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Arrêt
publié le 24 février 2004

Extrait de l'arrêt n° 21/2004 du 4 février 2004 Numéros du rôle : 2641 et 2646 En cause : les recours en annulation des articles 6 à 11 du décret du Conseil flamand du 5 juillet 2002 réglant la dotation et la répartition du Fonds flamand d La Cour d'arbitrage, composée du président A. Arts et du juge P. Martens, faisant fonction de pr(...)

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Extrait de l'arrêt n° 21/2004 du 4 février 2004 Numéros du rôle : 2641 et 2646 En cause : les recours en annulation des articles 6 à 11 du décret du Conseil flamand du 5 juillet 2002 réglant la dotation et la répartition du Fonds flamand des communes, introduits par les communes de Lennik et Beringen.

La Cour d'arbitrage, composée du président A. Arts et du juge P. Martens, faisant fonction de président, et des juges R. Henneuse, M. Bossuyt, E. De Groot, J.-P. Snappe et E. Derycke, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président A. Arts, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des recours et procédure Par requêtes adressées à la Cour par lettres recommandées à la poste le 27 février 2003 et parvenues au greffe le 28 février 2003, la commune de Lennik et la commune de Beringen ont introduit un recours en annulation des articles 6 à 11 du décret du Conseil flamand du 5 juillet 2002 réglant la dotation et la répartition du Fonds flamand des communes (publié au Moniteur belge du 31 août 2002, deuxième édition).

Ces affaires, inscrites sous les numéros 2641 et 2646 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) II. En droit (...) Quant à l'objet des recours B.1. La première partie requérante demande l'annulation de l'article 6, §§ 1er et 2, du décret du Conseil flamand du 5 juillet 2002 réglant la dotation et la répartition du Fonds flamand des communes (affaire no 2641). La deuxième partie requérante demande l'annulation des articles 6 à 11 du même décret (affaire no 2646). Les deux parties prennent un moyen unique, fondé sur la violation des articles 10 et 11 de la Constitution.

B.2. La Cour doit déterminer l'étendue des recours en annulation en fonction du contenu des requêtes, et notamment sur la base de l'exposé des moyens. Elle limite son examen aux dispositions dont il est exposé en quoi elles violeraient les dispositions invoquées aux moyens.

Dès lors que les moyens invoqués sont dirigés contre les seuls paragraphes 1er et 2 de l'article 6 du décret précité du 5 juillet 2002, la Cour limite son examen à ces dispositions. En outre, s'il devait apparaître de l'examen des moyens invoqués que seules certaines parties de ces dispositions sont critiquées, l'examen sera, le cas échéant, limité à ces éléments.

B.3. Les deux premiers paragraphes de l'article attaqué sont libellés comme suit : «

Art. 6.§ 1er. Le Fonds des Communes est réparti parmi les communes selon les critères suivants : 1o 40,8 % pour le financement spécial des villes-centres et des communes côtières : a) 30 % en fonction du nombre d'habitants des communes comptant 200.000 d'habitants ou plus; b) 1,6 % en fonction du nombre d'habitants des communes comptant entre 100.000 et 200.000 habitants; c) 6,2 % en fonction du nombre d'habitants des les communes suivantes : Turnhout, [Roulers], Genk, [Ostende], Hasselt, [Saint-Nicolas, Courtrai, Malines, Alost et Louvain];d) 2 % en fonction du nombre d'habitants des villes suivantes : Aarschot, Deinze, [Termonde], Diest, Eeklo, Geel, [Hal], Herentals, [Ypres], Knokke-Heist, [Lierre], Lokeren, Mol, [Audenarde, Renaix, Saint-Trond], Tielt, [Tirlemont, Tongres, Vilvorde] et Waregem;e) 1 % en fonction du nombre d'habitants des communes dont le territoire est limitrophe de la mer; 2o 8 % pour la fonction de centre : a) 4 % en fonction de la population active occupée dans la commune;b) 4 % en fonction du nombre d'élèves et d'étudiants qui suivent un enseignement sur le territoire de la commune; 3o 30,2 % pour la pauvreté fiscale : a) 19 % sur la proportionnalité inverse du produit global de l'impôt des personnes physiques des habitants de la commune, à l'exclusion des taxes additionnelles à l'impôt des personnes physiques;b) 11,2 % sur la proportionnalité inverse du revenu cadastral imposable global sur le territoire de la commune; 4o 6 % pour les espaces libres sur la base de la superficie des bois, jardins, parcs, terres incultes, eaux cadastrées, terres arables, prairies, zones de récréation et vergers; 5o 15 % pour critères sociaux : a) 1 % en fonction du nombre de personnes bénéficiant d'un statut VIPO, à l'exclusion des minimexés;b) 4 % en fonction du nombre de chômeurs infrascolarisés;c) 3 % en fonction du nombre de naissances dans des familles défavorisées;d) 3 % en fonction du nombre d'occupants d'appartements locatifs sociaux;e) 4 % en fonction du nombre de minimexés. § 2. Les nombres de base pour tous les critères, à l'exception des critères de la pauvreté fiscale, sont égaux à l'unité sur laquelle le critère est basé. Dans le § 1er, 1o a, b, c, d et e, 2o, a et b, 5o a, b, c, d et e, l'unité est représentée par des personnes; au 4o par des hectares et au 5o, c par le nombre de naissances.

Pour les critères de la pauvreté fiscale, visés au § 1er, 3o, a) et b), les nombres de base sont calculés à l'aide des formules suivantes : 1o nombre de base de l'impôt sur les personnes physiques = habitants2/impôt global sur les personnes physiques enrôlé, à l'exclusion des taxes additionnelles sur l'impôt des personnes physiques des habitants de la commune; 2o nombre de base du revenu cadastral = habitants2/revenu cadastral imposable global sur le territoire de la commune. » Quant à l'exception soulevée par le Gouvernement flamand B.4.1. Le Gouvernement flamand considère que l'exposé contestant les dispositions attaquées, en particulier celui de la deuxième partie requérante, ne peut être considéré comme un moyen, étant donné qu'il se limite à renvoyer à des éléments de fait et à la situation spécifique de la partie requérante.

B.4.2. Pour satisfaire aux exigences de l'article 6 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, les moyens de la requête doivent faire connaître, parmi les règles dont la Cour garantit le respect, celles qui seraient violées ainsi que les dispositions qui violeraient ces règles et exposer en quoi ces règles auraient été transgressées par ces dispositions.

B.4.3. S'il est vrai que la deuxième partie requérante en particulier avance une série d'éléments de fait, ceci n'empêche pas que son exposé satisfait pour le reste aux exigences précitées de l'article 6 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage et peut par conséquent être considéré comme un moyen recevable.

B.4.4. L'exception ne peut être admise.

Quant au fond B.5.1. Dans les travaux préparatoires, le but du décret du 5 juillet 2002 est décrit comme suit : « [Le] décret a pour but de réformer en profondeur le financement général des communes via le Fonds flamand des communes, tant en ce qui concerne l'établissement de la dotation qu'en ce qui concerne la manière dont les moyens sont répartis entre les communes.

Par cette réforme, le Gouvernement flamand exécute un point important de l'accord de gouvernement pour la Flandre. Cet accord prévoit la réforme des fonds de financement sur la base d'une série de critères : plus d'attention apportée à la capacité fiscale objective et à la solidarité fiscale entre les communes, valorisation de la fonction de centre et de la fonction urbaine, attention apportée à la capacité administrative des communes plus petites, y compris des communes rurales, souci de la conservation et de l'extension des espaces libres [...].

En réformant le Fonds des communes, le Gouvernement flamand entend concilier de manière équilibrée une diversité d'objectifs. » (Doc ., Parlement flamand, 2001-2002, no 1148/1, p. 3) B.5.2. Les règles de répartition du Fonds des communes figurant à l'article 6 attaqué sont groupées sous cinq « critères », à savoir 1) le fait que la commune présente les caractéristiques d'une grande ville, d'une ville-centre, d'une ville provinciale ou d'une commune côtière; 2) la fonction de centre; 3) la capacité fiscale; 4) la présence d'espaces libres; 5) les critères sociaux.

La part de chacune des communes dans le Fonds flamand des communes est calculée sur la base des cinq critères précités et des règles et coefficients de pondération qui les accompagnent.

Le ministre flamand des Affaires intérieures a commenté comme suit ce régime de répartition : « La répartition de moyens entre 308 communes est une tâche délicate qui donnera toujours lieu à des contestations. Un accroissement du montant fera grandir aussi la discussion au sujet du partage.

En établissant les règles de répartition, le Gouvernement flamand exécute les principes qui figurent explicitement dans l'accord de gouvernement.

Un financement de base est garanti à chacune des communes, tenant compte de l'importante contribution de celles-ci à la politique générale de l'autorité. Le partage vise toutefois en premier lieu à redistribuer des moyens obtenus par la levée des impôts de tous les citoyens. Les communes qui, par suite d'une capacité fiscale moindre par rapport aux autres communes, ont moins de possibilités de recettes suffisantes via leur fiscalité propre reçoivent une plus grande part du Fonds flamand des communes.

La capacité fiscale propre des communes diffère fortement. En appliquant des taux identiques d'additionnels à l'impôt des personnes physiques et au précompte immobilier, on obtient des recettes par habitant qui diffèrent considérablement. Ceci est la conséquence de facteurs qui sont, pour une grande part, étrangers à la politique qui est menée, tels que, notamment, le niveau de revenu des habitants, la valeur des revenus cadastraux, la présence d'établissements industriels, la fonction de centre et le contexte urbain ou rural. Ces facteurs externes déterminent également dans une large mesure le schéma des dépenses d'une commune. Il y a par conséquent une inégalité manifeste des chances.

La redistribution des moyens est une tâche essentielle de l'autorité.

Il n'est pas acceptable que le citoyen, par suite d'une différence de la capacité et de l'environnement socio-économique de son administration, soit mis à contribution de manière très différente pour une même offre de services, en fonction de la commune où il habite.

C'est pourquoi la richesse ou la pauvreté fiscale devient un des critères essentiels du partage du Fonds flamand des communes. Plus la commune peut percevoir de moyens par habitant sur la base de l'impôt des personnes physiques et du revenu cadastral, moins élevée sera sa part dans le Fonds des communes. Ce critère revêt une grande importance pour les communes financièrement plus faibles, parmi lesquelles souvent les petites communes rurales.

A côté de cela ont été repris, dans le Fonds des communes, des critères tenant compte des principes de l'accord de gouvernement : ' Les grandes villes, les villes-centres et les villes provinciales bénéficient d'un financement spécial. Le Gouvernement flamand entend valoriser ainsi de manière significative leur fonction de centre. Ces communes ont, précisément à cause de leur fonction de centre, des missions spécifiques importantes qui donnent aussi lieu à des dépenses supplémentaires considérables. Les communes côtières bénéficient elles aussi d'un financement spécial. Ceci est justifié par leurs activités et leur infrastructure touristiques. ' Supprimer cette aide particulière ébranlerait grandement la situation financière des villes et communes concernées. Ce financement particulier s'opère sur la base du nombre d'habitants. A côté de cela, la fonction de centre de toutes les communes est prise en considération par le biais du degré d'activité et du nombre d'élèves et d'étudiants. La préservation des espaces libres et de la ruralité des communes est prise en compte. Des critères tels que la surface des bois, des parcs, des friches, des terres arables, des zones de récréation, des vergers sont pris en considération pour cela. Enfin, il y a les critères sociaux, repris sur la base des critères pertinents du Fonds d'impulsion sociale. » (Doc., Parlement flamand, 2001-2002, no 1148/5, pp. 8-9) B.6.1. C'est au législateur décrétal qu'il appartient, dans l'exercice de sa compétence relative au financement des communes, de déterminer les critères de répartition des moyens du Fonds flamand des communes et de fixer le coefficient de pondération à appliquer. Le législateur décrétal dispose en ce domaine d'une large marge d'appréciation. La Cour peut seulement considérer qu'une différence de traitement est inconstitutionnelle lorsqu'elle n'est pas susceptible de justification raisonnable.

B.6.2. La rigidité résultant inévitablement de l'utilisation de critères de répartition et de coefficients de pondération fixés de manière générale peut se justifier par la considération que le législateur décrétal entend légiférer par catégories plutôt que de tenir compte des particularités propres à chaque cas individuel - en l'espèce les 308 communes flamandes -, de sorte qu'il faut admettre, sauf erreur manifeste, que, nécessairement, ces catégories n'appréhendent la diversité des situations qu'avec un certain degré d'approximation.

B.6.3. Il convient à cet égard de tenir compte du fait que certains critères de répartition pouvant être perçus comme discriminatoires par les communes requérantes constituent un élément d'un règlement global.

Il peut arriver, en pareil cas, que l'application concrète de certains critères, considérée isolément, soit moins favorable pour certaines communes. L'éventuelle annulation d'un élément de ce règlement global pourrait alors conduire à rompre l'équilibre qu'une approche plus globale ferait peut-être apparaître.

B.7. Le recours au procédé de critères de répartition n'est pas déraisonnable en soi; il convient néanmoins d'examiner si les critères utilisés peuvent raisonnablement se justifier au regard des articles 10 et 11 de la Constitution.

En ce qui concerne le premier critère B.8.1. Le premier critère sur la base duquel les moyens du Fonds flamand des communes sont répartis entre les communes - coefficient de pondération de 40,8 % - concerne le « financement spécial des villes-centres et des communes côtières » (article 6, § 1er, 1o).

Contrairement aux quatre autres critères, la répartition des communes en catégories est exclusivement utilisée dans le premier critère. Pour les autres critères, les moyens sont répartis entre les 308 communes flamandes, sans classement en catégories (Doc., Parlement flamand, 2001-2002, no 1148/1, p. 16).

Dans le premier critère, un pourcentage fixe du Fonds des communes est réparti, au sein de chacune des cinq catégories de communes distinguées par les dispositions attaquées, sur la base du nombre d'habitants de cette catégorie. Ces cinq catégories de communes sont : les communes de 200.000 habitants et plus; les communes comptant entre 100.000 et 200.000 habitants; les villes-centres; les villes provinciales; les communes côtières. Le fait que ces catégories de communes bénéficient d'un financement spécial dans le système de répartition a été justifié dans les travaux préparatoires par une référence à la fonction de centre exercée par ces communes : du fait de leur fonction de centre, elles ont des missions spécifiques telles que de prévoir et d'exploiter « des infrastructures minimales en matière d'administration, de police, de culture et de loisirs » (Doc., ibid ., p. 29) qui donnent lieu à des dépenses supplémentaires considérables. Supprimer cette aide particulière bouleverserait d'ailleurs profondément leur situation financière (Doc., Parlement flamand, 2001-2002, no 1148/1, p. 8; ibid., no 1148/5, pp. 8-9).

B.8.2. La deuxième partie requérante ne démontre pas - et la Cour n'aperçoit pas - en quoi cette répartition des communes en catégories ne serait pas raisonnablement justifiée. Affirmer que cette répartition est arbitraire et imprécise et que la commune de Beringen serait de ce fait discriminée par rapport aux autres communes ne suffit pas pour établir une violation du principe d'égalité et de non-discrimination.

En ce qui concerne le second critère B.9.1. Le second critère - coefficient de pondération de 8 p.c. - a trait à la « fonction de centre » et comporte deux sous-critères : la population active occupée dans la commune et le nombre d'élèves et d'étudiants qui suivent un enseignement sur le territoire de la commune (article 6, § 1er, 2o). Ceci vise en particulier les élèves et étudiants de l'enseignement secondaire et de l'enseignement supérieur (article 8, § 1er, 1o).

B.9.2. La deuxième partie requérante n'attaque que le deuxième sous-critère, en tant qu'il ne mentionne pas l'enseignement primaire et l'enseignement artistique à temps partiel, de sorte que les communes connaissant une grande concentration de ce type d'enseignement seraient discriminées par rapport aux communes connaissant une concentration d'établissements d'enseignement secondaire et supérieur. La Cour limite son examen à ce sous-critère.

B.9.3. Le sous-critère fondé sur le nombre d'élèves et d'étudiants qui suivent un enseignement sur le territoire de la commune mesure la concentration de personnes qui viennent dans la commune pour y suivre une formation. Ce sous-critère est lié à l'importance des dépenses nécessaires pour développer une infrastructure minimale en matière d'administration et de police notamment (Doc., Parlement flamand, 2001-2002, no 1148/1, p. 19) et vise à valoriser la fonction de centre d'une commune. De petites communes comptant peu d'habitants peuvent elles aussi avoir une certaine fonction de centre par rapport aux communes environnantes (ibid., pp. 20 et 29).

Le sous-critère concerne les élèves et étudiants de l'enseignement secondaire et de l'enseignement supérieur ainsi que les élèves de l'enseignement de promotion sociale et de l'enseignement artistique à temps partiel. Dans ces deux dernières catégories, les élèves comptent pour un demi-équivalent (article 8, § 1er, 2o et 3o), étant donné qu'il s'agit de formes d'enseignement à horaire réduit (ibid., pp. 20, 29 et 30). En tant que la deuxième partie requérante affirme que l'enseignement artistique à temps partiel n'est aucunement pris en compte comme critère de distinction, le moyen manque par conséquent en fait.

Le fait qu'il n'est pas tenu compte de l'enseignement primaire dans ce sous-critère peut se justifier par la constatation que cette sorte d'enseignement est organisée dans la plupart des communes et que cela ne constitue dès lors pas un critère de distinction utile, étant donné qu'il aurait un effet de trop grand nivellement.

En ce qui concerne le troisième critère B.10.1. Le troisième critère - coefficient de pondération de 30,2 p.c. - concerne la capacité fiscale (« pauvreté fiscale ») d'une commune (article 6, § 1er, 3o).

B.10.2. Dans les travaux préparatoires, ce critère est commenté comme suit : « La notion de capacité fiscale n'a rien à voir avec les taux d'imposition, le nombre de taxes levées ou la pression fiscale effective dans une commune mais mesure la capacité d'une commune d'acquérir des recettes par la fiscalité. La taxe additionnelle à l'impôt des personnes physiques et les centimes additionnels au précompte immobilier étant les deux impositions primaires permettant une parfaite comparaison entre les communes, ce sont ces deux impositions qui sont utilisées pour mesurer la capacité fiscale.

Une commune dont les habitants génèrent des revenus relativement élevés aura une grande capacité fiscale, même si elle ne perçoit pas de taxe additionnelle à l'impôt des personnes physiques, parce que la valeur de 1 % de l'impôt des personnes physiques par habitant est élevée. A l'inverse, une commune ' pauvre ' dont les habitants paient peu d'impôts est fiscalement pauvre, même si ses taux d'imposition sont élevés. Il en va de même, mutatis mutandis, pour le précompte immobilier qui est basé sur le revenu cadastral. Un poids moindre est attribué à cette dernière donnée en raison du fait que les revenus cadastraux ne sont plus à jour.

La clé de répartition fonctionnera ici suivant la proportionnalité inverse. Plus le montant de 1 % de l'enrôlement par personne est élevé, plus la part que les communes reçoivent pour ces critères sera réduite. [...] Le grand poids donné à ces critères accentue l'importance du rôle redistributeur du Fonds des communes. Les communes qui ont la possibilité d'acquérir plus aisément des recettes doivent en effet moins pouvoir faire appel aux subventions de l'autorité. » (Doc., Parlement flamand, 2001-2002, no 1148/1, pp. 20 et 21) B.10.3. Ces commentaires font apparaître que le troisième critère n'est pas dénué de justification raisonnable. Le grief formulé par les parties requérantes, selon lequel le revenu cadastral ne serait pas également et correctement établi dans toutes les communes, n'affecte pas la pertinence de cette justification. Ainsi qu'il ressort des travaux préparatoires précités, le législateur décrétal a en effet tenu compte de cette circonstance en prévoyant que le critère du revenu cadastral aurait un poids moindre que celui de l'impôt des personnes physiques.

En ce qui concerne le quatrième critère B.11.1. Le quatrième critère - coefficient de pondération de 6 p.c. - a trait aux espaces libres (article 6, § 1er, 4o).

B.11.2. L'utilisation de ce critère a été justifiée comme suit dans les travaux préparatoires : d'une part, les communes ayant de grands espaces libres sont financièrement défavorisées par rapport aux communes comportant de nombreuses zones d'habitat, étant donné que les premières nommées ne tirent aucun revenu de cette portion de leur territoire; d'autre part, l'entretien de ces espaces libres peut générer des dépenses considérables pour l'adoption de certaines mesures (en matière d'érosion des sols, de curage des ruisseaux et des fossés, de gestion de l'eau et de pollution de l'environnement notamment) (Doc ., Parlement flamand, 2001-2002, no 1148/1, pp. 21-22).

B.11.3. La circonstance que les terres arables, les vergers et les zones de récréation pèsent du même poids que les bois, les parcs et les étendues d'eau n'est pas de nature - contrairement à ce que soutient la seconde partie requérante - à priver le quatrième critère de justification raisonnable, compte tenu notamment de l'approche globale à laquelle il est fait référence aux B.6.2 et B.6.3.

En ce qui concerne le cinquième critère B.12.1. Le cinquième critère - coefficient de pondération de 15 p.c. - concerne les « critères sociaux » concrétisés par cinq sous-critères (article 6, § 1er, 5o).

Etant donné que les parties requérantes ne contestent que le quatrième de ces sous-critères - « nombre d'occupants d'appartements locatifs sociaux » (coefficient de pondération de 3 p.c.) -, la Cour limite son examen à ce sous-critère.

B.12.2. Selon les parties requérantes, on ne saurait justifier que le législateur décrétal ne prenne en compte comme critère de distinction que le nombre d'habitants d'appartements locatifs sociaux et non le nombre d'habitants des logements sociaux dans leur ensemble.

B.12.3. Les travaux préparatoires mentionnent à cet égard : « Les quartiers comportant de nombreux appartements locatifs sociaux se caractérisent par un retard social des habitants. Bien que cette forme d'habitat soit répartie sur l'ensemble du territoire, il en existe d'importantes concentrations dans les villes, au point de constituer des quartiers entiers. Il n'est pas besoin d'expliquer que c'est précisément là que les efforts doivent être les plus importants pour améliorer la qualité du milieu de vie. » (Doc ., Parlement flamand, 2001-2002, no 1148/1, pp. 22 et 31) « On a choisi de ne pas retenir toutes les habitations sociales parce que l'on voulait opérer une distinction entre le contexte urbain et le contexte rural. Prendre en compte toutes les habitations sociales aurait seulement eu un effet de nivellement et aurait dès lors été superflu. » (Doc., Parlement flamand, 2001-2002, no 1148/5, p. 12) Un amendement qui visait à prendre également en compte les habitations sociales comme critère a été rejeté (Doc ., Parlement flamand, 2001-2002, no 1148/3, p. 3; ibid., no 1148/5, pp. 31-32; ibid., no 1148/6, p. 3). Le ministre a déclaré à cet égard que les appartements locatifs sociaux figurent dans les critères de répartition par suite de l'intégration du Fonds d'impulsion sociale dans le Fonds des communes et que le but est de tenir davantage compte de l'ensemble des problèmes sociaux dans la répartition du Fonds des communes (Doc., Parlement flamand, 2001-2002, no 1148/5, p. 31).

B.12.4. Il ressort de ceci que ce n'est pas sans justification raisonnable que le législateur décrétal n'a tenu compte, à titre de critère, que du nombre d'habitants des appartements locatifs sociaux, et non de celui de l'ensemble des logements sociaux.

B.13. Les critères et sous-critères litigieux, figurant à l'article 6, § 1er, du décret du 5 juillet 2002, ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution.

Il s'ensuit que le paragraphe 2 de l'article 6 précité résiste également au contrôle de constitutionnalité, puisqu'il se limite à définir les « nombres de base » utilisés pour les critères mentionnés au paragraphe 1er.

Par ces motifs, la Cour rejette les recours.

Ainsi prononcé en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 4 février 2004.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président, A. Arts.

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