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Circulaire du 08 mai 2003
publié le 16 mai 2003

Circulaire relative à la loi du 13 février 2003 ouvrant le mariage à des personnes de même sexe et modifiant certaines dispositions du Code civil

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service public federal justice
numac
2003009440
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16/05/2003
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08/05/2003
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SERVICE PUBLIC FEDERAL JUSTICE


8 MAI 2003. - Circulaire relative à la loi du 13 février 2003Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/02/2003 pub. 28/02/2003 numac 2003009163 source service public federal justice Loi ouvrant le mariage à des personnes de même sexe et modifiant certaines dispositions du Code civil fermer ouvrant le mariage à des personnes de même sexe et modifiant certaines dispositions du Code civil


A Mesdames et Messieurs les Procureurs généraux près les Cours d'appel;

A Mesdames et Messieurs les Officiers de l'état civil du Royaume;

J'attire votre attention sur les dispositions de la loi du 13 février 2003Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/02/2003 pub. 28/02/2003 numac 2003009163 source service public federal justice Loi ouvrant le mariage à des personnes de même sexe et modifiant certaines dispositions du Code civil fermer ouvrant le mariage à des personnes de même sexe et modifiant certaines dispositions du Code civil. Cette loi vise à assurer l'égalité de traitement, sur le plan du mariage, des couples homosexuels et hétérosexuels.

Les règles relatives à la conclusion, à la dissolution et aux effets du mariage sont applicables à un mariage entre personnes de même sexe.

Cependant, ce mariage n'a aucun effet en matière de filiation.

La ligne de conduite consistant à ne pas lier d'effets en matière de filiation à un mariage de deux personnes de même sexe se prolonge en matière d'adoption.

L'« ouverture du mariage » n'entraîne pas la possibilité pour deux époux de même sexe d'adopter.

La loi publiée au Moniteur belge du 28 février 2003 entre en vigueur le 1er juin 2003.

J'ai estimé opportun de vous apporter par circulaire les précisions utiles à propos des nouvelles dispositions qui seront applicables dès cette date.

A. Formalités relatives à la célébration du mariage et conditions requises pour pouvoir contracter mariage 1. Ouverture du mariage aux personnes de même sexe Les nouvelles dispositions de la loi s'inscrivent dans les dispositions actuelles du Code civil.1. L'article 2 de la loi remplace dans le texte français de l'article 75 du Code civil les mots « pour mari et femme » par les mots « pour époux ». Cette modification de la loi a été dictée par le souci de rendre cet article neutre du point de vue du sexe.

Cela n'a pas été utile dans le texte néerlandais car celui-ci utilisait déjà le terme « tot echtgenoten ». 2.1. L'article 3 de la loi introduit un nouvel article 143 dans le Code civil : « Article 143, alinéa 1er - Deux personnes de sexe différent ou de même sexe peuvent contracter mariage. » Bien que le Code civil n'ait nulle part stipulé que seules les personnes de sexe différent pouvaient contracter mariage, doctrine et jurisprudence ont toujours considéré que la différence de sexe était une condition positive de la conclusion du mariage. Elles ont trouvé appui dans les articles 162 et 163 du Code civil, qui contiennent les empêchements à mariage entre frère et soeur, oncle et nièce, et tante et neveu.

Néanmoins, le législateur a jugé utile de prévoir explicitement la possibilité pour des personnes de même sexe de se marier civilement.

L'idée de départ, qui est la neutralité du mariage du point de vue du sexe, est de la sorte exprimée.

Cela a pour conséquence que, lorsque deux personnes de même sexe contractent mariage ensemble, leur union est mise sur un total pied d'égalité avec celle qui lie deux personnes de sexe différent, à l'exception des effets du mariage en matière de filiation. 2.2. De la filiation L'article 3 de la loi ajoute un second paragraphe à l'article 143 du Code civil : « Si le mariage a été contracté entre des personnes de même sexe, l'article 315 n'est pas applicable. » Les enfants qui, actuellement, naissent pendant le mariage voient s'établir, par le seul fait de la naissance dans le mariage, un lien de filiation non seulement entre eux et la mère (article 312 du Code civil), mais aussi entre eux et le père (article 315 du Code civil).

Si l'article 143 du Code civil exclut l'application de l'article 315 du même Code, il va de soi que les articles 316, 317 et 318 ne peuvent pas non plus trouver application (voir Sénat, rapport, doc. n°1173/3, p. 78). Les articles 315 à 318 du Code civil, qui traitent de la présomption de paternité, sont exclusivement basés sur des situations biologiquement possibles. Ces articles n'utilisent en effet que les termes « paternité » et « père ». Le législateur a estimé que lier de plein droit des effets en matière de filiation à un mariage entre deux personnes du même sexe reviendrait à faire une trop grande abstraction de la réalité. 2. Déclaration de mariage En vertu de l'article 63 du Code civil, tout mariage doit être précédé d'une déclaration de mariage. Le mariage ne peut être célébré avant le 14e jour qui suit la date de l'établissement de l'acte de cette déclaration (article 165, § 1er, du même Code).

C'est au moment de cette déclaration de mariage que les futurs époux doivent remplir les conditions requises pour pouvoir contracter mariage. Il est dès lors évident que les déclarations de mariage ne peuvent être reçues par l'officier de l'état civil qu'à partir de l'entrée en vigueur de la loi. Cela correspond d'ailleurs à un principe général de droit : une loi ne peut être invoquée avant son entrée en vigueur.

Néanmoins, avant l'entrée en vigueur de la loi, les officiers de l'état civil peuvent donner des informations sur ce mariage et aider les futurs époux à constituer leur dossier, sans toutefois pouvoir recevoir la déclaration de mariage. 2.1. Nationalité des futurs époux de même sexe La présente loi ne porte pas atteinte aux principes de droit international privé applicables au mariage. Ainsi, le fait que deux personnes de même sexe puissent se marier ou non relève des conditions de fond du mariage. En droit international privé, celles-ci sont soumises au statut personnel des époux (article 3 du Code civil).

En présence de deux futurs époux possédant la même nationalité, la loi applicable pour déterminer les conditions de fond du mariage est leur loi nationale commune. Si les futurs époux sont de nationalité différente, chacun d'eux devra répondre aux conditions imposées par sa propre loi nationale (application distributive - pour les mariages célébrés à l'étranger, voir l'article 170ter du Code civil).

L'ouverture du mariage aux personnes du même sexe implique que la Belgique instaure une institution juridique qui n'existe pas encore comme telle dans les autres pays, à l'exception toutefois des Pays-Bas qui, selon les informations du Département, sont les seuls à connaître la même institution.

Dès lors, dans l'immédiat, seuls des ressortissants des Pays-Bas et des citoyens belges pourront, en principe, contracter un tel mariage (voir Sénat, doc. parl., 2-1173/1, p. 4.). 2.2. Documents requis pour la déclaration de mariage L'article 64, § 1er, du Code civil énonce les documents qui doivent être remis à l'officier de l'état civil lors de la déclaration de mariage.

Ce sont, pour rappel : 1° une copie conforme de l'acte de naissance;2° une preuve d'identité;3° une preuve de nationalité;4° une preuve de célibat et, le cas échéant, de la dissolution ou de l'annulation des précédents mariages;5° une preuve de l'inscription dans les registres de la population, le registre des étrangers ou le registre d'attente et/ou une preuve de la résidence actuelle;6° le cas échéant, une preuve écrite légalisée, émanant du futur époux absent lors de la déclaration du mariage, dont il ressort que celui-ci consent à la déclaration;7° toute autre pièce authentique dont il ressort que l'intéressé remplit les conditions requises pour pouvoir contracter mariage. Conformément au 7° de cette disposition, les personnes qui n'ont pas la nationalité belge et qui invoquent l'existence du mariage des personnes de même sexe selon la législation de l'Etat dont ils sont ressortissants, devront en apporter la preuve formelle, dans un document officiel émanant des autorités de leur Etat d'origine, établissant que le mariage entre personnes de même sexe est possible selon les règles en vigueur dans le pays. J'attire l'attention sur le fait que le certificat de coutume qui normalement est exigé ne suffira pas toujours à cet égard. En effet, les textes législatifs laissent rarement apparaître que le mariage n'est prévu que pour des personnes de sexe différent. 3. Empêchements à mariage 1.L'article 162 du Code civil prohibe le mariage entre frère et soeur. L'empêchement à mariage est étendu : deux frères ou deux soeurs ne peuvent pas non plus se marier ensemble. 2. L'article 163 du Code civil prohibe le mariage entre oncle et nièce, et entre tante et neveu.L'empêchement à mariage est étendu : le mariage est également prohibé entre oncle et neveu, et entre tante et nièce. 3. J'attire votre attention sur le fait que l'empêchement à mariage entre beaux-frères et belles-soeurs a été supprimé par la loi du 27 mars 2001Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/03/2001 pub. 11/05/2001 numac 2001009358 source ministere de la justice Loi modifiant les articles 162 et 164 du Code civil fermer modifiant les articles 162 et 164 du Code civil (M.B., 11/05/2001), entrée en vigueur le 21 mai 2001, et n'a pas été réintroduit par la nouvelle loi. Il n'a donc pas pu être étendu aux mariages entre beaux-frères, ni entre belles-soeurs Par conséquent, la possibilité offerte au Roi, par le nouvel article 164, de lever pour des causes graves l'empêchement à mariage entre ces personnes, est sans objet.

B. Reconnaissance à l'étranger du mariage de personnes de même sexe La Belgique, comme cela a déjà été mentionné plus haut, en ouvrant le mariage aux personnes de même sexe, instaure une institution juridique encore inconnue comme telle dans d'autres pays.

Il n'est donc pas exclu que de tels mariages ne soient pas reconnus dans certains pays.

Des situations apparaîtront ainsi où certains mariages seront parfaitement valables en Belgique, et, où, en même temps, aucun effet ne leur sera reconnu à l'étranger.

Il est donc extrêmement important que l'officier de l'état civil attire l'attention des intéressés sur les inconvénients possibles de ces mariages à l'étranger. Il est de l'intérêt des futurs époux de se faire dûment conseiller sur leur statut juridique dans l'hypothèse où ils s'établiraient à l'étranger, ou dans le cas où ils y auraient déjà ou acquerraient par la suite des intérêts patrimoniaux ou autres.

Cela est d'autant plus important que l'on ne peut faire que des prévisions globales quant à la manière dont la pratique juridique étrangère réagira aux mariages entre personnes de même sexe. Comme cela a déjà été précisé, il n'est d'abord pas certain que de tels mariages seront reconnus comme tels. Il n'est pas sûr non plus que le fait de ne pas reconnaître un tel mariage impliquerait qu'aucun effet ne lui serait reconnu, ou qu'au contraire certains effets lui seraient accordés.

C. Conditions auxquelles un mariage célébré à l'étranger est reconnu en Belgique 1. L'article 7 de la loi remplace l'article 170 du Code civil par une nouvelle disposition. L'esprit de la loi requiert que les conditions auxquelles un mariage célébré à l'étranger est considéré comme valable en Belgique, soient rendues neutres du point de vue du sexe.

L'article 170ter du Code civil reste néanmoins applicable aux mariages visés à l'article 170 du même Code. En substance, ces mariages ne sont valables en Belgique que si les parties contractantes ont satisfait aux conditions prescrites à peine de nullité par leur statut personnel pour pouvoir contracter mariage.

Concrètement, cela signifie que le mariage de personnes de même sexe ne sera reconnu en Belgique que si les lois nationales respectives des époux connaissent un tel mariage (cf. ci-avant point A , 2.1). 2. L'article 8 de la loi modifie l'article 171 du Code civil, lequel règle la transcription sur les registres de l'état civil, au retour sur le territoire du royaume, de l'acte de célébration d'un mariage contracté en pays étranger.Dans l'esprit de la loi, il convenait également de rendre cet article neutre du point de vue du sexe.

D. Obligations alimentaires L'article 9 de la loi modifie l'article 206 du Code civil, qui porte sur l'obligation alimentaire entre beaux-parents et beaux-enfants. Le 1° de cette disposition stipule que l'obligation alimentaire prend fin lorsque le beau-père ou la belle-mère a convolé en secondes noces.Par la modification de l'article 206 du Code civil, on vise à mettre un terme à la distinction basée sur le sexe existant dans cette disposition.

E. Etablissement de la filiation des enfants adultérins d'un époux (articles 10 à 12 de la loi) Les articles 313, 319bis et 322 du Code civil visent les cas où l'établissement de la filiation des enfants adultérins d'un époux est porté à la connaissance de l'autre.

Ces articles ont été adaptés afin de les rendre également applicables en cas de mariage avec une personne de même sexe.

Dans chacun des cas susmentionnés, il faudra donc prévoir que tant l'époux que l'épouse soit mis(e) au courant.

F. L' adoption (articles 13 à 16 de la loi) Les effets en matière de filiation n'étant pas reconnus à un mariage entre personnes de même sexe, comme cela a déjà été précisé plus haut, l'adoption par un couple de personnes de même sexe n'est pas possible.

Il a donc été nécessaire de modifier les articles 345, alinéa 2, 346, alinéas 1er et 3, 361, § 2, et 368, § 3, du Code civil en conséquence.

Une adaptation des articles 358, §§ 2 et 3, et 370, § 3, du même Code n'était en revanche pas utile puisque la formulation de ces dispositions ne vise que la situation classique homme-femme.

G. Modification d'autres dispositions du Code civil Les articles 17 à 20 de la loi modifient respectivement les articles 1398, 1676, 1940 et 1941 du Code civil.

Ces modifications ont été dictées par le souci de rendre le texte neutre du point de vue du sexe.

L'article 21 de la loi modifie quant à lui l'article 16, III, de la loi du 30 avril 1951, relative aux baux commerciaux, loi qui figure dans le Livre III, Titre VIII, section IIbis du Code civil.

Enfin, l'article 22 vient modifier l'article 48 du Livre III, Titre XVIII du Code civil relatif aux privilèges et hypothèques. Ces deux dernières modifications s'inspirent également du souci de rendre le texte neutre du point de vue du sexe.

H. Entrée en vigueur de la loi Aux termes de l'article 23 de la loi, celle-ci entre en vigueur le premier jour du quatrième mois qui suit celui au cours duquel elle aura été publiée au Moniteur belge .

La date d'entrée en vigueur de la loi est donc fixée au 1er juin 2003.

Par conséquent, l'officier de l'état civil ne peut accepter les déclarations de mariage et vérifier si les conditions requises pour pouvoir contracter mariage sont remplies qu'à partir du 1er juin 2003.

Bruxelles, le 8 mai 2003.

Le Ministre de la Justice, M. VERWILGHEN

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