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Arrêté Ministériel
publié le 22 mars 2021

Arrêté ministériel maintenant le classement de la ferme Saint-Laurent à Bassenge, classée par arrêté ministériel du 29 mai 1952

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service public de wallonie
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22/03/2021
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SERVICE PUBLIC DE WALLONIE


1er FEVRIER 2021. - Arrêté ministériel maintenant le classement de la ferme Saint-Laurent à Bassenge, classée par arrêté ministériel du 29 mai 1952


La Ministre du Patrimoine, Vu l'article 21 du décret du 26 avril 2018 relatif au Code wallon du Patrimoine réglant les dispositions transitoires ;

Vu l'article 205 du Code wallon du Patrimoine applicable aux procédures de classement en cours à la date d'entrée en vigueur du décret du 26 avril 2018 précité ;

Vu les articles 197 à 204 du Code wallon du Patrimoine précité ;

Vu l'arrêté du Gouvernement wallon du 13 septembre 2019 fixant la répartition des compétences entre les Ministres et réglant la signature des actes du Gouvernement ;

Vu l'arrêté du Gouvernement wallon du 26 septembre 2019 portant règlement du fonctionnement du Gouvernement wallon ;

Vu l'arrêté du 29 mai 1952 classant comme monument la ferme Saint-Laurent à Glons ;

Vu la demande de déclassement introduite par les consorts Cajot datée du 24 avril 2013 ;

Vu la décision ministérielle du 19 juin 2020 d'entamer la procédure d'enquête en vue du déclassement éventuel de la ferme Saint-Laurent à Glons, classée comme monument par arrêté du 29 mai 1952, notifiée le 26 juin 2020 ;

Vu l'enquête publique réalisée du 27 juillet au 31 août 2020, conformément aux dispositions de l'article 199 du Code wallon du Patrimoine précité ;

Vu la fiche patrimoniale établie par l'administration le 14 octobre 2014 et actualisée le 2 avril 2020 ;

Vu l'avis du Conseil communal de Bassenge émis en séance du 8 octobre 2020 ;

Vu l'avis d'initiative nuancé de la C.C.A.T.M émis en séance du 17 septembre 2020 ;

Vu l'absence d'avis du Collège provincial ;

Vu l'avis de la Commission royale des Monuments, Sites et Fouilles émis en séance du 11 août 2020 ;

Considérant le classement de la ferme Saint-Laurent, sise rue Saint-Laurent n° 74 à 4690 Glons, par l'arrêté du 29 mai 1952 ;

Considérant que la ferme Saint-Laurent a été acquise par M. Jean-Pol Cajot en 1955, en toute connaissance de cause quant au statut du bien ;

Considérant qu'à la suite du décès de M. Jean-Pol Cajot en 1995, Marc-Antoine Cajot et Michel Cajot sont devenus nu-propriétaires de la ferme Saint-Laurent, en toute connaissance de cause quant au statut du bien ;

Considérant la demande de déclassement du 24 avril 2013 et la décision ministérielle du 19 juin 2020 exposant les faits et rétroactes et décidant d'entamer la procédure de déclassement ;

Considérant que la décision ministérielle du 19 juin 2020 précitée a été notifiée conformément à l'article 198 du Code wallon du Patrimoine précité ;

Considérant qu'une enquête publique a été réalisée entre le 27 juillet 2020 et le 31 août 2020 ;

Considérant que l'enquête publique a donné lieu à deux courriers d'observations écrites ;

Considérant que le premier courrier daté du 24 août 2020, rédigé par M. Henri Solarz, contient des observations qui peuvent être résumées de la manière suivante : - la crainte que les vestiges du Moyen-Age soient démolis pour permettre la construction d'appartements qui viendraient dénaturer le bâti historique et la quiétude du village ; - le bâtiment est une ancienne ferme abbatiale, témoin d'une des 4 seigneuries de Glons, témoin majeur de l'histoire du village au même titre que la tour du vieux cimetière qui mérite d'être conservée et à laquelle les citoyens sont attachés ; - la construction de logements en lieu et place de la ferme Saint-Laurent nuirait à la tranquillité du voisinage ;

Considérant que le deuxième courrier daté du 25 août 2020, rédigé par maîtres Hostier et Secrétin pour le compte des consorts Cajot, contient des observations qui peuvent être résumées de la manière suivante : - le caractère incomplet et orienté des faits et rétroactes mentionnés dans la décision ministérielle du 19 juin 2020 précitée ; - la fiche d'évaluation telle que disponible sur le site internet renseigné dans le courrier de notification est incomplète, de sorte que l'enquête publique perd toute utilité ; - les faits et rétroactes du dossier démontrent que M. Jean-Pol Cajot a bien envisagé la possibilité de reconstruire le bien mais que, compte tenu du coût de la restauration et de la perte d'intérêt de la ferme quant à son exploitation au regard de l'évolution des techniques agricoles, seuls le déclassement et l'expropriation constituent une option envisageable ; - l'administration du patrimoine aurait reconnu que la reconstruction des parties sinistrées ne constituaient effectivement pas la meilleure option compte tenu de leur affectation et de la nécessité d'assurer la viabilité de l'exploitation de la ferme Saint-Laurent ; - la finalité d'une procédure de classement est la préservation du bien classé et la protection dudit bien classé incombe en premier lieu aux autorités publiques en vertu de diverses dispositions légales ; - en l'état actuel, la ferme Saint-Laurent constitue un danger compte tenu des chutes de tuiles ou de briques ; - l'absence dans la fiche d'évaluation d'une quelconque estimation du coût des travaux relatif à la protection de la ferme Saint-Laurent, ce qui est nécessaire pour que l'autorité administrative puisse apprécier correctement les enjeux de la procédure de déclassement. De manière générale, le coût des travaux que nécessitent la protection de la ferme Saint-Laurent est disproportionné par rapport à l'intérêt qu'elle représente actuellement sur le plan patrimonial, de sorte que la logique de classement à montré ses limites et que la seule solution est un déclassement total ou partiel ; - divers projets de réaffectation ont été envisagés depuis 1976 mais aucun n'a abouti par manque de moyens. Les consorts Cajot sont néanmoins prêts, moyennant un taux de subsides acceptable, à participer au financement de la restauration de la partie de la ferme Saint-Laurent qui peut encore être sauvée sans engager de frais colossaux ; - la requalification partielle ou totale de la ferme Saint-Laurent en tant que ruine est inadmissible ; - en l'absence de mesure adéquate de stockage par la commune, une reconstruction à l'identique du pignon sur rue démonté par la commune de Bassenge est devenue impossible ; - la seule possibilité de viabiliser certains éléments remarquables de la ferme Saint-Laurent sans engendrer de frais disproportionné est de procéder à un déclassement partiel ou total du bien ;

Considérant l'avis d'initiative nuancé de la C.C.A.T.M - reproduit partiellement ci-dessous - émis en séance du 17 septembre 2020, à savoir 4 votes favorables au maintien du classement, 2 votes favorables au déclassement partiel et 2 votes favorables au déclassement total ; « Au vu des documents consultés et des observations émises, la CCATm rend un avis d'initiative nuancé libellé comme suit : 4 votes en faveur du maintien du classement pour les motifs suivants : - Il faut préserver le patrimoine car c'est une source de fierté pour la Vallée d'avoir un bien classé. - La décision ne doit pas être prise en fonction des personnes ou de la conjoncture, on doit se positionner sur le patrimoine et non sur l'aspect financier. - Le bâtiment présente un caractère historique et s'intègre dans un cadre de vie qui appartient au villageois. - Le bâtiment a une valeur architecturale de par ses particularités et son histoire. - Il faut préserver le patrimoine même si la crainte d'un blocage administratif est présente car il est financièrement difficile de restaurer ce bien. Il faudrait pouvoir trouver un apport financier. 2 votes en faveur du déclassement partiel pour les motifs suivants : - Il faut trouver une solution pour garantir la sécurité tout en gardant une partie du patrimoine. - Le corps de logis devrait être préservé. Il y a lieu de se concentrer sur ce qu'il reste en bon état. La crainte est que ça reste en état et que rien ne change si on ne déclasse pas. 2 votes en faveur du déclassement pour les motifs suivants : - Sans une autre possibilité de développement, l'avenir de ce bâtiment restera incertain au vu des antécédents du dossier. - En état, le bien n'apporte rien de plus que des questions de sécurité. » ;

Considérant l'avis du Conseil communal de Bassenge émis en séance du 8 octobre 2020, défavorable à un déclassement total du bâtiment mais favorable à un déclassement partiel de la ferme Saint-Laurent à condition que des mesures urgentes soient prises par les propriétaires pour sécuriser les lieux et pour préserver la façade à rue ;

Considérant que le Collège provincial (anciennement députation permanente) de la Province de Liège n'a rendu aucun avis motivé et que, conformément à l'article 200 du Code wallon précité, la procédure a été poursuivie ;

Considérant l'avis défavorable au déclassement de la Commission royale des Monuments, Sites et Fouilles émis en séance du 11 août 2020 reproduit ci-dessous : « Nous avons l'honneur de vous faire savoir que la Commission royale, réunie en séance de la Section des Monuments du 11 août 2020, a examiné le dossier repris en objet.

Comme l'établit de manière détaillée et pertinente la fiche patrimoniale élaborée en 2014 et actualisée en avril dernier, ce bien témoigne toujours d'une représentativité architecturale rare, jalonnée d'éléments millésimés particulièrement intéressant pour retracer son évolution et lui comparer des biens similaires souvent moins bien documentés. Sur le plan architectural, les éléments qui ont justifié son classement sont toujours présents avec les composantes particulièrement remarquables que sont la vaste grange « en double large » et les tours qui la cantonnent, formant toujours un repère marquant dans le paysage.

Malgré les deux incendies de 1970 et 1976, l'état d'abandon de l'aile sud et l'état de ruine de l'aile orientale et de la grange nord, consécutif au différend qui oppose les propriétaires à l'autorité publique depuis cette époque, la restauration et la réaffectation du bien semblent toujours réalisables, comme en témoignent la fiche d'état sanitaire et le projet de restauration et de réaffectation en logement initié en 2009 et malheureusement abandonné en 2013.

L'Awap et la CRMSF accompagnent de très nombreux dossiers de réhabilitation de fermes d'intérêt patrimonial, illustrant par ces exemples aboutis que la préservation de ces biens et leur adaptation au mode de vie actuel représentent une plus-value inestimable pour leurs occupants mais aussi pour le maintien des qualités paysagés des quartiers donc elles constituent souvent le point focal.

Dans ce contexte et au vu des analyses des différentes options (déclassement total ou partiel, requalification de l'objet du classement pour reconnaître comme ruines les deux ailes incendiées ou maintien du classement), la Commission se rallie pleinement à l'analyse de l'Awap et émet dès lors un avis défavorable au déclassement de la ferme Saint-Laurent à Glons. » ;

Considérant que la décision ministérielle du 19 juin 2020 précitée contient un résumé des faits et rétroactes du dossier et que, dans le cadre de la présente décision, l'autorité administrative a pris en compte l'ensemble des faits et rétroactes du dossier, en ce compris les faits et éléments mentionnés dans les conclusions remises par les consorts Cajot dans le cadre de la procédure judicaire 2018/RG/1093 actuellement pendante devant la Cour d'appel de Liège et que, par conséquent, l'autorité administrative statue en toute connaissance de cause ; que cette procédure est mue entre les consorts Cajot, l'Etat belge, la Communauté française et la Région wallonne et tend notamment à voir condamner ces parties, sur la base de l'article 1382 du Code civil, à indemniser les consorts Calot pour la perte de valeur de la ferme dès lors qu'elles n'auraient pas pris de décision de déclassement, expropriation ou restauration à un moment (1976-1980-1989) où il n'était pas trop tard pour que la ferme se retrouve dans l'état qui est le sien ce jour ;

Considérant que pour des questions pratiques et de lisibilité, l'ensemble des rétroactes relatifs au dossier de la ferme Saint-Laurent, vieux de plus de 50 ans, n'ont pas été entièrement reproduits ni dans la décision ministérielle du 19 juin 2020 ni dans le présent arrêté mais que ces éléments sont bien connus de l'autorité administrative laquelle statue sur une demande de déclassement de 2013 et n'a pas à inférer dans la procédure judiciaire en cours ;

Considérant que les faits et rétroactes mentionnés dans la fiche d'évaluation sont fournis à titre d'information et n'influencent nullement l'analyse de l'intérêt patrimonial de la ferme Saint-Laurent ;

Considérant que les conseils des consorts Cajot affirment que la fiche d'évaluation mise à disposition via le site internet mentionné dans le courrier de notification est incomplète, en ce que les points 5.1.1., 5.1.2., 5.1.3., 7.2.2. et 7.2.3. sont partiellement ou totalement manquants ;

Considérant que l'ensemble des documents complets devant être publiés sur le site internet de la DGO4 ont été transmis au service compétent ne faisant pas partie de l'AWaP ;

Considérant que la publication de ces documents sur le site internet de la DGO4 nécessitait la réalisation d'une manipulation informatique consistant en l'assemblage de plusieurs fichiers PDF différents à l'aide d'un programme spécialisé ;

Considérant qu'au cours de ladite manipulation, certains points de la fiche d'évaluation ont manifestement disparu ;

Considérant que l'absence de certains points de la fiche d'évaluation est consécutive à un problème informatique ;

Considérant que l'AWaP n'a été contacté directement par aucun intervenant à la procédure de déclassement à propos de ce problème informatique ;

Considérant que l'AWaP a pris connaissance de ce problème informatique à lecture du courrier des consorts Cajot daté du 25 août 2020, rédigé par leurs conseils - maîtres Hostier et Secrétin - et adressé à la commune de Bassenge ;

Considérant que l'AWaP a entrepris spontanément et immédiatement toutes les démarches nécessaires afin de publier sur le site internet de la DGO4 la fiche d'évaluation dans son intégralité ;

Considérant que la fiche d'évaluation a été publiée dans son intégralité sur le site internet de la DGO4 le 30 octobre 2020 ;

Considérant qu'une version papier de la fiche d'évaluation était annexée aux courriers recommandés de notification adressés au collège du bourgmestre et des échevins et à la Commission royale des monuments, sites et fouilles ;

Considérant que les consorts Cajot et leurs conseils avaient connaissance depuis un certain temps du caractère incomplet de la fiche d'évaluation disponible sur le site internet de la DGO4, étant donné que ladite fiche a fait l'objet d'une analyse poussée et de la rédaction d'un courrier d'avocat de 25 pages ;

Considérant que ni les consorts Cajot ni leurs conseils n'ont averti directement l'AWaP ou l'autorité administrative du caractère incomplet de la fiche d'évaluation disponible sur le site internet de la DGO4 ;

Considérant que ni les consorts Cajot ni leurs conseils n'ont demandé en temps utile à l'administration communale, à l'AWaP ou à l'autorité administrative la transmission de la fiche d'évaluation complète endéans le délai de l'enquête publique ce qui, en l'espèce, était tout à fait matériellement possible ;

Considérant qu'il appert du courrier daté du 25 août 2020 que ni les consorts Cajot ni leurs conseils n'ont été consulter le dossier de la procédure disponible à la maison communale, alors que cette possibilité est inscrite à l'article 199, § 1er, alinéa 2, du Code wallon du Patrimoine précité et rappelée dans le courrier recommandé de notification adressé aux consorts Cajot ;

Considérant que le dossier de la procédure disponible et consultable à la maison communale contenait la fiche d'évaluation complète en version papier ;

Considérant que, nonobstant le problème informatique, les consorts Cajot et leurs conseils n'ont pas fait preuve de la diligence nécessaire et n'ont pas agi en personne prudente et diligente, en ce qu'ils n'ont pas effectué les démarches nécessaires afin de prendre connaissance en temps utile des passages manquant de la fiche d'évaluation disponible sur le site internet de la DGO4 ;

Considérant que face à cette situation, il existait pourtant des solutions simples leur permettant de prendre connaissance de la fiche d'évaluation dans son intégralité en temps utile, à savoir en adressant une demande expresse de transmission à l'administration communale ou régionale ou en consultant le dossier de la procédure disponible à la maison communale ;

Considérant que l'enquête publique a notamment pour finalité de porter des informations à la connaissance de l'autorité et de permettre aux participants de formuler leurs observations et réclamations en connaissance de cause sur le projet présenté et que, dès lors qu'il ressort des réclamations et des observations que toute personne a pu informer l'administration de son opposition à la hauteur du projet et que toute personne a pu exprimer ses craintes quant aux risques liés à celle-ci, l'enquête a rempli sa fonction ;

Considérant qu'en toute hypothèse, la fiche d'évaluation disponible sur le site internet de la DGO4 permettait effectivement aux consorts Cajot de prendre connaissance de la portée de la procédure de déclassement (à savoir un maintien du classement, un déclassement total, partiel ou une requalification du classement en « ruine ») et que les consorts Cajot ont pu faire valoir valablement leurs observations quant à la décision qu'il convenait d'adopter par rapport à ces diverses options ;

Considérant que le Conseil d'Etat estime de manière générale que les irrégularités commises lors de l'enquête publique ne peuvent entraîner l'annulation de l'autorisation consécutive que lorsqu'elles ont causé personnellement grief au requérant en l'empêchant de faire valoir ses observations en connaissance de cause ou en temps utile, ou lorsque celui-ci démontre que l'autorité n'a pu se prononcer en connaissance de cause du fait de ces irrégularités (voy. not. C.E., n° 236.650 du 1er décembre 2016) ;

Considérant qu'en l'espèce l'autorité administrative se prononce en toute connaissance de cause étant donné qu'elle dispose de la fiche d'évaluation dans son intégralité, ainsi que de l'ensemble des réclamations et observations formulées dans le cadre de l'enquête publique ;

Considérant que, compte tenu des circonstances du cas d'espèce, l'enquête publique réalisée entre le 27 juillet 2020 et le 31 août 2020 a eu effet utile en ce qu'elle permettait à toute personne intéressée de pouvoir présenter ses observations et réclamation en toute connaissance de cause ;

Considérant que l'élément sur lequel se fonde les consorts Cajot pour estimer que l'administration du patrimoine aurait reconnu que la reconstruction des parties sinistrées de la ferme Saint-Laurent ne constitue pas la meilleure option est un courrier daté du 28 décembre 1976 ;

Considérant que ledit courrier ne se prononce pas explicitement sur l'opportunité de procéder au déclassement de la ferme Saint-Laurent, qu'il ne mentionne aucune motivation, qu'il ne constitue pas une prise officielle de position de la part de l'administration du patrimoine et qu'il est daté de plus de quarante ans ;

Considérant que l'objet du présent arrêté se limite uniquement à la question du déclassement éventuel de la ferme Saint-Laurent et ne s'étend pas à la question de l'opportunité d'une éventuelle expropriation pour cause d'utilité publique ;

Considérant que le déclassement d'un bien se justifie en cas de disparition en tout ou en partie de l'intérêt qui avait justifié ce classement, lorsque le bien ne présente de ce fait plus un intérêt suffisant (C.E., n° 242.225 du 23 août 2018) ;

Considérant que la ferme a été classée comme monument en 1952 en raison de sa valeur historique et archéologique ;

Considérant que la fiche d'évaluation employant la nomenclature moderne fait référence aux intérêts historique, archéologique et architectural ;

Considérant cependant que les conditions du déclassement sont régies par le droit applicable au moment où l'autorité administrative se prononce sur le déclassement (C.E., n° 247.449 du 23 avril 2020) ;

Considérant que le Code wallon du Patrimoine (ci-après : « le CoPat ») est entré en vigueur le 1er juin 2019 ;

Considérant que l'article 23 du CoPat prévoit que le Gouvernement peut entamer la procédure de modification ou de radiation d'un arrêté de classement sur la base : - 1° de la fiche patrimoniale visée à l'article 3, 6°, a) et b) du CoPat ; - 2° de l'examen de l'adéquation de la mesure de protection adoptée par rapport aux intérêts et aux critères visés à l'article 1er du CoPat ou s'il est établi que des circonstances nouvelles intervenues depuis la date de l'arrêté de classement ont eu pour effet de diminuer l'intérêt du bien, au sens de l'article 1er, alinéa 1er, du CoPat ;

Considérant que les faits et rétroactes, notamment les deux incendies, n'ont pas diminué l'intérêt patrimonial du bien, comme en témoigne l'analyse des critères et intérêts visés à l'article D.1er du CoPat contenue dans la fiche d'évaluation ;

Considérant la représentativité typologique de la ferme Saint-Laurent, modèle authentique de la ferme abbatiale hesbignonne ;

Considérant que, quant à l'intérêt architectural, la ferme Saint-Laurent conserve parfaitement ses caractéristiques architecturales des XVIIe et XVIIIe siècles ;

Considérant que le logis, même privé de ses croisées de pierre, est un parfait exemple des particularismes de l'habitation rurale dans la Hesbaye liégeoise ;

Considérant que la grange, qui s'étend sur près de 540 m2, est l'une des plus grandes construites sur le modèle en « double large » en région wallonne ;

Considérant que le porche d'entrée en retrait, dépourvu d'étage, constitue une autre caractéristique de la cense en Hesbaye liégeoise ;

Considérant que le chartil à baies jumelées de l'aile, plutôt rare dans la région, renforce encore l'intérêt typologique ;

Considérant que les deux hautes tours flanquant la grange au nord signalent de manière exceptionnelle la dignité des propriétaires de ce type de bien et que ce dispositif, s'il n'est pas unique, reste exceptionnel en Hesbaye, en particulier dans sa partie liégeoise ;

Considérant que l'aile nord de la grange, malgré l'incendie de 1976, conserve une majesté qui n'est pas sans évoquer la magie romantique des ruines abbatiales de Villers-la-Ville ou d'Aulne ;

Considérant, quant à l'intérêt archéologique du bien, que celui-ci « sans ajoutes modernes », offre à l'étude des historiens et archéologues le produit matériel quasi intact d'un contexte historique donné ;

Considérant qu'outre la valeur archéologique intrinsèque au bâti, la commission royale des monuments et des sites signalait, dans son avis du 13 décembre 1949, l'existence probable d'une chapelle antérieure aux aménagements du XVIIIe siècle ;

Considérant la probable antiquité du site, plusieurs découvertes fortuites aux abords de la ferme ainsi que la proximité d'un tumulus nivelé, ce qui renforce l'intérêt archéologique du bien ;

Considérant, quant à l'intérêt historique du bien, que la ferme de Saint-Laurent est un témoin exemplaire du processus de construction de la société rurale médiévale et moderne ;

Considérant que les multiples pierres armoriées et millésimées qui ponctuent l'évolution du quadrilatère constituent de précieux indicateurs historiques ;

Considérant que le double incendie de 1970 et 1976 a altéré la perception de cet ensemble remarquable mais que les dommages ne sont pas irréversibles ;

Considérant que les dommages résultant du double incendie de 1970 et 1976 ne concernent que la couverture et la charpente de 2 ailes ;

Considérant que les maçonneries de l'aile à rue présentent un bon état général malgré une toiture vétuste ;

Considérant que le corps de logis présente un état général très bon à l'exception des deux dernières travées d'écuries jouxtant la grange où la couverture et la charpente doivent être restaurées ;

Considérant que la grande constituant l'aile nord est dépourvue de couverture, que les murs gouttereaux sont conservés pratiquement sur toute leur hauteur, y compris la frise de corniche, que le pignon ouest est partiellement conservé, que le pignon est est conservé jusqu'au niveau des corniches, que les maçonneries de la tourelle nord-ouest sont conservées jusqu'au niveau des corbeaux de sablière, partiellement en place, mais que la tour nord-est en revanche est éventrée sur tout son flanc nord ;

Considérant que les étables constituant l'aile est sont dépourvues de la quasi-totalité des planchers et des charpentes, que les murs gouttereaux sont conservés jusqu'au niveau de corniche, que la couverture a entièrement disparu et que le pignon sud a été démonté par la commune de Bassenge en 1996 ;

Considérant que les ailes sud et ouest sont dans un état satisfaisant ou bon contrairement aux ailes nord et est pour lesquelles le double incendie de 1970 et 1976 a entamé leur intégrité, en ce que les charpentes de des ailes nord et est doivent être considérées comme irréversiblement perdues ;

Considérant que, grâce au relevé de l'architecte Nicolas Leclerc, le profil et les matériaux de toitures sont bien documentés et peuvent être restitués sans recours à interprétation ;

Considérant que les maçonneries des ailes sinistrées sont quasi complètes - à l'exception du pignon est et de la tourelle nord-est - mais que leurs pendants à l'angle nord-ouest, relativement bien conservés, permettraient également une restitution sérieuse ;

Considérant que le double incendie de 1970 et 1976 qui a ravagé deux ailes de la ferme Saint-Laurent a entrainé une réduction notable de l'intégrité du bien, causant la perte irréversible de deux charpentes à peine documentées, mais qu'une restauration de ces deux ailes sinistrées est possible compte tenu de la conservation sur toute leur hauteur des murs gouttereaux, du pignon ouest et de la tour nord-ouest, de l'abondante documentation iconographique et du relevé réalisé par l'architecte Nicolas Leclerc peu après l'incendie de 1970 ;

Considérant que la procédure initiée à la suite de l'introduction d'une demande de certificat de patrimoine a démontré qu'une restauration acceptable est possible mais que, pour des raisons économiques et financières, la procédure n'a pas abouti et la restauration des deux ailes incendiées n'a pas été retenue par les propriétaires ;

Considérant que l'état actuel de la ferme Saint-Laurent ne fait pas obstacle à un projet de restauration et de réaffectation du bien qui reste réalisable comme en témoignent le projet de restauration et de réaffectation de la ferme Saint-Laurent en logements initié en 2009 et abandonné en 2013 ;

Considérant que, malgré le double incendie de 1970 et 1976, la ferme Saint-Laurent témoigne toujours d'une représentativité architecturale rare, jalonnée d'éléments millésimés particulièrement intéressant pour retracer son évolution, et que les éléments qui ont justifié son classement sont toujours présents ;

Considérant que le double incendie de 1970 et 1976 n'a pas eu pour conséquence de faire disparaitre en tout ou en partie l'intérêt qui avait justifié le classement de la ferme Saint-Laurent et que cette dernière présente toujours un intérêt suffisant sur le plan patrimonial pour justifier son classement ;

Considérant que d'aucuns affirment qu'un déclassement total ou partiel de la ferme Saint-Laurent permettrait d'empêcher son dépérissement et de clôturer définitivement toutes les discussions relatives à la restauration dudit bien à la suite du double incendie de 1970 et 1976 ;

Considérant qu'en cas de déclassement partiel ou total du bien, les rétroactes et les observations émises lors de l'enquête publique laissent à penser que la ferme Saint-Laurent serait démolie et/ou transformée en vue de la création de logements et d'appartements en lieu et place dudit bien ;

Considérant qu'un déclassement total ou partiel de la ferme Saint-Laurent, nonobstant l'état sanitaire d'une partie de la ferme à la suite des deux incendies, n'est pas opportun en ce que la ferme Saint-Laurent conserve à la fois les caractéristiques requises pour justifier d'un classement et un état matériel suffisant pour permettre sa restauration ;

Considérant qu'un déclassement partiel de la ferme Saint-Laurent impliquerait la démolition des ailes sinistrées de la ferme Saint-Laurent, laissant uniquement un moignon de ferme dépourvu de ce qui fonde son intérêt, à savoir sa grange, sa volumétrie symbolique et remarquable, ses tourelles d'angle, l'organisation défensive et rationnelle en quadrilatère, l'authenticité de l'ensemble du bien ;

Considérant qu'un déclassement partiel de la ferme Saint-Laurent entraînerait une perte totale d'intégrité et d'intérêt notamment historique et architectural du bien qui doit être envisagé dans son ensemble ;

Considérant que la possibilité de viabiliser certains éléments remarquables de la ferme Saint-Laurent sans engendrer de frais disproportionné ne réside pas uniquement dans le déclassement partiel ou total de la ferme Saint-Laurent ;

Considérant que l'Agence wallonne du Patrimoine dispose d'une expertise précieuse qui a déjà permis le sauvetage remarquable de biens classés en carence d'affectation, à l'instar du cas de la ferme Saint-Laurent à Anthisnes qui a été réaffectée en logements sociaux ;

Considérant que l'Agence wallonne du Patrimoine dispose de services spécialisés dans l'aide aux propriétaires de biens en difficulté, à savoir la Direction du Développement stratégique, et capable d'identifier au mieux toute réaffectation possible compatible avec la situation actuelle de la ferme Saint-Laurent ;

Considérant qu'un déclassement partiel ou total empêcherait l'Agence wallonne du Patrimoine de faire valoir l'expertise héritée de l'ex-institut du Patrimoine wallon (IPW) qui, à l'époque, n'avait pas pu intervenir en 2003 compte tenu de l'existence d'un contentieux judiciaire entre les propriétaires de la ferme Saint-Laurent et la Région wallonne ;

Considérant que le déclassement partiel ou total de la ferme Saint-Laurent ne doit pas être envisagé comme une manière de mettre fin à des litiges juridiques et financiers opposant les propriétaires de la ferme Saint-Laurent, la commune de Bassenge et la Région wallonne, au détriment de la défense du patrimoine wallon ;

Considérant que le classement de la ferme Saint-Laurent dans sa globalité est toujours justifié actuellement à suffisance par les intérêts et critères qui avaient commandé à l'époque son classement et que les dégradations subies à la suite du double incendie de 1970 et 1976 ne sont pas irréversibles ;

Considérant qu'une requalification de l'objet du classement permettrait de reconnaître la qualité de « ruines » aux deux ailes incendiées de la ferme Saint-Laurent qui, en l'état, conservent une puissance telle qu'elles perpétuent les valeurs patrimoniales décrites supra ;

Considérant que la mise en valeur de ruines historiques, même au coeur de villages bâtis, est commune en Europe mais que la grande majorité de ces sites sont destinés à l'agrément du public ou au tourisme et ne peuvent se concevoir sans une maîtrise d'ouvrage publique ;

Considérant l'opposition des propriétaires de la ferme Saint-Laurent à l'encontre d'une telle requalification des ailes sinistrées de ladite ferme et l'absence de projet de mise en valeur de ces ruines ;

Considérant qu'en l'espèce le maintien du classement actuel de la ferme Saint-Laurent reste l'option la plus opportune ; qu'en tout état de cause, l'état de la ferme dû à un manque d'entretien de la part des propriétaires ne peut pas être retenu à l'appui d'une demande de déclassement introduite par ceux-ci ;

Considérant qu'une décision administrative doit être adaptée à l'objectif qu'elle poursuit, en ce sens qu'il doit exister un rapport de proportionnalité entre, d'une part, la limitation apportée par la mesure administrative à l'exercice d'une liberté ou d'un droit et, d'autre part, en l'occurrence, les nécessités de la sauvegarde du patrimoine culturel ;

Considérant que la Cour européenne des droits de l'homme a reconnu à de multiples reprises que la protection du patrimoine culturel vise un but légitime permettant de limiter l'exercice d'une liberté ou d'un droit ;

Considérant que l'autorité administrative prend acte du fait que la possibilité de restaurer la ferme Saint-Laurent a été étudiée en son temps par M. Jean-Pol Cajot mais que cette possibilité n'a pas pu être retenue compte tenu de l'aspect financier de la restauration et de la perte d'intérêt de la ferme Saint-Laurent quant à son exploitation professionnelle au regard de l'évolution des techniques agricoles et que, par conséquent, seules le déclassement et l'expropriation constituaient à l'époque des options envisageables pour Jean-Pol Cajot ;

Considérant qu'il ressort de l'analyse des rétroactes du dossier que les propriétaires successifs de la ferme Saint-Laurent se sont toujours plaint du coût excessif de la restauration complète de la ferme Saint-Laurent à la suite du double incendie de 1970 et 1976 ;

Considérant que, compte tenu de l'état actuel de la ferme Saint-Laurent, une restauration de ladite ferme impliquerait des travaux importants ;

Considérant que l'autorité administrative se prononce en ayant à sa disposition une estimation des coûts de rénovation qui avait été réalisée dans le cadre du projet de réaffectation de la ferme Saint-Laurent en logements lors de l'introduction de la demande de certificat de patrimoine ;

Considérant que les propriétaires de la ferme Saint-Laurent tout comme l'autorité administrative ne sont pas sans ignorer le coût actuel de la rénovation de la ferme Saint-Laurent puisque c'est précisément l'importance de ce dernier qui a motivé la décision des propriétaires d'abandonner le projet de réaffectation de la ferme Saint-Laurent en logements en 2013 ;

Considérant qu'en vertu du principe de proportionnalité, l'appréciation de l'intérêt justifiant la protection d'un bien ne peut donc pas faire complètement abstraction du danger éventuel que présenterait le bien pour la sécurité publique ni de l'importance des mesures de sécurisation que la conservation dudit bien impliquerait, le cas échéant, pour son propriétaire ;

Considérant qu'en dehors du contrôle de la proportionnalité, le seul fait que la conservation d'un bien implique des conséquences financières négatives pour les propriétaires ne peut justifier le déclassement d'un bien ;

Considérant que le seul argument financier relatif au coût de la restauration de la ferme Saint-Laurent ne doit pas mettre en péril la défense du patrimoine wallon ;

Considérant que le coût lié à l'entretien d'un bien classé ne peut en aucun cas réduire la responsabilité du propriétaire quant à la préservation et la gestion de son bien en bon père de famille ;

Considérant qu'il pèse sur les propriétaires d'une bien classé l'obligation de maintenir et de protéger le bien classé en bon état ;

Considérant qu'en contrepartie de cette obligation pesant sur les propriétaires de bien classés, le législateur wallon a mis en place des mesures d'aides publiques directes et indirectes ;

Considérant que depuis le double incendie de 1970 et 1976, les propriétaires successifs de la ferme Saint-Laurent n'ont pris aucune mesure pour, d'une part, sécuriser les ailes sinistrées de la ferme Saint-Laurent et d'autre part, limiter le coût et l'importance des dommages subis et de la détérioration de la ferme Saint-Laurent ;

Considérant que le 26 août 1976, l'architecte G. Janssen estimait que le coût des travaux de restauration était à 14.651.807 BEF, soit 363.208,81 €, alors que la ferme Saint-Laurent était assurée contre l'incendie pour un montant total de 9.336.000 BEF, soit 231.433,39 € ;

Considérant que depuis le double incendie de 1970 et 1976, les propriétaires successifs de la ferme Saint-Laurent n'ont pris aucune mesure pour entretenir leur bien ;

Considérant que plus de 40 ans, les propriétaires de la ferme Saint-Laurent n'ont réalisé aucun travail de quelque nature que ce soit à la suite du double incendie dont a fait l'objet la ferme Saint-Laurent ;

Considérant qu'à plusieurs reprises, la commune de Bassenge a pris un arrêté ordonnant aux propriétaires de la ferme Saint-Laurent d'exécuter les travaux de sauvegarde mais que lesdits propriétaires n'ont réalisé aucuns des travaux demandés ;

Considérant qu'entre le jugement du Tribunal de 1ère instance de Liège daté du 25 juin 1981 et le jugement du Tribunal de 1ère instance de Liège daté du 23 octobre 2003, les propriétaires de la ferme Saint-Laurent ont considéré à tort qu'ils avaient été expropriés de leur bien et que, par conséquent, ils n'ont entrepris aucun travail d'entretien, de sécurisation ou de rénovation de la ferme Saint-Laurent ;

Considérant que l'inaction des propriétaires successifs de la ferme Saint-Laurent, à défaut de procéder aux travaux de sécurisation et de maintenance de la ferme Saint-Laurent, a entrainé le délabrement de l'ensemble de la ferme Saint-Laurent et a aggravé les coûts relatifs, d'une part, aux mesures de sécurisation permettant à la ferme Saint-Laurent de ne pas constituer un danger pour la sécurité publique et, d'autre part, aux mesures de restauration des éléments de la ferme Saint-Laurent sinistrés ;

Considérant que le délabrement de la ferme Saint-Laurent est dû à l'inaction des propriétaires du bien qui ont laissé leur bien à l'abandon ainsi qu'à diverses décisions qu'ils ont prises au cours de ces 50 dernières années ;

Considérant ainsi que M. Jean-Pol Cajot n'a pas souhaité mettre en oeuvre la proposition « hybride » de restauration proposée en 1976 par la Commission royale des monuments, sites et fouilles et s'est limité à exiger le déclassement ou l'expropriation pour cause d'utilité publique en excluant toute possibilité de restauration, comme le démontre le courrier émanant du conseil de M. Jean-Pol Cajot daté du 19 octobre 1976 ;

Considérant que les parties sinistrées de la ferme Saint-Laurent n'ont fait l'objet d'aucun travail de restauration à la suite du double incendie de 1970 et 1976 ;

Considérant que M. Jean-Pol Cajot et ses héritiers n'ont jamais apporté la preuve que le montant des primes d'assurances versées à la suite des deux sinistres a été réinvesti dans la restauration des éléments sinistrés de la ferme Saint-Laurent, malgré le jugement du Tribunal de 1ère instance de Liège daté du 23 octobre 2003 ;

Considérant que les primes versées par l'assurance ont, semble-t-il, a priori servi à financer la construction d'une nouvelle ferme au cours de l'année 1977, sise chemin de Paifve à Glons, comme en atteste un courrier de Gh. De Bièvre dans le courant de l'année 1979 et un courrier de M. J. Reybroek daté du 13 mai 1991 ;

Considérant que plusieurs injonctions maïorales à l'encontre des propriétaires de la ferme Saint-Laurent - émises notamment en 1981, 1986 et 1990 - et relatives à l'entretien et la stabilisation de la ferme Saint-Laurent n'ont pas été exécutées par lesdits propriétaires ;

Considérant qu'il ressort de l'analyse des rétroactes que les propriétaires successifs de la ferme Saint-Laurent n'ont entrepris pendant plus de 40 ans que des démarches pour tenter de vendre leur bien, d'en obtenir le déclassement ou d'obtenir l'expropriation pour cause d'utilité publique, à l'exception du projet de réaffectation de la ferme Saint-Laurent en logements engagé dans le cadre de la demande de certificat de patrimoine ;

Considérant que le projet de réaffectation de la ferme Saint-Laurent en logements en conformité avec le classement dudit bien a été abandonné pour des raisons économiques et financières ;

Considérant que la prise de mesures adéquates par le propriétaire de la ferme Saint-Laurent au lendemain des sinistres aurait permis d'éviter l'aggravation des dommages causés à la ferme Saint-Laurent à la suite du double incendie de 1970 et 1976 ;

Considérant que l'inaction et les décisions des propriétaire successifs ont participé activement au délabrement de la ferme Saint-Laurent ;

Considérant que les propriétaires successifs de la ferme Saint-Laurent n'ont pas satisfait à leur obligation de maintien et de conservation en bon état de la ferme Saint-Laurent et n'ont pas agit en bon père de famille dans le cadre de la conservation et de l'entretien de la ferme Saint-Laurent ;

Considérant que le coût particulièrement important des mesures de sécurisation et de restauration allégué par les propriétaires de la ferme Saint-Laurent est principalement dû à l'inaction desdits propriétaires, à leurs décisions et à leur volonté de procéder au déclassement ou à l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Considérant que le prétendu caractère disproportionné entre l'intérêt patrimonial que présente la ferme Saint-Laurent et le coût éventuellement exagéré des travaux que nécessite sa sauvegarde est imputable aux choix et comportement des propriétaires de la ferme Saint-Laurent qui ont laissé ladite ferme à l'abandon sans réaliser de travaux nécessaires à sa sécurisation et sa préservation depuis maintenant 50 ans ;

Considérant que les coûts des travaux nécessaires à la maintenance et à la rénovation de la ferme Saint-Laurent peuvent être réduits par plusieurs modalités de soutien mises en place par la Région wallonne ;

Considérant que la Région wallonne prévoit la possibilité d'octroyer une subvention pour les travaux d'entretien, de maintenance ou de restauration sur un bien classé à hauteur de maximum 50 ou 60% du montant (cf. article 43 du CoPat) ;

Considérant que la Région wallonne prévoit la possibilité pour les propriétaires de bien classés de se faire assister par l'AWaP dans toute une série de démarches (cf. article 46 du CoPat) ;

Considérant qu'une autorité administrative peut refuser de déclasser un bien sans violer le principe de proportionnalité lorsqu'il n'est pas établi que, depuis le classement d'un bien, acte individuel devenu définitif, de nouvelles circonstances seraient apparues ou auraient été découvertes de nature à diminuer l'intérêt que présente le bien ou à accroître la charge que sa sauvegarde implique pour ses propriétaires rendant celle-ci démesurée par rapport à son intérêt, hors les frais résultant du manque d'entretien ponctuel du bien, réparations et sécurisations normales incluses, qu'il en va d'autant plus ainsi lorsque le risque était prévisible dans la mesure où les propriétaires ont acquis la propriété du bien en ayant connaissance de son classement, avec les contraintes qui s'y attachent (C.E., n° 242.225 du 23 août 2018) ;

Considérant le montant initial des travaux de maintenance et de restauration de la ferme Saint-Laurent mentionné supra ;

Considérant que M. Jean-Pol Cajot a acquis la ferme Saint-Laurent en 1955 et que M. Jean-Pol Cajot avait connaissance du classement du bien lors de son acquisition ;

Considérant l'inaction et les décisions des propriétaires successifs de la ferme Saint-Laurent ;

Considérant en l'espèce que les coûts des travaux nécessaires à la maintenance et à la rénovation de la ferme Saint-Laurent (hors frais résultant d'un manque d'entretien ponctuel, réparation et sécurisation normale incluse) ne sont pas disproportionnés par rapport à l'intérêt patrimonial que représente la ferme Saint-Laurent ;

Considérant qu'en tout état de cause, nonobstant le classement de la ferme Saint-Laurent, la restauration de ladite ferme et sa réaffectation nécessitent un investissement important et que le classement de ladite ferme n'est pas à l'origine du caractère important de l'investissement nécessaire ;

Considérant, qu'en l'espèce, le maintien du classement de la ferme Saint-Laurent ne viole pas le principe de proportionnalité ;

Considérant que les propriétaires d'un bien classé ne sont pas en droit d'en exiger le déclassement pour la seule raison que celui-ci serait une source, selon eux, d'un risque compromettant la sécurité de tiers, à moins qu'il apparaisse que le classement fait obstacle à la prise des mesures indispensables pour éviter des dangers réels menaçant la sécurité publique (C.E., n° 242.225 du 23 août 2018) ;

Considérant que seule l'aile à rue et l'angle sud-est de la ferme Saint-Laurent peuvent éventuellement constituer un risque pour la sécurité publique, en ce que les autres ailes sont entièrement situées dans le domaine privé où ne présentent pas de risque pour la sécurité publique compte tenu de leur situation ;

Considérant qu'il ressort d'un rapport daté du 9 octobre 2015 que la maçonnerie de l'aile à rue est saine et que sa stabilité n'est pas directement menacée par le mur pignon, en ce que ce dernier ne semble pas liaisonné au mur de façade ;

Considérant que le mur « pignon » situé à l'angle sud-est de la ferme Saint-Laurent constitue le point le point le plus sensible de l'édifice ;

Considérant que le mur « pignon » situé à l'angle sud-est de la ferme Saint-Laurent n'est pas liaisonné avec le gros oeuvre-extérieur ;

Considérant qu'un simple étançonnement provisoire dudit mur « pignon » permettrait de prévenir toute menace à l'encontre de la sécurité publique ;

Considérant que les atteintes à la sécurité publique évoquées par les propriétaires de la ferme Saint-Laurent, à savoir la chute de tuiles et de briques, sont entièrement dues à un défaut d'entretien en bon père de famille de l'aile à rue (pourtant non incendiée) de la ferme Saint-Laurent par ses propriétaires ;

Considérant que la chute de tuile est due à l'usure de la couverture ;

Considérant que la chute de brique est due à un manque d'entretien des corniches qui a pour conséquence le déjointement des têtes de mur ;

Considérant que ces travaux relèvent de la maintenance, que les propriétaires d'un bien classé doivent le maintenir en bon état et que des subventions spécifiques existent pour les y aider ;

Considérant que les propriétaires de la ferme Saint-Laurent ont refusé à plusieurs reprises, notamment en 1981, 1986 et 1990, d'exécuter des injonctions maïorales relative à l'entretien et la stabilisation de l'aile à rue de la ferme Saint-Laurent ;

Considérant qu'en 1996, à défaut d'intervention de la part des propriétaires de la ferme Saint-Laurent, la commune de Bassenge a procédé à ses frais au démontage du pignon à rue de la grange incendiée en ayant obtenu un subside d'un montant de 850.928 BEF ;

Considérant que le 23 novembre 2018 lors de la réunion de synthèse du Comité d'accompagnement relatif à la délivrance d'un certificat de patrimoine portant sur la démolition d'une partie de la ferme Saint-Laurent, l'Agence wallonne du Patrimoine avait rappelé aux propriétaires de la ferme Saint-Laurent leur obligation légale de maintenir le bien classé en bon état en recommandant aux propriétaires de l'entretenir en bon père de famille, ce qui inclut un entretien annuel des toitures, des gouttières et leur évacuation par un couvreur ;

Considérant que l'éventuel caractère dangereux de l'aile à rue de la ferme Saint-Laurent pour la sécurité publique n'est pas dû à un problème structurel mais bien à un défaut d'entretien et de maintenance de la part des propriétaires de la ferme Saint-Laurent ; qu'il ne peut justifier le déclassement d'un bien qui présente toujours un intérêt ;

Considérant que la police administrative générale de la sécurité publique relève des attributions du bourgmestre ;

Considérant que la coordination des interventions relevant de ces deux polices distinctes est assurée par l'article 26 du CoPat soumettant à une tutelle spéciale la décision du bourgmestre qui, en application des articles 133 et 135, § 2, alinéa 2, 1°, de la nouvelle loi communale, ordonne la démolition d'un monument classé menaçant ruine ;

Considérant que le déclassement de la ferme Saint-Laurent ne constitue pas un préalable à la réalisation des travaux de stabilisation, d'entretien et de sécurisation de cette dernière ;

Considérant que la démolition d'une partie de la ferme Saint-Laurent ne constitue pas l'unique moyen de préserver la sécurité publique ;

Considérant que la réalisation de travaux de stabilisation, d'entretien et de sécurisation adéquats permettraient de prévenir toute menace pour la sécurité publique ;

Considérant que le classement de la ferme Saint-Laurent ne fait pas obstacle à la prise de mesure ou à l'exécution de travaux de maintenance permettant de prévenir, le cas échéant, toute menace à l'encontre à la sécurité publique conformément aux articles 22, 25 et 26 du CoPat ;

Considérant que, concernant les travaux de maintenance, le Code wallon du Patrimoine prévoit une procédure allégée sous forme de déclaration (cf. article 25, alinéa 1er, 1°, du CoPat) et offre la possibilité de percevoir des subventions (cf. article 43, alinéa 1er, 1°, du CoPat) ;

Considérant que, concernant les travaux de restauration qui ne relèvent pas de la maintenance, le Code wallon du Patrimoine prévoit la possibilité d'effectuer de tels travaux sous réserve de l'obtention d'un permis d'urbanisme (cfr. article 25, alinéa 1er, 2°, du CoPat) ;

Considérant qu'en l'espèce, la situation actuelle ne justifie pas le déclassement total ou partiel de la ferme Saint-Laurent au motif de la menace que représenterait ladite ferme à l'encontre de la sécurité publique ;

Considérant, quant aux mesures de prévention et d'entretien à adopter par les propriétaires de la ferme Saint-Laurent afin de prévenir toute menace à l'encontre de à la sécurité publique, que lesdits propriétaires doivent réaliser : - l'étançonnement provisoire du mur « pignon » à l'angle sud-est ; - la restauration de la toiture de l'aile à rue ; - la restauration des deux murs coupe-feu du porche d'entrée de l'aile à rue ; - l'entretien annuel de la toiture de l'aile à rue ; - l'entretien annuel des gouttières de l'aile à rue ; - la surveillance régulière de l'évolution de l'état de l'aile à rue ;

Considérant que le fait que la commune de Bassenge n'ait pris aucune précaution particulière en 1996 pour le stockage des briques issues du démontage du pignon à rue de la grange incendiée n'est pas pertinent dans le cadre du présent arrêté ;

Considérant que les propriétaires de la ferme Saint-Laurent reprochent à la commune de Bassenge la réalisation de travaux de sécurisation qui incombent pourtant aux propriétaires du bien ;

Considérant que la question de l'opportunité d'un point de vue patrimonial d'accepter ou de refuser le remontage à l'identique d'un mur relevant d'un bien classé appartient à l'Agence wallonne du Patrimoine seule ;

Considérant que parmi les quelques 250 fermes classées en Région wallonne, quelques-unes seulement sont similaires à la ferme Saint-Laurent, abstraction faite de ses particularités typologiques ;

Considérant que l'intérêt patrimonial de la ferme Saint-Laurent n'a pas diminué depuis son classement et que les éléments qui ont justifié son classement sont toujours présents ;

Considérant que le classement de la ferme Saint-Laurent n'induit aucune disproportion entre l'intérêt que représente ladite ferme sur le plan patrimonial et le coût éventuellement exagéré des travaux que nécessite sa sauvegarde ou sa dangerosité (hors frais résultant d'un manque d'entretien ponctuel, réparation et sécurisation normale incluse) ; que ce n'est en effet pas le refus de déclasser qui est à l'origine de ces coûts et de ces mesures mais bien le défaut d'entretien des propriétaires, Arrête : Article unique. Le classement de la ferme Saint-Laurent, sise rue Saint-Laurent n° 74 à 4690 Glons - parcelle cadastrée Bassenge, 4ème division, section C, n° 143 -, tel que défini par l'arrêté du 29 mai 1952 est maintenu.

La demande de déclassement datée du 24 avril 2013 est refusée.

Fait à Namur, le 1er février 2021.

V. DE BUE

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