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Arrêt
publié le 13 février 2006

Extrait de l'arrêt n° 199/2005 du 21 décembre 2005 Numéro du rôle : 3708 En cause : les questions préjudicielles relatives aux articles 65, 193, 196 et 197 du Code pénal et aux articles 21, 22, 23 et 24 du titre préliminaire du Code de proc La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges L. Lavrysen, A(...)

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COUR D'ARBITRAGE


Extrait de l'arrêt n° 199/2005 du 21 décembre 2005 Numéro du rôle : 3708 En cause : les questions préjudicielles relatives aux articles 65, 193, 196 et 197 du Code pénal et aux articles 21, 22, 23 et 24 du titre préliminaire du Code de procédure pénale, posées par le Tribunal correctionnel de Furnes.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Moerman, E. Derycke et J. Spreutels, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président A. Arts, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par jugement du 19 avril 2005 en cause du ministère public contre E. Beernaert et autres, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 20 mai 2005, le Tribunal correctionnel de Furnes a posé les questions préjudicielles suivantes : 1. « Les articles 65 du Code pénal et 21 du titre préliminaire du Code de procédure pénale violent-ils le principe fondamental de la sécurité juridique et le principe de légalité et, partant, les articles 12, alinéa 2, et 14 de la Constitution en corrélation avec l'article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques [lire : l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme] et avec les articles 33, 108 et 159 de la Constitution, s'ils sont interprétés en ce sens que, lorsque le juge décide que plusieurs infractions constituent une infraction collective, la prescription ne commence à courir qu'à compter du dernier fait qui, selon le juge du fond, a été commis avec la même intention, pour autant qu'entre aucun des faits le délai de prescription ne se soit totalement écoulé ? »;2. « Les articles 193, 196 et 197 du Code pénal et les articles 21, 22 et 23 du titre préliminaire du Code de procédure pénale violent-ils le principe constitutionnel de légalité formulé dans les articles 12 et 14 de la Constitution en tant qu'ils sont interprétés en ce sens que les infractions de faux en écritures et d'usage de faux sont considérées comme une seule infraction qui perdure tant que continue d'exister le but visé et réalisé par l'acte initial, bien qu'aucun acte positif nouveau ne soit posé par qui que ce soit, la prescription de l'action publique ne commençant à courir pour les deux infractions qu'à partir du moment où ce but n'existe plus ? »;3. « Les articles 21, 22, 23 et 24 du titre préliminaire du Code de procédure pénale (ancien) violent-ils le principe constitutionnel de légalité formulé dans les articles 12, alinéa 2, et 14 de la Constitution, en tant qu'ils règlent la prescription et en tant que le régime de prescription des infractions implique que la prescription est suspendue pendant la procédure de cassation à partir du jour du jugement attaqué jusqu'au jour de l'arrêt de la Cour de cassation déclarant le pourvoi recevable, et pour autant que le pourvoi en cassation ne soit pas manifestement irrecevable ? ». (...) III. En droit (...) Quant à la première question préjudicielle B.1.1. L'article 65 du Code pénal énonce : « Lorsqu'un même fait constitue plusieurs infractions ou lorsque différentes infractions soumises simultanément au même juge du fond constituent la manifestation successive et continue de la même intention délictueuse, la peine la plus forte sera seule prononcée.

Lorsque le juge du fond constate que des infractions ayant antérieurement fait l'objet d'une décision définitive et d'autres faits dont il est saisi et qui, à les supposer établis, sont antérieurs à ladite décision et constituent avec les premières la manifestation successive et continue de la même intention délictueuse, il tient compte, pour la fixation de la peine, des peines déjà prononcées. Si celles-ci lui paraissent suffire à une juste répression de l'ensemble des infractions, il se prononce sur la culpabilité et renvoie dans sa décision aux peines déjà prononcées. Le total des peines prononcées en application de cet article ne peut excéder le maximum de la peine la plus forte ».

B.1.2. L'article 21 du titre préliminaire du Code de procédure pénale énonce : « Sauf en ce qui concerne les infractions définies dans les articles 136bis, 136ter et 136quater du Code pénal, l'action publique sera prescrite après dix ans, cinq ans ou six mois à compter du jour où l'infraction a été commise, selon que cette infraction constitue un crime, un délit ou une contravention.

Le délai sera cependant de quinze ans si cette infraction est un crime qui ne peut être correctionnalisé en application de l'article 2 de la loi du 4 octobre 1867Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/10/1867 pub. 11/12/2009 numac 2009000816 source service public federal interieur Loi sur les circonstances atténuantes fermer sur les circonstances atténuantes.

Par ailleurs, le délai sera d'un an en cas de contraventionnalisation d'un délit ».

B.2.1. Lorsque, conformément à l'article 65 du Code pénal, différentes infractions constituent la manifestation successive et continue de la même intention délictueuse, la peine la plus forte sera seule prononcée. Il est question d'unité d'intention délictueuse dans le chef du prévenu lorsque les infractions qui lui sont imputées sont liées par une unité d'intention et de réalisation et forment, en ce sens, un seul fait, à savoir un comportement complexe.

B.2.2. Conformément à l'article 21 du titre préliminaire du Code de procédure pénale, le délai de prescription prend en principe cours à compter du jour où l'infraction a été commise. Selon la jurisprudence, si les faits ont été commis par unité d'intention, la prescription court à partir du dernier fait.

B.2.3. Devant le juge a quo, le premier prévenu fait valoir qu'en cas de délit collectif, la prescription, tant sur le plan pénal que sur le plan civil, n'est donc pas déterminée par la loi, mais par l'appréciation du juge qui doit décider quels faits constituent une infraction collective et à quelle date l'infraction prend fin, ce qui serait contraire au principe de la sécurité juridique et au principe de légalité en matière pénale.

B.3.1. L'article 12 de la Constitution énonce : « La liberté individuelle est garantie.

Nul ne peut être poursuivi que dans les cas prévus par la loi, et dans la forme qu'elle prescrit. [...] ».

B.3.2. L'article 14 de la Constitution énonce : « Nulle peine ne peut être établie ni appliquée qu'en vertu de la loi ».

B.3.3. L'article 7.1 de la Convention européenne des droits de l'homme dispose : « Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui, au moment où elle a été commise, ne constituait pas une infraction d'après le droit national ou international. De même il n'est infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où l'infraction a été commise ».

B.4.1. En vertu de l'article 1er, 2°, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, modifié par la loi spéciale du 9 mars 2003, la Cour est compétente pour contrôler des normes législatives au regard des articles du titre II « Des Belges et de leurs droits » et des articles 170, 172 et 191 de la Constitution.

B.4.2. Toutefois, lorsqu'une disposition conventionnelle liant la Belgique a une portée analogue à celle d'une des dispositions constitutionnelles dont le contrôle relève de la compétence de la Cour et dont la violation est alléguée, les garanties consacrées par cette disposition conventionnelle constituent un ensemble indissociable avec les garanties inscrites dans les dispositions constitutionnelles concernées.

Il s'ensuit que, lorsqu'est alléguée la violation d'une disposition du titre II ou des articles 170, 172 ou 191 de la Constitution, la Cour tient compte, dans son examen, des dispositions de droit international qui garantissent des droits ou libertés analogues.

B.5.1. En attribuant au pouvoir législatif la compétence, d'une part, de déterminer dans quels cas et sous quelle forme des poursuites pénales sont possibles et, d'autre part, d'adopter la loi en vertu de laquelle une peine peut être établie et appliquée, les articles 12, alinéa 2, et 14 de la Constitution garantissent à tout citoyen qu'aucun comportement ne sera punissable et qu'aucune peine ne sera infligée qu'en vertu de règles adoptées par une assemblée délibérante, démocratiquement élue.

B.5.2. Il découle également des articles 12 et 14 de la Constitution, ainsi que de l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et du principe de la sécurité juridique que la loi pénale doit être formulée en des termes qui permettent à chacun de savoir, au moment où il adopte un comportement, si celui-ci est ou non punissable. Ils exigent que le législateur indique, en des termes suffisamment précis, clairs et offrant la sécurité juridique, quels faits sont sanctionnés afin, d'une part, que celui qui commet les faits puisse évaluer préalablement, de manière satisfaisante, quelle sera la conséquence pénale de ses actes et afin, d'autre part, que ne soit pas laissé au juge un trop grand pouvoir d'appréciation. Les principes de légalité et de prévisibilité sont applicables à l'ensemble de la procédure pénale, en ce compris les stades de l'information et de l'instruction.

B.6.1. Le délit collectif implique que plusieurs infractions qui seraient punissables distinctement sont considérées, en raison de l'unité d'intention, comme constituant un seul comportement complexe, puni d'une seule peine.

B.6.2. Le fait que le juge répressif doive décider s'il y a unité d'intention et à quelle date le dernier fait a été commis n'empêche pas que chaque infraction distincte - et donc également l'infraction la plus grave qui déterminera finalement la peine - doive satisfaire aux exigences du principe de légalité en matière pénale.

La jurisprudence qui interprète l'article 65 du Code pénal et l'article 21 du titre préliminaire du Code de procédure pénale en ce sens qu'en cas de délit collectif, la prescription court à partir du dernier fait, ne modifie en rien la définition des diverses infractions et elle n'empêche pas les personnes intéressées d'évaluer les conséquences pénales de leur comportement. Toute personne sait qu'elle pourra être poursuivie et condamnée si elle a eu un comportement qui correspond aux éléments constitutifs d'une infraction réprimée par une loi pénale.

B.7.1. Selon la jurisprudence relative à la prescription en cas de délit collectif, le juge examine pour chaque fait, eu égard à son propre délai de prescription, si l'action publique n'était pas déjà prescrite au moment où le fait suivant a été commis. A partir du moment où l'action publique pour un fait déterminé est prescrite, elle ne peut revivre du fait que de nouveaux faits punissables ont par la suite été commis.

Si les diverses infractions sont d'une nature différente et sont soumises à des délais de prescription distincts, la prescription de chaque fait délictueux reste soumise au délai qui lui est applicable, même si les délais commencent à courir à partir du dernier fait.

B.7.2. La prescription de l'action publique repose sur des considérations d'intérêt général. L'imprévisibilité qui tient au fait qu'une infraction qui était punissable au moment où elle a été commise pourrait encore être sanctionnée de la même peine après l'échéance du délai de prescription escompté, parce que l'infraction s'inscrit dans le cadre d'une série de comportements délictueux qui, par suite de l'unité d'intention, sont considérés comme un seul délit collectif, n'est pas de nature à porter atteinte aux articles 12 et 14 de la Constitution ou à l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme.

B.8. La question préjudicielle appelle une réponse négative.

Quant à la deuxième question préjudicielle B.9.1. L'article 193 du Code pénal énonce : « Le faux commis en écritures, en informatique ou dans les dépêches télégraphiques, avec une intention frauduleuse ou à dessein de nuire, sera puni conformément aux articles suivants ».

B.9.2. L'article 196 du Code pénal énonce : « Seront punies de réclusion de cinq ans à dix ans les autres personnes qui auront commis un faux en écritures authentiques et publiques, et toutes personnes qui auront commis un faux en écritures de commerce, de banque ou en écritures privées, Soit par fausses signatures, Soit par contrefaçon ou altération d'écritures ou de signatures, Soit par fabrication de conventions, dispositions, obligations ou décharges ou par leur insertion après coup dans les actes, Soit par addition ou altération de clauses, de déclarations ou de faits que ces actes avaient pour objet de recevoir ou de constater ».

B.9.3. L'article 197 du Code pénal énonce : « Dans tous les cas exprimés dans la présente section, celui qui aura fait usage de l'acte faux ou de la pièce fausse sera puni comme s'il était l'auteur du faux ».

B.10.1. L'usage d'un faux se continue, même sans fait nouveau de l'auteur du faux et sans intervention itérative de sa part, tant que le but qu'il visait n'est pas atteint et tant que l'acte initial qui lui est reproché continue de produire, sans qu'il s'y oppose, l'effet utile qu'il en attendait (Cass. 23 décembre 1998, Pas. 1998, II, n° 534, et 6 mars 2001, Pas., 2001, I, n° 123). Conformément à l'article 21 du titre préliminaire du Code de procédure pénale, le délai de prescription ne commence à courir qu'à compter de la fin de la situation délictuelle.

B.10.2. Selon la jurisprudence, lorsque l'auteur d'un faux en écritures a aussi fait usage de la pièce fausse avec la même intention frauduleuse ou le même dessein de nuire, la prescription de l'action publique ne prend cours, tant à l'égard de la perpétration du faux qu'en ce qui concerne l'usage de la pièce fausse, qu'à partir du dernier fait d'usage (Cass., 29 octobre 1980, Pas., 1981, I, n° 129).

B.10.3. Le premier prévenu devant le juge a quo soutient que celui-ci n'a pas soumis à la Cour le régime de prescription de l'infraction continue mais la qualification de l'usage de faux comme infraction continue.

Les parties ne peuvent modifier le contenu de la question préjudicielle. Celle-ci a pour objet de demander à la Cour si les dispositions en cause violent le principe de légalité en matière pénale « en tant qu' sont interprétés en ce sens que les infractions de faux en écritures et usage de faux sont considérées comme une seule infraction qui perdure tant que continue d'exister le but visé et réalisé par l'acte initial, bien qu'aucun acte positif nouveau ne soit posé par qui que ce soit, la prescription de l'action publique ne commençant à courir pour les deux infractions qu'à partir du moment où ce but n'existe plus ».

B.11.1. Il relève du pouvoir d'appréciation du juge pénal de déterminer, sur la base des dispositions pénales, quand une infraction cesse d'exister et quand, en conséquence, le délai de prescription commence à courir. Il revient également au juge d'apprécier quand l'usage de faux constitue la continuation du faux en écritures et forme avec ce dernier une seule infraction.

B.11.2. La jurisprudence qui interprète les dispositions en cause en ce sens qu'en cas d'infraction de faux en écritures suivi d'usage de la pièce fausse, la prescription ne prend également cours à l'égard du faux qu'à partir du dernier fait d'usage, ne modifie en rien la définition des diverses infractions et n'empêche pas non plus les personnes intéressées d'évaluer les conséquences pénales de leur comportement. Toute personne sait qu'elle pourra être poursuivie et condamnée si elle a eu un comportement qui correspond aux éléments constitutifs d'une infraction réprimée par une loi pénale.

B.11.3. Selon la jurisprudence relative à la prescription de l'infraction de faux en écritures suivi d'usage de la pièce fausse, le juge examine si, entre la perpétration du faux et le premier usage de celui-ci, il s'est écoulé un laps de temps plus long que le délai de prescription, auquel cas l'auteur ne pourrait plus être condamné du chef de faux (Cass. 9 février 1982, Pas., 1982, I, n° 348). Même si le juge pénal estime que l'usage de la pièce fausse est uniquement le prolongement du faux en écritures et constitue une seule infraction avec ce dernier, l'action publique, à partir du moment où elle est prescrite pour un fait déterminé, ne peut revivre parce que de nouveaux faits punissables ont par la suite été commis.

B.11.4. L'imprévisibilité qui tient au fait qu'une infraction qui était punissable au moment où elle a été commise pourrait encore être sanctionnée de la même peine après l'échéance du délai de prescription escompté, parce que l'infraction s'inscrit dans le cadre d'une série de comportements délictueux considérés comme une seule infraction, n'est pas de nature à porter atteinte aux articles 12 et 14 de la Constitution ou à l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme.

B.12. La question préjudicielle appelle une réponse négative.

Quant à la troisième question préjudicielle B.13.1. L'article 22 du titre préliminaire du Code de procédure pénale énonce : « La prescription de l'action publique ne sera interrompue que par les actes d'instruction ou de poursuite faits dans le délai déterminé par l'article 21.

Ces actes font courir un nouveau délai d'égale durée, même à l'égard des personnes qui n'y sont pas impliquées ».

B.13.2. L'article 23 du titre préliminaire du Code de procédure pénale énonce : « Le jour où l'infraction a été commise ainsi que celui où l'acte interruptif a été fait sont comptés dans les délais ».

B.13.3. L'article 24 du titre préliminaire du Code de procédure pénale, tel qu'il s'appliquait aux faits en cause, énonçait : « La prescription de l'action publique est suspendue à l'égard de toutes les parties : 1° à partir du jour de l'audience où l'action publique est introduite devant la juridiction de jugement selon les modalités fixées par la loi. La prescription recommence toutefois à courir : - à partir du jour où la juridiction de jugement décide, d'office ou sur requête du ministère public, de reporter l'examen de l'affaire pour une durée indéterminée et ce, jusqu'au jour où la juridiction de jugement reprend ledit examen; - à partir du jour où la juridiction de jugement décide, d'office ou sur requête du ministère public, de reporter l'examen de l'affaire en vue de l'accomplissement d'actes d'instruction complémentaires concernant le fait mis à charge et ce, jusqu'au jour où la juridiction de jugement reprend ledit examen; - à partir de la déclaration d'appeler, visée à l'article 203, ou de la notification de recours, visée à l'article 205, jusqu'au jour où l'appel est introduit, selon les modalités fixées par la loi, devant la juridiction de jugement en degré d'appel, si l'appel du jugement sur l'action publique émane uniquement du ministère public; - à l'échéance d'un délai d'un an, à compter du jour de l'audience au cours de laquelle, selon le cas, l'action publique est introduite devant la juridiction de jugement en degré de première instance ou devant la juridiction de jugement en degré d'appel ou au cours de laquelle cette dernière juridiction décide de statuer sur l'action publique et ce, jusqu'au jour du jugement de la juridiction de jugement considérée statuant sur l'action publique; 2° dans les cas de renvoi pour la décision d'une question préjudicielle;3° dans les cas prévus à l'article 447, alinéas 3 et 5, du Code pénal;4° pendant le traitement d'une exception d'incompétence, d'irrecevabilité ou de nullité soulevée devant la juridiction de jugement par l'inculpé, par la partie civile ou par la personne civilement responsable.Si la juridiction déclare l'exception fondée ou que la décision sur l'exception est jointe au fond, la prescription n'est pas suspendue ».

B.14.1. Selon la jurisprudence, la prescription de l'action publique est en principe suspendue durant une procédure de cassation (Cass. 20 septembre 2000, Pas., 2000, II, n° 482). L'article 24 du titre préliminaire du Code de procédure pénale, tel qu'il est en vigueur depuis le 1er septembre 2003, dispose expressément que la prescription est suspendue lorsque la loi le prévoit ou lorsqu'il existe un obstacle légal à l'introduction ou à l'exercice de l'action publique.

B.14.2. Devant le juge a quo, le premier inculpé soutient que le motif de suspension précité n'a pas été prévu par la loi. La question préjudicielle a pour objet de demander à la Cour si les dispositions en cause violent le principe de légalité en matière pénale « en tant qu' règlent la prescription et en tant que le régime de prescription des infractions implique que la prescription est suspendue pendant la procédure de cassation à partir du jour du jugement attaqué jusqu'au jour de l'arrêt de cassation déclarant le pourvoi recevable, et pour autant que le pourvoi en cassation ne soit pas manifestement irrecevable ».

B.15. L'imprévisibilité qui tient au fait qu'une infraction qui était punissable au moment où elle a été commise pourrait encore être sanctionnée de la même peine à l'échéance du délai de prescription escompté, parce que ce délai a entre-temps été suspendu, n'est pas de nature à porter atteinte aux articles 12 et 14 de la Constitution. Ces dispositions exigent certes que le délai de prescription ait en principe été adopté par une assemblée délibérante démocratiquement élue, mais elles n'empêchent pas que soit laissée au juge la latitude, chaque fois qu'il existe un obstacle à l'introduction ou à l'exercice de l'action publique, de suspendre ce délai dans l'intérêt de l'action publique.

En effet, il résulte de la nature de la procédure de cassation, qu'afin d'éviter un usage abusif, elle entraîne la suspension du délai de prescription. Les dispositions qui règlent le pourvoi en cassation doivent dès lors, de manière implicite mais certaine, être réputées avoir pour effet que l'introduction d'un tel pourvoi a un effet suspensif sur le délai de prescription.

B.16. La question préjudicielle appelle une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : 1. L'article 65 du Code pénal et l'article 21 du titre préliminaire du Code de procédure pénale, interprétés en ce sens qu'en cas de délit collectif, la prescription de l'action publique court à partir du dernier fait qui a été commis avec la même intention délictueuse et pour autant que le délai de prescription ne soit écoulé entre aucun des faits, ne violent pas les articles 12, alinéa 2, et 14 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme.2. Les articles 193, 196 et 197 du Code pénal et les articles 21, 22 et 23 du titre préliminaire du Code de procédure pénale, interprétés en ce sens que les infractions de faux en écritures et usage de faux sont considérées comme une seule infraction qui perdure tant que continue d'exister le but visé et réalisé par l'acte initial, bien qu'aucun acte positif nouveau ne soit posé par qui que ce soit, la prescription de l'action publique ne commençant à courir pour les deux infractions qu'à partir du moment où ce but n'existe plus, ne violent pas les articles 12, alinéa 2, et 14 de la Constitution.3. Les articles 21, 22, 23 et 24 du titre préliminaire du Code de procédure pénale, interprétés en ce sens que la prescription de l'action publique est suspendue pendant la procédure de cassation à partir du jour du jugement attaqué jusqu'au jour de l'arrêt de la Cour de cassation déclarant le pourvoi recevable, et pour autant que le pourvoi en cassation ne soit pas manifestement irrecevable, ne violent pas les articles 12, alinéa 2, et 14 de la Constitution. Ainsi prononcé en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 21 décembre 2005.

Le greffier, Le président, P.-Y. Dutilleux. A. Arts.

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