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Arrêt
publié le 15 septembre 2008

Extrait de l'arrêt n° 111/2008 du 31 juillet 2008 Numéros du rôle : 4308, 4309, 4335, 4378, 4401 et 4402 En cause : les questions préjudicielles relatives aux articles 235ter et 416, alinéa 2, du Code d'instruction criminelle, posées par l La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Bossuyt et M. Melchior, et des juges P. Ma(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 111/2008 du 31 juillet 2008 Numéros du rôle : 4308, 4309, 4335, 4378, 4401 et 4402 En cause : les questions préjudicielles relatives aux articles 235ter et 416, alinéa 2, du Code d'instruction criminelle, posées par la Cour de cassation.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Bossuyt et M. Melchior, et des juges P. Martens, R. Henneuse, E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, J. Spreutels et T. Merckx-Van Goey, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président M. Bossuyt, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure a. Par deux arrêts du 2 octobre 2007 en cause respectivement de J.S. et de A. V.C., dont les expéditions sont parvenues au greffe de la Cour le 11 octobre 2007, la Cour de cassation a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 235ter et/ou l'article 416, alinéa 2, du Code d'instruction criminelle violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'ils ne prévoient pas un pourvoi en cassation immédiat contre un arrêt de la chambre des mises en accusation dans le cas d'un contrôle du dossier confidentiel conformément aux articles 189ter et/ou 235ter du Code d'instruction criminelle, lequel arrêt est un arrêt préparatoire, alors que l'article 416, alinéa 2, du Code d'instruction criminelle permet, par dérogation au premier alinéa de cet article, un pourvoi en cassation immédiat contre l'arrêt de la chambre des mises en accusation rendu par application de l'article 235bis du Code d'instruction criminelle relatif à l'examen de la régularité de la procédure, lequel arrêt est un arrêt préparatoire analogue à celui rendu par application de l'article 235ter du Code d'instruction criminelle ? ». b. Par arrêt du 30 octobre 2007 en cause de G.S. et E.P., dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 9 novembre 2007, la Cour de cassation a posé la même question préjudicielle. c. Par un arrêt du 27 novembre 2007 et deux arrêts du 18 décembre 2007 en cause respectivement de M.V.C., C.G. et R.B. contre la SA « Dexia Assurances Belgique » et autres, dont les expéditions sont parvenues au greffe de la Cour les 13 et 28 décembre 2007, la Cour de cassation a posé la même question préjudicielle.

Ces affaires, inscrites sous les numéros 4308, 4309, 4335, 4378, 4401 et 4402 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) III. En droit (...) B.1. Par les questions préjudicielles reproduites ci-dessus - dont la formulation est identique dans chacune des affaires jointes -, la Cour de cassation demande si les articles 235ter et 416, alinéa 2, du Code d'instruction criminelle sont compatibles avec les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que l'article 416, alinéa 2, ne prévoit pas de possibilité de former un recours en cassation immédiat contre un arrêt préparatoire de la chambre des mises en accusation exerçant le contrôle, sur la base du dossier confidentiel, de la régularité de l'application des méthodes particulières de recherche d'observation et d'infiltration, conformément à l'article 189ter ou à l'article 235ter, alors qu'en vertu de l'article 416, alinéa 2, un recours en cassation immédiat peut être formé contre les arrêts préparatoires de la chambre des mises en accusation exerçant le contrôle de la régularité de la procédure en application de l'article 235bis du Code d'instruction criminelle.

B.2.1. L'article 235bis du Code d'instruction criminelle, inséré par la loi du 12 mars 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/03/1998 pub. 02/04/1998 numac 1998009267 source ministere de la justice Loi relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction type loi prom. 12/03/1998 pub. 02/04/1998 numac 1998009266 source ministere de la justice Loi modifiant le Code judiciaire et le Code d'instruction criminelle en ce qui concerne la procédure en dessaisissement fermer relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction (Moniteur belge , 2 avril 1998), dispose : « § 1er. Lors du règlement de la procédure, la chambre des mises en accusation contrôle, sur la réquisition du ministère public ou à la requête d'une des parties, la régularité de la procédure qui lui est soumise. Elle peut même le faire d'office. § 2. La chambre des mises en accusation agit de même, dans les autres cas de saisine. § 3. Lorsque la chambre des mises en accusation contrôle d'office la régularité de la procédure et qu'il peut exister une cause de nullité, d'irrecevabilité ou d'extinction de l'action publique, elle ordonne la réouverture des débats. § 4. La chambre des mises en accusation entend, en audience publique si elle en décide ainsi à la demande de l'une des parties, le procureur général, la partie civile et l'inculpé en leurs observations. § 5. Les irrégularités, omissions ou causes de nullités visées à l'article 131, § 1er, ou relatives à l'ordonnance de renvoi, et qui ont été examinées devant la chambre des mises en accusation ne peuvent plus l'être devant le juge du fond, sans préjudice des moyens touchant à l'appréciation de la preuve ou qui concernent l'ordre public. Il en va de même pour les causes d'irrecevabilité ou d'extinction de l'action publique, sauf lorsqu'elles ne sont acquises que postérieurement aux débats devant la chambre des mises en accusation.

Les dispositions du présent paragraphe ne sont pas applicables à l'égard des parties qui ne sont appelées dans l'instance qu'après le renvoi à la juridiction de jugement, sauf si les pièces sont retirées du dossier conformément à l'article 131, § 2, ou au § 6 du présent article. § 6. Lorsque la chambre des mises en accusation constate une irrégularité, omission ou cause de nullité visée à l'article 131, § 1er, ou une cause d'irrecevabilité ou d'extinction de l'action publique, elle prononce, le cas échéant, la nullité de l'acte qui en est entaché et de tout ou partie de la procédure ultérieure. Les pièces annulées sont retirées du dossier et déposées au greffe du tribunal de première instance, après l'expiration du délai de cassation ».

B.2.2. L'article 189ter du Code d'instruction criminelle, également mentionné dans les questions préjudicielles, disposition qui a été insérée par la loi du 27 décembre 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/12/2005 pub. 30/12/2005 numac 2005010015 source service public federal justice Loi portant des modifications diverses au Code d'instruction criminelle et au Code judiciaire en vue d'améliorer les modes d'investigation dans la lutte contre le terrorisme et la criminalité grave et organisée fermer portant des modifications diverses au Code d'instruction criminelle et au Code judiciaire en vue d'améliorer les modes d'investigation dans la lutte contre le terrorisme et la criminalité grave et organisée (Moniteur belge , 30 décembre 2005), dispose : « Sur la base d'éléments concrets qui ne sont apparus que postérieurement au contrôle de la chambre des mises en accusation exercé en vertu de l'article 235ter, le tribunal peut, soit d'office, soit sur réquisition du ministère public, soit à la demande du prévenu, de la partie civile ou de leurs avocats, charger la chambre des mises en accusation de contrôler l'application des méthodes particulières de recherche d'observation et d'infiltration, en application de l'article 235ter.

Cette réquisition ou cette demande doit, sous peine de déchéance, être soulevée avant tout autre moyen de droit, sauf si ce moyen concerne des éléments concrets et nouveaux qui sont apparus lors de l'audience.

Le tribunal transmet le dossier au ministère public, afin de porter l'affaire à cet effet devant la chambre des mises en accusation ».

B.2.3. L'article 235ter du Code d'instruction criminelle, également inséré par la loi précitée du 27 décembre 2005 disposait : « § 1er. La chambre des mises en accusation est chargée de contrôler [...] la mise en oeuvre des méthodes particulières de recherche d'observation et d'infiltration.

Dès la clôture de l'information dans laquelle ces méthodes ont été utilisées et avant que le ministère public ne procède à la citation directe, la chambre des mises en accusation examine, sur la réquisition du ministère public, la régularité des méthodes particulières de recherche d'observation et d'infiltration.

Dès le moment où le juge d'instruction communique son dossier au procureur du Roi en vertu de l'article 127, § 1er, alinéa 1er, la chambre des mises en accusation examine, sur la réquisition du ministère public, la régularité des méthodes particulières de recherche d'observation et d'infiltration qui ont été appliquées dans le cadre de l'instruction ou de l'information qui l'a précédée. § 2. La chambre des mises en accusation se prononce dans les trente jours de la réception de la réquisition du ministère public. Ce délai est ramené à huit jours si l'un des inculpés se trouve en détention préventive.

La chambre des mises en accusation entend, séparément et en l'absence des parties, le procureur général en ses observations.

Elle entend de la même manière la partie civile et l'inculpé, après convocation qui leur est notifiée par le greffier par télécopie ou par lettre recommandée à la poste au plus tard quarante-huit heures avant l'audience. Le greffier les informe également dans cette convocation, que le dossier répressif est mis à leur disposition au greffe, en original ou en copie pour consultation pendant cette période.

Pour les méthodes particulières de recherche d'observation et d'infiltration, elle peut entendre, séparément et en l'absence des parties, le juge d'instruction et l'officier de police judiciaire visé aux articles 47sexies, § 3, 6°, et 47octies, § 3, 6°.

La chambre des mises en accusation peut charger le juge d'instruction d'entendre les fonctionnaires de police chargés d'exécuter l'observation et l'infiltration et le civil visé à l'article 47octies, § 1er, alinéa 2, en application des articles 86bis et 86ter. Elle peut décider d'être présente à l'audition menée par le juge d'instruction ou de déléguer un de ses membres à cet effet. § 3. Le ministère public soumet au président de la chambre des mises en accusation le dossier confidentiel visé aux articles 47septies, § 1er, alinéa 2, ou 47novies, § 1er, alinéa 2, qui porte sur l'information ou sur l'instruction visée au § 1er. Seuls les magistrats de la chambre des mises en accusation ont le droit de consulter ce dossier confidentiel.

Le président de la chambre des mises en accusation prend les mesures nécessaires en vue d'assurer la protection du dossier confidentiel. Il le restitue immédiatement au ministère public après en avoir pris connaissance. § 4. L'arrêt de la chambre des mises en accusation ne peut pas faire mention du contenu du dossier confidentiel, ni du moindre élément susceptible de compromettre les moyens techniques et les techniques d'enquête policière utilisés ou la garantie de la sécurité et de l'anonymat de l'indicateur, des fonctionnaires de police chargés de l'exécution de l'observation ou de l'infiltration et du civil visé à l'article 47octies, § 1er, alinéa 2. § 5. Il est procédé pour le surplus conformément à l'article 235bis, §§ 5 et 6. § 6. Le contrôle du dossier confidentiel par la chambre des mises en accusation n'est susceptible d'aucun recours ».

B.2.4. L'article 416 du Code d'instruction criminelle, modifié par les lois du 12 mars 1998 (Moniteur belge , 2 avril 1998), 19 décembre 2002 (Moniteur belge , 14 février 2003) et 13 juin 2006 (Moniteur belge , 19 juillet 2006), dispose : « Le recours en cassation contre les arrêts préparatoires et d'instruction, ou les jugements en dernier ressort de cette qualité, ne sera ouvert qu'après l'arrêt ou le jugement définitif; l'exécution volontaire de tels arrêts ou jugements préparatoires ne pourra, en aucun cas, être opposée comme fin de non-recevoir.

L'alinéa précédent ne s'applique pas aux arrêts ou jugements rendus sur la compétence ou en application des articles 135 et 235bis, ni aux arrêts ou jugements relatifs à l'action civile qui statuent sur le principe d'une responsabilité, ni aux arrêts par lesquels conformément à l'article 524bis, § 1er, il est statué sur l'action publique et ordonné une enquête particulière sur les avantages patrimoniaux, ni aux arrêts de renvoi conformément à l'article 57bis de la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié infraction et à la réparation du dommage causé par ce fait ».

B.3. Dans son arrêt n° 105/2007 du 19 juillet 2007, la Cour a annulé le paragraphe 6 de l'article 235ter du Code d'instruction criminelle, pour les motifs suivants : « B.16.1. Les parties requérantes font ensuite valoir que l'article 235ter, § 6, du Code d'instruction criminelle viole les droits de la défense en ce qu'il dispose que le contrôle du dossier confidentiel par la chambre des mises en accusation n'est susceptible d'aucun recours. Ainsi, il serait établi une différence de traitement injustifiée en comparaison avec d'autres procédures, comme celle de l'article 235bis du Code d'instruction criminelle, dans lesquelles la décision de la chambre des mises en accusation concernant la régularité de la procédure pénale peut faire l'objet d'un pourvoi en cassation.

B.16.2. Les articles 407, 408, 409 et 413 du Code d'instruction criminelle prévoient que tout arrêt ou jugement définitif peut faire l'objet d'un pourvoi en cassation. Conformément à l'article 416, alinéa 1er, du Code d'instruction criminelle, le recours en cassation contre les arrêts préparatoires et d'instruction, ou les jugements en dernier ressort de cette qualité, ne sera ouvert qu'après l'arrêt ou le jugement définitif. L'article 416, alinéa 2, prévoit exceptionnellement, dans un nombre de cas limité, un recours en cassation immédiat contre un arrêt ou un jugement non définitif.

Relèvent notamment de ces exceptions les décisions de la chambre des mises en accusation rendues en application de l'article 235bis du Code d'instruction criminelle relatives à la régularité de la procédure pénale.

B.16.3. En disposant que ' le contrôle du dossier confidentiel par la chambre des mises en accusation n'est susceptible d'aucun recours ', l'article 235ter, § 6, ne se limite pas à appliquer la règle selon laquelle le recours en cassation ne sera ouvert qu'après l'arrêt ou le jugement définitif. Il exclut que même un pourvoi en cassation qui serait formé après un arrêt ou un jugement définitif puisse porter sur le contrôle du dossier confidentiel exercé par la chambre des mises en accusation, à la fin de l'information ou de l'instruction.

Une telle dérogation aux règles rappelées en B.16.2 ne peut être admise que s'il est raisonnablement justifié de priver une catégorie de personnes de la faculté d'introduire un pourvoi devant la Cour de cassation.

B.16.4. L'exclusion du recours en cassation contre les arrêts rendus en application de l'article 235ter du Code d'instruction criminelle a été justifiée par le caractère nécessairement secret des données du dossier confidentiel, qui peuvent être contrôlées uniquement par les magistrats de la chambre des mises en accusation (Doc. parl., Chambre, 2005-2006, DOC 51-2055/001, p.63).

Une telle préoccupation pourrait justifier que seuls les magistrats de la Cour de cassation aient le droit de consulter le dossier confidentiel et que le président de la chambre saisie prenne les mesures nécessaires en vue d'assurer la protection du dossier confidentiel, ainsi que le prévoit, en ce qui concerne la procédure devant la chambre des mises en accusation, l'article 235ter, § 3.

Toutefois, en excluant tout recours contre le contrôle du dossier confidentiel, le législateur est allé au-delà de ce qui était nécessaire pour garantir le secret des données sensibles que contient ce dossier.

B.16.5. La mesure critiquée a été justifiée par une comparaison ' avec la situation engendrée par la loi du 8 avril 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/2002 pub. 31/05/2002 numac 2002009479 source ministere de la justice Loi relatif à l'anonymat des témoins fermer relative à l'anonymat des témoins ', la Cour de cassation ne pouvant exercer ' un contrôle direct en vue de savoir si les dispositions prescrites par l'article 156 du Code d'instruction criminelle ont été respectées ou si le témoin est une personne qui a été déchue du droit de témoigner ou un mineur âgé de moins de quinze ans, personnes ne pouvant pas prêter serment ', ces données d'identité étant inscrites dans un registre secret ou confidentiel qui ' relève évidemment du secret professionnel et ne peut jamais être joint au dossier répressif ' et qui ' ne peut donc pas être communiqué à la Cour de cassation ' (ibid. ).

La justification d'une mesure ne peut résulter de ce qu'une mesure semblable a été prise dans une autre matière qui n'est pas comparable.

Les mesures d'infiltration et d'observation peuvent constituer une ingérence dans le droit au respect de la vie privée et du domicile, garantis par des normes constitutionnelles et conventionnelles au regard desquelles la Cour de cassation peut exercer, même d'office, un contrôle sur les décisions judiciaires, ce qui suppose qu'elle ait accès aux données confidentielles. En outre, ces mesures doivent satisfaire aux exigences de proportionnalité et de subsidiarité formulées aux articles 47sexies, § 2, et 47octies, § 2, du Code d'instruction criminelle, ce qui fait partie du contrôle de légalité que doit exercer la Cour de cassation.

B.16.6. Il est encore allégué que la protection du dossier confidentiel relève d'un intérêt supérieur et qu'on ne peut prendre aucun risque puisqu'il y va, notamment, de la vie des infiltrants.

Tout magistrat étant tenu au secret professionnel, il n'est pas justifié que soit refusé à la Cour de cassation l'accès à un dossier contrôlé par la chambre des mises en accusation, dès lors que la confidentialité de ce dossier peut être garantie de la même manière au sein des deux juridictions.

B.16.7. L'exposé des motifs de la loi attaquée insistait également sur les ' importantes garanties procédurales qui doivent assurer le droit à un procès équitable lors de l'examen devant la chambre des mises en accusation sur la base de l'article 235ter, du Code d'instruction criminelle [...] ' (ibid., p. 82; Doc. parl., Sénat, 2005-2006, 3-1491/3, p. 17).

B.16.8. La circonstance que des garanties importantes sont prévues lors du contrôle effectué par la chambre des mises en accusation ne peut justifier que soit exclu le contrôle de légalité, exercé par la Cour de cassation, qui doit porter notamment sur le respect de ces garanties.

B.16.9. Il est aussi allégué que la Cour de cassation exerce un contrôle sur les conséquences juridiques du contrôle de la chambre des mises en accusation lorsque la Cour de cassation est saisie en application de l'article 235bis. Ce contrôle ne permet cependant pas à la Cour de cassation de prendre connaissance de données dont l'examen a pu conduire la chambre des mises en accusation à conclure à la légalité ou à l'illégalité des mesures critiquées.

B.16.10. Il est enfin soutenu que la décision de la chambre des mises en accusation n'est pas définitive et que le juge du fond pourra, en application des articles 189ter et 335bis du Code d'instruction criminelle, charger la chambre des mises en accusation de contrôler à nouveau l'application des méthodes particulières de recherche d'observation et d'infiltration, en application de l'article 235ter.

Cette possibilité, qui n'est prévue qu'au cas où des éléments concrets ' sont apparus postérieurement au contrôle de la chambre des mises en accusation ', n'équivaut pas au contrôle de légalité qu'exerce la Cour de cassation en matière répressive.

B.16.11. Il découle de ce qui précède que l'article 235ter, § 6, établit une différence de traitement qui n'est pas raisonnablement justifiée. Cette disposition doit être annulée ».

B.4. Postérieurement à l'annulation de l'article 235ter, § 6, du Code d'instruction criminelle par son arrêt n° 105/2007, la Cour a déclaré plusieurs questions préjudicielles sans objet en ce qu'elles concernaient l'absence de recours contre les arrêts de la chambre des mises en accusation portant contrôle du dossier confidentiel (arrêts nos 107/2007 du 26 juillet 2007, 109/2007 du 26 juillet 2007, 126/2007 du 4 octobre 2007, 6/2008 du 17 janvier 2008 et 18/2008 du 14 février 2008).

B.5. Lorsque le législateur a prévu, par la loi du 12 mars 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/03/1998 pub. 02/04/1998 numac 1998009267 source ministere de la justice Loi relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction type loi prom. 12/03/1998 pub. 02/04/1998 numac 1998009266 source ministere de la justice Loi modifiant le Code judiciaire et le Code d'instruction criminelle en ce qui concerne la procédure en dessaisissement fermer relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction, insérant un nouvel article 235bis dans le Code d'instruction criminelle, que les irrégularités, omissions ou causes de nullités visées à l'article 131, § 1er, ou relatives à l'ordonnance de renvoi et qui ont été examinées devant la chambre des mises en accusation ne peuvent en principe plus l'être devant le juge du fond, sans préjudice des moyens touchant à l'appréciation de la preuve ou qui concernent l'ordre public (article 235bis, § 5), il a prévu parallèlement, pour les arrêts de la chambre des mises en accusation rendus sur la base de l'article 235bis précité, une exception supplémentaire à la règle de l'article 416, alinéa 1er, qui dispose que les recours en cassation ne sont ouverts qu'après l'arrêt ou le jugement définitif.

Dans l'exposé des motifs du projet de loi il est dit à ce sujet : « Dans la mesure où les moyens soulevés dans l'exercice du recours introduit par l'article 135, en projet, du CIC ou développés dans le cadre de l'article 235 en projet, du même Code ne peuvent plus être invoqués devant le juge du fond, il est impératif d'ouvrir à l'inculpé la possibilité de se pourvoir immédiatement en cassation contre un arrêt défavorable de la chambre des mises en accusation. Le projet tend ainsi à introduire une nouvelle exception à la règle reprise à l'alinéa 1er de l'article 416 actuel, selon laquelle les pourvois formés contre les arrêts préparatoires ou d'instruction sont irrecevables tant que la décision définitive sur le fond n'a pas été prononcée. Puisque les problèmes relatifs à la régularité de l'instruction peuvent être définitivement tranchés au stade du règlement de la procédure, il est nécessaire qu'ils puissent au besoin être examinés par la Cour de cassation » (Doc. parl., Chambre, 1996-1997, n° 857/1, p. 71).

B.6. En vertu de l'article 235bis du Code d'instruction criminelle, il appartient à la chambre des mises en accusation de contrôler la régularité de la procédure qui lui est soumise, soit d'office, soit sur la réquisition du ministère public ou à la demande d'une des parties. Le cas échéant, les actes viciés sont annulés et les pièces annulées sont retirées du dossier et déposées au greffe du tribunal de première instance, après l'expiration du délai de cassation (article 235bis, § 6). En vertu de l'article 416, alinéa 2, du Code d'instruction criminelle, tel qu'il a été modifié par la loi du 12 mars 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/03/1998 pub. 02/04/1998 numac 1998009267 source ministere de la justice Loi relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction type loi prom. 12/03/1998 pub. 02/04/1998 numac 1998009266 source ministere de la justice Loi modifiant le Code judiciaire et le Code d'instruction criminelle en ce qui concerne la procédure en dessaisissement fermer, la décision de la chambre des mises en accusation rendue conformément à l'article 235bis peut faire l'objet d'un recours en cassation immédiat.

B.7. Afin de se conformer à l'arrêt de la Cour n° 202/2004 du 21 décembre 2004, le législateur a, par la loi du 27 décembre 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/12/2005 pub. 30/12/2005 numac 2005010015 source service public federal justice Loi portant des modifications diverses au Code d'instruction criminelle et au Code judiciaire en vue d'améliorer les modes d'investigation dans la lutte contre le terrorisme et la criminalité grave et organisée fermer, inséré l'article 235ter dans le Code d'instruction criminelle. En vertu de cette disposition, la chambre des mises en accusation contrôle l'application des méthodes particulières de recherche d'observation et d'infiltration sur la base du dossier confidentiel.

B.8. Par l'arrêt précité n° 105/2007, la Cour a annulé le paragraphe 6 de l'article 235ter du Code d'instruction criminelle - qui excluait tout recours contre le contrôle du dossier confidentiel exercé par la chambre des mises en accusation en vertu de cet article 235ter - parce qu'il privait sans justification la catégorie de personnes qui faisaient l'objet d'une méthode de recherche d'observation et d'infiltration de la possibilité d'introduire un pourvoi en cassation contre la décision de la chambre des mises en accusation prise en application de l'article 235ter du Code d'instruction criminelle, alors que cette possibilité existe contre les décisions de la chambre des mises en accusation prises en application de l'article 235bis de ce Code.

Il découle de l'annulation du paragraphe 6 de l'article 235ter du Code d'instruction criminelle qu'un pourvoi en cassation doit être possible aussi bien contre les décisions de la chambre des mises en accusation prises en application de l'article 189ter ou de l'article 235ter que contre celles prises en application de l'article 235bis.

Compte tenu de l'objectif du législateur, tel qu'il est défini en B.5, visant à permettre un pourvoi en cassation immédiat contre les arrêts de la chambre des mises en accusation relatifs à la régularité de la procédure qui lui est soumise en application de l'article 235bis, par dérogation à la règle contenue à l'alinéa 1er de l'article 416, il n'est pas justifié que les arrêts par lesquels la chambre des mises en accusation contrôle la régularité des méthodes particulières de recherche d'observation et d'infiltration sur la base du dossier confidentiel, en application de l'article 189ter ou de l'article 235ter, ne puissent pas également faire l'objet d'un pourvoi en cassation immédiat.

Cette différence de traitement injustifiée provient de l'absence, dans l'article 416, alinéa 2, du Code d'instruction criminelle, d'une disposition législative ayant, pour les décisions prises par la chambre des mises en accusation en application de l'article 235ter, une portée identique à celle qui concerne les décisions de la chambre des mises en accusation prises en application de l'article 235bis.

B.9. Il s'ensuit que l'article 416, alinéa 2, du Code d'instruction criminelle n'est pas compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il ne prévoit pas un pourvoi en cassation immédiat contre un arrêt de la chambre des mises en accusation lorsque celle-ci exerce un contrôle du dossier confidentiel en application des articles 189ter ou 235ter du Code d'instruction criminelle.

B.10. Enfin, pour ce qui est de l'observation du Conseil des ministres selon laquelle la Cour peut constater une lacune législative mais ne peut la combler, c'est au juge a quo qu'il appartient, si la lacune est située dans le texte soumis à la Cour, de mettre fin à l'inconstitutionnalité constatée par celle-ci, lorsque ce constat est exprimé en des termes suffisamment précis et complets pour permettre que la disposition en cause soit appliquée dans le respect des articles 10 et 11 de la Constitution (comp. CEDH, 29 novembre 1991, Vermeire c. Belgique, § 25).

B.11. Les questions préjudicielles appellent une réponse affirmative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 416, alinéa 2, du Code d'instruction criminelle viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il ne prévoit pas un recours en cassation immédiat contre un arrêt de la chambre des mises en accusation qui contrôle, sur la base du dossier confidentiel, la régularité de la mise en oeuvre des méthodes particulières de recherche d'observation et d'infiltration, en application des articles 189ter ou 235ter du Code d'instruction criminelle.

Ainsi prononcé en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989, à l'audience publique du 31 juillet 2008.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président, M. Bossuyt.

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