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Arrêt De La Cour Constitutionelle
publié le 17 septembre 1999

Arrêt n° 48/99 du 20 avril 1999 Numéro du rôle : 1620 En cause : la question préjudicielle relative aux articles 17, § 1 er , alinéas 2 et 4, et 18, antépénultième alinéa, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat, posée par le La Cour d'arbitrage, composée des présidents L. De Grève et M. Melchior, et des juges H. Boel, G(...)

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Arrêt n° 48/99 du 20 avril 1999 Numéro du rôle : 1620 En cause : la question préjudicielle relative aux articles 17, § 1er, alinéas 2 et 4, et 18, antépénultième alinéa, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat, posée par le Conseil d'Etat.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents L. De Grève et M. Melchior, et des juges H. Boel, G. De Baets, E. Cerexhe, A. Arts et R. Henneuse, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président L. De Grève, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle Par arrêt n° 78.468 du 1er février 1999 en cause de J. Vandenhende contre la commune de Zwevegem et la Région flamande, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 18 février 1999, le Conseil d'Etat a posé la question préjudicielle suivante : « Les articles 17, § 1er, alinéa 2, et/ou l'article 17, § 1er, alinéa 4, et/ou l'article 18, antépénultième alinéa, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat, lus en combinaison avec le principe général de droit conventionnel de l'impartialité du juge, inscrit entre autres à l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme et à l'article 14.1 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution dès lors qu'en ce qui concerne la garantie de l'impartialité du juge, ils font une distinction entre, premièrement, les autorités et les citoyens qui, pour faire trancher la question de la légalité d'un acte administratif les concernant, sont impliqués dans une procédure administrative précédée d'un référé administratif et les autorités et les citoyens qui, pour cette appréciation, sont impliqués dans une procédure judiciaire précédée d'un référé et, en second lieu, les autorités et les citoyens qui, pour faire trancher la question de la légalité d'un acte administratif les concernant, sont impliqués dans une procédure administrative devant le Conseil d'Etat sans suspension provisoire préalable et/ou sans mesures provisoires et les cas où une suspension et/ou des mesures de l'espèce furent prononcées ? » II. Les faits et la procédure antérieure Le 24 septembre 1997, le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Zwevegem avait délivré à P. Degroote un permis de bâtir pour la construction d'un poulailler destiné à accueillir des poulets de chair.

J. Vandenhende demanda au Conseil d'Etat de suspendre cette décision vu l'extrême urgence. Le 21 novembre 1997, le Conseil d'Etat ordonna, par son arrêt n° 69.772, la suspension par provision. L'arrêt fut rendu par le conseiller d'Etat J. Bovin, président faisant fonction de la dixième chambre.

Le 26 novembre 1997, le collège des bourgmestre et échevins rapporta le permis suspendu, réexamina le dossier et décida d'accorder le permis, estimant qu'il ne pouvait raisonnablement être affirmé que le chantier menaçait la beauté du paysage environnant.

J. Vandenhende attaque à nouveau cette décision devant le Conseil d'Etat par une demande de suspension pour cause d'extrême urgence. Le 10 décembre 1997, le Conseil d'Etat ordonna, par arrêt n° 70.184, la suspension par provision. L'arrêt fut rendu par le conseiller d'Etat J. Bovin, président faisant fonction de la dixième chambre.

L'examen au fond fut fixé au 21 octobre 1998, par ordonnance rendue le 21 septembre 1998 par le président de la dixième chambre du Conseil d'Etat.

Le 13 octobre 1998, le collège des bourgmestre et échevins transmit au greffe du Conseil d'Etat une requête en récusation du conseiller d'Etat J. Bovin.

Dans sa déclaration du 19 octobre 1998 concernant la demande de récusation, le conseiller d'Etat J. Bovin estime qu'il n'y a aucun motif de récusation. En effet, explique-t-il, non seulement la loi ne comporte aucune disposition interdisant à un conseiller d'Etat d'instruire le fond de l'affaire lorsqu'il a statué sur la demande de suspension mais elle lui impose au contraire de siéger également sur le fond. En l'espèce, il n'existe aucune règle de droit international qui permette de ne pas faire application des dispositions de la loi.

Par ordonnance du premier président du Conseil d'Etat du 21 octobre 1998, la demande de récusation a été renvoyée devant la neuvième chambre afin d'y être tranchée.

Par arrêt n° 78.468 du 1er février 1999, la neuvième chambre du Conseil d'Etat a rejeté la demande de récusation et a posé la question préjudicielle susmentionnée.

III. La procédure devant la Cour Par ordonnance du 18 février 1999, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.

Le 2 mars 1999, en application de l'article 72, alinéa 1er, de la loi spéciale précitée, les juges-rapporteurs H. Boel et E. Cerexhe ont fait rapport devant la Cour de ce qu'ils estimaient qu'il pourrait être mis fin à la procédure par un arrêt de réponse immédiate.

Les conclusions des juges-rapporteurs ont été notifiées aux parties dans l'instance principale conformément à l'article 72, alinéa 2, de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 5 mars 1999.

Le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Zwevegem, Otegemstraat 100, 8550 Zwevegem, a introduit un mémoire justificatif par lettre recommandée à la poste le 16 mars 1999.

La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.

IV. En droit - A - A.1. Dans leurs conclusions, les juges-rapporteurs ont estimé, au vu du dossier, qu'il pouvait être mis fin à l'examen de la question préjudicielle par un arrêt de réponse immédiate, conformément à l'article 72, in fine, de la loi spéciale du 6 janvier 1989. Ils estiment plus particulièrement qu'il convient de répondre également par la négative à la présente question préjudicielle, pour les motifs exposés dans l'arrêt n° 17/99.

A.2.1. Par lettre du 8 mars 1999, le conseil de J. Vandenhende a fait savoir que son client souhaitait expressément ne pas prendre position dans un débat de principe susceptible d'influencer la composition du siège qui examine son recours en annulation.

A.2.2. Dans son mémoire justificatif, la commune de Zwevegem souligne que le problème n'est pas le même que celui qui était abordé dans l'arrêt n° 17/99. Un élément neuf intervient dans la discussion, élément qui n'était pas pris en compte lors de l'examen de la première question préjudicielle. La commune de Zwevegem, première partie défenderesse dans l'instance principale, a en effet introduit une demande de récusation du conseiller d'Etat Bovin et a demandé subsidiairement que soit posée une question préjudicielle.

Il ressort de la décision de renvoi que le Conseil d'Etat estime que l'article 17 des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat prévoit un régime spécifique pour la composition des chambres. Aux termes de l'article 17, la suspension est ordonnée par la chambre qui est compétente pour statuer sur le fond. Cette disposition n'interdit pas que les conseillers d'Etat qui ont siégé en référé siègent également dans le litige au fond. Le président de la chambre ou le conseiller d'Etat par lui désigné qui a ordonné la suspension provisoire ne peut pas siéger dans la chambre qui statue sur le maintien de la suspension.

L'article 17 des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat ne prévoit en d'autres termes qu'un seul cas d'incompatibilité. Dans ce cas, le conseiller d'Etat concerné est d'emblée contraint de se retirer de l'affaire. Ce régime spécifique et l'article 29 des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat ne sont, à l'estime du Conseil d'Etat, pas cumulatifs.

La formulation concrète de la question préjudicielle prête apparemment à confusion quant à sa portée réelle et fait croire à tort qu'il s'agirait exactement de la même problématique que celle abordée dans l'arrêt n° 17/99. La question préjudicielle devrait donc être reformulée pour faire apparaître sa véritable portée. Il ressort de la reformulation proposée que la question préjudicielle est différente de celle qui a conduit à l'arrêt n° 17/99, qui ne concernait pas le problème de la récusation. La question préjudicielle n'est dès lors pas manifestement sans objet et il y a lieu de poursuivre l'examen selon la procédure ordinaire. - B - Quant à l'objet de la question préjudicielle B.1. La commune de Zwevegem propose dans son mémoire justificatif de reformuler la question préjudicielle.

Les parties ne pouvant pas, devant la Cour, modifier ou faire modifier le contenu d'une question préjudicielle, il n'y a pas lieu d'accéder à la demande de la commune de Zwevegem.

B.2. Les articles 17 et 18 des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat font partie du titre III de ces lois. Ce titre concerne la compétence de la section d'administration du Conseil d'Etat.

Les articles 17 et 18 concernent le référé administratif. Ces dispositions énoncent : «

Art. 17.§ 1er. Lorsqu'un acte ou un règlement d'une autorité administrative est susceptible d'être annulé en vertu de l'article 14, alinéa 1er, le Conseil d'Etat est seul compétent pour ordonner la suspension de son exécution.

Sans préjudice de l'article 90, §§ 2 et 3, la suspension est ordonnée, les parties entendues ou dûment appelées, par arrêt motivé du président de la chambre saisie ou du conseiller d'Etat qu'il désigne à cette fin.

Dans les cas d'extrême urgence, la suspension peut être ordonnée à titre provisoire sans que les parties ou certaines d'entre elles aient été entendues. Dans ce cas, l'arrêt qui ordonne la suspension provisoire convoque les parties dans les trois jours devant la chambre qui statue sur le confirmation de la suspension.

Le président de la chambre ou le conseiller d'Etat par lui désigné qui a ordonné la suspension provisoire ne peut siéger dans la chambre qui statuera sur la confirmation de la suspension. § 2. La suspension de l'exécution ne peut être ordonnée que si des moyens sérieux susceptibles de justifier l'annulation de l'acte ou du règlement attaqué sont invoqués et à condition que l'exécution immédiate de l'acte ou du règlement risque de causer un préjudice grave difficilement réparable.

Les arrêts prononcés en vertu des §§ 1er et 2 ne sont susceptibles ni d'opposition ni de tierce opposition.

Les arrêts par lesquels la suspension a été ordonnée sont susceptibles d'être rapportés ou modifiés à la demande des parties. § 3. La demande de suspension est introduite par un acte distinct de la requête en annulation et au plus tard avec celle-ci.

Elle contient un exposé des moyens et des faits qui, selon son auteur, justifient que la suspension ou, le cas échéant, des mesures provisoires soient ordonnées.

La suspension et les autres mesures provisoires qui auraient été ordonnées avant l'introduction de la requête en annulation de l'acte ou du règlement seront immédiatement levées par le président de la chambre ou par le conseiller d'Etat qu'il désigne qui les a prononcées s'il constate qu'aucune requête en annulation invoquant les moyens qui les avaient justifiées n'a été introduite dans le délai prévu par le règlement de procédure. § 4. Le président de la chambre ou le conseiller d'Etat qu'il désigne statue dans les quarante-cinq jours sur la demande de suspension. Si la suspension a été ordonnée, il est statué sur la requête en annulation dans les six mois du prononcé de l'arrêt. § 4bis. La section d'administration peut, suivant une procédure accélérée déterminée par le Roi, annuler l'acte ou le règlement dont la suspension est demandée si, dans les trente jours à compter de la notification de l'arrêt qui ordonne la suspension ou confirme la suspension provisoire, la partie adverse ou celui qui a intérêt à la solution de l'affaire n'a pas introduit une demande de poursuite de la procédure. § 4ter. Il existe dans le chef de la partie requérante une présomption de désistement d'instance lorsque, la demande de suspension d'un acte ou d'un règlement ayant été rejetée, la partie requérante n'introduit aucune demande de poursuite de la procédure dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt. § 5. L'arrêt qui ordonne la suspension ou la suspension provisoire de l'exécution d'un acte ou d'un règlement peut, à la demande de la partie requérante, imposer une astreinte à l'autorité concernée. Dans ce cas, l'article 36, §§ 2 à 4, est d'application.

Le Roi fixe, par arrêté délibéré en Conseil des Ministres, la procédure applicable à la fixation de l'astreinte. § 6. Le Roi fixe, par arrêté délibéré en Conseil des Ministres, la procédure relative aux demandes prévues par le présent article. Des règles spécifiques peuvent être fixées concernant l'examen des demandes de suspension de l'exécution qui sont manifestement irrecevables et non fondées. Une procédure spécifique pour l'examen au fond, dans le cas où la suspension de l'exécution est ordonnée, peut également être fixée.

Au cas où la suspension de l'exécution est ordonnée pour détournement de pouvoir, l'affaire est renvoyée à l'assemblée générale de la section d'administration. Elle l'est, à la demande du requérant, si la suspension est ordonnée pour violation des articles 10, 11 et 24 de la Constitution.

Si l'assemblée générale de la section d'administration n'annule pas l'acte ou le règlement attaqué, la suspension cesse immédiatement ses effets. Dans ce cas, l'affaire est renvoyée, pour examen d'autres moyens éventuels, à la chambre qui en était initialement saisie. § 7. Si la chambre compétente pour statuer au fond n'annule pas l'acte ou le règlement qui fait l'objet du recours, elle peut lever ou rapporter la suspension ordonnée.

Art. 18.Lorsque le Conseil d'Etat est saisi d'une demande de suspension d'un acte ou d'un règlement, conformément à l'article 17, il peut seul, au provisoire et dans les conditions prévues à l'article 17, § 2, alinéa 1er, ordonner toutes les mesures nécessaires afin de sauvegarder les intérêts des parties ou des personnes qui ont intérêt à la solution de l'affaire, à l'exclusion des mesures ayant pour objet des droits civils.

Ces mesures sont ordonnées, les parties entendues ou dûment appelées, par arrêt motivé du président de la Chambre compétente pour statuer au fond ou du conseiller d'Etat qu'il désigne à cette fin.

Dans les cas d'extrême urgence, des mesures provisoires peuvent être ordonnées sans que les parties ou certaines d'entre elles soient entendues. Dans ce cas, l'arrêt qui ordonne les mesures provisoires convoque les parties dans les trois jours devant la chambre qui statuera sur le maintien des mesures qui n'auraient pas été exécutées.

Le président de la chambre ou le conseiller d'Etat par lui désigné qui a ordonné les mesures ne peut siéger dans la chambre qui statuera sur le maintien desdites mesures.

L'article 17, § 2, alinéas 2 et 3, et § 5, est applicable aux arrêts prononcés en vertu du présent article.

Le Roi fixe, par arrêté délibéré en Conseil des ministres, la procédure relative aux mesures provisoires prévues par le présent article. » B.3. La question préjudicielle concerne le fait que les dispositions précitées n'empêchent pas qu'un conseiller d'Etat qui a ordonné la suspension provisoire par application de l'article 17, § 1er, alinéa 3, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat siège ensuite dans la chambre qui doit examiner le fond du litige.

Quant au fond B.4. Le référé administratif vise à renforcer la protection juridique offerte par le Conseil d'Etat et s'inscrit dans le cadre des principes formulés dans la recommandation n° R(89) 8 du 13 septembre 1989 du Comité des ministres du Conseil de l'Europe aux Etats membres relative à la protection juridictionnelle provisoire en matière administrative (Doc. parl., Sénat, 1990-1991, n° 1300/1, pp. 1, 7-8, 21 et 25).

Cette recommandation énonce notamment que, quand un acte administratif est contesté devant une autorité juridictionnelle et que celle-ci ne s'est pas encore prononcée, le requérant a la possibilité de demander à la même autorité juridictionnelle ou à une autre autorité juridictionnelle compétente, de décider des mesures de protection provisoire concernant l'acte administratif, que la procédure à suivre devant l'autorité juridictionnelle est une procédure rapide, que, sauf les cas d'urgence, la procédure est contradictoire et que les tiers intéressés peuvent y intervenir.

B.5.1. La procédure de suspension d'un acte administratif, réglée par l'article 17 précité des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat est un accessoire du recours en annulation de cet acte. Ainsi, la suspension d'un acte administratif ne peut être obtenue que si cet acte est susceptible d'être annulé par le Conseil d'Etat en vertu de l'article 14, alinéa 1er, des mêmes lois coordonnées. Par ailleurs, la suspension ne peut être ordonnée que si des moyens sérieux susceptibles de justifier l'annulation sont invoqués.

B.5.2. Comme le contentieux objectif d'annulation auquel elle est essentiellement liée, la procédure de suspension a pour seul objectif de permettre d'éviter qu'un acte administratif par hypothèse litigieux, puisqu'il fait ou fera l'objet d'un recours en annulation, ne produise des effets de droit aux conséquences irréversibles alors même que des moyens sérieux d'annulation sont, dès l'introduction de la demande de suspension, invoqués et établis.

B.5.3. La décision de suspension provisoire est la première phase d'une procédure unique dont il y a lieu d'assurer la continuité. Cette décision est cependant susceptible d'être remise en cause, en premier lieu par la chambre qui doit statuer sur sa confirmation dans le respect des garanties d'un débat contradictoire prescrit par l'article 17, § 1er, alinéa 3, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat, et ensuite par la décision définitive statuant sur le recours en annulation. Par conséquent, cette mesure ne préjuge pas de la décision au fond rendue par le Conseil d'Etat lorsqu'il juge définitivement de la légalité de l'acte administratif.

B.6. Lors de l'élaboration de la réglementation en cause, le législateur a ménagé un juste équilibre entre, d'une part, l'exigence d'une protection juridique effective, en vue d'aboutir à une décision rapide concernant une demande de suspension et, en cas de suspension, concernant le recours en annulation, sans toutefois perdre de vue les intérêts de la partie défenderesse et de la partie intervenante et, d'autre part, le bon fonctionnement de la section d'administration du Conseil d'Etat, aux fins d'éviter qu'au cours des phases respectives d'une même procédure, le dossier doive à chaque fois être examiné par d'autres conseillers d'Etat et d'autres auditeurs, sauf le cas particulier mentionné à l'article 17, § 1er, alinéa 4.

Par ailleurs, la réglementation est identique pour toutes les parties appelées à la cause. La réglementation instaurée par le législateur, qui n'exclut pas que le conseiller d'Etat qui a procédé à la suspension provisoire examine l'affaire au fond, n'est pas de nature à compromettre son impartialité objective. L'appréhension de la partie requérante ou de la partie intervenante au sujet de l'impartialité de la chambre est d'autant moins objectivement justifiée qu'en l'espèce, le Conseil d'Etat ne doit pas se prononcer sur le bien-fondé de droits subjectifs mais sur le bien-fondé d'allégations mettant en cause la légalité objective d'un acte administratif.

B.7. A supposer que l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme soit applicable au litige au fond, il ne saurait en résulter une appréciation différente, d'autant que la recommandation citée en B.4 n'exclut pas non plus que les mesures provisoires soient ordonnées par la même juridiction que celle qui statue sur le fond. La référence à l'article 14.1 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ne saurait pas davantage conduire à une conclusion différente.

B.8. La question préjudicielle appelle une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : Les articles 17, § 1er, alinéas 2 et 4, et 18, antépénultième alinéa, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution, ni lus isolément, ni combinés avec l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 14.1 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en tant que ces articles ne s'opposent pas à ce que le conseiller d'Etat qui a ordonné la suspension provisoire connaisse de l'affaire au fond.

Ainsi prononcé en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 20 avril 1999.

Le greffier, L. Potoms.

Le président, L. De Grève

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