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Arrêt
publié le 11 mai 2005

Extrait de l'arrêt n° 69/2005 du 20 avril 2005 Numéro du rôle : 2943 En cause : le recours en annulation des articles 18 à 23 de l'ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 17 juillet 2003 portant le Code bruxellois du logement, intr La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et A. Arts, et des juges P. Martens, R.(...)

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COUR D'ARBITRAGE


Extrait de l'arrêt n° 69/2005 du 20 avril 2005 Numéro du rôle : 2943 En cause : le recours en annulation des articles 18 à 23 de l'ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 17 juillet 2003 portant le Code bruxellois du logement, introduit par l'a.s.b.l.

Syndicat national des propriétaires et autres.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et A. Arts, et des juges P. Martens, R. Henneuse, M. Bossuyt, E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke et J. Spreutels, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 8 mars 2004 et parvenue au greffe le 10 mars 2004, un recours en annulation des articles 18 à 23 de l'ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 17 juillet 2003 portant le Code bruxellois du logement (publiée au Moniteur belge du 9 septembre 2003) a été introduit par l'a.s.b.l. Syndicat national des propriétaires, dont le siège social est établi à 1000 Bruxelles, rue du Lombard 76, P. Raes, demeurant à 1050 Bruxelles, rue De Praetere 38, M.L. Stockhem, demeurant à 1180 Bruxelles, avenue A. Dupuich 24, C. Persoons, demeurant à 1750 Sint-Kwintens-Lennik, Breynaertstraat 93, et X. Laloux et A. Van Roy, qui ont fait élection de domicile à 1180 Bruxelles, avenue Winston Churchill 253. (...) II. En droit (...) Quant à l'intérêt des parties requérantes B.1.1. Le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale conteste l'intérêt à agir de l'a.s.b.l. Syndicat national des propriétaires dès lors qu'elle ne démontrerait pas en quoi le droit de propriété dont la protection constitue son objet social serait atteint par les dispositions attaquées.

B.1.2. L'a.s.b.l. Syndicat national des propriétaires a pour objet, selon ses statuts, « la défense du droit de propriété privée mobilière et immobilière » ainsi que « l'introduction devant les juridictions pénales, civiles et administratives [...] de toutes les actions en justice qui se justifient par la défense de son objet et des intérêts collectifs ou privés de ses membres ».

Lorsqu'une association sans but lucratif se prévaut d'un intérêt collectif, il est requis que son objet social soit d'une nature particulière et, dès lors, distinct de l'intérêt général; que l'intérêt collectif ne soit pas limité aux intérêts individuels de ses membres; que la norme entreprise soit susceptible d'affecter l'objet social; qu'il n'apparaisse pas, enfin, que cet objet social n'est pas ou n'est plus réellement poursuivi.

La procédure organisée par les articles 18 à 23 de l'ordonnance contestée peut avoir pour effet de déposséder, pendant une période pouvant aller jusqu'à neuf années, le titulaire de droits réels sur un logement inoccupé, sur un logement qui n'a pas fait l'objet de travaux de rénovation ou encore sur un logement qui a été déclaré inhabitable, conformément à l'article 135 de la Nouvelle loi communale, en permettant à un opérateur immobilier public de mettre en oeuvre un droit de gestion publique après avoir, le cas échéant, réalisé les travaux de rénovation ou d'amélioration requis.

Une telle mesure est de nature à porter atteinte au droit de propriété. Elle peut donc affecter directement et défavorablement l'objectif que l'association requérante s'est donné pour mission de défendre.

B.1.3. L'exception est rejetée.

B.2.1. Le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale conteste également l'intérêt à agir des deuxième à sixième parties requérantes au motif que celui-ci serait dénué de caractère certain. Il considère que le risque pour les propriétaires concernés de voir leur immeuble inoccupé et, partant, de se voir appliquer le régime de gestion publique mis en place par l'ordonnance est purement aléatoire dès lors qu'ils ont tous des raisons particulières et personnelles qui permettent de justifier l'inoccupation temporaire de leur bien. Ils ne pourraient donc se voir appliquer ledit régime.

B.2.2. La Constitution et la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage imposent à toute personne physique ou morale qui introduit un recours en annulation de justifier d'un intérêt. Ne justifient de l'intérêt requis que les personnes dont la situation pourrait être affectée directement et défavorablement par la norme entreprise.

L'article 18 de l'ordonnance attaquée permet à tout opérateur immobilier public de disposer d'un droit de gestion publique à l'égard de trois catégories de logements : les logements inoccupés, ceux visés aux articles 9 et 10 de l'ordonnance et qui n'ont pas fait l'objet de travaux de rénovation ou d'amélioration et, enfin, ceux qui ont été déclarés inhabitables, conformément à l'article 135 de la Nouvelle loi communale.

Les deuxième à sixième parties requérantes sont propriétaires d'immeubles qu'elles n'occupent, pour certaines, que partiellement, et, pour d'autres, que de manière sporadique. Dès lors que l'ordonnance entreprise ne fixe aucune durée d'inoccupation à partir de laquelle le régime de gestion publique peut être mis en oeuvre, en leur qualité de propriétaire d'un ou de plusieurs immeubles pouvant être mis en location en raison d'une inoccupation, fût-elle temporaire, les parties requérantes susvisées peuvent être affectées directement et défavorablement par les dispositions attaquées.

B.2.3. L'exception est rejetée.

B.3.1. Quant à l'article 23 de l'ordonnance attaquée, le Gouvernement bruxellois soutient qu'en se limitant à organiser une tutelle de substitution en cas de défaillance des autorités communales, cette disposition ne porte pas sur le droit de gestion publique, de sorte que les parties requérantes seraient sans intérêt à en demander l'annulation.

Les personnes physiques qui introduisent un recours en annulation doivent être directement affectées par les dispositions dont elles requièrent l'annulation.

B.3.2. Il ressort tant de la requête que du mémoire en réponse introduit par les parties requérantes que celles-ci contestent en réalité non pas la tutelle de substitution que l'ordonnance entend organiser mais l'absence de contrôle préalable à la mise en oeuvre du droit de gestion publique.

Dès lors que cette absence de contrôle préalable est étrangère à l'article 23 de l'ordonnance incriminée, les parties requérantes n'ont pas d'intérêt à en demander l'annulation.

B.3.3. La Cour limitera donc son examen aux articles 18 à 22 de l'ordonnance attaquée.

Quant à la recevabilité de la demande d'intervention de l'a.s.b.l. « Rassemblement bruxellois pour le Droit à l'Habitat/Brusselse Bond voor het Recht op Wonen » B.4.1. Les parties requérantes soulèvent une exception de non-opposabilité de la personnalité juridique au motif que l'a.s.b.l.

R.B.D.H./B.B.R.o.W. ne démontrerait pas qu'un registre des membres de l'association a été établi et déposé au greffe du tribunal de commerce, ni que les modifications apportées à la liste des administrateurs auraient été publiées. Elles contestent en outre la personnalité juridique même de la partie intervenante au motif qu'il n'apparaîtrait pas que les actes de nomination des administrateurs auraient été déposés au même greffe.

En ce qui concerne la décision d'intervenir, les parties requérantes font valoir que la composition du conseil d'administration serait irrégulière, que la décision d'intervenir dudit conseil ne serait signée par aucun des administrateurs, que la pièce devant faire apparaître cette décision n'est pas conforme à l'exigence de l'article 11 de la loi du 27 juin 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1921 pub. 19/08/2013 numac 2013000498 source service public federal interieur Loi sur les associations sans but lucratif, les associations internationales sans but lucratif et les fondations. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur les associations sans but lucratif, les associations internationales sans but lucratif et les fondations et, enfin, que la décision ne permettrait pas de déduire si l'intervention vise à soutenir ou à rejeter le recours des parties requérantes.

B.4.2. L'association intervenante a acquis la personnalité juridique par la publication de ses statuts et de l'identité des membres de son conseil d'administration aux annexes du Moniteur belge du 13 mai 1999, conformément à l'article 3 de la loi du 27 juin 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1921 pub. 19/08/2013 numac 2013000498 source service public federal interieur Loi sur les associations sans but lucratif, les associations internationales sans but lucratif et les fondations. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer, avant sa modification par la loi du 2 mai 2002. Il ne peut être porté atteinte à cette personnalité juridique par le non-respect de l'article 26novies, § 1er, alinéa 2, 2°, de la même loi, sur la base duquel les actes relatifs à la nomination des administrateurs doivent être déposés dans le dossier de l'association, tenu au greffe du tribunal de commerce, dès lors que cette disposition, en tant que condition requise pour acquérir la personnalité juridique, ne s'applique qu'aux associations qui souhaitent acquérir la personnalité juridique après le 3 juin 2003.

L'exception déduite du défaut de personnalité morale est rejetée.

B.4.3. L'article 26 de la loi du 27 juin 1921Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/06/1921 pub. 19/08/2013 numac 2013000498 source service public federal interieur Loi sur les associations sans but lucratif, les associations internationales sans but lucratif et les fondations. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer énonce que toute action intentée par une association n'ayant pas respecté les formalités prévues aux articles 10, 23 et 26novies, § 1er, alinéa 2, 5°, est suspendue. L'action n'est irrecevable que si l'association ne satisfait pas à ses obligations dans le délai fixé par le juge.

L'obligation de déposer une copie du registre des membres et les modifications apportées à la liste des administrateurs dans le dossier de l'association au greffe du tribunal de commerce (article 26novies, § 1er, alinéa 2, 3° et 6°) ne fait pas partie des formalités visées à l'article 26, ni davantage l'obligation de mentionner la qualité d'a.s.b.l. sur toutes les pièces émanant de l'association (article 11). Au demeurant, la Cour constate que les a.s.b.l. qui ont acquis la personnalité juridique avant le 1er janvier 2004 ont le temps à titre de mesure transitoire jusqu'à la fin de l'année 2005 de respecter les nouvelles obligations (arrêté royal du 2 avril 2003, modifié par l'arrêté royal du 8 décembre 2004).

L'exception déduite de la non-opposabilité de la personnalité juridique est rejetée.

B.4.4. L'examen des pièces déposées par la partie intervenante ne permet pas non plus d'accueillir l'exception déduite du défaut de capacité d'ester en justice : le rapport du conseil d'administration du 30 avril 2004 constitue une preuve suffisante de la décision prise par l'organe compétent régulièrement constitué de l'association d'intervenir devant la Cour. Il n'est du reste pas requis que la décision d'intervenir dans l'instance indique l'objet de cette intervention.

B.5. La demande d'intervention est recevable.

En ce qui concerne la recevabilité des deux premiers moyens B.6.1. Dans son mémoire en intervention, le Gouvernement flamand prétend que les premier et deuxième moyens soulevés par les parties requérantes seraient irrecevables à défaut de précision.

B.6.2. Pour satisfaire aux exigences de l'article 6 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, les moyens de la requête doivent faire connaître, parmi les règles dont la Cour garantit le respect, celles qui seraient violées ainsi que les dispositions qui violeraient ces règles et exposer en quoi ces règles auraient été transgressées par ces dispositions.

Contrairement à ce que soutient le Gouvernement flamand, les parties requérantes indiquent bien les dispositions constitutionnelles auxquelles il aurait à leur estime été porté atteinte, les dispositions de l'ordonnance qui contreviendraient auxdites dispositions et en quoi celles-ci seraient violées.

B.6.3. L'exception est rejetée.

Quant au fond En ce qui concerne la compétence de la Région de Bruxelles-Capitale B.7.1. Les parties requérantes prennent un premier moyen de la violation par les articles 18 à 23 de l'ordonnance attaquée, des articles 10, 11, 16, 17, 35 et 39 de la Constitution, lus isolément ou en combinaison avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, des articles 6, § 1er, IV, 10 et 79, § 1er, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles et de l'article 4 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises.

B.7.2. Elles prétendent, dans une deuxième branche du premier moyen, que si le droit de gestion publique prévu par l'ordonnance litigieuse ne devait pas s'assimiler à une expropriation de fait, l'on serait forcé d'admettre que ce droit de gestion entraîne une redéfinition du droit de propriété étrangère à la conception de la propriété exprimée à l'article 544 du Code civil, ce qui relève, en principe, de la compétence du législateur fédéral.

B.8. Les articles 18 à 22 de l' ordonnance du 17 juillet 2003Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 17/07/2003 pub. 09/09/2003 numac 2003031392 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance portant le Code bruxellois du Logement fermer portant le Code bruxellois du logement disposent : « Article 18 § 1er. Tout opérateur immobilier public dispose d'un droit de gestion publique des logements suivants : 1° les logements inoccupés;2° les logements visés aux articles 9 et 10 qui n 'ont pas fait l'objet de travaux de rénovation ou d'amélioration ou dont la situation n'a pas été régularisée conformément aux dispositions de l'article 13, alors que le logement n'est pas occupé par le propriétaire ou le titulaire du droit réel lui-même;3° les logements déclarés inhabitables, conformément à l'article 135 de la nouvelle loi communale. § 2. Sont présumés inoccupés, les logements : 1° qui ne sont pas garnis du mobilier indispensable à leur affectation pendant une période d'au moins douze mois consécutifs, à moins que le propriétaire ou le titulaire de droits réels puisse justifier cet état de choses par sa situation ou celle de son locataire;2° ou pour lesquels la consommation d'eau ou d'électricité constatée pendant une période d'au moins douze mois consécutifs est inférieure à la consommation minimale fixée par le Gouvernement, à moins que le propriétaire ou le titulaire de droits réels puisse justifier cet état de choses par sa situation ou celle de son locataire. § 3. Par dérogation au § 2, n'est pas présumé inoccupé le logement qui fait l'objet d'une domiciliation de la personne physique propriétaire ou titulaire de droits réels.

Article 19 Dans les cas visés à l'article 18, § 1er, l'opérateur immobilier public propose, par lettre recommandée, au titulaire d'un droit réel sur l'habitation concernée de gérer son bien en vue de le mettre en location, le cas échéant, après avoir exécuté les travaux requis pour le rendre compatible avec les exigences de sécurité, de salubrité et d'équipement visées à l'article 4.

Sans préjudice de l'article 135 de la nouvelle loi communale, les agents inspecteurs du Service d'inspection régionale ou le fonctionnaire délégué par le Gouvernement peuvent visiter l'habitation entre 8 h et 20 h, à la demande d'un opérateur immobilier public et, le cas échéant, accompagnés d'un représentant de ce dernier, pour déterminer les travaux éventuels visés au premier alinéa.

La proposition de l'opérateur immobilier public visée au premier alinéa précise les conditions de la gestion fixées dans un contrat-type déterminé par le Gouvernement. Le contrat-type proposé au titulaire de droits réels devra au moins comprendre les éléments suivants : 1° le loyer proposé par l'opérateur immobilier public, calculé selon des critères arrêtés par le Gouvernement;2° la nature des travaux éventuels à réaliser par l'opérateur immobilier public;3° la rémunération de l'opérateur immobilier public destinée à rembourser le coût des travaux nécessaires à la mise en location;4° le contenu et la périodicité des fiches de calcul remises au titulaire de droits réels.Ces fiches de calcul précisent au moins les éléments visés au 2°, les frais d'entretien et de réparation et tous autres frais inhérents à la gestion locative, ainsi que le solde des dépenses encourues qui reste à rembourser par le propriétaire, déduction faite de la part des loyers affectée à leur remboursement; 5° les modalités de transmission des baux conclus par l'opérateur immobilier public au nom et pour compte du titulaire de droits réels, ainsi que l'information, par l'opérateur immobilier, de toute modification, transmission ou dissolution des contrats conclus au nom et pour compte de l'intéressé;6° les obligations respectives de l'opérateur immobilier public et du titulaire de droits réels. Le titulaire de droits réels dispose de deux mois pour faire part de sa réponse.

Article 20 En cas de refus du titulaire de droits réels sans motif sérieux, ou à défaut de réponse de sa part dans le délai prévu à l'article 19, l'opérateur immobilier public met le titulaire de droits réels en demeure de louer son bien après avoir, le cas échéant, réalisé les travaux dans un délai qu'il fixe, avec un minimum de deux mois.

La mise en demeure visée à l'alinéa précédent indique expressément l'intention de l'opérateur immobilier public d'exercer son droit de gestion publique à l'expiration de ce délai, ainsi que, le cas échéant, de réaliser les travaux requis.

Les dispositions du présent chapitre sont intégralement reproduites au verso de la mise en demeure visée au présent article.

A l'expiration du délai visé au premier alinéa, le droit de gestion publique peut être mis en oeuvre par un opérateur immobilier public, comme prescrit à l'article 21.

Article 21 § 1er. L'opérateur immobilier public informe par lettre recommandée le titulaire de droits réels de la mise en oeuvre du droit de gestion publique par l'expiration des délais visés aux articles 19 et 20. II en informe également le Service d'inspection régionale en indiquant le bien en faisant l'objet. § 2. A dater de la notification visée au § 1er, l'opérateur immobilier public dispose, pendant neuf ans maximum à dater de la remise en état du bien, de la compétence de gérer provisoirement l'habitation, en ce compris la faculté de louer le bien aux conditions de revenus et de propriété pour l'accès au logement social fixées par le Gouvernement en application de l'ordonnance du 9 septembre 1993 portant modification du Code du Logement pour la Région de Bruxelles-Capitale et relative au secteur du logement social, et d'effectuer les travaux nécessaires en vue de cette location.

Les logements gérés à la suite de la mise en oeuvre du droit de gestion publique visé à l'article 18, § 1er, doivent être prioritairement proposés aux locataires amenés à quitter une habitation ne répondant pas aux normes de sécurité, de salubrité et d'équipement visées à l'article 4. A cet effet, le Service d'inspection régionale dresse un relevé desdits logements et le tient à la disposition des autorités publiques concernées.

Les baux conclus par l'opérateur immobilier public sont opposables de plein droit au titulaire de droits réels. § 3. Le titulaire de droits réels perçoit, à dater de la conclusion du bail visé au § 2, le loyer prescrit, après déduction de tous les frais engendrés, directement ou indirectement, par la gestion publique. § 4. L'opérateur immobilier public agit en lieu et place du titulaire de droits réels pour solliciter, le cas échéant, l'obtention de l'attestation de conformité, conformément à l'article 7. § 5. Au cours de la gestion publique, l'opérateur immobilier public informe le titulaire de droits réels des actes essentiels de cette gestion. Il lui remet au minimum un rapport annuel. Le relevé des frais engendrés directement ou indirectement par la gestion publique sera envoyé semestriellement au propriétaire ou au titulaire de droits réels.

Article 22 § 1er. A tout moment, par l'envoi d'un courrier recommandé à l'opérateur immobilier public en charge de la gestion publique, le titulaire de droits réels peut demander de reprendre la gestion de son habitation à la condition d'avoir remboursé au préalable le solde de l'ensemble des frais exposés, directement ou indirectement, par l'opérateur immobilier public. Cette reprise de gestion ne peut intervenir au plus tôt que dans un délai de soixante jours à dater de l'envoi du courrier recommandé. § 2. En cas de reprise du bien par le titulaire de droits réels, celui-ci est subrogé de plein droit dans les droits et obligations de l'opérateur immobilier public en ce qui concerne la relation contractuelle avec le locataire. § 3. Sans préjudice des articles 1372 et suivants du Code civil, lorsqu'au terme du droit de gestion, l'habitation est à nouveau mise en location par le titulaire de droits réels, l'habitation est offerte par priorité au locataire en place, moyennant un loyer qui ne peut dépasser de plus de la moitié le dernier loyer payé et calculé conformément aux articles 19 ou 20 ».

B.9. L'examen de la conformité d'une disposition litigieuse aux règles de compétence doit précéder l'examen de sa compatibilité avec les dispositions du titre II de la Constitution et les articles 170, 172 et 191 de celle-ci.

B.10.1. Le Constituant et le législateur spécial, dans la mesure où ils ne disposent pas autrement, ont attribué aux communautés et aux régions toute la compétence d'édicter les règles propres aux matières qui leur ont été transférées. Sauf dispositions contraires, le législateur spécial a transféré aux communautés et aux régions l'ensemble de la politique relative aux matières qu'il a attribuées.

B.10.2. La Région de Bruxelles-Capitale est compétente pour le logement en vertu de l'article 6, § 1er, IV, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, combiné avec l'article 4 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises.

Dans l'exercice de cette compétence, les régions peuvent apporter des limitations au droit de propriété.

B.10.3. La mise en oeuvre d'une politique du logement implique que des limites soient apportées à l'exercice du droit de propriété des titulaires de droits réels sur les immeubles concernés par les mesures destinées à atteindre l'objectif fixé. Le droit de gestion publique instauré par les dispositions attaquées concerne les seuls logements inoccupés, ceux qui n'ont pas fait l'objet de travaux de rénovation et ceux qui ont été déclarés inhabitables, conformément à l'article 135 de la Nouvelle loi communale. Il n'implique pas de modification du régime relatif au droit de propriété tel qu'il est défini par le Code civil.

B.11. Le premier moyen, en sa deuxième branche, ne peut être accueilli.

B.12. Dans un deuxième moyen, soulevé à titre subsidiaire, les parties requérantes prétendent que l'ordonnance attaquée violerait les articles 35 et 39 de la Constitution, les articles 6, § 1er, IV, et 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles ainsi que l'article 4 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises, en mettant en place un régime qui modifie substantiellement la définition et le principe même de la gestion d'affaires visée aux articles 1372 et suivants du Code civil.

B.13.1. En absence d'exécution de l'article 35 de la Constitution, la Cour ne peut opérer aucun contrôle au regard de cette disposition constitutionnelle.

B.13.2. Les dispositions attaquées ne touchent pas au droit commun de la gestion d'affaires. Elles visent seulement à organiser un régime particulier de gestion pour certains immeubles afin d'atteindre les objectifs fixés en matière de politique du logement. Il s'ensuit que le législateur ordonnanciel est resté dans les limites des compétences qu'il tient de l'article 6, § 1er, IV, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, combiné avec l'article 4 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises.

B.14. Le deuxième moyen ne peut être accueilli.

En ce qui concerne les autres moyens B.15. Dans le premier moyen de leur requête, les parties requérantes allèguent la violation, par les dispositions attaquées, des articles 10, 11, 16, 17, 35 et 39 de la Constitution, lus isolément ou en combinaison avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, des articles 6, § 1er, IV, 10 et 79, § 1er, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles ainsi que de l'article 4 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises.

Il est soutenu, dans une première branche du premier moyen, que les disposions incriminées opèrent une expropriation de fait en privant le propriétaire du droit d'usage, de jouissance et de disposition de son bien pour une période pouvant aller au-delà de neuf années, sans respecter les conditions constitutionnelles et légales de l'expropriation dès lors qu'aucun recours juridictionnel ne serait organisé ni aucun régime de juste et préalable indemnité.

Il est également soutenu à titre subsidiaire, dans la troisième branche du premier moyen, que si la Cour devait considérer que le système litigieux ne constitue pas une expropriation de fait, il faudrait à tout le moins l'analyser comme une réglementation de l'usage des biens particulièrement stricte et excessivement attentatoire au droit au respect de la propriété. Les parties requérantes ajoutent qu'un tel droit de gestion de plus de neuf ans constituerait un acte de disposition et s'apparenterait ainsi à une servitude d'utilité publique en principe soumise à transcription.

B.16.1. Si le droit de gestion publique instauré par l'ordonnance attaquée prévoit de nombreuses limitations au droit de propriété sur les immeubles qu'elle vise, il n'implique pas pour autant un transfert obligatoire de propriété ni une confiscation générale des biens, qui relèvent du champ d'application des articles 16 et 17 de la Constitution.

B.16.2. Le premier moyen, en sa première branche, ne peut être accueilli.

B.17.1. Bien que les propriétaires concernés ne soient pas expropriés, les dispositions constitutionnelles et conventionnelles invoquées s'opposent à ce que l'autorité publique impose à une catégorie déterminée de personnes des charges qui excèdent celles qu'un particulier peut devoir supporter dans l'intérêt général.

B.17.2. En adoptant les dispositions attaquées, le législateur ordonnanciel entendait concrétiser le droit au logement en stimulant efficacement l'offre de logements sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale (Doc., Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, 2002-2003, A-416/1, pp. 1, 5 et 11). Un tel objectif est conforme à l'intérêt général. Eu égard à l'article 23 de la Constitution, cet objectif s'impose au législateur compétent.

B.17.3. La Cour doit encore examiner si les mesures contestées n'entraînent pas d'effets disproportionnés, en particulier en ce qu'elles contiennent une limitation du droit de propriété.

B.17.4. Il y a lieu de considérer que les mesures contestées règlent « l'usage des biens conformément à l'intérêt général », au sens de l'alinéa 2 de l'article 1er du Premier Protocole additionnel. Ces mesures ne seraient discriminatoires que si elles affectaient de manière excessive les droits des propriétaires concernés.

B.17.5. Les dispositions attaquées n'entraînent pas automatiquement une limitation au droit de propriété.

L'opérateur immobilier public propose, par lettre recommandée, au titulaire d'un droit réel sur l'habitation concernée de gérer son bien en vue de le mettre en location, le cas échéant, après avoir exécuté les travaux requis pour le rendre compatible avec les exigences de sécurité, de salubrité et d'équipement (article 19, alinéa 1er).

Le titulaire de droits réels dispose de deux mois pour faire part de sa réponse (article 19, dernier alinéa).

S'il ne répond pas dans ce délai ou s'il refuse sans motif sérieux, l'opérateur immobilier public met le titulaire de droits réels en demeure de louer son bien après avoir, le cas échéant, réalisé les travaux dans un délai qu'il fixe, avec un minimum de deux mois (article 20, alinéa 1er).

Ce n'est qu'à l'expiration de ce dernier délai que le droit de gestion publique peut être mis en oeuvre par un opérateur immobilier public (article 20, dernier alinéa).

B.17.6. Le droit de gestion publique ne peut être mis en oeuvre à l'égard de tout logement.

Un opérateur immobilier public ne dispose d'un droit de gestion publique que sur des logements inoccupés, des logements déclarés inhabitables et des logements pour lesquels le certificat de conformité ou l'attestation de conformité ont été refusés et qui n'ont pas été régularisés conformément aux exigences de sécurité, de salubrité et d'équipement, sauf lorsque le propriétaire les occupe lui-même (article 18, § 1er).

Les logements sont présumés inoccupés lorsqu'ils n'ont pas été garnis du mobilier indispensable à leur affectation pendant une période d'au moins douze mois consécutifs ou lorsque pendant la même période il n'a pas été constaté de consommation minimale d'eau ou d'électricité. La présomption d'inoccupation peut toutefois être renversée si le propriétaire ou le titulaire de droits réels peut justifier cet état de choses par sa situation ou celle de son locataire (article 18, § 2) ou s'il est domicilié dans l'immeuble en tant que personne physique (article 18, § 3).

Les travaux préparatoires de l'ordonnance précisent, à cet égard, que ce que le Code vise, ce ne sont pas les inoccupations « intellectuelles » (inoccupations pour raisons professionnelles, pour voyage à l'étranger, etc.) ou « accidentelles » (personnes âgées en maison de repos etc.). Il s'agit uniquement de l'inoccupation spéculative (Doc., Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, 2002-2003, A-416/2, p. 135).

B.17.7. L'opérateur immobilier public est compétent pendant neuf ans au maximum à dater de la remise en état du logement pour sa gestion provisoire (article 21, § 2).

Le propriétaire ou le titulaire de droits réels perçoit le produit de la location, toutefois après déduction de tous les frais engendrés directement ou indirectement par la gestion publique (article 21, § 3). Chaque semestre il reçoit un relevé des frais engendrés directement ou indirectement par la gestion publique (article 21, § 5).

En ce qui concerne le montant du loyer, le Gouvernement est chargé de déterminer une grille de loyer maximum, compte tenu de la situation du bien et de la situation des occupants (Doc., Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, 2002-2003, A-416/2, p. 144).

Quant à l'affirmation des parties requérantes que ce loyer pourrait être symbolique, la Cour constate que la mesure manquerait son objectif social si le législateur venait à fixer des montants exorbitants pour les locataires sociaux.

La circonstance que le gestionnaire public peut, sur cette somme, récupérer les investissements consentis ne rend pas non plus la mesure disproportionnée dès lors qu'au terme des neuf années prévues pour le droit de gestion, le propriétaire peut retrouver un bien revalorisé par les travaux de réhabilitation entrepris par l'opérateur. Il ne pourrait en outre être admis que celui-ci assume quotidiennement la charge de cette gestion sans récupérer les frais qu'elle engendre.

B.17.8. Les titulaires de droits réels sur les immeubles visés par l'ordonnance ne sont pas privés de tout contrôle juridictionnel à l'égard des actes posés par l'opérateur immobilier public. Ils peuvent dans leurs relations avec les opérateurs immobiliers publics faire usage de tous les recours juridictionnels de droit commun. Par ailleurs, un recours en annulation et une demande de suspension peuvent être introduits devant le Conseil d'Etat par le titulaire de droits réels. Le législateur ordonnanciel a également indiqué qu'il n'y aurait pas de problèmes juridiques « si on [reprenait] les critères objectifs définis par [ledit] Code » et qu'en tout état de cause, « il [pouvait] toujours y avoir un recours devant le juge de paix, pour faire état de la bonne foi du propriétaire » (Doc., Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, 2002-2003, A-416/2, pp. 135 et 141).

Il ressort de la jurisprudence du Conseil d'Etat que celui-ci procède à un contrôle juridictionnel approfondi tant au regard de la loi qu'au regard des principes généraux du droit. Le Conseil d'Etat examine à cet égard si la décision de l'autorité soumise à son contrôle est fondée en fait et si elle n'est pas manifestement disproportionnée par rapport au fait établi. Certes, le Conseil d'Etat ne peut substituer sa décision à celle de l'autorité concernée, mais lorsqu'il annule cette dernière décision, l'autorité est tenue de se conformer à l'arrêt du Conseil d'Etat.

B.17.9. Enfin, le propriétaire ou le titulaire de droits réels sur un immeuble effectivement soumis à un droit de gestion publique peut à tout moment demander à l'opérateur immobilier public de reprendre la gestion de son habitation après avoir remboursé le solde des frais exposés directement ou indirectement par ledit opérateur (article 22, § 1er). Contrairement à ce que soutiennent les parties requérantes, l'opérateur immobilier public ne peut s'opposer à cette reprise.

B.17.10. Eu égard à ce qui précède et compte tenu du poids particulier que le Constituant a lui-même accordé au droit à un logement décent, les dispositions attaquées, en raison de leur nature et des garanties offertes, ne portent pas atteinte de manière disproportionnée aux droits des propriétaires concernés.

B.17.11. Dès lors que les restrictions que les dispositions attaquées apportent au droit de propriété ne sont pas contraires aux articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, le choix de soumettre de la même manière à ces dispositions les logements inoccupés qui sont la propriété d'un particulier et les logements inoccupés qui sont la propriété d'une autorité publique - et dès lors de ne pas viser d'abord ces derniers logements - relève du pouvoir d'appréciation du législateur ordonnanciel et ne peut porter atteinte au constat de constitutionnalité.

B.18. Le premier moyen en sa troisième branche ne peut être accueilli.

B.19.1. Dans une quatrième branche du premier moyen, les parties requérantes reprochent aux dispositions attaquées de créer une différence de traitement discriminatoire entre les propriétaires d'immeubles visés par ces dispositions et ceux qui sont concernés par le régime de réquisition organisé par l'article 134bis de la Nouvelle loi communale, dans la mesure où les premiers ne bénéficieraient pas de garanties équivalentes à celles offertes aux seconds.

Les parties requérantes se plaignent également du fait que l'ordonnance litigieuse traite de manière identique les propriétaires d'immeubles insalubres et les propriétaires d'immeubles entretenus mais inoccupés, d'une part, et, d'autre part, les propriétaires d'immeubles entretenus qui sont domiciliés à l'étranger ou en dehors de la Région de Bruxelles-Capitale et ceux qui sont domiciliés dans cette Région.

B.19.2. Sans que la situation des propriétaires soumis au régime de réquisition visé par l'article 134bis de la Nouvelle loi communale inséré par l'article 27 de la loi du 12 janvier 1993Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/01/1993 pub. 07/04/2009 numac 2009000212 source service public federal interieur Loi concernant un droit d'action en matière de protection de l'environnement. - Traduction allemande fermer doive être comparée minutieusement à celle des propriétaires qui sont soumis au droit de gestion publique prévu par l'ordonnance attaquée, la différence en matière de garanties dont ils bénéficient s'explique par l'exercice des compétences respectives de l'autorité fédérale et de la Région de Bruxelles-Capitale dans une matière différente.

B.19.3. En ce qui concerne l'identité de traitement entre les propriétaires de logements insalubres et les propriétaires de logements entretenus, eu égard à la politique de stimulation de l'offre de logements que le législateur ordonnanciel a entendu poursuivre en vue de garantir à tous l'accès à un logement décent, il est raisonnablement justifié de prévoir des règles identiques tant pour les logements inoccupés mais en bon état qu'à l'égard de ceux pour lesquels des travaux de réhabilitation doivent être réalisés.

B.19.4. Enfin, en ce qui concerne le sort réservé aux propriétaires domiciliés à l'étranger et en dehors de la Région de Bruxelles-Capitale, d'une part, et celui réservé aux propriétaires domiciliés dans la Région de Bruxelles-Capitale, d'autre part, il y a lieu de relever que l'article 18, § 3, de l'ordonnance bruxelloise déroge, d'une manière générale, au paragraphe 2 du même article en prévoyant que n'est pas présumé inoccupé le logement qui fait l'objet d'une domiciliation de la personne physique propriétaire ou titulaire de droits réels.

En revanche, le propriétaire domicilié à l'étranger ou en dehors de la Région de Bruxelles-Capitale voit une présomption d'inoccupation établie à sa charge dans les deux cas visés à l'article 18, § 2, présomption à laquelle il peut toutefois faire échec par toute justification relative à sa situation ou à celle de son locataire.

B.20. Le premier moyen, en sa quatrième branche, ne peut être accueilli.

B.21. Les parties requérantes prennent un troisième moyen, à titre subsidiaire, de la violation de l'article 22 et des articles 10 et 11 de la Constitution combinés avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce que l'article 18 de l'ordonnance litigieuse recourt à des présomptions qui renvoient à des réalités effectives, caractéristiques de la vie quotidienne, et qui, pour être vérifiées, impliqueraient une ingérence de l'autorité publique dans le droit au respect de la vie privée et du domicile.

B.22.1. L'article 18, § 2, dispose que les logements sont présumés inoccupés lorsqu'ils ne sont pas garnis du mobilier indispensable à leur affectation pendant une période d'au moins douze mois consécutifs ou lorsque pendant la même période il n'a pas été constaté de consommation minimale d'eau et d'électricité, sauf si le propriétaire ou le titulaire d'un droit réel peut justifier cet état de choses par sa situation ou celle de son locataire.

Sur la base de l'article 13, § 1er, les agents-inspecteurs du service d'inspection régionale ou le fonctionnaire délégué du Gouvernement peuvent visiter le logement entre 8 et 20 heures pour constater ou contrôler la conformité des lieux aux exigences de sécurité, de salubrité et d'équipement. Cette visite ne peut se faire qu'après avertissement préalable du bailleur et du locataire par lettre recommandée.

B.22.2. Le droit au respect de la vie privée et familiale a pour objet essentiel de protéger les personnes contre les immixtions dans leur intimité, leur vie familiale, leur domicile ou leur correspondance. La proposition qui a précédé l'adoption de l'article 22 de la Constitution insistait sur « la protection de la personne, la reconnaissance de son identité, l'importance de son épanouissement et celui de sa famille [...] » et elle soulignait la nécessité de protéger la vie privée et familiale « des risques d'ingérence que peuvent constituer, notamment par le biais de la modernisation constante des techniques de l'information, les mesures d'investigation, d'enquête et de contrôle menées par les pouvoirs publics et organismes privés, dans l'accomplissement de leurs fonctions ou de leurs activités » (Doc. parl., Sénat, 1991-1992, n° 100-4/2°, p. 3).

Il ressort en outre des travaux préparatoires de l'article 22 de la Constitution que le Constituant a entendu chercher à mettre le plus possible la proposition en concordance « avec l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme [...], afin d'éviter toute contestation sur le contenu respectif de l'article de la Constitution et de l'article 8 de la [Convention] » (Doc. parl., Chambre, 1993-1994, n° 997/5, p. 2).

Les droits que garantissent les dispositions constitutionnelle et conventionnelle précitées ne sont toutefois pas absolus. Bien que l'article 22 de la Constitution reconnaisse à chacun le droit au respect de sa vie privée et familiale, cette disposition ajoute en effet immédiatement : « sauf dans les cas et conditions fixés par la loi ». L'article 8.2 de la Convention précitée dispose : « Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ».

B.22.3. A supposer que la disposition attaquée puisse constituer une ingérence dans le droit au respect de la vie privée, de la vie familiale et du domicile, le législateur ordonnanciel a pu raisonnablement considérer que la mesure est nécessaire pour atteindre l'objectif légitime poursuivi.

Il peut, en effet, se justifier qu'afin de garantir à chacun le droit d'accès à un logement décent consacré par l'article 23 de la Constitution, le législateur ordonnanciel autorise les pouvoirs publics à se renseigner sur l'occupation effective d'un immeuble pour lequel tout laisse à penser que celui-ci pourrait être inoccupé. Une telle mesure ne peut être considérée comme une ingérence disproportionnée dans le droit au respect de la vie privée, de la vie familiale et du domicile des personnes concernées.

B.23. Le troisième moyen ne peut être accueilli.

Par ces motifs, la Cour rejette le recours.

Ainsi prononcé en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 20 avril 2005, par le juge P. Martens, en remplacement du président M. Melchior, légitimement empêché d'assister au prononcé du présent arrêt.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président f.f., P. Martens.

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