui est de sa qualité de « lauréate » et pour ce qui est de son intérêt au recours en annulation.

A.7.3. La requérante, qui avait réussi l'examen en 1994 sous le régime originaire du décret du 17 juillet 1991 mais qui n'avait pas été nommée avant l'entrée en vigueur du nouveau décret du 8 juillet 1996, ne pouvait pas bénéficier d'une disposition transitoire quelconque.

Elle justifie dès lors de l'intérêt requis pour demander l'annulation de la disposition.

Quant au fond A.8.1. La requérante estime que les catégories évoquées sont bel et bien comparables. Les titulaires d'un brevet de promotion ont obtenu leur brevet à l'occasion d'un même type d'examen et la fonction qu'ils devaient finalement remplir était identique à celle des lauréats des épreuves organisées sous le régime originaire du décret du 17 juillet 1991.

A.8.2. Le traitement inégal n'est ni objectif ni raisonnablement justifié.

L'audition des titulaires d'un brevet peut difficilement être invoquée à titre d'argument. En effet, l'audition est en réalité une simple formalité et les détenteurs d'un brevet sont de facto classés avant les premiers lauréats des nouvelles épreuves, comme la requérante a elle-même pu en faire l'expérience en 1994, première lauréate des épreuves mais finalement classée seulement sixième (derrière cinq titulaires d'un brevet). Le fait qu'elle ait finalement été admise au stage, avant les titulaires d'un brevet, a donné lieu à des procédures devant le Conseil d'Etat.

L'instauration de la réserve de recrutement, comme l'a exposé le Gouvernement flamand, confirme le traitement inégal : les lauréats de 1996 et les lauréats postérieurs sont mis dans une réserve de recrutement pendant quatre ans, alors que les lauréats de 1994 n'ont pas été mis dans une réserve, bien qu'ils aient subi des épreuves identiques et qu'ils aient donc prouvé leur aptitude de la même façon.

A.8.3. Inacceptable car illogique est la référence faite par le Gouvernement flamand à un changement de politique : d'une part, il fait valoir qu'il était impossible d'instaurer sur cette base un régime transitoire limité pour les lauréats de 1994, et d'autre part les titulaires d'un brevet - du moins de l'inspection « ancien style » - ont été « emmenés » dans le système visé du nouveau type. - B - Quant à la disposition entreprise B.1.1. Le décret du 17 juillet 1991 relatif à l'inspection et aux services d'encadrement pédagogique a institué l'inspection de l'enseignement de la Communauté flamande. L'accès à la fonction d'inspecteur est subordonné à une épreuve (article 22, alinéa 1er); pour être admis à cette épreuve, les candidats doivent notamment déposer un dossier (article 22, alinéa 2, 6°). L'examen du dossier et l'appréciation de l'épreuve sont confiés à un jury qui, par décision motivée, présente, par vacance d'emploi, deux candidats en vue de leur admission au stage par le Gouvernement flamand.

En vue du classement des candidats, le jury doit non seulement prendre en compte les lauréats de l'épreuve visée à l'article 22, mais également les membres du personnel auxquels s'appliquent des dispositions transitoires en vertu de l'article 109.

Cette disposition énonce : «

Art. 109.Par dérogation au titre II, [chapitre II,] section 4, sous-section 2, le jury visé à l'article 28 doit tenir compte dans sa proposition des membres du personnel lauréats d'un examen d'aptitude à une fonction d'inspecteur, organisé en exécution de l'arrêté royal du 22 mars 1969 fixant le statut des membres du personnel directeur et enseignant, du personnel auxiliaire d'éducation, du personnel paramédical des établissements d'enseignement gardien, primaire, moyen, technique, artistique et normal de l'Etat, ainsi que des internats dépendant de ces établissements, et des membres du service d'inspection chargé de la surveillance de ces établissements, et des membres du personnel porteurs d'un brevet de promotion d'inspecteur délivré sur la base du même arrêté royal du 22 mars 1969 et de l'arrêté royal du 7 mars 1978 relatif à l'examen pour l'obtention du certificat d'aptitude à la fonction d'inspecteur cantonal de l'enseignement fondamental (régime néerlandais).

Le jury se basera sur les éléments de l'examen subi antérieurement et entendra les intéressés. » Par conséquent, le jury doit prendre en compte les anciens lauréats et évaluer à nouveau les éléments des examens antérieurs. A cet effet, il entend les intéressés : d'une part, les titulaires d'un brevet ne peuvent être soumis à un nouvel examen complémentaire ou à une épreuve complémentaire; d'autre part, les intéressés doivent entrer en contact de façon organisée avec le jury avant que celui-ci établisse le classement des candidats Doc., Conseil flamand, 1990-1991, n° 519/3 et n° 519/4). B.1.2. L'article 21, § 2, attaqué, du décret de la Communauté flamande du 8 juillet 1996 relatif à l'enseignement VII complète l'article 28 du décret du 17 juillet 1991 par les alinéas 3, 4 et 5. Cet article dispose actuellement : « L'appréciation de l'épreuve et du dossier visé aux articles 22, deuxième alinéa, 6°, et 23, deuxième alinéa, 5°, est confiée à un jury dont le Gouvernement flamand détermine la composition et le fonctionnement.

Le jury prend une décision collégiale et présente 2 candidats par vacance d'emploi dans un ordre de valeur motivé. A parité des voix, la voix du président est prépondérante.

Par dérogation à l'alinéa 2 du présent article, le jury peut présenter au Gouvernement flamand, pour la fonction d'inspecteur de l'enseignement fondamental, une liste de candidats qui arrivent en ordre utile afin d'être proposés, pendant une période de quatre ans à compter de la date de clôture des travaux du jury, pour l'admission au stage. Les candidats sont classés par le jury selon un ordre de valeur. Le jury prend une décision collégiale. En cas de parité des voix, la voix du président est prépondérante.

Par dérogation à l'alinéa 2 du présent article, l'inspecteur général de l'enseignement fondamental présente deux candidats par vacance d'emploi, classés dans l'ordre de la liste précitée et suivant la règle de la parité, pour les vacances ouvertes après la clôture des travaux du jury et avant la fin de la période déterminée par l'alinéa 3.

Le candidat qui est admis au stage par le Gouvernement flamand est rayé de la liste. Les candidats de la liste précédente qui ont conservé leurs droits, sont retenus par priorité pour être proposés lors de la présentation d'une nouvelle liste. » La nouvelle réglementation ne prévoit pas de mesures transitoires pour ceux qui avaient réussi l'épreuve visée à l'article 22 avant l'entrée en vigueur du décret du 8 juillet 1996.

B.1.3. Selon les travaux préparatoires, la disposition entreprise vise à constituer, par le biais de l'épreuve, une réserve de recrutement pour l'accès à la fonction d'inspecteur de l'enseignement fondamental, afin de limiter dans une large mesure l'organisation répétée d'épreuves. L'inspecteur général est habilité à présenter, en cas de vacances d'emploi après la clôture des travaux du jury, deux candidats par emploi vacant dans le respect de l'ordre établi par le jury, afin d'éviter que celui-ci ne doive se réunir pour chaque présentation. La disposition entreprise permet que les lauréats de l'épreuve organisée en vue d'une réserve de recrutement antérieure conservent durant quatre ans leur droit d'être présentés, même si une nouvelle réserve de recrutement était constituée dans l'intervalle Doc., Parlement flamand, 1995-1996, n° 310/1, p. 9).

Quant à l'intérêt de la partie requérante B.2.1. Le Gouvernement flamand conteste l'intérêt de la partie requérante du fait que son statut, sous le régime originaire du décret relatif à l'inspection, n'était pas celui de « lauréate », mais bien de « classée », ce qui veut dire « présentée » au sens de l'article 28, alinéa 2, du décret du 17 juillet 1991. La présentation de la personne que le ministre n'admet pas au stage n'est assortie d'aucun effet juridique.

Le Gouvernement flamand ajoute que la requérante ne saurait invoquer l'intérêt requis en droit, dès lors que, d'une part, elle n'a pas contesté devant le Conseil d'Etat l'arrêté de retrait concernant son admission au stage et que, d'autre part, elle ne fait état d'aucune distinction illicite par rapport aux candidats présentés sous l'empire du régime complété du décret relatif à l'inspection ou par rapport à ceux qui figurent sur la liste visée dans ce régime complété.

B.2.2. La disposition litigieuse détermine la manière dont est établie, par dérogation au système applicable jusqu'à son entrée en vigueur, la liste des candidats qui entrent en ligne de compte pour être présentés en vue de l'admission au stage en tant qu'inspecteur de l'enseignement fondamental. Il est en outre prévu un régime de réserve de recrutement basé sur le classement par ordre d'aptitude, établi par le jury compétent, classement qui est déterminé par l'épreuve organisée en application des articles 22 et 27 du décret du 17 juillet 1991.

La disposition entreprise a pour conséquence que la requérante, qui avait réussi au printemps de 1994 l'épreuve en question et qui avait été classée par le jury en vue de l'admission au stage, mais qui n'était pas encore admise au stage de façon définitive par arrêté ministériel avant l'entrée en vigueur de la disposition litigieuse, se voit contrainte de participer à nouveau à des épreuves identiques.

Il s'ensuit qu'elle est susceptible d'être directement et défavorablement affectée dans sa situation par la disposition entreprise.

B.2.3. L'exception d'irrecevabilité tirée du défaut d'intérêt est rejetée.

Quant au fond B.3. La partie requérante dénonce la violation des articles 10 et 11 de la Constitution par l'article 21, § 2, du décret du 8 juillet 1996 en ce que celui-ci ne prévoit aucune disposition transitoire pour les candidats ayant réussi l'examen sous l'empire du décret du 17 juillet 1991, alors que les candidats (lauréats et titulaires d'un brevet) qui avaient réussi l'examen avant l'entrée en vigueur de ce dernier décret bénéficiaient d'une disposition transitoire figurant à l'article 109 du décret du 17 juillet 1991.

B.4.1. Le Gouvernement flamand soutient que la situation juridique des candidats « présentés » sous l'empire du décret du 17 juillet 1991 n'est pas comparable au statut des lauréats de l'examen d'aptitude et des détenteurs d'un brevet de promotion d'inspecteur, visé à l'article 109 du décret précité, parce que le constat d'aptitude de l'époque était illimité dans le temps.

B.4.2. La Cour constate que le régime transitoire de l'article 109 du décret du 17 juillet 1991 prévoyait uniquement que « le jury visé à l'article 28 doit tenir compte dans sa proposition des membres du personnel » lauréats d'un examen d'aptitude ou qui étaient détenteurs du brevet de promotion d'inspecteur.

Formulée de la sorte, cette disposition transitoire n'accordait aux membres du personnel concernés qu'une dispense de l'épreuve visée à l'article 22 du décret, en sorte qu'il peut être admis que les lauréats de l'épreuve visée à l'article 22 et les membres du personnel dispensés par l'article 109 ont été considérés par le législateur décrétal de 1991 comme disposant d'une aptitude comparable pour être présentés en vue de l'admission au stage comme inspecteur de l'enseignement fondamental.

L'argument de non-comparabilité des catégories concernées de membres du personnel, soulevé par le Gouvernement flamand, ne peut être retenu.

B.5. Si le législateur décrétal estime qu'un changement de politique s'impose d'urgence, il peut décider de lui donner un effet immédiat et il n'est en principe pas obligé de prévoir un régime transitoire.

D'une manière générale, les pouvoirs publics doivent d'ailleurs pouvoir adapter leur politique aux circonstances changeantes de l'intérêt général. Tout changement de politique destiné à faire face à une nécessité urgente deviendrait impossible si l'on partait du principe que les articles 10 et 11 de la Constitution exigent que le régime antérieur soit maintenu pendant une période déterminée.

Lorsqu'à l'époque de l'adoption d'un décret, comme en l'espèce le décret du 17 juillet 1991, le législateur décrétal a prévu un régime transitoire, il ne peut toutefois, lorsqu'il estime devoir procéder à une modification décrétale, se prévaloir de sa liberté d'action précitée pour édicter, sur le plan des mesures transitoires, un régime qui ne résisterait pas à un contrôle au regard des articles 10 et 11 de la Constitution.

B.6.1. La Cour constate qu'en vertu des dispositions actuellement en vigueur du décret, il existe une différence de traitement entre, d'une part, les lauréats de l'examen d'aptitude et les titulaires du brevet d'inspecteur visés à l'article 109 du décret du 17 juillet 1991 et, d'autre part, les lauréats des épreuves visées aux articles 22 et 27 de ce décret.

B.6.2. Comme l'observe le Gouvernement flamand, il existe entre les deux catégories de personnes une distinction qui repose sur un critère objectif, étant donné que l'aptitude des bénéficiaires du régime transitoire prévu à l'article 109 était constatée indépendamment de toute procédure de sélection ou vacance d'emploi et que ce constat d'aptitude était illimité dans le temps.

B.6.3. Le législateur décrétal pouvait partir du principe que l'aptitude des bénéficiaires du régime transitoire visé à l'article 109 a été constatée d'une autre façon que l'aptitude constatée à la suite des épreuves visées aux articles 22 et 27.

La différence de traitement qui en découle, et qui avait pour effet que les lauréats des épreuves visées aux articles 22 et 27 ne disposaient que d'un certificat d'aptitude limité dans le temps et devaient par conséquent, à défaut d'une réserve de recrutement quelconque, à chaque fois se présenter à nouveau à ces épreuves, peut se justifier par le fait que le législateur décrétal a opté pour un nouveau mode de recrutement et que les bénéficiaires visés à l'article 109 pouvaient nourrir des attentes légitimes sur la base des droits acquis avant l'entrée en vigueur du décret du 17 juillet 1991.

B.7.1. La disposition entreprise a toutefois instauré un régime complémentaire qui vise désormais à prolonger la validité de la réussite aux épreuves visées aux articles 22 et 27, dès lors que le jury, par dérogation à l'alinéa 2 de l'article 28, peut, pour la fonction d'inspecteur de l'enseignement fondamental, présenter au Gouvernement flamand une liste de candidats qui, durant une période de quatre ans à compter de la date de clôture des travaux du jury, entreront en ligne de compte pour être présentés en vue de l'admission au stage.

Ainsi, les candidats ayant réussi l'épreuve visée aux articles 22 et 27 entrent en ligne de compte, pour une période d'au moins quatre ans, pour être présentés sur pied d'égalité avec les membres du personnel visés à l'article 109 en vue de l'admission au stage, alors que ce droit est refusé à ceux qui ont réussi des épreuves identiques avant l'entrée en vigueur de la disposition décrétale entreprise.

B.7.2. A la lumière des objectifs mentionnés en B.1.3 de la disposition décrétale entreprise, ce traitement distinct n'est pas susceptible de justification objective et raisonnable.

Le fait que de telles épreuves aient été organisées à l'époque à la suite de vacances d'emploi n'enlève rien à leur valeur intrinsèque pour déterminer l'aptitude des lauréats en tant que candidats inspecteurs de l'enseignement fondamental, si bien que les circonstances particulières, évoquées par le Gouvernement flamand, dans lesquelles ces épreuves ont été organisées ne sauraient constituer un critère pertinent susceptible de justifier la distinction établie.

En effet, comme le Gouvernement flamand le déclare lui-même, le système des épreuves visées aux articles 22 et 27 est simplement complété, mais pas modifié quant à son contenu, en sorte qu'il doit être admis que les membres du personnel qui ont réussi ces épreuves avant l'entrée en vigueur de la disposition entreprise remplissaient les mêmes conditions d'aptitude que ceux qui ont depuis lors réussi des épreuves identiques et qui aujourd'hui entrent en ligne de compte, de même que les membres du personnel visés à l'article 109, pour être présentés en vue de l'admission au stage.

B.7.3. En n'accordant pas aux membres du personnel ayant réussi les épreuves visées aux articles 22 et 27 avant l'entrée en vigueur de la disposition décrétale entreprise les mêmes droits que ceux dont bénéficient les membres du personnel ayant la qualité de lauréat depuis l'entrée en vigueur de l'article 21, § 2, du décret du 8 juillet 1996, le législateur décrétal a pris une mesure qui n'est pas compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution.

Le moyen est fondé.

Par ces motifs, la Cour annule l'article 21, § 2, du décret de la Communauté flamande du 8 juillet 1996 relatif à l'enseignement VII en ce qu'il n'accorde pas aux membres du personnel ayant réussi avant son entrée en vigueur les épreuves visées aux articles 22 et 27 les mêmes droits que ceux dont bénéficient les membres du personnel ayant la qualité de lauréat depuis cette entrée en vigueur.

Ainsi prononcé en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 10 mars 1998.

Le président, L. De Grève.

Le greffier, L. Potoms.

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