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Décision Du Conseil De La Concurrence
publié le 09 février 2006

Conseil de la concurrence. - Décision n° 2005-D/V-54 du 16 décembre 2005 Affaire CONC-C/C-03/050 : Rossel & Cie - De Persgroep - Editeco Vu le procès-verbal de la séance du vendredi 9 décembre 2005; Vu la requête en récusation déposée à l Vu l'ordonnance du 12 décembre 2005 du président du Conseil de la concurrence qui désigne un magist(...)

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SERVICE PUBLIC FEDERAL ECONOMIE, P.M.E., CLASSES MOYENNES ET ENERGIE


Conseil de la concurrence. - Décision n° 2005-D/V-54 du 16 décembre 2005 Affaire CONC-C/C-03/050 : Rossel & Cie - De Persgroep - Editeco Vu le procès-verbal de la séance du vendredi 9 décembre 2005;

Vu la requête en récusation déposée à la séance du 9 décembre 2005 par Maître Mischaël Modrikamen au nom de la société IPM établie à 1000 Bruxelles, Boulevard Jacqmain, 127;

Vu l'ordonnance du 12 décembre 2005 du président du Conseil de la concurrence qui désigne un magistrat, membre du Conseil de la concurrence en vue de composer une chambre chargée de statuer sur la demande en récusation d'IPM en rapport avec l'affaire CONC-C/C-03/050 (Groupe Rossel-De Persgroep-Editeco);

Vu l'ordonnance du 12 décembre 2005 composant la chambre devant connaître de la demande de récusation à l'audience du 14 décembre 2005 à 14 heures;

Vu la note d'observations écrites du 11 décembre 2005 des membres de la chambre contre qui la récusation est demandée en réponse aux moyens de récusation de la requérante;

Vu la télécopie du 12 décembre 2005 informant les membres de la chambre, les parties notifiantes, la requérante ainsi que les rapporteurs Patrick Marchand et Toon Musschoot de la possibilité de les entendre à l'audience du 14 décembre 2005 à 14 heures;

Vu la lettre du 14 décembre 2005 des membres de la chambre contre qui la récusation est demandée par laquelle ils font savoir qu'ils souhaitent être entendus à l'audience du 14 décembre en l'absence du rapporteur, des parties notifiantes de la concentration CONC-C/C-03/050, des tiers et de leurs conseils;

Entendu à l'audience du 14 décembre 2005 : Confidentiel qui s'en réfèrent à leur note d'observations écrites, le rapporteur Toon Musschoot, Maître Mischaël Modrikamen, conseil de la requérante, Maîtres Pierre-Manuel Louis et Johan Ysewyn, conseils des parties notifiantes de l'affaire CONC-C/C-03/050; 1. La demande soumise au Conseil La S.A. de droit belge IPM (ci-après IPM) a déposé lors de l'audience du 9 décembre 2005 du Conseil de la concurrence consacrée à l'examen du dossier de concentration répertorié sous le n° CONC-C/C- 03/050 une requête en récusation à l'égard des membres de la chambre du Conseil composée de Confidentiel.

IPM demande au Conseil d'ordonner aux membres précités de s'abstenir de statuer dans cette affaire et de composer une nouvelle chambre.

La demande se fonde sur l'article 18, § 2, de la loi sur la protection de la concurrence économique (ci-après LPCE) qui dispose que « Les membres du Conseil de la concurrence peuvent être récusés pour les causes énoncées à l'article 828 du Code judiciaire ».

La demande en récusation vise la disposition de l'article 828,9° du Code judiciaire qui stipule qu'un juge peut être récusé s'il a précédemment connu du différend comme juge ou arbitre. 2. Les antécédents Une opération de concentration a été notifiée au Conseil de la concurrence le 26 septembre 2003 sous la référence CONC-C/C-03/050. Le Conseil a approuvé cette opération de concentration, en l'assortissant de conditions, par une décision du 26 janvier 2004.

La Cour d'Appel de Bruxelles a annulé le 15 septembre 2005 la décision du Conseil, sans toutefois déclarer l'opération inadmissible comme ce fût le cas dans une autre procédure (cfr. arrêts des 25 juin 1997 et 15 janvier 1998 dans le cadre de l'acquisition de Barry par Callebaut, publiés respectivement au Moniteur Belge du 4 juillet 1997, p. 17947 et du 12 février 1998, p. 4095).

Par courrier du 19 octobre 2005, les représentants communs des parties notifiantes à la concentration CONC-C/C-03/050 ont informé le Conseil de l'acquisition par une des parties notifiantes d'un contrôle exclusif sur l'autre.

A la suite de cette opération, le représentant commun des parties notifiantes à cette concentration a sollicité le retrait de la notification déposée le 26 septembre 2003.

L'examen du retrait de cette notification a été fixé à l'audience du Conseil du 9 décembre 2005. La chambre du Conseil appelée à statuer sur cette demande est identique à celle qui a prononcé la décision n° 2005-C/C- 47 du 26 septembre 2005.

IPM considère que celle-ci concerne la même question litigieuse, à savoir l'admissibilité de la concentration entre les journaux De Tijd et L'Echo et qu'il y a de ce fait motif à récusation en application de l'article 828,9° du Code judiciaire.

Les membres contre qui la récusation est demandée ont fait valoir leurs observations par une note datée du 11 décembre 2005.

Ils y exposent que la requête est irrecevable au double motif de son dépôt tardif au regard de l'article 833 du Code judiciaire et de l'inobservation des dispositions de l'article 835 du même code qui prévoit le dépôt au greffe (en l'espèce au secrétariat, vu l'absence de greffe au sein du Conseil de la concurrence) et non à l'audience.

Sur le fond, les mêmes membres considèrent que la question posée à la chambre dont les membres sont récusés, à savoir si le Conseil de la concurrence peut ou doit donner acte du retrait de la notification du 26 septembre 2003 dans le cadre de la concentration CONC-C/C-03/050 est différente de celle soumise à la chambre du Conseil qui a conduit à la décision du 26 septembre 2005.

Lors de l'audience du 14 décembre 2005, les membres Confidentiel ont demandé à être entendu, en application de l'article 18, § 3bis, de la LPCE. Ils ont réitéré les observations contenues dans la note du 11 décembre 2005.

Sur la question de la recevabilité, IPM a contesté la tardiveté au motif qu'il a manifesté son intention de déposer une requête en récusation avant de commencer sa plaidoirie et précisé qu'il n'a pu faire de dépôt au greffe compte tenu de l'absence de greffe au Conseil de la concurrence.

IPM considère en outre qu'il a qualité et intérêt à agir, vu qu'il était présent aux procédures tant devant le Conseil de la concurrence que devant la Cour d'Appel. 3. La position du Conseil La possibilité de récuser un ou des membre(s) du Conseil de la concurrence est consacré par l'article 18, § 2, de la LPCE. En vertu de cette disposition, le ou les membre(s) peut (ou peuvent) être récusé(s) pour les causes énoncées à l'article 828 du Code judiciaire.

La récusation est le droit accordé par la loi à une partie de refuser d'être jugée par un des membres de la juridiction saisie de la cause.

Une requête déposée par une partie étrangère à la cause ne constitue pas une requête en récusation (Cass.- 2e chambre - 10 décembre 2003 - JT 2003 p. 883).

Par cet arrêt, la Cour de cassation fait explicitement référence à la qualité de partie dans le cadre du dépôt d'une requête en récusation.

Il en résulte que pour avoir qualité pour déposer utilement une requête en récusation, il faut être une partie à la cause.

La qualité est une des conditions de recevabilité de l'action. Il importe donc d'examiner si IPM est ou non partie à la cause.

La requête en récusation est déposée dans le cadre d'une opération de concentration.

Les opérations de concentration sont soumises à l'approbation préalable du Conseil de la concurrence qui constate si elles sont ou ne sont pas admissibles (article 10, § 1er LPCE).

Les concentrations qui font l'objet d'un accord doivent être notifiées par les intéressés agissant conjointement. Dans les autres cas, la concentration doit être présentée par l'intéressé qui a réalisé la concentration. Les parties peuvent notifier un projet d'accord à condition qu'elles déclarent explicitement qu'elles ont l'intention de conclure un accord qui ne diffère pas de manière significative du projet notifié en ce qui concerne tous les points pertinents du droit de la concurrence (article 12, 66 1er 2 LPCE).

Le chapitre 2 de la LPCE traite des pratiques de concurrence. La section première concerne les pratiques restrictives de concurrence et la section traite des concentrations.

Il existe une différence essentielle entre les procédures de concentration et les pratiques restrictives de concurrence.

En matière de pratiques restrictives de concurrence, il existe un litige et l'autorité de concurrence est appelée à examiner un différend. Tandis que pour les opérations de concentration, l'autorité de concurrence exerce un contrôle administratif de la régularité d'une transaction.

Comme exposé, les procédures de concentration sont initiées par une notification effectuées par les parties notifiantes, à savoir les entreprises qui envisagent la conclusion d'une transaction économique (les intéressés au sens de la loi).

Le rôle du Conseil de la concurrence est d'examiner cette transaction et de dire si elle est ou non admissible, le cas échéant sous condition.

Dans le cadre de l'instruction menée par le Service de la concurrence et dirigée par le Corps des rapporteurs, il est usage d'envoyer des questionnaires aux concurrents et tiers qui pourraient être intéressés par la concentration notifiée au Conseil de la concurrence.

Le législateur a eu soin de veiller à renforcer la transparence du contrôle des concentrations en diversifiant les sources d'informations et en permettant aux tiers intéressés de s'associer à la procédure de contrôle.

C'est ainsi que la loi permet à tous tiers intéressés de déposer des observations écrites et même d'être entendu devant le Conseil de la concurrence pour autant qu'ils justifient d'un intérêt suffisant et qu'ils en ont fait la demande par écrit. Elle offre encore la possibilité d'interjeter un recours devant la Cour d'appel de Bruxelles à toute personne justifiant d'un intérêt et ayant demandé au Conseil d'être entendue (article 43bis, § 2).

En l'espèce IPM a déposé des observations écrites et a été entendu devant le Conseil de la concurrence. C'est en qualité de tiers à la procédure qu'il a pu faire valoir ses droits. Ainsi il est suffisamment garanti que ses considérations exposées seront susceptibles, le cas échéant, d'être prises en compte par le Conseil de la concurrence, pour apprécier la régularité de l'opération de concentration au regard du droit de la concurrence, et déterminer, en particulier, si les engagements proposés par les parties concernées lui apparaissent suffisants à cette fin.

Il en résulte que la position procédurale des tiers, quand bien même ces tiers intéressés auraient participé activement à la procédure administrative de contrôle des concentrations, ne saurait être assimilée à celle des parties à la concentration.

Les tiers intéressés ne disposent donc pas de garanties identiques et de droits aussi étendus que ceux que la loi accorde aux parties notifiantes de la concentration. Cette différence de droits s'impose à l'impératif de célérité qui caractérise l'économie générale de la loi sur la protection de la concurrence économique et qui impose au Conseil de la concurrence de respecter des délais stricts pour l'adoption de la décision finale, faute de quoi l'opération de concentration est réputée admissible (1).

Ainsi, seules peuvent être considérées comme partie à ce contrôle les entreprises qui ont conclu la transaction (les parties notifiantes), voire la société cible.

Ceci résulte des dispositions de la LPCE, plus spécialement des sections 7bis, 8 et 9, lesquelles, en matière de concentration, établissent une distinction nette entre les parties et toute personne justifiant d'un intérêt et ayant demandé au Conseil d'être entendue.

Les décisions du Conseil (...) sont notifiées aux parties (...) et au Ministre et non à toute partie justifiant d'un intérêt (article 40bis, alinéa 1er).

L'article 41, § 2, alinéa 3, stipule que les décisions visées aux articles 33, § 2, et 34, § 1er, de la loi y compris les décisions et arrêts visés aux sections 5ter et 7(...) ainsi que les avis selon lesquels la concentration est censée, à défaut de décision, être autorisée sont publiés au moniteur belge et notifiés aux parties qui ont participé à la concentration.

Enfin, l'article 43bis, § 2, qui traite des recours, consacre la distinction entre les parties et ceux ou celles qui ne le sont pas en stipulant que les recours prévus à l'article 43 peuvent être introduits par : les parties en cause devant le Conseil le plaignant toute personne justifiant d'un intérêt et ayant demandé au Conseil d'être entendue.

IPM, qui se situe dans cette dernière catégorie, n'a donc pas la qualité de partie.

A défaut de qualité, sa requête doit en conséquence être déclarée irrecevable.

Par ces motifs, Le Conseil de la concurrence déclare la requête en récusation irrecevable, à défaut de qualité dans le chef de la requérante.

Ainsi décidé le 16 décembre 2005 par la chambre du Conseil de la concurrence constituée de Monsieur Jacques Schaar, président de chambre, de Mesdames Marie-Claude Grégoire et Dominique Smeets, et de Monsieur David Szafran, membres. (1) Voir mutatis mutandis arrêt du TPI-CE du 27 novembre 1997, http://curia.eu.int/, considérants n° 101 et 107.

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