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Arrêt
publié le 12 avril 2005

Extrait de l'arrêt n° 55/2005 du 8 mars 2005 Numéro du rôle : 2953 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 257, § 2, 3°, du Code des impôts sur les revenus 1992 , posée par le Tr(...) La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges R. Henneuse, (...)

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12/04/2005
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COUR D'ARBITRAGE


Extrait de l'arrêt n° 55/2005 du 8 mars 2005 Numéro du rôle : 2953 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 257, § 2, 3°, du Code des impôts sur les revenus 1992 (en ce qui concerne la Région flamande), posée par le Tribunal de première instance de Gand.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges R. Henneuse, L. Lavrysen, J.-P. Snappe, E. Derycke et J. Spreutels, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président A. Arts, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par jugement du 10 mars 2004 en cause de la s.a. Groep Immo Dobbelaere contre la Région flamande, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 19 mars 2004, le Tribunal de première instance de Gand a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 257, § 2, 3°, du Code des impôts sur les revenus 1992 viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il exclut la remise ou réduction proportionnelle du précompte immobilier lorsque l'immeuble est resté inoccupé en dehors de la volonté du propriétaire pendant plus de douze mois, compte tenu de l'exercice d'imposition précédent, dans la mesure où il s'agit d'un bâtiment démoli en vue d'une nouvelle construction ? » (...) III. En droit (...) Quant à la disposition en cause B.1. La question préjudicielle porte sur l'article 257, § 2, 3°, du Code des impôts sur les revenus 1992, tel qu'il a été remplacé par l'article 3 du décret de la Région flamande du 9 juin 1998 « contenant des dispositions modifiant le Code des impôts sur les revenus, pour ce qui concerne le précompte immobilier », avant sa modification par l'article 2 du décret du 13 juillet 2001 « modifiant l'article 257 du Code des impôts sur les revenus 1992, pour ce qui concerne le précompte immobilier ».

Cette disposition concerne l'obtention éventuelle de la remise ou de la modération proportionnelle du précompte immobilier.

B.2. Initialement, l'article 50 du décret du 25 juin 1992 contenant diverses mesures d'accompagnement du budget 1992 avait supprimé la remise et la modération proportionnelle du précompte immobilier pour les immeubles bâtis, non meublés, restés totalement inoccupés et improductifs de revenus pendant au moins nonante jours dans le courant de l'année.

B.3. L'article 50 du décret du 25 juin 1992 a été abrogé par l'article 60, alinéa 2, du décret du 22 décembre 1993 contenant diverses mesures d'accompagnement du budget 1994, qui disposait : « L'article 50 du décret du 25 juin 1992 contenant diverses mesures d'accompagnement du budget 1992 est abrogé.

Pour ce qui concerne la Région flamande, aucune remise ou modération proportionnelle n'est accordée par dérogation à l'article 257, 4° du code des impôts sur les revenus 1992, dans la mesure où le revenu cadastral imposable peut être réduit en vertu de l'article 15, § 1er, 1°, lorsque l'immeuble n'a pas été occupé pendant plus de 12 mois, compte tenu de l'exercice d'imposition précédent. » A la place de la suppression totale de la remise ou de la modération proportionnelle du précompte immobilier, le législateur décrétal décidait ainsi que cette remise ou cette modération proportionnelle pouvait être accordée, sauf lorsque le bien était resté inoccupé pendant plus de douze mois.

B.4. L'article 257, § 2, 3°, du Code des impôts sur les revenus 1992, modifié par le décret du 9 juin 1998, a repris l'alinéa 2 de l'article 60 précité du décret du 22 décembre 1993. Il disposait : « Sur demande de l'intéressé : [...] 3° remise ou réduction proportionnelle du précompte immobilier est accordée dans la mesure où le revenu cadastral imposable peut être réduit en vertu de l'article 15, aucune remise ou réduction proportionnelle ne peut être accordée si le bien immobilier est resté inoccupé pendant plus de 12 mois, compte tenu de l'exercice d'imposition précédent.» Cette disposition est entrée en vigueur à partir de l'exercice d'imposition 1999.

B.5. Le décret du 13 juillet 2001 « modifiant l'article 257 du Code des impôts sur les revenus 1992, pour ce qui concerne le précompte immobilier », a remplacé comme suit l'article 257, § 2, 3°, du Code des impôts sur les revenus 1992 : « Sur demande de l'intéressé [, il est accordé] : [...] 3° une remise ou une réduction proportionnelle du précompte immobilier, dans la mesure où le revenu imposable peut être réduit en vertu de l'article 15.» En même temps, pour ce qui concerne la Région flamande, a été inséré dans l'article 257 du Code des impôts sur les revenus 1992 un paragraphe 2bis rédigé comme suit : « § 2bis. Il ne peut être accordé une remise ou une réduction proportionnelle, s'il n'a pas été fait usage du bien depuis plus de douze mois, compte tenu de l'année d'imposition précédente. Cette disposition n'est toutefois pas applicable : 1° à un immeuble bâti non meublé, faisant l'objet d'un plan d'expropriation;2° à un immeuble bâti non meublé en voie de rénovation ou de transformation et ayant un but social ou culturel, exécutée par une société de logement social ou pour le compte d'une autorité.La durée de la remise ou de la réduction proportionnelle est plafonnée à 5 ans; 3° à un immeuble dont le contribuable ne peut exercer les droits réels pour cause d'une calamité, force majeure, une procédure ou une enquête administrative ou judiciaire en cours ou une procédure d'héritage non finalisée.Le précompte immobilier est à nouveau dû à partir du 1er janvier de l'année d'imposition qui suit l'année dans laquelle disparaissent les circonstances entravant la jouissance libre de l'immeuble. » En l'espèce, la Cour ne doit pas tenir compte de cette dernière modification décrétale, qui est entrée en vigueur à partir de l'exercice d'imposition 2002, puisqu'elle contrôle l'article précité tel qu'il était applicable à l'exercice d'imposition en cause, à savoir l'exercice d'imposition 2000.

Quant à la question préjudicielle B.6. Par la question préjudicielle, le juge a quo demande à la Cour si l'article 257, § 2, 3°, du Code des impôts sur les revenus 1992 viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que la remise ou la modération proportionnelle du précompte immobilier est refusée lorsqu'un immeuble reste inoccupé pendant plus de douze mois, compte tenu de l'exercice d'imposition précédent, pour des raisons indépendantes de la volonté du propriétaire, dans la mesure où il s'agit d'un immeuble démoli en vue de sa reconstruction.

B.7. En ne supprimant, par l'article 60 du décret du 22 décembre 1993 et, ensuite, par l'article 257, § 2, 3°, du Code des impôts sur les revenus 1992, tel qu'il a été remplacé par l'article 3 du décret du 9 juin 1998, la remise ou la modération proportionnelle du précompte immobilier que lorsque l'immeuble est resté inoccupé pendant plus de douze mois, le législateur décrétal a voulu mieux adapter à la lutte contre la taudisation qu'entraîne l'inoccupation la mesure qu'il avait prise à l'origine, à savoir la suppression pure et simple, mentionnée au B.2, de la remise ou de la modération proportionnelle du précompte immobilier.

Le législateur décrétal entendait ainsi « pouvoir tenir compte de causes involontaires d'improductivité, comme la réalisation de travaux destinés à rendre l'immeuble à nouveau habitable [...] » (Doc., Conseil flamand, 1993-1994, n° 415/1, p. 23) et il voulait « éviter que la suppression de cette modération s'applique également aux habitations inoccupées temporairement et frappe ainsi par exemple aussi les propriétaires qui rénovent leur habitation. En effet, cela serait contraire à la politique visant à lutter contre la taudisation.

La rénovation d'une habitation doit précisément être stimulée » (Doc., Conseil flamand, 1993-1994, n° 415/13, pp. 4 et 5).

B.8. En disposant que le bénéfice de la modération ou de la remise du précompte immobilier est supprimé lorsqu'un immeuble bâti reste inoccupé pendant longtemps, le législateur décrétal adopte une mesure qui est pertinente dans sa lutte contre l'inoccupation et la taudisation. La limite de douze mois est en rapport avec le souci du législateur d'inciter le propriétaire à exécuter dans les délais des travaux d'entretien ou de réparation ou à rechercher un locataire ou un acheteur.

B.9. Dans les arrêts nos 82/2003 et 155/2003, la Cour a jugé à propos de l'article 60 précité du décret du 22 décembre 1993 : « B.3.4. La Cour constate toutefois qu'en cas de dépassement de la période mentionnée - sauf dans les hypothèses explicitement mentionnées à l'article 60, alinéa 3, qui ne sont pas en cause en l'espèce -, la diminution du précompte immobilier est refusée sans distinguer la raison de l'inoccupation. Il est pourtant possible que des bâtiments bien entretenus restent inoccupés plus longtemps en dépit du fait que le propriétaire met tout en oeuvre pour les donner à bail. De même, un immeuble peut être plus longtemps improductif lorsque sont requis d'importants travaux de transformation qui durent plus de douze mois, totalement en dehors de la volonté du propriétaire. Dans aucun des deux cas, il ne pourrait être reproché au propriétaire de contribuer à l'inoccupation ou à la taudisation.

B.3.5. L'article 60 du décret du Conseil flamand du 22 décembre 1993 a des effets disproportionnés à l'égard de la catégorie des propriétaires d'immeubles bâtis dont le bâtiment reste inoccupé pour des raisons indépendantes de leur volonté. Dans cette mesure, la disposition en cause viole les articles 10 et 11 de la Constitution. » B.10. Toutefois, lorsque, comme en l'espèce, un bien immeuble habitable est démoli afin de construire un nouvel immeuble et d'accroître ainsi la valeur économique du bien, l'improductivité n'est pas due à des circonstances indépendantes de la volonté du propriétaire. En outre, il ne s'agit pas de travaux destinés à rendre l'immeuble à nouveau habitable. Dans ce cas, il n'est pas manifestement déraisonnable que la remise ou la modération du précompte immobilier soit refusée en application de la disposition en cause.

B.11. La question préjudicielle appelle une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 257, § 2, 3°, du Code des impôts sur les revenus 1992, tel qu'il était applicable avant sa modification par le décret de la Région flamande du 13 juillet 2001, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.

Ainsi prononcé en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 8 mars 2005.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président, A. Arts.

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