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Arrêt
publié le 14 octobre 2009

Extrait de l'arrêt n° 126/2009 du 16 juillet 2009 Numéro du rôle : 4687 En cause : la demande de suspension du décret de la Région wallonne du 3 avril 2009 « ratifiant le permis d'urbanisme délivré pour la construction de la jonction ' Parc La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Melchior et M. Bossuyt, et des juges P. Ma(...)

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Extrait de l'arrêt n° 126/2009 du 16 juillet 2009 Numéro du rôle : 4687 En cause : la demande de suspension du décret de la Région wallonne du 3 avril 2009 « ratifiant le permis d'urbanisme délivré pour la construction de la jonction ' Parc-Sud ' du métro léger de Charleroi en application du décret du 17 juillet 2008 relatif à quelques permis pour lesquels il existe des motifs impérieux d'intérêt général », introduite par la ville de Charleroi et autres.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Melchior et M. Bossuyt, et des juges P. Martens, R. Henneuse, E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, J. Spreutels et T. Merckx-Van Goey, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la demande et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 21 avril 2009 et parvenue au greffe le 22 avril 2009, une demande de suspension du décret de la Région wallonne du 3 avril 2009 « ratifiant le permis d'urbanisme délivré pour la construction de la jonction ' Parc-Sud ' du métro léger de Charleroi en application du décret du 17 juillet 2008 relatif à quelques permis pour lesquels il existe des motifs impérieux d'intérêt général » (publié au Moniteur belge du 16 avril 2009) a été introduite par la ville de Charleroi, représentée, en application de l'article L1242-2 du Code wallon de la démocratie locale, par les personnes suivantes, et par les personnes suivantes agissant en leur nom propre : André Lierneux, demeurant à 6000 Charleroi, Quai de Brabant 25, Jean-Noël Lorsignol, demeurant à 6000 Charleroi, rue du Pont Neuf 3, Henri Prevot, demeurant à 6000 Charleroi, rue de Marcinelle 91, Paul Catoir, demeurant à 6000 Charleroi, rue du Collège 9, Jean-Claude Nackers, demeurant à 6032 Charleroi, rue Hector Denis 83, et Alain Pelgrims, demeurant à 6032 Charleroi, rue du Mayeuri 18/55.

Par la même requête, les parties requérantes demandent également l'annulation du même décret. (...) II. En droit (...) Quant au décret attaqué et à son contexte B.1.1. La demande de suspension est dirigée contre le décret du 3 avril 2009 « ratifiant le permis d'urbanisme délivré pour la construction de la jonction ' Parc-Sud ' du métro léger de Charleroi en application du décret du 17 juillet 2008 relatif à quelques permis pour lesquels il existe des motifs impérieux d'intérêt général » (ci-après : le décret du 3 avril 2009).

L'article unique de ce décret dispose : « Le permis d'urbanisme délivré le 18 février 2009 par arrêté ministériel à la Société régionale wallonne du Transport (SRWT) et relatif à la construction de la jonction ' Parc-Sud ' du métro léger de Charleroi (MLC) avec construction d'un pont sur la Sambre, d'une ligne jusqu'à la gare du sud et d'un rond-point (Olof Palme), est ratifié ».

B.1.2. Comme son intitulé l'indique, le décret du 3 mars 2009 est adopté en application du décret du 17 juillet 2008 « relatif à quelques permis pour lesquels il existe des motifs impérieux d'intérêt général » (ci-après : le décret du 17 juillet 2008).

B.2.1. Le décret du 17 juillet 2008, d'une part, instaure une procédure de « ratification » de certains permis pour lesquels il existe des motifs impérieux d'intérêt général (articles 1er à 4) et, d'autre part, ratifie certains permis octroyés, à l'égard desquels sont considérés comme avérés des motifs impérieux d'intérêt général (articles 5 à 17).

En permettant cette « ratification » de certains permis, le décret du 17 juillet 2008 tend ainsi à traduire « un intérêt grandissant du Parlement wallon quant au suivi de dossiers qui dépassent l'intérêt local » (Doc. parl., Parlement wallon, 2007-2008, n° 805/1, p. 2).

B.2.2. Le décret attaqué a été adopté selon la procédure prévue par les articles 1er à 4 du décret du 17 juillet 2008.

B.2.3. Les articles 1er à 4 du décret du 17 juillet 2008 instaurent une procédure de « ratification » des permis d'urbanisme, des permis d'environnement et des permis uniques relatifs à certains actes et travaux énumérés à l'article 1er du décret et pour lesquels le décret répute avérés des motifs impérieux d'intérêt général.

Ces articles disposent : «

Article 1er.Les motifs impérieux d'intérêt général sont avérés pour l'octroi des permis d'urbanisme, des permis d'environnement et des permis uniques relatifs aux actes et travaux qui suivent : 1° les actes et travaux d'aménagement des infrastructures et bâtiments d'accueil des aéroports régionaux de Liège-Bierset et de Charleroi-Bruxelles Sud qui suivent : [...] 2° en exécution de l'accord de coopération du 11 octobre 2001 entre l'Etat fédéral, les Régions flamande, wallonne et de Bruxelles-Capitale relatif au plan d'investissement pluriannuel 2001-2012 de la S.N.C.B., les actes et travaux sur le territoire de la Région wallonne qui se rapportent au réseau RER; 3° dans le cadre de la mise en oeuvre du schéma de développement de l'espace régional (troisième partie, point 1.4.) adopté par le Gouvernement wallon le 27 mai 1999, les actes et travaux qui se rapportent aux modes structurants de transport en commun pour Charleroi, Liège, Namur et Mons; 4° les chaînons manquants routiers et fluviaux sur le territoire de la Région wallonne du réseau transeuropéen de transport visé dans la Décision n° 884/2004/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 modifiant la Décision n° 1692/96/CE sur les orientations communautaires pour le développement du réseau transeuropéen de transport.

Art. 2.Lorsque les actes et travaux énumérés à l'article 1er sont visés à l'article 84 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme, du Patrimoine et de l'Energie, le permis est délivré par le Gouvernement ou son délégué selon les modalités et les conditions fixées à l'article 127 du même Code, en ce compris celles du § 3 dudit article.

Lorsque les actes et travaux énumérés à l'article 1er concernent un établissement au sens du décret du 11 mars 1999 relatif au permis d'environnement, il est fait application de l'article 13, alinéa 2, dudit décret.

Par dérogation aux alinéas 1er et 2, la demande de permis dont soit l'accusé de réception, soit l'introduction est antérieur à l'entrée en vigueur du présent décret, poursuit son instruction selon les dispositions en vigueur à cette date.

Art. 3.Dans les quarante-cinq jours de son octroi, le Gouvernement présente au Parlement wallon le permis d'urbanisme, le permis d'environnement ou le permis unique relatif aux actes et travaux visés à l'article 1er. Les permis visés à l'article 2, alinéa 3, sont présentés au Parlement dans les quarante-cinq jours de leur réception par le Gouvernement.

Le Parlement wallon ratifie le permis présenté dans les soixante jours à dater du dépôt du dossier de permis sur le Bureau du Parlement wallon. Lorsqu'aucun décret de ratification n'est approuvé dans le délai précité, le permis est réputé non octroyé.

Les délais visés aux alinéas 1er et 2 sont suspendus entre le 16 juillet et le 15 août.

Le permis ratifié par le Parlement wallon est exécutoire à dater de la publication au Moniteur belge du décret et le permis est envoyé par le Gouvernement conformément aux dispositions du même Code ou du décret du 11 mars 1999.

Art. 4.Lorsqu'une demande de permis porte sur une modification mineure d'un permis ratifié par le Parlement wallon, cette demande suit les règles de droit commun du même Code ou du même décret ».

B.2.4. Ces quatre articles font l'objet de recours en annulation actuellement pendants devant la Cour.

B.3. En ce qui concerne les « modes structurants de transport en commun » visés à l'article 1er, 3°, du décret du 17 juillet 2008, les travaux préparatoires de ce décret exposent : « Dans sa troisième partie, le Schéma de développement de l'espace régional (S.D.E.R.; arrêté par le Gouvernement wallon en sa séance du 27 mai 1999) aborde les moyens de mise en oeuvre, notamment quant à la structuration de l'espace wallon.

Singulièrement, au sein des villes, le S.D.E.R. opte pour une organisation de la mobilité interne qui soit compatible avec la qualité de vie des usagers et des habitants.

Le centre ville doit d'abord, selon le S.D.E.R., constituer un lieu de rencontre et d'échange, où l'on privilégiera la marche à pied, le vélo et les transports en commun.

C'est dans ce sens qu'a déjà été octroyé le permis d'extension du métro à Charleroi, ou encore qu'est envisagé le réaménagement de la place qui s'étendra devant la nouvelle gare des Guillemins à Liège : les actes et travaux ne se limitent pas à la pose d'un nouveau mode structurant urbain mais, pour une bonne part et à cette occasion, le projet consiste en un réaménagement complet de l'espace public, d'alignement à alignement.

Ce sont les mêmes principes qui doivent guider les études et les réalisations des modes structurants à Charleroi, Liège, Namur ou Mons.

Fondés sur le S.D.E.R., ces actes et travaux sont garants d'un meilleur aménagement du centre ville, d'une convivialité urbaine retrouvée, susceptible de redynamiser la mixité des fonctions et l'économie d'énergie en matière de déplacements, ce qui constitue autant de motifs impérieux d'intérêt général » (Doc. parl., Parlement wallon, 2007-2008, n° 805/1, p. 22).

B.4.1. Le 11 décembre 2006, un permis d'urbanisme a été délivré à la Société régionale wallonne du Transport (SRWT) en vue de finaliser la boucle du métro entourant la ville de Charleroi.

B.4.2. Ce permis a fait l'objet d'une demande de suspension et d'un recours en annulation devant le Conseil d'Etat, introduits par des commerçants de la ville de Charleroi, particuliers et sociétés, dont les trois premiers requérants individuels dans le cadre de l'actuelle procédure.

Etaient notamment critiquées devant le Conseil d'Etat des lacunes de l'étude d'incidences et l'absence de prise en compte des objections soulevées dans le cadre de l'enquête publique.

La demande de suspension a été rejetée par l'arrêt n° 185.702 du 14 août 2008, pour défaut de démonstration du préjudice grave difficilement réparable.

Dans le cadre de la procédure en annulation, le premier auditeur a, dans son rapport déposé le 21 janvier 2009, estimé fondé le premier moyen pris de la violation de l'article 129 du CWATUP, en ce que la délibération du conseil communal précédant la délivrance du permis attaqué n'aurait pas pris en compte certaines variantes du projet; il n'a par conséquent pas examiné les autres moyens.

B.4.3. Parallèlement à ce recours, les six requérants individuels dans le cadre de l'actuelle procédure ont introduit devant le Tribunal de première instance de Charleroi, au nom de la ville de Charleroi, en application de l'article L1242-2 du Code wallon de la démocratie locale, une action en cessation environnementale fondée sur l'article 1er de la loi du 12 janvier 1993Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/01/1993 pub. 07/04/2009 numac 2009000212 source service public federal interieur Loi concernant un droit d'action en matière de protection de l'environnement. - Traduction allemande fermer « concernant un droit d'action en matière de protection de l'environnement ».

La demande de cessation a été déclarée recevable, mais non fondée, et appel a été interjeté contre cette décision devant la Cour d'appel de Mons; au moment de l'audience concernant la présente demande de suspension, l'affaire était renvoyée au rôle.

B.4.4. Par arrêté ministériel du 18 février 2009, le ministre a retiré la décision du 11 décembre 2006 et octroyé un permis d'urbanisme à la SRWT. Les travaux préparatoires du décret attaqué expliquent : « Afin d'éviter, autant que faire se peut, l'arrêt de chantier, l'arrêté ministériel du 18 février 2009 prévoit que le retrait d'acte ne prend effet [qu'à la date de publication] de la ratification du nouveau permis » (Doc. parl., Parlement wallon, 2008-2009, n° 933/2, p. 4). B.4.5. Par arrêt n° 193.238 du 12 mai 2009, le Conseil d'Etat a rejeté le recours en annulation dirigé contre le permis du 11 décembre 2006, en considérant que, compte tenu du décret attaqué, le recours a « perdu son objet ».

B.5.1. Après avoir mentionné le rapport du premier auditeur du Conseil d'Etat concluant à une illégalité formelle du permis délivré le 11 décembre 2006, l'exposé des motifs du décret du 3 avril 2009 explicite comme suit le contexte : « Le conseil communal de Charleroi a d'initiative délibéré sur les questions de voirie afférentes au présent permis d'urbanisme ce 16 février 2009.

La théorie du retrait des actes administratifs permet à toute autorité administrative de retirer un acte administratif créateur de droits jusqu'à la clôture des débats lorsque celui-ci est attaqué auprès du Conseil d'Etat.

Le conseil communal a corrigé l'illégalité avancée par le premier auditeur du Conseil d'Etat dans son rapport. Dans ces conditions, l'autorité administrative peut procéder au retrait du permis d'urbanisme du 11 décembre 2006 et à la délivrance d'un nouveau permis d'urbanisme ayant le même objet.

Par arrêté ministériel daté du 18 février 2009, le permis d'urbanisme délivré le 11 décembre 2006 est retiré et, à nouveau, délivré sous conditions.

Conformément au décret du 17 juillet 2008, le permis d'urbanisme délivré le 18 février 2009 est donc présenté au Parlement en vue de sa ratification par ce dernier » (Doc. parl., Parlement wallon, 2008-2009, n° 933/1, p. 2).

Le ministre a également exposé : « L'extension du métro de Charleroi et le développement d'une nouvelle mobilité à Charleroi représentent des investissements de 105 millions d'euros. La fermeture de la boucle constitue à elle seule un investissement de 24,5 millions d'euros, soit près d'un quart de l'investissement global.

Ces investissements participent incontestablement au processus de réduction de la consommation d'énergie et des émissions de CO2, dans lequel la Région wallonne s'est inscrite » (Doc. parl., Parlement wallon, 2008-2009, n° 933/2, p. 3).

B.5.2. En ce qui concerne l'incidence des recours pendants dirigés contre le décret du 17 juillet 2008, le ministre a considéré, bien qu'il soit « prématuré d'émettre un avis juridique sur ces recours » (Doc. parl., Parlement wallon, 2008-2009, n° 933/2, p. 5), ce qui suit : « Dans le cadre du présent permis, s'il est ratifié, l'annulation des dispositions générales du décret DAR n'aurait pas pour effet de remettre en question le permis délivré par arrêté ministériel conformément à la procédure prévue par l'article 127 du CWATUP ».

Quant à l'intérêt B.6.1. La demande de suspension étant subordonnée au recours en annulation, la recevabilité de celui-ci, et en particulier l'existence de l'intérêt requis, doit être abordée dès l'examen de la demande de suspension.

B.6.2. La Constitution et la loi spéciale du 6 janvier 1989 imposent à toute personne physique ou morale qui introduit un recours en annulation de justifier d'un intérêt. Ne justifient de l'intérêt requis que les personnes dont la situation pourrait être affectée directement et défavorablement par la norme attaquée.

B.7.1. La demande de suspension et le recours en annulation sont introduits par six habitants de la ville de Charleroi, agissant, d'une part, en leur nom propre et, d'autre part, au nom de la ville de Charleroi.

L'action des requérants est introduite au nom de la ville de Charleroi, en application de l'article L1242-2 du Code wallon de la démocratie locale.

L'article L1242-2 du Code wallon de la démocratie locale, qui constitue l'unique disposition de la section intitulée « Exercice par un contribuable des actions en justice appartenant à la commune », dispose : « Un ou plusieurs habitants peuvent, au défaut du collège communal, ester en justice au nom de la commune, en offrant, sous caution, de se charger personnellement des frais du procès et de répondre des condamnations qui seraient prononcées.

La commune ne pourra transiger sur le procès sans l'intervention de celui ou de ceux qui auront poursuivi l'action en son nom ».

B.7.2. Les requérants justifient leur intérêt personnel à agir par l'incidence du décret attaqué sur le recours qu'ils ont introduit devant le Conseil d'Etat contre le premier permis d'urbanisme délivré en 2006.

Dès lors que le décret du 3 avril 2009 ratifie un permis appelé à se substituer au permis attaqué devant le Conseil d'Etat, les requérants estiment avoir intérêt à contester le décret attaqué par lequel le législateur décrétal intervient directement dans la procédure devant le Conseil d'Etat.

Le Conseil d'Etat a d'ailleurs, en raison du décret attaqué, déclaré leur recours « sans objet » par arrêt n° 193.238 du 12 mai 2009.

Les requérants justifient par ailleurs l'intérêt à agir de la ville de Charleroi par l'incidence du décret attaqué sur la procédure judiciaire d'action en cessation qu'elle a introduite, et qui est actuellement pendante devant la Cour d'appel de Mons.

B.7.3. Le Gouvernement wallon et la ville de Charleroi, qui intervient dans la procédure en étant représentée par son collège communal, ainsi que la SRWT estiment que l'action introduite au nom de la ville de Charleroi n'est pas recevable.

B.7.4. Sans qu'il soit besoin d'examiner à ce stade si et dans quelle mesure chacun des requérants, notamment la ville de Charleroi, justifie de l'intérêt à agir, la Cour constate que les deuxième, troisième et quatrième requérants sont, en leur qualité de requérants dans la procédure engagée devant le Conseil d'Etat, directement et individuellement affectés par le décret attaqué puisque le Conseil d'Etat a déclaré leur recours « sans objet » en raison de ce décret; la perspective de pouvoir bénéficier d'un éventuel recours en rétractation fondé sur l'article 17 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 justifie dès lors leur intérêt à agir.

Pour le surplus, on ne peut reprocher aux requérants de ne pas avoir introduit un recours en annulation contre l'article 1er, 3°, du décret du 17 juillet 2008, sur la base duquel le décret attaqué a été adopté, dès lors qu'ils ne pouvaient présumer, sur la base du seul texte de cette disposition, pendant la période au cours de laquelle un recours en annulation aurait pu être introduit contre le décret du 17 juillet 2008 précité, que cette disposition serait ultérieurement appliquée effectivement dans le cas du métro de Charleroi.

B.8. L'examen limité de la recevabilité du recours en annulation auquel la Cour a pu procéder dans le cadre de la demande de suspension ne fait pas apparaître, au stade actuel de la procédure, que le recours en annulation - et donc la demande de suspension - doive être considéré comme irrecevable.

Quant aux conditions de fond de la demande de suspension B.9. Aux termes de l'article 20, 1°, de la loi spéciale du 6 janvier 1989, deux conditions de fond doivent être remplies pour que la suspension puisse être décidée : - des moyens sérieux doivent être invoqués; - l'exécution immédiate de la règle attaquée doit risquer de causer un préjudice grave difficilement réparable.

Les deux conditions étant cumulatives, la constatation que l'une de ces deux conditions n'est pas remplie entraîne le rejet de la demande de suspension.

Quant au préjudice grave difficilement réparable B.10. Une suspension par la Cour doit permettre d'éviter qu'un préjudice grave résulte pour les requérants de l'application immédiate de la norme attaquée, préjudice qui ne pourrait être réparé ou qui pourrait difficilement être réparé en cas d'annulation éventuelle.

B.11. La Constitution et la loi spéciale du 6 janvier 1989 exigent que toute personne physique ou morale qui introduit un recours justifie d'un intérêt, ce dont il résulte que l'action populaire n'est pas admissible. Il est exigé dans le même esprit que la demande de suspension soit fondée sur un risque de préjudice grave difficilement réparable touchant les parties requérantes elles-mêmes.

B.12.1. Les requérants invoquent comme préjudice grave difficilement réparable une atteinte au droit à un procès équitable de la première partie requérante en ce que le décret attaqué interfère directement dans la procédure de l'action en cessation environnementale, actuellement pendante devant la Cour d'appel de Mons.

Ils considèrent que seule la suspension du décret attaqué est susceptible de permettre que la Cour d'appel de Mons statue dans les délais utiles, à savoir avant que les travaux relatifs au métro comme tels aient effectivement commencé.

B.12.2. Les parties requérantes invoquent par ailleurs que des travaux effectués sur la base d'une étude d'incidences lacunaire et sans tenir compte des objections soulevées dans le cadre de l'enquête publique risquent de leur causer un préjudice grave difficilement réparable.

Elles ont en outre précisé, au cours de l'audience dans le cadre de la présente procédure, qu'elles ne critiquaient pas les travaux en tant que tels, mais la procédure d'adoption du permis relatif à ces travaux.

B.13. Il convient de constater que, dans le contexte factuel rappelé précédemment, une suspension éventuelle du décret attaqué ne pourrait avoir pour conséquence ni d'arrêter lesdits travaux, ni de rendre ces travaux illégaux en l'absence de permis : une éventuelle suspension du décret attaqué aurait seulement pour conséquence de permettre à un juge de se prononcer sur la légalité du permis de 2006, auquel se substitue le permis ratifié par le décret attaqué.

En l'espèce, deux procédures juridictionnelles étaient pendantes au moment de l'introduction de la présente demande de suspension : d'une part, une action en cessation environnementale devant la Cour d'appel de Mons, introduite au nom de la ville de Charleroi, et, d'autre part, un recours en annulation devant le Conseil d'Etat introduit par certains des requérants individuels dans le présent recours.

B.14. En ce qui concerne le préjudice éventuel subi par la ville de Charleroi dans le cadre de l'action en cessation environnementale, introduite en son nom par six habitants de la ville, les requérants ne démontrent pas en quoi les travaux du métro ou l'incidence éventuelle du décret attaqué sur la procédure juridictionnelle portée devant la Cour d'appel de Mons pourraient causer un préjudice grave difficilement réparable à la ville et aux intérêts de la collectivité.

B.15. En ce qui concerne le préjudice personnel que subiraient les six habitants de la ville de Charleroi agissant à titre individuel, ces requérants ne sont pas parties, à ce titre, dans l'action en cessation pendante devant la Cour d'appel de Mons, qu'ils ont introduite au nom de la ville, de telle sorte qu'ils ne peuvent invoquer l'interférence du décret attaqué dans cette procédure.

B.16. Quant au recours en annulation qu'ils ont introduit à titre individuel devant le Conseil d'Etat, il a été rejeté par l'arrêt n° 193.238 du 12 mai 2009, de telle sorte que le décret attaqué n'est pas de nature à interférer dans une procédure en cours. Par conséquent, une suspension du décret attaqué ne pourrait empêcher le préjudice invoqué par les requérants.

B.17. Dès lors qu'il n'est pas satisfait à l'une des conditions requises par l'article 20, 1°, de la loi spéciale du 6 janvier 1989, la demande de suspension doit être rejetée.

Par ces motifs, la Cour rejette la demande de suspension.

Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989, à l'audience publique du 16 juillet 2009.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président, M. Melchior.

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