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Arrêt
publié le 29 décembre 2009

Extrait de l'arrêt n° 168/2009 du 29 octobre 2009 Numéro du rôle : 4575 En cause : le recours en annulation des articles 11, 14, 17 et 21 du décret de la Communauté française du 25 avril 2008 fixant les conditions pour pouvoir satisfaire à La Cour constitutionnelle, composée des présidents P. Martens et M. Bossuyt, et des juges M. Mel(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 168/2009 du 29 octobre 2009 Numéro du rôle : 4575 En cause : le recours en annulation des articles 11, 14, 17 et 21 du décret de la Communauté française du 25 avril 2008 fixant les conditions pour pouvoir satisfaire à l'obligation scolaire en dehors de l'enseignement organisé ou subventionné par la Communauté française, introduit par la SPRL « AGNES SCHOOL ».

La Cour constitutionnelle, composée des présidents P. Martens et M. Bossuyt, et des juges M. Melchior, L. Lavrysen, J.-P. Moerman, E. Derycke et T. Merckx-Van Goey, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président P. Martens, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 10 décembre 2008 et parvenue au greffe le 12 décembre 2008, la SPRL « AGNES SCHOOL », dont le siège social est établi à 1040 Bruxelles, rue Louis Hap 143, a introduit un recours en annulation des articles 11, 14, 17 et 21 du décret de la Communauté française du 25 avril 2008 fixant les conditions pour pouvoir satisfaire à l'obligation scolaire en dehors de l'enseignement organisé ou subventionné par la Communauté française (publié au Moniteur belge du 12 juin 2008). (...) II. En droit (...) Quant aux dispositions attaquées B.1.1. Le recours en annulation est dirigé contre les articles 11, 14, 17 et 21 du décret de la Communauté française du 25 avril 2008 fixant les conditions pour pouvoir satisfaire à l'obligation scolaire en dehors de l'enseignement organisé ou subventionné par la Communauté française (ci-après : le décret du 25 avril 2008).

B.1.2. Ce décret instaure une réglementation de ce type d'enseignement, en ayant pour objectif de « permettre de garantir aux mineurs leur droit à un enseignement de qualité, ce qui suppose la mise en place de procédures efficaces de contrôle de l'obligation scolaire et l'institution de normes de référence » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2007-2008, n° 521/1, p. 3), ainsi que de « respecter le principe de la liberté de l'enseignement consacré par l'article 24 de la Constitution » (ibid. ).

Dans cette perspective, le décret distingue deux types d'enseignement en dehors de celui qui est organisé ou subventionné par la Communauté : « Tout d'abord, il est prévu que les mineurs fréquentant un établissement susceptible de délivrer un diplôme reconnu comme équivalent à ceux délivrés en Communauté française satisfont à l'obligation scolaire dès lors qu'ils ont informé l'Administration de leur inscription dans cet établissement. Tel est le cas des établissements dépendant de l'une des autres communautés ou de ceux auxquels une équivalence a été reconnue. Une autre hypothèse vise les établissements qui, sans bénéficier de cette équivalence, peuvent mener à la délivrance d'un diplôme étranger. Dans ce cas, le Gouvernement devra reconnaître que leur fréquentation permet de satisfaire à l'obligation scolaire.

Toutes les autres situations de scolarisation, même collective, relèvent de l'enseignement à domicile et, à ce titre, sont soumises aux dispositions qui lui sont propres : obligation de se soumettre au contrôle du niveau des études et de présenter les épreuves certificatives organisées par la Communauté française » (ibid. ).

B.2.1. L'article 11 du décret du 25 avril 2008 dispose : « Le Service général de l'Inspection est chargé du contrôle du niveau des études dans le cadre de l'enseignement à domicile. Il s'assure que l'enseignement dispensé permet au mineur soumis à l'obligation scolaire d'acquérir un niveau d'études équivalent aux socles de compétences, aux compétences terminales, aux savoirs communs requis et aux compétences minimales visés, respectivement, aux articles 16 et 25 ou 35 du décret du 24 juillet 1997 définissant les missions prioritaires de l'enseignement fondamental et de l'enseignement secondaire et organisant les structures propres à les atteindre.

Le Service général de l'Inspection s'assure également que l'enseignement dispensé poursuit les objectifs définis à l'article 6 du décret du 24 juillet 1997 définissant les missions prioritaires de l'enseignement fondamental et de l'enseignement secondaire et organisant les structures propres à les atteindre, qu'il est conforme au titre II de la Constitution et ne prône pas des valeurs qui sont manifestement incompatibles avec la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée à Rome, le 4 novembre 1950 ».

B.2.2. L'article 14 du décret du 25 avril 2008 dispose : « Le Service général de l'Inspection peut procéder au contrôle du niveau des études à tout moment, d'initiative ou à la demande du Gouvernement ou de la Commission, et fonde son contrôle sur des faits prélevés notamment à travers l'analyse des documents visés à l'article 13 et sur l'interrogation des élèves.

Des contrôles ont toutefois lieu au moins durant les années au cours desquelles le mineur soumis à l'obligation scolaire atteint l'âge de 8 et de 10 ans.

Le Service général de l'Inspection fixe la date du contrôle et la notifie aux personnes responsables au moins un mois à l'avance ».

B.2.3. L'article 17 du décret du 25 avril 2008 dispose : « Après avoir réalisé le contrôle du niveau des études, le Service général de l'Inspection établit un rapport et émet un avis sur la conformité à l'article 11 de l'enseignement dispensé à domicile. Le rapport et l'avis sont notifiés aux personnes responsables qui, dans les dix jours de la notification, peuvent communiquer par écrit leurs observations à la Commission.

L'avis du Service général de l'Inspection est transmis au plus tard dans le mois qui suit la date du contrôle à la Commission qui statue.

En cas de décision négative, un nouveau contrôle est effectué, selon les mêmes modalités, au minimum deux mois et au maximum quatre mois à dater de la notification de cette décision. Si le Service général de l'Inspection estime que l'enseignement dispensé à domicile n'est toujours pas conforme à l'article 11, il conclut son rapport par un avis sur les modalités d'intégration du mineur soumis à l'obligation scolaire dans un établissement scolaire organisé ou subventionné par la Communauté française. Les personnes responsables peuvent faire valoir leurs observations conformément à l'alinéa 1er.

Si, à l'issue du 2e contrôle, la Commission décide que le niveau des études n'est pas conforme à l'article 11, les personnes responsables inscrivent le mineur soumis à l'obligation scolaire dans un établissement scolaire organisé ou subventionné par la Communauté française ou dans un établissement visé à l'article 3.

La Commission détermine, pour l'enseignement ordinaire et, dans le respect de l'alinéa 6, pour l'enseignement secondaire spécialisé de forme 4, la forme, la section et l'année d'étude dans lesquelles le mineur soumis à l'obligation scolaire doit être inscrit.

Lorsque l'avis du Service général de l'Inspection conclut à l'intégration du mineur soumis à l'obligation scolaire dans l'enseignement spécialisé, cet avis est notifié aux personnes responsables qui peuvent s'opposer à cette intégration auprès de la Commission dans les quinze jours de la notification de l'avis. En cas d'accord ou d'absence d'opposition dans le délai, les personnes responsables font procéder aux examens visés à l'article 12, § 1er, du décret du 3 mars 2004 organisant l'enseignement spécialisé. Le rapport résultant de ces examens est transmis à la Commission qui statue.

La Commission détermine, pour l'enseignement spécialisé, le type et, le cas échéant, la forme ainsi que le degré de maturité ou la phase dans lesquels le mineur soumis à l'obligation scolaire doit être inscrit.

Pour l'application des alinéas 5 et 7, la Commission peut déroger aux conditions d'admission. Sa décision se fonde sur l'âge ainsi que sur les compétences et les savoirs acquis par le mineur soumis à l'obligation scolaire ».

B.2.4. L'article 21 du décret du 25 avril 2008 dispose : « Les personnes responsables inscrivent dans un établissement scolaire organisé ou subventionné par la Communauté française ou dans un établissement visé à l'article 3 le mineur soumis à l'obligation scolaire et relevant de l'enseignement à domicile qui n'a pas obtenu le certificat ou les attestations dans le respect des conditions visées par les articles 18 à 20.

Pour l'enseignement ordinaire et pour l'enseignement secondaire spécialisé de forme 4, la Commission détermine la forme, la section et l'année d'étude dans lesquelles le mineur soumis à l'obligation scolaire doit être inscrit.

Pour l'enseignement spécialisé, elle détermine le type et, le cas échéant, la forme ainsi que le degré de maturité ou la phase dans lesquels le mineur soumis à l'obligation scolaire doit être inscrit.

Pour l'application des alinéas 2 et 3, la Commission peut déroger aux conditions d'admission selon les mêmes modalités que celles prévues à l'article 17, dernier alinéa.

Si elle s'estime insuffisamment informée, la Commission peut demander au Service général de l'Inspection l'établissement d'un rapport tel que prévu à l'article 17, alinéa 3. Lorsque ce rapport conclut à l'intégration dans l'enseignement spécialisé, les formalités prévues à l'article 17, alinéa 6 sont d'application.

Si les personnes responsables envisagent une inscription du mineur soumis à l'obligation scolaire dans l'enseignement spécialisé, elles en informent la Commission dans les quinze jours de la proclamation des résultats ou de la décision de ne pas accorder le certificat d'études de base et font procéder aux examens visés à l'article 12, § 1er, du décret du 3 mars 2004 organisant l'enseignement spécialisé. Le rapport résultant de ces examens est transmis à la Commission.

En cas de recours contre la décision de ne pas accorder le certificat d'études de base, le délai d'information à la Commission visé à l'alinéa précédent prend cours au jour de la notification de la décision du Conseil de recours ».

Quant au premier moyen B.3. Le premier moyen est pris de la violation, par les articles 11, 14 et 17 du décret du 25 avril 2008, de la liberté d'enseignement garantie par l'article 24, §§ 1er, 3, 4 et 5, de la Constitution.

Compte tenu de l'imprécision des termes employés dans le décret, le législateur décrétal aurait violé la liberté d'enseignement soit en accordant au Service de l'Inspection générale le pouvoir d'apprécier ce qu'est un « niveau d'études équivalent », soit en contraignant celui-ci à prendre uniquement en compte, dans son évaluation, les socles de compétences, les compétences terminales, les savoirs communs requis et les compétences minimales visés dans le décret précité du 24 juillet 1997.

B.4. L'article 24 de la Constitution dispose : « § 1. L'enseignement est libre; toute mesure préventive est interdite; la répression des délits n'est réglée que par la loi ou le décret.

La communauté assure le libre choix des parents.

La communauté organise un enseignement qui est neutre. La neutralité implique notamment le respect des conceptions philosophiques, idéologiques ou religieuses des parents et des élèves.

Les écoles organisées par les pouvoirs publics offrent, jusqu'à la fin de l'obligation scolaire, le choix entre l'enseignement d'une des religions reconnues et celui de la morale non confessionnelle. § 2. Si une communauté, en tant que pouvoir organisateur, veut déléguer des compétences à un ou plusieurs organes autonomes, elle ne le pourra que par décret adopté à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés. § 3. Chacun a droit à l'enseignement dans le respect des libertés et droits fondamentaux. L'accès à l'enseignement est gratuit jusqu'à la fin de l'obligation scolaire.

Tous les élèves soumis à l'obligation scolaire ont droit, à charge de la communauté, à une éducation morale ou religieuse. § 4. Tous les élèves ou étudiants, parents, membres du personnel et établissements d'enseignement sont égaux devant la loi ou le décret.

La loi et le décret prennent en compte les différences objectives, notamment les caractéristiques propres à chaque pouvoir organisateur, qui justifient un traitement approprié. § 5. L'organisation, la reconnaissance ou le subventionnement de l'enseignement par la communauté sont réglés par la loi ou le décret ».

B.5.1. La liberté d'enseignement garantie par l'article 24, § 1er, de la Constitution assure le droit d'organiser et donc de choisir - des écoles fondées sur une philosophie confessionnelle ou non confessionnelle déterminée. Elle implique également que des personnes privées puissent, sans autorisation préalable et sous réserve du respect des libertés et des droits fondamentaux, organiser et faire dispenser un enseignement selon leur propre conception, tant en ce qui concerne la forme de cet enseignement qu'en ce qui concerne son contenu, par exemple en créant des écoles dont la spécificité réside dans des conceptions déterminées d'ordre pédagogique ou éducatif.

B.5.2. Si la liberté d'enseignement comporte le libre choix des parents de la forme de l'enseignement, et notamment le choix d'un enseignement à domicile dispensé par les parents, ou d'un enseignement dispensé dans un établissement d'enseignement qui n'est ni organisé, ni subventionné, ni reconnu au sens de l'article 3 du décret, ce libre choix des parents doit toutefois s'interpréter en tenant compte, d'une part, de l'intérêt supérieur de l'enfant et de son droit fondamental à l'enseignement et, d'autre part, du respect de l'obligation scolaire.

B.6.1. L'article 24, § 3, de la Constitution garantit en effet le droit de chacun de recevoir un enseignement « dans le respect des libertés et droits fondamentaux », tandis que l'article 24, § 4, rappelle le principe d'égalité entre tous les élèves et étudiants.

L'article 2 du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme dispose : « Nul ne peut se voir refuser le droit à l'instruction. L'Etat dans l'exercice des fonctions qu'il assumera dans le domaine de l'éducation et de l'enseignement, respectera le droit des parents d'assurer cette éducation et cet enseignement conformément à leurs convictions religieuses et philosophiques ».

L'article 28 de la Convention internationale relative aux droits de l'enfant dispose : « 1. Les Etats parties reconnaissent le droit de l'enfant à l'éducation, et en particulier, en vue d'assurer l'exercice de ce droit progressivement et sur la base de l'égalité des chances [...] ».

L'article 29 de cette Convention dispose : « 1. Les Etats parties conviennent que l'éducation de l'enfant doit viser à : a) Favoriser l'épanouissement de la personnalité de l'enfant et le développement de ses dons et de ses aptitudes mentales et physiques, dans toute la mesure de leurs potentialités;b) Inculquer à l'enfant le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et des principes consacrés dans la Charte des Nations Unies;c) Inculquer à l'enfant le respect de ses parents, de son identité, de sa langue et de ses valeurs culturelles, ainsi que le respect des valeurs nationales du pays dans lequel il vit, du pays duquel il peut être originaire et des civilisations différentes de la sienne;d) Préparer l'enfant à assumer les responsabilités de la vie dans une société libre, dans un esprit de compréhension, de paix, de tolérance, d'égalité entre les sexes et d'amitié entre tous les peuples et groupes ethniques, nationaux et religieux, et avec les personnes d'origine autochtone;e) Inculquer à l'enfant le respect du milieu naturel; [...] ».

L'article 22bis de la Constitution, tel qu'il a été complété par la révision constitutionnelle du 22 décembre 2008 (Moniteur belge du 29 décembre 2008), dispose par ailleurs : « Chaque enfant a droit au respect de son intégrité morale, physique, psychique et sexuelle.

Chaque enfant a le droit de s'exprimer sur toute question qui le concerne; son opinion est prise en considération, eu égard à son âge et à son discernement.

Chaque enfant a le droit de bénéficier des mesures et services qui concourent à son développement.

Dans toute décision qui le concerne, l'intérêt de l'enfant est pris en considération de manière primordiale.

La loi, le décret ou la règle visée à l'article 134 garantissent ces droits de l'enfant ».

B.6.2. Le droit à l'enseignement de l'enfant peut par conséquent limiter la liberté de choix des parents et la liberté des enseignants quant à l'enseignement qu'ils souhaitent dispenser à l'enfant soumis à l'obligation scolaire.

La Cour européenne des droits de l'homme considère ainsi que, lorsqu'au lieu de le conforter, les droits des parents entrent en conflit avec le droit de l'enfant à l'instruction, les intérêts de l'enfant priment (voy. CEDH, 30 novembre 2004, décision Bulski c.

Pologne; voy. aussi CEDH, 5 février 1990, décision Graeme c.

Royaume-Uni, 30 juin 1993, B.N. et S.N. c. Suède et 11 septembre 2006, décision Fritz Konrad et autres c. Allemagne).

B.7.1. Le décret attaqué a pour objectif de « s'assurer que les mineurs soumis à l'obligation scolaire bénéficient de leur droit à l'éducation » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2007-2008, n° 521/1, p. 4).

En fixant une période durant laquelle l'enseignement est obligatoire pour tous les enfants, l'obligation scolaire tend à protéger les enfants et à assurer l'effectivité de leur droit à l'éducation.

L'article 1er, § 2, de la loi du 29 juin 1983Documents pertinents retrouvés type loi prom. 29/06/1983 pub. 25/01/2011 numac 2011000012 source service public federal interieur Loi concernant l'obligation scolaire. - Traduction allemande fermer concernant l'obligation scolaire dispose : « L'enseignement et la formation dispensés au mineur soumis à l'obligation scolaire doivent contribuer à son éducation ainsi qu'à sa préparation à l'exercice d'une profession ».

Les travaux préparatoires de la loi précitée du 29 juin 1983, qui a prolongé la durée de l'obligation scolaire, exposent que celle-ci se définit essentiellement par rapport au contenu pédagogique : « Etant donné le point de départ - le droit de chaque jeune à une formation de base, - l'obligation scolaire n'est pas seulement définie en fonction de l'âge minimum mais également et surtout en fonction du contenu pédagogique » (Doc. parl., Chambre, 1982-1983, n° 645/1, p. 6).

En ce qui concerne l'enseignement à domicile, il était précisé : « Bien que l'enseignement à domicile ne réponde pratiquement plus à aucune réalité sociologique, le § 4 préserve la possibilité, sous les conditions à fixer par le Roi, de dispenser un enseignement à domicile, tout en respectant l'obligation scolaire, ceci afin de satisfaire à la liberté d'enseignement prescrite dans l'article 17 de la Constitution » (ibid., p. 7).

B.7.2. Bien que, conformément à l'article 1er, § 6, de la loi du 29 juin 1983Documents pertinents retrouvés type loi prom. 29/06/1983 pub. 25/01/2011 numac 2011000012 source service public federal interieur Loi concernant l'obligation scolaire. - Traduction allemande fermer concernant l'obligation scolaire, l'enseignement à domicile permette de satisfaire à l'obligation scolaire, le choix de cette forme d'enseignement - dont la légitimité n'est pas remise en cause par le décret attaqué - ne peut toutefois aboutir à dispenser les parents du respect de cette obligation scolaire - dont le non-respect est par ailleurs pénalement sanctionné - et à méconnaître ainsi le droit de chaque enfant à une formation de base.

La nécessité de veiller au respect de l'obligation scolaire peut ainsi conduire les communautés à instaurer des mécanismes de contrôle permettant de vérifier que tous les enfants reçoivent effectivement, fût-ce à domicile, un enseignement permettant de satisfaire à l'obligation scolaire, afin de garantir ainsi leur droit à l'instruction.

B.7.3. Il convient dès lors d'apprécier si les conditions et contrôles instaurés par le décret attaqué ne portent pas atteinte à la liberté pédagogique qu'implique la liberté d'enseignement garantie par l'article 24, § 1er, de la Constitution et si ces mesures ne sont pas disproportionnées, en ce qu'elles excéderaient ce qui est nécessaire à la réalisation des objectifs d'intérêt général visés, à savoir garantir la qualité et l'équivalence de l'enseignement.

B.8.1. L'article 11 du décret du 25 avril 2008 prévoit que le Service général de l'Inspection contrôle le niveau des études dans l'enseignement à domicile, en s'assurant que l'enseignement dispensé « permet au mineur soumis à l'obligation scolaire d'acquérir un niveau d'études équivalent aux socles de compétences, aux compétences terminales, aux savoirs communs requis et aux compétences minimales visés, respectivement, aux articles 16 et 25 ou 35 du décret du 24 juillet 1997 définissant les missions prioritaires de l'enseignement fondamental et de l'enseignement secondaire et organisant les structures propres à les atteindre ».

B.8.2. Les travaux préparatoires exposent, en ce qui concerne l'article 11 du décret attaqué : « Cette disposition fixe le cadre de référence du contrôle du niveau des études. Compte tenu du principe de la liberté de l'enseignement, il ne peut être question d'imposer le respect des socles de compétences, des compétences terminales, des savoirs requis communs ou des compétences minimales en tant que tels. Par contre, ceux-ci peuvent servir de critère pour l'appréciation du niveau d'études à atteindre pour les élèves relevant de l'enseignement à domicile. Le Service général de l'inspection sera donc chargé d'apprécier si l'enseignement prodigué peut raisonnablement être considéré comme de nature à atteindre le même niveau de connaissances que celui qui résulterait de l'application des socles et compétences » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2007-2008, n° 521/1, p. 5).

Il est toutefois possible d'obtenir sur demande motivée, conformément à l'article 12 du décret du 25 avril 2008, une dérogation au niveau d'études normalement requis « lorsque le mineur soumis à l'obligation scolaire présente des troubles de santé, d'apprentissage, du comportement ou lorsqu'il est atteint d'un handicap moteur, sensoriel ou mental ».

De la sorte, « des possibilités d'adaptation sont prévues pour les mineurs présentant un profil particulier » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2007-2008, n° 521/3, p. 4; voy. aussi Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2007-2008, n° 521/1, p. 3).

B.9.1. Le décret précité de la Communauté française du 24 juillet 1997 institue le concept de socles de compétences. Ce concept est défini comme un « référentiel présentant de manière structurée les compétences de base à exercer jusqu'au terme des huit premières années de l'enseignement obligatoire et celles qui sont à maîtriser à la fin de chacune des étapes de celles-ci parce qu'elles sont considérées comme nécessaires à l'insertion sociale et à la poursuite des études » (article 5, 2°).

Il institue également le concept de « compétences terminales », défini comme un « référentiel présentant de manière structurée les compétences dont la maîtrise à un niveau déterminé est attendue à la fin de l'enseignement secondaire » (article 5, 3°).

L'article 16 du décret précité du 24 juillet 1997 fixe les principes d'élaboration des socles de compétences, tandis que les articles 25 et 35 concernent les compétences terminales, savoirs communs requis et compétences minimales, respectivement pour les humanités générales et technologiques, et pour les humanités professionnelles et techniques.

Les articles 9 et suivants du décret de la Communauté française du 19 juillet 2001 « portant confirmation des socles de compétences visées à l'article 16 du décret du 24 juillet 1997 définissant les missions prioritaires de l'enseignement fondamental et de l'enseignement secondaire et organisant les structures propres à les atteindre et organisant une procédure de dérogation limitée » organisent une procédure permettant de déroger aux modes d'apprentissage décrits dans les socles de compétences.

B.9.2. Dans l'avant-projet soumis à la section de législation du Conseil d'Etat, il était prévu que le Service général de l'Inspection devait s'assurer que l'enseignement dispensé à domicile permet « d'acquérir un niveau d'études suffisant en référence aux socles de compétences, aux compétences terminales, aux savoirs communs requis et aux compétences minimales [...] ».

Le terme « niveau d'études suffisant » a été remplacé par « niveau d'études équivalent » afin de tenir compte des observations du Conseil d'Etat : « L'expression ' niveau d'études suffisant ' est particulièrement vague et laisse dès lors un pouvoir discrétionnaire très large au Service général de l'Inspection. [...] Le Conseil d'Etat n'aperçoit pas pourquoi les mineurs soumis à l'obligation scolaire doivent seulement acquérir un ' niveau d'études suffisant ' en référence aux socles de compétences, aux compétences terminales, aux savoirs communs requis et aux compétences minimales, et ce d'autant moins qu'ils doivent être placés [...] dans des conditions identiques à celles des mineurs provenant d'autres formes d'enseignement pour l'épreuve et les examens qu'ils sont tenus de présenter [...] » Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2007-2008, n° 521/1, p. 23).

B.10.1.1. Si la liberté d'enseignement, visée à l'article 24, § 1er, de la Constitution, implique le droit d'organiser et d'offrir, sans référence à une conception philosophique confessionnelle ou non confessionnelle déterminée, un enseignement qui trouve sa spécificité dans les conceptions pédagogiques ou éducatives particulières, elle n'empêche toutefois pas que le législateur compétent prenne, en vue d'assurer la qualité et l'équivalence de l'enseignement obligatoire, des mesures qui soient applicables de manière générale, indépendamment de la spécificité de l'enseignement dispensé.

B.10.1.2. En ce qui concerne l'enseignement dispensé à l'aide de moyens publics, la Cour a reconnu qu'en vue d'assurer la qualité et l'équivalence de l'enseignement, le législateur compétent peut prendre des mesures qui sont applicables de manière générale aux établissements d'enseignement, indépendamment de la spécificité de l'enseignement dispensé par ceux-ci (arrêts n° 76/96 du 18 décembre 1996, B.6; n° 19/98 du 18 février 1998, B.8.4; n° 19/99 du 17 février 1999, B.4.3; n° 49/2001 du 18 avril 2001, B.8; n° 131/2003 du 8 octobre 2003, B.5.4). A cet égard, les objectifs de développement, les objectifs finaux et les socles de compétences sont un moyen adéquat pour assurer l'équivalence des certificats et diplômes et garantir l'équivalence de l'enseignement dispensé dans les établissements que les parents et les élèves peuvent librement choisir (arrêts n° 76/96 du 18 décembre 1996, B.8.3, et n° 49/2001 du 18 avril 2001, B.10.1).

En ce qui concerne les établissements d'enseignement qui choisissent de ne pas recourir à des subventions publiques, bien que l'autorité publique puisse contrôler la qualité de l'enseignement dispensé, ce contrôle ne peut aller jusqu'à exiger le respect des objectifs de développement, des objectifs finaux ou des socles de compétences.

B.10.2. En se référant aux socles de compétences, aux compétences terminales, aux savoirs communs requis et aux compétences minimales prévus dans le décret du 24 juillet 1997, l'article 11 attaqué permet d'apprécier le niveau d'études de l'enfant, par rapport à des « référentiels » clairement établis, de sorte que le niveau d'études sera apprécié en fonction de critères connus des parents et des enseignants, et par conséquent suffisamment prévisibles.

La référence aux socles de compétences, aux compétences terminales, aux savoirs communs requis et aux compétences minimales ne signifie donc pas que leur contenu pourrait être imposé aux enfants relevant de l'enseignement à domicile; cette référence signifie seulement qu'ils constituent des critères indicatifs des connaissances et aptitudes globales de base qu'un enfant doit, en fonction de son âge, pouvoir maîtriser.

Dans les travaux préparatoires, le ministre a d'ailleurs expressément exposé : « La référence aux socles et compétences précités ne peut en aucun cas permettre [au Service général de l'Inspection] de porter un jugement sur les pratiques pédagogiques utilisées ou d'imposer quelque contenu que ce soit. Ces normes de référence clairement établies doivent permettre d'éviter tout arbitraire ! » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2007-2008, n° 521/3, pp. 3-4).

B.10.3. L'article 11 attaqué ne permet donc pas d'imposer un programme aux enseignants de l'enseignement à domicile.

Le texte de l'article 11 attaqué ne prévoit d'ailleurs pas que le Service général de l'Inspection contrôle que le niveau d'études est « identique », mais seulement qu'il est « équivalent » aux socles de compétences, aux compétences terminales, aux savoirs communs requis et aux compétences minimales prévus dans le décret du 24 juillet 1997.

Cette « équivalence » du niveau d'études de l'enseignement à domicile par rapport à l'enseignement organisé ou subventionné doit par conséquent recevoir la même acception que l'« équivalence » au sens de la loi du 19 mars 1971 relative à l'équivalence des diplômes et certificats d'études étrangers.

B.10.4. Compte tenu, dès lors, des caractéristiques propres à l'enseignement à domicile et à la liberté d'enseignement, l'appréciation du caractère « équivalent » du niveau d'études doit prendre en considération les méthodes pédagogiques ainsi que les conceptions idéologiques, philosophiques ou religieuses des parents ou des enseignants, pour autant que ces méthodes et conceptions ne méconnaissent pas le droit de l'enfant à recevoir un enseignement dans le respect des libertés et droits fondamentaux et ne portent atteinte ni à la qualité de l'enseignement ni au niveau d'études à atteindre.

B.10.5. L'article 11 attaqué ne méconnaît donc pas la liberté d'enseignement.

B.11. Le premier moyen n'est pas fondé.

Quant au deuxième moyen B.12. La partie requérante reproche aux articles 17 et 21 du décret du 25 avril 2008 de violer les articles 10 et 11 de la Constitution en imposant aux personnes responsables d'inscrire l'enfant scolarisé à domicile dans une école organisée, subventionnée ou reconnue par la Communauté pour le cas où le contrôle du niveau des études aboutit à un résultat insatisfaisant ou dans l'hypothèse où cet enfant n'obtient pas le certificat ou l'attestation visés aux articles 18 à 20 du décret attaqué.

En ce qui concerne les conséquences du contrôle du niveau des études B.13.1. En vertu de l'article 14 du décret attaqué, un contrôle du niveau des études peut avoir lieu à tout moment, et au moins durant les années au cours desquelles le mineur soumis à l'obligation scolaire atteint l'âge de 8 et de 10 ans.

Les travaux préparatoires exposent : « En fonction de la situation de chaque enfant, le Service général de l'inspection pourra procéder à un contrôle à n'importe quel moment. Il peut également être requis par le Gouvernement ou la Commission de l'enseignement à domicile. Dans tous les cas, un contrôle devra toutefois avoir lieu durant chacune des années indiquées par cette disposition. De cette manière, un contrôle aura lieu au moins tous les deux ans. Pour les années ultérieures, ces contrôles restent bien entendu possibles, mais ne sont plus obligatoires, puisque les mineurs devront présenter les jurys » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2007-2008, n° 521/1, p. 5).

B.13.2. Le fait de permettre qu'un contrôle ait lieu à tout moment tend ainsi à prendre en compte la situation de chaque enfant.

Par ailleurs, le Service général de l'Inspection doit notifier ce contrôle aux personnes responsables au moins un mois avant la date du contrôle (article 14, alinéa 3, du décret du 25 avril 2008).

B.13.3. L'article 14 ne méconnaît pas la liberté d'enseignement.

B.14.1. Après avoir réalisé le contrôle du niveau des études, le Service général de l'Inspection établit dans le mois un rapport et émet un avis sur la conformité à l'article 11 de l'enseignement dispensé à domicile. Le rapport de contrôle et l'avis de conformité à l'article 11 du décret sont notifiés aux personnes responsables qui, dans les dix jours de la notification, peuvent communiquer par écrit leurs observations à la Commission de l'enseignement à domicile, qui statue (article 17, alinéas 1er et 2, du décret du 25 avril 2008).

En cas de décision négative, un nouveau contrôle est effectué, selon les mêmes modalités, au minimum deux mois et au maximum quatre mois à dater de la notification de cette décision; si la décision est encore négative, les personnes responsables disposent à nouveau de la possibilité de faire valoir par écrit leurs observations dans les dix jours de la notification (article 17, alinéa 3, du décret du 25 avril 2008).

Un régime spécifique est prévu lorsque le Service général de l'Inspection estime que le mineur relève de l'enseignement spécialisé (article 17, alinéa 6, du décret du 25 avril 2008).

En cas de deuxième décision négative de la Commission, les personnes responsables disposent de quinze jours à partir de la notification de la décision de la Commission pour introduire un recours auprès du Gouvernement. Le Gouvernement dispose d'un mois pour se prononcer sur le recours (articles 23 et 24 du décret du 25 avril 2008).

Ce n'est que lorsque le Gouvernement rejette le recours contre une seconde décision négative de la Commission que les personnes responsables sont tenues d'inscrire le mineur soumis à l'obligation scolaire dans un établissement organisé ou subventionné par la Communauté, ou dans un établissement visé à l'article 3 du décret (article 17, alinéa 4, du décret du 25 avril 2008), afin de ne pas laisser perdurer une situation de « sous-scolarisation » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2007-2008, n° 521/1, p. 6).

B.14.2. Il n'est ni déraisonnable ni disproportionné d'imposer, au terme de cette longue procédure qui prend en compte tant l'avis des personnes responsables que l'intérêt de l'enfant que, dans l'hypothèse de deux constats successifs de lacunes dans le niveau d'études de l'enfant scolarisé à domicile, l'enfant doive être inscrit dans un établissement d'enseignement organisé, subventionné ou visé à l'article 3 du décret.

La liberté de choix des parents quant à l'enseignement qu'ils veulent dispenser à leur enfant n'est ainsi limitée que dans la mesure où leur choix aboutit à un enseignement qui a été, par deux fois, considéré comme déficient, et qui méconnaît ainsi le droit à l'enseignement de l'enfant.

L'inscription obligatoire de l'enfant dans un établissement d'enseignement organisé, subventionné ou visé par l'article 3 du décret du 25 avril 2008 assure ainsi à l'enfant qu'il bénéficiera d'un enseignement garantissant un niveau d'études qui soit respecte les compétences définies par le décret du 24 juillet 1997, soit a été reconnu conformément à l'article 3 du décret du 25 avril 2008.

Pour le surplus, les parents conservent leur liberté de choix de l'établissement d'enseignement, qui ne doit pas nécessairement relever de l'enseignement organisé ou subventionné par la Communauté française, puisqu'il peut s'agir d'un établissement reconnu au sens de l'article 3 du décret.

B.14.3. L'article 17 ne méconnaît pas la liberté d'enseignement.

En ce qui concerne les épreuves de certification B.15. Les articles 18 à 20 du décret du 25 avril 2008 prévoient l'inscription de l'enfant scolarisé à domicile à différentes épreuves.

L'article 18 prévoit qu'au plus tard dans l'année scolaire au cours de laquelle l'enfant scolarisé à domicile atteindra l'âge de 12 ans, il devra être inscrit à l'épreuve externe commune organisée en vue de l'obtention du certificat d'études de base en vertu du décret du 2 juin 2006 relatif à l'évaluation externe des acquis des élèves de l'enseignement obligatoire et au certificat d'études de base au terme de l'enseignement primaire.

L'article 19 prévoit qu'au plus tard dans l'année scolaire au cours de laquelle l'enfant scolarisé à domicile atteint l'âge de quatorze ans, il doit être inscrit aux examens organisés en vue de la délivrance des attestations d'orientation sanctionnant le premier degré en vertu du décret du 12 mai 2004 portant organisation du jury de la Communauté française de l'Enseignement secondaire.

L'article 20 prévoit qu'au plus tard dans l'année scolaire au cours de laquelle l'enfant scolarisé à domicile atteint l'âge de seize ans, il doit être inscrit aux examens organisés en vue de la délivrance des attestations d'orientation sanctionnant le deuxième degré en vertu du décret du 12 mai 2004 précité.

Lorsque le mineur qui présente des troubles de la santé, d'apprentissage, du comportement ou lorsqu'il est atteint d'un handicap moteur, sensoriel ou mental, bénéficie d'une dérogation conformément à l'article 12, l'article 22 du décret autorise la Commission à accorder, sur demande motivée, des dispenses ou délais supplémentaires pour la présentation des épreuves visées aux articles 18 et 20.

Si l'enfant n'obtient pas le certificat ou les attestations dans les conditions prévues aux articles 18 à 20 du décret, il devra être inscrit dans un établissement organisé ou subventionné par la Communauté ou dans un établissement visé à l'article 3 du décret (article 21, alinéa 1er, du décret du 25 avril 2008).

B.16. La partie requérante est le pouvoir organisateur de deux écoles d'enseignement maternel et primaire. Elle ne justifie donc de l'intérêt pour agir en annulation de l'article 21 du décret attaqué qu'en ce qu'il concerne les conséquences d'un échec à l'épreuve commune externe menant au certificat d'études de base visée à l'article 18 du décret.

B.17. Etant donné que, par son arrêt n° 107/2009 du 9 juillet 2009, la Cour a partiellement annulé cette disposition, le recours est devenu sans objet.

Quant au troisième moyen B.18. Le troisième moyen est pris de la violation, par l'article 14 du décret attaqué, des articles 10, 11, 22, 24, 30 et 129, § 1er, 2°, de la Constitution.

La requérante considère qu'en permettant au Service général de l'Inspection d'imposer que les épreuves liées au contrôle du niveau des études soient organisées en français, alors que l'enseignement à domicile peut être dispensé dans une autre langue, la Communauté excède ses compétences en violation de l'article 129, § 1er, 2°, de la Constitution, qui ne l'autorise à régler l'emploi des langues dans l'enseignement que pour les « établissements créés, subventionnés ou reconnus par les pouvoirs publics ».

La requérante estime par ailleurs que la Communauté française méconnaît de manière discriminatoire la liberté d'enseignement et la liberté d'emploi des langues.

B.19.1. L'article 129 de la Constitution dispose : « § 1. Les Parlements de la Communauté française et de la Communauté flamande, chacun pour ce qui le concerne, règlent par décret, à l'exclusion du législateur fédéral, l'emploi des langues pour : [...] 2° l'enseignement dans les établissements créés, subventionnés ou reconnus par les pouvoirs publics; [...] ».

B.19.2. L'article 30 de la Constitution dispose : « L'emploi des langues usitées en Belgique est facultatif; il ne peut être réglé que par la loi, et seulement pour les actes de l'autorité publique et pour les affaires judiciaires ».

B.20. Il résulte de la formulation du moyen qu'il critique l'article 14 du décret du 25 avril 2008, dans la mesure où cette disposition concerne des enfants relevant de l'enseignement à domicile et qui sont instruits totalement ou principalement dans une autre langue que le français.

B.21.1. En disposant que les enfants soumis à l'obligation scolaire qui relèvent de la compétence de la Communauté française et qui sont instruits à domicile doivent présenter les épreuves concernant le contrôle du niveau des études organisées en français par la Communauté française et qu'en cas d'absence de réussite de ces épreuves, ils devront être inscrits dans un établissement organisé, subventionné ou reconnu par la Communauté française, l'article 14 du décret attaqué, lu en combinaison avec l'article 17 du même décret, n'est pas une disposition qui règle l'emploi des langues dans l'enseignement, au sens de l'article 129, § 1er, 2°, de la Constitution, mais une disposition qui règle l'enseignement, au sens de l'article 127, § 1er, alinéa 1er, 2°, de la Constitution.

B.21.2. La disposition attaquée relève dès lors de la compétence du législateur décrétal.

Le moyen, en ce qu'il invoque l'article 129, § 1er, 2°, de la Constitution, n'est donc pas fondé.

Il découle encore de ce qui précède que contrairement à ce que soutient la partie requérante, le Service général de l'Inspection ne dispose d'aucune marge de manoeuvre dans le choix de la langue utilisée pour ces épreuves, de telle sorte que le principe de légalité, visé à l'article 24, § 5, de la Constitution, n'est pas davantage violé.

B.22. Il convient d'examiner encore si cette disposition ne porte pas une atteinte injustifiée à la liberté d'emploi des langues dans le cadre de l'enseignement à domicile, qui serait déduite des dispositions constitutionnelles citées dans le moyen.

B.23.1. Lorsque des parents choisissent un enseignement à domicile pour leur enfant, ils peuvent choisir de dispenser ou faire dispenser cet enseignement exclusivement ou principalement dans une autre langue que le français.

Ce choix, qui relève de la sphère de la vie privée, peut notamment s'expliquer par le fait que des parents, de nationalité étrangère, notamment des ressortissants de l'Union européenne qui ne séjournent que temporairement sur le territoire de la Belgique, peuvent préférer un enseignement dans leur langue maternelle, plutôt que dans la langue de leur lieu de résidence temporaire.

Si la Communauté française n'est pas tenue d'assurer aux ressortissants étrangers un droit à un enseignement selon leurs préférences linguistiques, elle ne peut toutefois interdire ce choix notamment lorsqu'il s'exerce dans le cadre d'un enseignement à domicile au sens du décret attaqué.

Les enfants relevant de l'enseignement à domicile et instruits dans une autre langue que le français ne sont en effet visés ni par la législation concernant le régime linguistique dans l'enseignement ni par la législation relative à l'enseignement en immersion linguistique.

B.23.2. Etant donné toutefois que l'obligation scolaire, qui vise à garantir l'exercice réel du droit à l'enseignement dans l'intérêt de l'enfant, doit pouvoir être contrôlée de manière effective et que l'on ne peut attendre raisonnablement de la Communauté française qu'elle prévoie les épreuves précitées dans toute langue, ce qui ne lui est du reste imposé par aucune obligation constitutionnelle ou internationale, il n'est pas disproportionné de soumettre aux épreuves liées au contrôle du niveau des études organisées en français les enfants qui relèvent de la compétence de la Communauté française et qui sont instruits à domicile, même s'ils le sont exclusivement ou principalement dans une autre langue.

B.24. Le troisième moyen n'est pas fondé.

Par ces motifs, la Cour rejette le recours.

Ainsi prononcé en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989, à l'audience publique du 29 octobre 2009.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président, P. Martens.

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