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Arrêt
publié le 20 octobre 2003

Extrait de l'arrêt n° 67/2003 du 14 mai 2003 Numéro du rôle : 2447 En cause : la question préjudicielle relative aux articles 10, 13 et 201 du Code wallon du logement, institué par le décret de la Région wallonne du 29 octobre 1998, posée p La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et A. Arts, et des juges L. François, (...)

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Extrait de l'arrêt n° 67/2003 du 14 mai 2003 Numéro du rôle : 2447 En cause : la question préjudicielle relative aux articles 10, 13 et 201 du Code wallon du logement, institué par le décret de la Région wallonne du 29 octobre 1998, posée par le juge de paix du premier canton de Charleroi.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et A. Arts, et des juges L. François, P. Martens, R. Henneuse, M. Bossuyt, E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman et E. Derycke, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par jugement du 2 mai 2002 en cause de F. Bondroit et M.-P. Binse contre J. Varga, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 22 mai 2002, le juge de paix du premier canton de Charleroi a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 10, l'article 13 et l'article 201, du décret du 29 octobre 1998 contenant le code wallon du logement en ce qu'ils entraînent une nullité d'office du bail en cas d'absence de délivrance préalable du permis de location avant la conclusion d'un contrat de bail, ledit permis n'étant délivré que si le logement respecte les critères minimaux de salubrité fixés par l'arrêté du gouvernement wallon du 25 février 1999, ne sont-ils pas en contrariété avec l'article 2 de la loi du 20 février 1991 modifié par la loi du 13 avril 1997 qui, au cas où le bien loué ne répond pas aux exigences élémentaires de sécurité, salubrité et habitabilité telles que prévues par l'Arrêté Royal du 8 juillet 1997, n'entraîne comme sanction possible, au choix du preneur, soit l'exécution des travaux nécessaires pour mettre le bien en conformité avec les conditions de l'alinéa 1er de l'article 2 de la loi du 20 février 1991, soit la résiliation du contrat avec dommages et intérêts ? » Par ordonnance du 19 juin 2002, la Cour a reformulé la question préjudicielle comme suit : « L'article 2 de la loi du 20 février 1991, modifié par la loi du 13 avril 1997, en tant qu'il prévoit comme sanction, au choix du preneur, au cas où le bien loué ne répond pas aux exigences élémentaires de sécurité, salubrité et habitabilité prévues par l'arrêté royal du 8 juillet 1997, soit l'exécution des travaux nécessaires pour mettre le bien loué en conformité avec les exigences précitées, soit la résiliation du contrat avec dommages et intérêts, et les articles 10, 13 et 201 du décret de la Région wallonne du 29 octobre 1998 instituant le Code wallon du logement, en tant qu'ils entraînent une nullité d'office du bail en cas d'absence de délivrance préalable du permis de location, violent-ils l'article 39 de la Constitution et l'article 6, § 1er, IV, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles ? » (...) III. En droit (...) B.1.1 Les articles 10, 13 et 201 du Code wallon du logement, insérés par l'article 1er du décret de la Région wallonne du 29 octobre 1998 instituant le Code wallon du logement, disposent : «

Art. 10.Avant toute mise en location d'un logement visé à la présente section, le bailleur doit être titulaire d'un permis de location.

Le logement doit : 1o respecter les critères minimaux de salubrité fixés par le Gouvernement en vertu de l'article 3; 2o respecter les règlements communaux en matière de salubrité et de sécurité incendie; 3o garantir l'inviolabilité du domicile et le respect de la vie privée, notamment par un système de fermeture à clé des locaux à usage individuel et des boîtes aux lettres. » «

Art. 13.En cas de non-respect des conditions fixées par l'article 10 et sans préjudice de l'article 201, le collège des bourgmestre et échevins de la commune où est situé le logement, et, en cas d'inaction du collège, le Gouvernement, adresse au bailleur, après avis d'un des fonctionnaires ou agents visés à l'article 5, une mise en demeure sommant le bailleur de prendre, dans un délai de quarante-huit heures à six mois, les mesures nécessaires pour respecter les conditions précitées.

Si le bailleur n'a pas obtempéré à la mise en demeure visée à l'alinéa 1er, le collège des bourgmestre et échevins, et, en cas d'inaction du collège, le Gouvernement, procède au retrait du permis de location. » «

Art. 201.§ 1er. Est puni d'une amende de cent francs à mille francs : 1o tout propriétaire, usufruitier, locataire, occupant ou gardien qui permet l'habitation dans un immeuble déclaré inhabitable ou interdit d'accès par le bourgmestre ou par le Gouvernement; 2o le bailleur qui : a) soit loue ou met en location un logement visé à l'article 10 sans avoir obtenu de permis de location;b) soit, après obtention d'un permis de location, contrevient à une disposition arrêtée par ou en vertu des articles 10 et suivants; 3o toute personne qui fait obstacle à l'exercice des missions des fonctionnaires et des agents techniques visés à l'article 5. § 2. Est puni d'un emprisonnement de huit jours à un an et d'une amende de mille francs à dix mille francs ou d'une de ces peines seulement : 1o toute personne qui récidive dans les cinq ans qui suivent une condamnation en vertu du § 1er; 2o tout bailleur qui loue ou met en location un logement nonobstant un refus ou un retrait de permis de location. » B.1.2. L'article 2 de la loi du 20 février 1991 « modifiant et complétant les dispositions du Code civil relatives aux baux à loyer » a inséré dans le livre III, titre VIII, chapitre II du Code civil, à la suite de l'article 1762bis , une section II ayant pour titre « Des règles particulières aux baux relatifs à la résidence principale du preneur », qui s'applique « aux baux portant sur le logement que le preneur, avec l'accord exprès ou tacite du bailleur, affecte dès l'entrée en jouissance à sa résidence principale » et dont l'article 2, complété depuis par la loi du 13 avril 1997 modifiant certaines dispositions en matière de baux, dispose : « Le bien loué doit répondre aux exigences élémentaires de sécurité, de salubrité et d'habitabilité.

Cette condition s'apprécie par référence à l'état du bien au moment de l'entrée en jouissance du preneur.

Le Roi fixe les conditions minimales à remplir pour que le bien loué soit conforme aux exigences de l'alinéa 1er.

Si les conditions prescrites par les alinéas précédents ne sont pas remplies, le preneur a le choix soit d'exiger l'exécution des travaux nécessaires pour mettre le bien loué en conformité avec les conditions de l'alinéa premier, soit de demander la résiliation du contrat avec dommages et intérêts.

En attendant l'exécution des travaux, le juge peut accorder une diminution du loyer. » B.2.1. En vertu de l'article 6, § 1er, IV, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, « le logement et la police des habitations qui constituent un danger pour la propreté et la salubrité publiques » sont des matières régionales.

B.2.2. Le Constituant et le législateur spécial, dans la mesure où ils n'en disposent pas autrement, ont attribué aux communautés et aux régions toute la compétence d'édicter les règles propres aux matières qui leur ont été transférées.

D'une part, il revient au législateur décrétal de déterminer les catégories de logements à l'égard desquelles il exerce ses compétences, en l'espèce les logements collectifs, les petits logements individuels, ainsi que les bâtiments non initialement destinés à l'habitation mais utilisés aux fins de logement, loués ou mis en location à titre de résidence principale, pour autant que ces logements soient situés dans des bâtiments existant depuis au moins vingt ans. D'autre part, l'exercice de ces compétences ne porte pas atteinte au pouvoir de l'autorité fédérale de déterminer les obligations contractuelles du preneur et du bailleur.

B.3.1. La question préjudicielle part de la supposition que l'absence du permis requis par la législation wallonne a pour effet d'entraîner la nullité du bail. Cet effet serait constitutif d'un excès de compétence.

B.3.2. Il résulte de l'examen des travaux préparatoires tant du décret du 6 avril 1995 que du décret en cause du 29 octobre 1998, qui a repris le régime juridique établi par le premier, que l'état souvent défectueux des logements collectifs et des petits logements individuels peut justifier la mise en place d'un système de contrôle de leur mise en location (Doc. , Conseil régional wallon, 1994-1995, no 297/1, pp. 2 à 4, et Doc. , Conseil régional wallon, 1997-1998, no 371/1, p. 13). Il apparaît, en effet, qu'un régime de permis de location pour ces biens est de nature à assurer l'efficacité des normes édictées en l'espèce par la Région wallonne.

B.3.3. En ne prévoyant, aux articles 13 et 201 du Code wallon du logement, que des sanctions de nature administrative ou pénale, le décret ne règle que les rapports entre le bailleur et l'autorité publique. Il ne peut en être déduit que l'article 2, alinéa 4, de la loi du 20 février 1991 aurait été modifié, fût-ce implicitement, par le législateur décrétal wallon.

Sans doute le juge de paix devra-t-il apprécier si l'absence de permis est de nature, soit à entraîner la nullité du bail, soit à vicier le consentement du preneur, soit à justifier la résiliation du bail, soit encore à fonder la condamnation du bailleur à satisfaire aux exigences du Code wallon. Mais il s'agit là d'une application des règles du droit des obligations et de la législation sur le bail de résidence principale et non d'une application du décret.

B.4. La question préjudicielle appelle une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 2, alinéa 4, de la loi du 20 février 1991 modifiant et complétant les dispositions du Code civil relatives aux baux à loyer, complété par la loi du 13 avril 1997 modifiant certaines dispositions en matière de baux, et les articles 10, 13 et 201 du Code wallon du logement, institué par le décret de la Région wallonne du 29 octobre 1998, ne violent ni l'article 39 de la Constitution ni l'article 6, § 1er, IV, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.

Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 14 mai 2003.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président, M. Melchior.

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