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Arrêt
publié le 25 octobre 2010

Extrait de l'arrêt n° 94/2010 du 29 juillet 2010 Numéros du rôle : 4824, 4832, 4844, 4845 et 4861 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 6.1.1, alinéas 3 et 4, et à l'article 6.1.2 du « Code flamand de l'aménagement d La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Bossuyt et M. Melchior, et des juges R. He(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 94/2010 du 29 juillet 2010 Numéros du rôle : 4824, 4832, 4844, 4845 et 4861 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 6.1.1, alinéas 3 et 4, et à l'article 6.1.2 du « Code flamand de l'aménagement du territoire » (coordination du 15 mai 2009), posées par la Cour d'appel de Gand.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Bossuyt et M. Melchior, et des juges R. Henneuse, E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, J. Spreutels, T. Merckx-Van Goey et P. Nihoul, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président M. Bossuyt, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure a. Par arrêt du 27 novembre 2009 en cause du ministère public et de l'inspecteur urbaniste régional contre Guy Van Weehaeghe et la SA « Ysowe », dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 7 décembre 2009, la Cour d'appel de Gand a posé les questions préjudicielles suivantes : 1.« L'article 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire viole-t-il le droit de propriété du tiers lésé par le maintien d'une construction illégale, droit garanti par l'article 16 de la Constitution et par l'article 1.1 du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, combinés ou non avec le principe de légalité et avec le principe de confiance, en ce que cette disposition empêche qu'il soit encore fait droit à l'action publique intentée dans les délais auprès de la juridiction de jugement en vue de la remise dans le pristin état ou de la remise dans l'état légal, si le maintien de cette construction n'est plus punissable au moment de la décision ? »; 2. « L'article 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire viole-t-il le principe de standstill, contenu dans l'article 23 de la Constitution, en laissant s'éteindre - sans prévoir d'alternative - des droits d'action déjà existants et exercés devant le juge par les pouvoirs publics en vue de restaurer le bon aménagement du territoire, à la suite d'une dépénalisation de l'infraction de maintien, alors que cette dépénalisation laisse intacte, tant de facto que de jure, l'atteinte concrète au bon aménagement du territoire ? »; 3. « Les articles 6.1.1, alinéa 3, et 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire violent-ils le principe de standstill, contenu dans l'article 23 de la Constitution, en ce que, combinées, ces dispositions rendent impossible l'imposition d'une mesure de réparation pour cause de maintien dans une zone non vulnérable du point de vue spatial et font ainsi dépendre en fait la possibilité pour l'autorité de demander la réparation de situations irrégulières de l'existence et de l'éventuelle poursuite d'un auteur auquel l'infraction constituée par la construction est imputable, alors que cette circonstance est sans rapport avec le dommage que la situation illégale a éventuellement causé au bon aménagement du territoire ? »; 4. « Les articles 6.1.1, alinéa 3, et 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que, combinées, ces dispositions ont pour effet que la personne qui maintient une situation en dehors d'une zone vulnérable du point de vue spatial et parallèlement à laquelle un constructeur peut encore être poursuivi pour l'infraction constituée par la construction peut encourir les conséquences d'une mesure de réparation imposée, alors que cette même personne ne doit pas subir ces conséquences s'il n'est plus possible de poursuivre un constructeur pour l'infraction constituée par la construction ? ». b. Par arrêt du 4 décembre 2009 en cause du ministère public contre Hugo Durinck et Rita Van Bockstaele, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 14 décembre 2009, la Cour d'appel de Gand a posé la question préjudicielle suivante : « Les articles 6.1.1, alinéa 3, et 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'ils ont pour effet, lorsqu'ils sont combinés, que la personne (morale) qui maintient une situation irrégulière en dehors d'une zone vulnérable du point de vue spatial et qui n'est pas poursuivie ou n'est pas jugée coupable de l'infraction de construction peut encore encourir les conséquences d'une mesure de réparation imposée lorsqu'un tiers est poursuivi et jugé coupable de l'infraction de construction et qu'une mesure de réparation est ordonnée à son encontre, alors qu'une même personne (morale) qui maintient une situation irrégulière en dehors d'une zone vulnérable du point de vue spatial et qui n'est pas poursuivie ou n'est pas jugée coupable de l'infraction de construction ne peut pas encourir de telles conséquences lorsqu'aucun tiers n'est poursuivi ou ne peut plus l'être pour l'infraction de construction ? ». c. Par deux arrêts du 18 décembre 2009 en cause respectivement du ministère public contre Marc Devolder et du ministère public et de l'inspecteur urbaniste régional contre Geert Bauwens et la SA « Opslag, Manipulatie en Distributie G.M.B. », dont les expéditions sont parvenues au greffe de la Cour le 11 janvier 2010, la Cour d'appel de Gand a posé les questions préjudicielles suivantes : 1. « L'article 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire viole-t-il le droit de propriété du tiers lésé par le maintien d'une construction illégale, droit garanti par l'article 16 de la Constitution et par l'article 1.1 du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, combinés ou non avec le principe de légalité et avec le principe de confiance, en ce que cette disposition empêche qu'il soit fait droit à l'action publique intentée dans les délais auprès de la juridiction de jugement en vue de la remise dans le pristin état ou de la remise dans l'état légal, si le maintien de cette construction n'est plus punissable au moment de la décision ? »; 2. « L'article 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire viole-t-il le principe de standstill, contenu dans l'article 23 de la Constitution, en laissant s'éteindre -sans prévoir d'alternative - des droits d'action déjà existants et exercés devant le juge par les pouvoirs publics en vue de restaurer le bon aménagement du territoire, à la suite d'une dépénalisation de l'infraction de maintien, alors que cette dépénalisation laisse intacte, tant de facto que de jure, l'atteinte concrète au bon aménagement du territoire ? »; 3. « Les articles 6.1.1, alinéa 3, et 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire violent-ils le principe de standstill, contenu dans l'article 23 de la Constitution, en ce que, combinées, ces dispositions rendent impossible l'imposition d'une mesure de réparation pour cause de maintien dans une zone non vulnérable du point de vue spatial et font ainsi dépendre en fait la possibilité pour l'autorité de demander la réparation de situations irrégulières de l'existence et de l'éventuelle poursuite ou déclaration de culpabilité d'un auteur auquel l'infraction constituée par la construction est imputable, alors que cette circonstance est sans rapport avec le dommage que la situation illégale a éventuellement causé au bon aménagement du territoire ? »; 4. « Les articles 6.1.1, alinéa 3, et 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'ils ont pour effet, lorsqu'ils sont combinés, que la personne (morale) qui maintient une situation irrégulière en dehors d'une zone vulnérable du point de vue spatial et qui n'est pas poursuivie ou n'est pas jugée coupable de l'infraction de construction peut encore encourir les conséquences d'une mesure de réparation imposée lorsqu'un tiers est poursuivi et jugé coupable de l'infraction de construction et qu'une mesure de réparation est ordonnée à son encontre, alors qu'une même personne (morale) qui maintient une situation irrégulière en dehors d'une zone vulnérable du point de vue spatial et qui n'est pas poursuivie ou n'est pas jugée coupable de l'infraction de construction ne peut pas encourir de telles conséquences lorsqu'aucun tiers n'est poursuivi ou ne peut plus l'être pour l'infraction de construction ? ». d. Par arrêt du 15 janvier 2010 en cause de Tom De Roep, agissant en sa qualité d'inspecteur urbaniste régional, contre Georges Depoorter, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 2 février 2010, la Cour d'appel de Gand a posé les questions préjudicielles suivantes : 1.« L'article 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire viole-t-il le droit de propriété du tiers lésé par le maintien d'une construction illégale, droit garanti par l'article 16 de la Constitution et par l'article 1.1 du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, combiné ou non avec le principe de légalité et avec le principe de confiance, en ce que cette disposition empêche qu'il soit encore fait droit à l'action publique intentée dans les délais auprès de la juridiction de jugement en vue de la remise dans le pristin état ou de la remise dans l'état légal, si le maintien de cette construction n'est plus punissable au moment de la décision ? »; 2. « L'article 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire viole-t-il le principe de standstill, contenu dans l'article 23 de la Constitution, en laissant s'éteindre -sans prévoir d'alternative - des droits d'action déjà existants et exercés devant le juge par les pouvoirs publics en vue de restaurer le bon aménagement du territoire, à la suite d'une dépénalisation de l'infraction de maintien, alors que cette dépénalisation laisse intacte, tant de facto que de jure, l'atteinte concrète au bon aménagement du territoire ? »; 3. « Les articles 6.1.1, alinéa 3, 6.1.1, alinéa 4, et 6.1.2 du Code flamand de l'aménagement du territoire violent-ils le principe de standstill, contenu dans l'article 23 de la Constitution, en ce que, combinées, ces dispositions rendent totalement impossible l'imposition d'une mesure de réparation pour cause de faits de maintien et font ainsi dépendre de facto la possibilité pour l'autorité de réparer des situations irrégulières de l'existence d'un auteur auquel l'infraction constituée par la construction est imputable, alors que cette circonstance est sans aucun rapport avec le dommage que la situation illégale cause au bon aménagement du territoire ? ».

Ces affaires, inscrites sous les numéros 4824, 4832, 4844, 4845 et 4861 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) III. En droit (...) Quant aux dispositions en cause B.1.1. Les questions préjudicielles portent sur l'article 6.1.1, alinéas 3 et 4, et sur l'article 6.1.2 du « Vlaamse Codex Ruimtelijke Ordening » (ci-après : Code flamand de l'aménagement du territoire), coordonné par l'arrêté du Gouvernement flamand du 15 mai 2009.

B.1.2. Ces dispositions font partie du titre VI (« Mesures de maintien »), chapitre Ier (« Dispositions pénales »), division 1ère (« Sanctions pénales ») du Code flamand de l'aménagement du territoire.

L'article 6.1.1 dispose : « Est punie d'un emprisonnement allant de huit jours à cinq ans et d'une amende de [26 euros à] 400 000 euros ou de l'une de ces peines, la personne qui : 1° exécute, poursuit ou maintient certains actes déterminés par les articles 4.2.1 et 4.2.15, soit sans permis préalable, soit en contravention du permis, soit après déchéance, annulation ou expiration du délai du permis, soit en cas de suspension du permis; 2° exécute, poursuit ou maintient des actes contraires à un plan d'exécution spatial, tel que visé aux articles 2.2.1 à 2.2.18 inclus, à un projet de plan d'exécution spatial pour lequel a été appliqué l'article 4.3.2 ou 4.4.7, § 1er, ou aux règlements urbanistiques et aux règlements de lotissement, mentionnés dans les articles 2.3.1 à 2.2.3 inclus, sauf si les actes exécutés sont autorisés ou s'il s'agit de travaux d'entretien à une construction principalement autorisée ou d'actes exemptés de l'obligation d'autorisation; 3° admet ou tolère en sa qualité de propriétaire que l'un des faits punissables visés aux points 1° et 2° est commis, poursuivi ou maintenu; 4° commet une infraction à l'obligation d'information visée aux articles 5.2.1 à 5.2.6 inclus; 5° poursuit les actes contraires à l'ordre de cessation, à la décision de confirmation ou, le cas échéant, à la décision en référé;6° commet une infraction après le 1er mai 2000 aux plans d'aménagement et aux règlements qui ont été établis conformément aux dispositions du décret relatif à l'aménagement du territoire, coordonné le 22 octobre 1996, et qui demeurent en vigueur aussi longtemps et dans la mesure où ils ne sont pas remplacés par de nouvelles ordonnances émises en vertu du présent code, ou qui poursuit ou maintient cette infraction de quelque manière qu'il soit, sauf si les travaux, actes ou modifications exécutés sont autorisés ou s'il s'agit de travaux d'entretien à une construction principalement autorisée ou d'actes exemptés de l'obligation d'autorisation;7° exécute, poursuit ou maintient des actes qui constituent une infraction au permis de bâtir et au permis de lotir qui ont été octroyés en vertu du décret relatif à l'aménagement du territoire, coordonné le 22 octobre 1996. Les peines minimales sont toutefois un emprisonnement de quinze jours et une amende de 2.000 euros, ou l'une de ces peines, lorsque les infractions visées au premier alinéa sont commises par des fonctionnaires instrumentant, des agents immobiliers et d'autres personnes qui achètent, lotissent, mettent en vente ou en location, vendent ou louent, construisent ou conçoivent et/ou érigent des installations fixes ou amovibles dans l'exercice de leur profession ou activité ou les personnes qui agissent comme intermédiaires dans le cadre de telles opérations, durant l'exercice de leur profession.

La sanction pénale pour [le maintien] d'infractions visées au premier alinéa, 1°, 2°, 3°, 6° et 7° ne s'applique pas pour autant que les actes, les travaux, les modifications ou l'usage contraire ne se situent pas dans les zones vulnérables d'un point de vue spatial. Pour [le maintien punissable], il est uniquement exigé que les actes incriminés au moment [du maintien] soient situés dans une zone vulnérable du point de vue spatial.

Une action en réparation engagée par l'inspecteur urbaniste ou par le Collège des bourgmestre et échevins en vertu du maintien de certains actes ne peut plus être autorisée à partir du 1er septembre 2009, si [ce maintien] a cessé d'être punissable au moment du [prononcé] ».

L'article 6.1.2 du Code flamand de l'aménagement du territoire dispose : « L'article 6.1.1, troisième alinéa, ajouté au décret du 4 juin 2003 et partiellement [annulé] par l'arrêt n° 14/2005 du 19 janvier 2005 de la Cour constitutionnelle, est interprété comme suit : Cette disposition [supprime] la pénalisation des délits de maintien mentionnés ».

B.1.3.1. L'article 6.1.1, alinéa 3, du Code flamand de l'aménagement du territoire a été repris, lors de la coordination de ce code, de l'article 146, alinéa 3, du décret de la Région flamande du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire.

L'article 146, alinéa 3, précité, tel qu'il a été inséré par l'article 7 du décret du 4 juin 2003 « modifiant le décret du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire en ce qui concerne la politique de maintien », disposait : « La sanction pour [le maintien] d'infractions visées à l'alinéa premier, 1°, 2°, 3°, 6° et 7°, ne s'applique pas pour autant que les opérations, travaux, modifications ou l'utilisation contraire ne sont pas situés dans les zones vulnérables du point vue spatial, pour autant qu'ils ne provoquent pas de nuisances urbanistiques inadmissibles pour les voisins ou pour autant qu'ils ne constituent pas de violation grave des prescriptions urbanistiques essentielles en matière de destination en vertu du plan d'exécution spatial ou du plan d'aménagement ».

Par son arrêt n° 14/2005 du 19 janvier 2005, la Cour a annulé, dans cette disposition, les mots « pour autant qu'ils ne provoquent pas de nuisances urbanistiques inadmissibles pour les voisins ou pour autant qu'ils ne constituent pas de violation grave des prescriptions urbanistiques essentielles en matière de destination en vertu du plan de l'exécution spatial ou du plan d'aménagement ».

B.1.3.2. Il découle de la première phrase de l'article 6.1.1, alinéa 3, du Code flamand de l'aménagement du territoire que le maintien d'infractions en matière d'urbanisme dans des zones autres que les zones vulnérables du point de vue spatial n'est plus punissable depuis le 22 août 2003, date d'entrée en vigueur de l'article 7, précité, du décret du 4 juin 2003. Comme la Cour l'a observé dans l'arrêt n° 14/2005 précité, l'article 7 du décret du 4 juin 2003 visait à ne plus considérer une infraction en matière d'urbanisme comme une infraction continue et à ne plus pénaliser sa persistance (Doc. parl., Parlement flamand, n° 2002-2003, n° 1566/7, p. 38).

Dans les zones vulnérables du point de vue spatial, le maintien comme l'exécution ou la poursuite d'infractions en matière d'urbanisme restent punissables. L'« exécution ou la poursuite » punissable, sera dénommée ci-après l'« infraction constituée par la construction ».

B.1.3.3. L'article 6.1.1, alinéa 3, du Code flamand de l'aménagement du territoire (précédemment l'article 146, alinéa 3, du décret portant organisation de l'aménagement du territoire) doit être combiné avec l'article 6.1.2 du même Code (précédemment l'article 184 du décret portant organisation de l'aménagement du territoire), tel qu'il a été inséré par l'article 83 du décret de la Région flamande du 27 mars 2009 « adaptant et complétant la politique d'aménagement du territoire, des autorisations et du maintien ».

Par cette disposition, le législateur décrétal a indiqué que l'article 146, alinéa 3, du décret portant organisation de l'aménagement du territoire (« la sanction pour [le maintien] d'infractions [...] ne s'applique pas pour autant que [...] ») visait non seulement à instaurer un motif d'exclusion de la peine mais entendait aussi dépénaliser le maintien d'infractions en matière d'urbanisme dans des zones autres que les zones vulnérables du point de vue spatial.

B.1.4.1. L'article 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire traite des actions en réparation intentées par l'inspecteur urbaniste ou par le collège des bourgmestre et échevins, fondées sur le maintien d'infractions en matière d'urbanisme dans des zones autres que les zones vulnérables du point de vue spatial.

Lors de la coordination du Code flamand de l'aménagement du territoire, cet alinéa 4 a été repris de l'article 146, alinéa 4, du décret portant organisation de l'aménagement du territoire, tel qu'il a été remplacé par l'article 50, 7°, du décret de la Région flamande du 27 mars 2009 « adaptant et complétant la politique d'aménagement du territoire, des autorisations et du maintien ». La date du 1er septembre 2009, mentionnée dans cette disposition, est liée à la date d'entrée en vigueur du décret précité du 29 mars 2009.

B.1.4.2. L'objectif que le législateur décrétal poursuivait en adoptant cette disposition a été exposé comme suit dans les travaux préparatoires : « Pour ce qui est des infractions de maintien, la question se pose toutefois de savoir s'il est opportun ou justifiable qu'après la dépénalisation de certaines de ces infractions (à savoir celles qui ne sont pas localisées dans une zone vulnérable du point de vue spatial), des actions en réparation (d'office) puissent encore être accueillies sur la base du maintien.

Le contentieux afférent au décret du 4 juin 2003 relatif au maintien enseigne à cet égard que les actions en réparation qui étaient pendantes avant le 22 août 2003 (date d'entrée en vigueur du décret du 4 juin 2003) ne sont pas, en soi, sans fondement. Les actions en réparation intentées avant l'entrée en vigueur du présent projet de décret sur la base du maintien (dorénavant dépénalisé) en zone agricole d'intérêt paysager, pourront en principe tout autant être accueillies.

D'un point de vue social, cette situation n'est pas tout à fait compatible avec la nature de l'action en réparation, qui constitue notamment un mode particulier de réparation ou de restitution destiné à mettre fin à une situation contraire à la loi, résultant de l'infraction et nuisant à l'intérêt général (Cass. 19 septembre 1989, T.R.O.S. 1999, 109, note). Cette lésion de l'intérêt général est fortement nuancée par une dépénalisation.

Pour cette raison, il est prévu pour l'avenir (à partir de l'entrée en vigueur du projet de décret) que les actions en réparation (d'office) qui sont fondées sur un maintien qui n'est plus punissable au moment de la décision ne peuvent plus être accueillies » (Doc. parl., Parlement flamand, 2008-2009, n° 2011/3, p. 57).

B.1.5. L'article 6.1.41, § 1er, du Code flamand de l'aménagement du territoire, qui n'est pas en cause, dispose : « Outre la peine, le tribunal peut ordonner de remettre le lieu en son état initial ou de cesser l'utilisation contraire, et/ou d'exécuter des travaux de construction ou d'adaptation et/ou de payer une amende égale à la plus-value acquise par le bien suite à l'infraction ».

Compte tenu des données des affaires soumises au juge a quo, qui portent sur des actions intentées par l'inspecteur urbaniste en vue de la remise en l'état, la Cour se limite à l'examen de l'« action en réparation » qui poursuit la remise en l'état, faisant donc abstraction d'éventuelles actions en réparation visant des travaux de construction ou d'adaptation ou le paiement d'une plus-value.

Quant à la pertinence des questions préjudicielles B.2.1. Le deuxième intimé dans l'affaire n° 4845 fait valoir que le Gouvernement flamand, en affirmant que les dispositions en cause ne sont pas contraires à la Constitution, se désiste de l'action publique en réparation intentée par l'inspecteur urbaniste, au nom du Gouvernement flamand, dans le litige soumis au juge a quo et que ce désistement a pour effet que les questions préjudicielles ne contribuent pas à la solution du litige soumis au juge a quo, dès lors que la juridiction a quo ne peut faire droit à l'action en réparation.

B.2.2. L'intimé dans l'affaire n° 4861 observe que l'inspecteur urbaniste qui a insisté pour que les questions préjudicielles soient posées n'a pas introduit de mémoire et il se demande s'il faut en déduire que l'inspecteur urbaniste ne croit plus en la recevabilité ou au bien-fondé de ses questions.

B.2.3. Le Gouvernement flamand doute que la réponse aux questions soit pertinente pour trancher les différents litiges soumis au juge a quo.

La décision de ne pas appliquer les dispositions en cause si elles étaient déclarées inconstitutionnelles impliquerait que l'infraction de maintien soit à nouveau réprimée, ce qui est contraire à l'objectif du législateur décrétal.

B.2.4. Ni les arguments avancés par le Gouvernement flamand pour défendre les dispositions en cause devant la Cour ni l'absence de l'inspecteur urbaniste dans les affaires devant la Cour ne permettent de conclure à un quelconque désistement d'instance ou à une telle prise de position des parties dans les affaires soumises aux juges a quo.

Pour le surplus, il appartient en principe au juge qui pose la question préjudicielle d'examiner si la réponse à la question est pertinente pour trancher le litige pendant devant lui. Ce n'est que si tel n'est manifestement pas le cas que la Cour peut décider que la question n'appelle pas de réponse.

En ce qui concerne l'observation du Gouvernement flamand, il n'appartient pas à la Cour de juger si, après un éventuel constat de violation, il naîtrait une situation qui serait contraire aux intentions du législateur décrétal. Etant donné que le juge a quo doit tenir compte de l'intérêt de toutes les parties en cause, ainsi que de l'intérêt général, la pertinence de la question ne saurait dépendre de l'éventuel avantage qu'en retirerait une des parties.

B.2.5. Dès lors qu'il n'apparaît pas que les questions préjudicielles seraient manifestement sans utilité pour la solution des litiges soumis aux juges a quo, les exceptions doivent être rejetées.

Quant aux interventions B.3.1. L'article 87, § 1er, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle dispose : « Lorsque la Cour constitutionnelle statue, à titre préjudiciel, sur les questions visées à l'article 26, toute personne justifiant d'un intérêt dans la cause devant la juridiction qui ordonne le renvoi, peut adresser un mémoire à la Cour dans les trente jours de la publication prescrite par l'article 74. Elle est, de ce fait, réputée partie au litige ».

B.3.2. Pour justifier d'un intérêt, conformément à l'article 87, § 1er, précité, les personnes qui souhaitent intervenir dans une procédure préjudicielle doivent invoquer, dans leur mémoire, suffisamment d'éléments permettant d'établir que la réponse de la Cour aux questions préjudicielles peut avoir une incidence directe sur leur situation personnelle.

B.3.3. La SCA « Verschaeve-Grouset & C° » fait valoir qu'une procédure analogue dans laquelle elle est partie a été reportée en raison des questions préjudicielles posées dans l'affaire n° 4824.

La SCA « Verschaeve-Grouset & C° » justifie ainsi d'un intérêt suffisant pour intervenir.

B.3.4. M. Morel fait valoir qu'il a interjeté appel d'un jugement du Tribunal correctionnel d'Anvers ordonnant une mesure de réparation et que l'inspecteur urbaniste a demandé, en appel, que des questions préjudicielles soient posées à la Cour. M. Morel conteste l'intérêt et la qualité de l'inspecteur urbaniste pour demander que des questions préjudicielles soient posées. La Cour d'appel a joint cette contestation au fond de l'affaire, qui sera traitée à l'audience du 29 septembre 2010.

M. Morel justifie ainsi d'un intérêt suffisant pour intervenir.

B.3.5. D. Kenis, J. Rombouts et la SPRL « Kenis Industriebouw », J. Geurts et la SA « Jonelinvest » font valoir qu'ils sont parties à des affaires analogues et que la juridiction saisie a décidé de ne pas poser de questions préjudicielles mais d'attendre la réponse de la Cour dans l'actuelle procédure.

D. Kenis, J. Rombouts et la SPRL « Kenis Industriebouw », J. Geurts et la SA « Jonelinvest » justifient ainsi d'un intérêt suffisant pour intervenir.

B.3.6. J. Wienen et P. Vande Casteele invoquent leur qualité de tiers lésés dans des affaires correctionnelles dans lesquelles les propriétaires de parcelles voisines sont poursuivis pour des infractions en matière d'urbanisme.

Ils font valoir qu'un tiers lésé a intérêt à ce que le juge (pénal) examine et fasse droit à l'action dans les délais et à ce qu'il ordonne la réparation en nature, ce à quoi les dispositions en cause font obstacle.

J. Wienen et P. Vande Casteele justifient ainsi d'un intérêt suffisant pour intervenir.

Les intimés dans l'affaire n° 4824 et le Gouvernement flamand font certes valoir que l'action en réparation n'a été intentée par un « tiers lésé » dans aucune des affaires soumises au juge a quo. La réponse de la Cour aux questions préjudicielles peut toutefois être pertinente pour les affaires dans lesquelles J. Wienen et P. Vande Casteele sont parties : s'il est répondu par la négative aux questions, le juge pénal ne pourra accueillir l'action en réparation publique et ces parties, en tant que parties civiles, perdront l'avantage procédural de pouvoir se joindre à l'action publique en réparation.

B.3.7. Le Gouvernement flamand, J. Wienen et P. Vande Casteele font valoir que les interventions de J. Geurts et de la SA « Jonelinvest » sont irrecevables, parce que, dans leurs mémoires, ces parties n'ont pas pris position sur le fond.

Etant donné que, dans leur mémoire en réponse, J. Geurts et la SA « Jonelinvest » se rallient simplement à l'argumentation développée dans le mémoire du Gouvernement flamand, la Cour n'a pas à examiner si, du fait de cette intervention, les droits de défense des autres parties seraient compromis et s'il y aurait lieu, pour cette raison, de déclarer l'intervention irrecevable ou de prévoir une possibilité complémentaire de formuler une argumentation écrite, au cas où une réplique orale à l'audience n'aurait pas suffi.

Quant au rôle de l'inspecteur urbaniste B.4.1. Il ressort des données des affaires soumises à la juridiction a quo que l'inspecteur urbaniste a, dans chaque affaire, pris l'initiative des actions en réparation en cause. L'arrêt de renvoi dans les affaires nos 4824 et 4861 fait apparaître que les deux premières questions préjudicielles ont été posées à la demande de l'inspecteur urbaniste et, dans l'affaire n° 4861, également la troisième question, qui présente de fortes similitudes avec la troisième question dans les affaires nos 4824, 4844 et 4845.

B.4.2. Les parties M. Morel, D. Kenis, J. Rombouts et la SPRL « Kenis Industriebouw », J. Geurts et la SA « Jonelinvest » contestent la qualité et l'intérêt de l'inspecteur urbaniste à demander que ces questions soient posées. Ces parties contestent également que l'inspecteur urbaniste puisse ester en justice devant la Cour.

B.4.3. Il appartient en principe au juge a quo d'apprécier la nécessité de poser une question préjudicielle à la Cour.

Il n'appartient pas à la Cour de statuer sur la qualité et l'intérêt de l'inspecteur urbaniste, dans les affaires soumises à la juridiction a quo, pour solliciter de poser des questions préjudicielles.

Dès lors que l'inspecteur urbaniste n'intervient devant la Cour dans aucune des affaires jointes, la Cour ne doit pas se prononcer sur la question de savoir si une telle intervention est recevable ou non.

Quant à la première question préjudicielle dans les affaires nos 4824, 4844, 4845 et 4861 B.5.1. La Cour est invitée à contrôler l'article 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire au regard de l'article 16 de la Constitution et de l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, combinés ou non avec le principe de légalité et avec le principe de confiance.

La question est de savoir si « le droit de propriété du tiers lésé par le maintien d'une construction illégale » est violé en ce que l'article 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire empêche qu'une action « publique » en réparation intentée dans les délais et fondée sur le maintien d'infractions en matière d'urbanisme soit encore accueillie après le 1er septembre 2009.

B.5.2. L'article 16 de la Constitution dispose : « Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique, dans les cas et de la manière établis par la loi, et moyennant une juste et préalable indemnité ».

L'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme dispose : « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens.

Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes ».

Cette disposition de droit international ayant une portée analogue à celle de l'article 16 de la Constitution, les garanties qu'elle contient forment un ensemble indissociable avec celles qui sont inscrites dans cette disposition constitutionnelle, de sorte que la Cour en tient compte lors de son contrôle des dispositions en cause.

B.5.3. Les intimés dans l'affaire n° 4824 et le Gouvernement flamand font valoir que la question est irrecevable, au motif qu'il n'apparaîtrait pas en quoi consisterait l'éventuelle violation des dispositions invoquées.

Il est exact qu'il ne saurait être question d'une violation de l'article 16 de la Constitution et de l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme à l'égard de l'inspecteur urbaniste et du collège des bourgmestre et échevins, qui sont compétents pour intenter une action en réparation : en effet, ces autorités n'agissent pas en l'espèce en tant que « tiers lésés » en vue de défendre un quelconque droit de propriété.

Dans la mesure où il peut être supposé que le « tiers lésé » dans la question préjudicielle vise la personne qui subirait des nuisances du fait du maintien d'une infraction en matière d'urbanisme, en particulier en tant que propriétaire d'une parcelle voisine, il apparaît de manière suffisamment claire en quoi la disposition en cause peut être contrôlée au regard des normes invoquées.

Les exceptions sont rejetées.

B.5.4. L'action « publique » en réparation visée dans la question est intentée par l'inspecteur urbaniste ou par le collège des bourgmestre et échevins dans l'intérêt général, en vue de sauvegarder le bon aménagement du territoire.

L'article 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire n'empêche pas que le tiers lésé par le maintien de la construction illégale défende ses intérêts privés, en particulier en tant que propriétaire d'une parcelle voisine. Il peut encore intenter une action afin de faire cesser les dommages qu'il subirait, par une réparation en nature, ou tout au moins afin de se faire indemniser pour des situations qui continuent de constituer une faute quasi délictuelle.

Pour le surplus, l'action publique en réparation reste possible pour les infractions constituées par une construction ou pour les infractions de maintien dans les zones vulnérables du point de vue spatial ainsi que pour les actions qui peuvent encore être fondées sur des infractions constituées par une construction dans des zones autres que les zones vulnérables du point de vue spatial.

Le tiers lésé perd un avantage s'il s'est joint à l'action en réparation intentée par l'inspecteur urbaniste, dès lors que cette action en réparation ne peut plus être accueillie en application de la disposition en cause. La perte de cet avantage ne concerne toutefois pas le droit de propriété du tiers lésé, mais sa situation procédurale, en conséquence de son choix de ne pas défendre lui-même ses intérêts privés et de se joindre simplement à l'action publique en réparation. Le cas échéant, il appartient au tiers lésé de faire valoir ses intérêts privés, en ce compris son droit de propriété.

Le tiers lésé par la construction illégale n'est donc pas affecté dans son droit de propriété par l'article 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire, droit de propriété qui est garanti par l'article 16 de la Constitution et par l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme.

B.5.5. Le contrôle au regard du principe de légalité et du principe de confiance, lus en combinaison avec les normes de référence précitées, ne conduit pas à une autre conclusion.

B.5.6. Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande des parties intervenantes J. Wienen et P. Vande Casteele de contrôler la disposition en cause au regard de normes de référence autres que celles qui sont invoquées dans la question préjudicielle, les parties ne pouvant modifier ou étendre la portée d'une question préjudicielle.

B.5.7. La première question préjudicielle dans les affaires nos 4824, 4844, 4845 et 4861 appelle une réponse négative.

Quant à la deuxième question préjudicielle dans les affaires nos 4824, 4844, 4845 et 4861 B.6.1. La Cour est invitée à contrôler si l'article 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire viole le « principe de standstill contenu dans l'article 23 de la Constitution » en ce qu'il est mis fin à l'action publique en réparation qui est déjà pendante devant le juge. Selon la question, cette extinction est « la suite d'une dépénalisation de l'infraction de maintien », alors que cette dépénalisation « laisse intacte, tant de facto que de jure, l'atteinte concrète au bon aménagement du territoire ».

B.6.2. La question préjudicielle concerne plus particulièrement le « droit à la protection d'un environnement sain », consacré par l'article 23, alinéa 3, 4°, de la Constitution.

La Cour a jugé que cette disposition implique une obligation de standstill qui s'oppose à ce que le législateur compétent réduise sensiblement le niveau de protection offert par la législation applicable, sans qu'existent pour ce faire des motifs liés à l'intérêt général (arrêts nos 135/2006 du 14 septembre 2006, B.10, 137/2006 du 14 septembre 2006, B.7.1, 145/2006 du 28 septembre 2006, B.5.1, 87/2007 du 20 juin 2007, B.5, 114/2008 du 31 juillet 2008, B.3 et 121/2008 du 1er septembre 2008, B.11.1).

B.6.3. Les intimés dans l'affaire n° 4824 affirment que l'obligation de standstill déduit de l'article 23 de la Constitution porte sur le droit à un environnement sain et non sur l'aménagement du territoire et l'urbanisme. L'intimé dans l'affaire n° 4861 fait valoir que l'article 23 de la Constitution porte exclusivement sur les aspects de l'environnement qui peuvent avoir une incidence négative sur la santé du citoyen et qu'il ne garantit pas un droit à un environnement esthétique.

Toute mesure relative à l'urbanisme et à l'aménagement du territoire n'a pas ipso facto une incidence sur le droit à un environnement sain, au sens de l'article 23, alinéa 3, 4°, de la Constitution. En l'espèce, il peut toutefois être admis que la disposition en cause, qui s'oppose de manière générale à ce que le juge fasse droit, après le 1er septembre 2009, à des actions publiques en réparation qui concernent le maintien de situations contraires à la réglementation relative à l'urbanisme et à l'aménagement du territoire - même si tel est seulement le cas dans des zones autres que les « zones vulnérables du point de vue spatial » -, a une portée qui entre en tout cas partiellement dans le champ d'application de l'article 23, alinéa 3, 4°, de la Constitution.

B.6.4. Selon les intimés dans l'affaire n° 4824, les droits énumérés à l'article 23 de la Constitution bénéficient aux justiciables et non aux autorités telles que l'inspecteur urbaniste ou le collège des bourgmestre et échevins. L'intimé dans l'affaire n° 4861 fait valoir que la Région flamande n'est pas titulaire des droits fondamentaux mais en est débitrice. La question qui porte sur l'action en réparation intentée par l'autorité serait dès lors irrecevable.

La circonstance que la deuxième question préjudicielle a été posée à la demande de l'inspecteur urbaniste n'enlève rien au fait que c'est finalement la juridiction a quo qui décide de la pertinence de la question, en tenant compte des intérêts des parties en cause comme de l'intérêt général.

L'exception est rejetée.

B.6.5. En adoptant l'article 7 du décret du 4 juin 2003, qui est devenu l'article 6.1.1, alinéa 3, du Code flamand de l'aménagement du territoire, le législateur décrétal flamand a estimé, dans le cadre de son pouvoir d'appréciation, que le maintien d'une situation irrégulière dans des zones autres que les zones vulnérables d'un point de vue spatial ne devait plus être considéré comme une infraction continue. En combinaison avec l'article 6.1.2 du Code flamand de l'aménagement du territoire, il apparaît que le but était d'emblée de supprimer cette incrimination. Il ressort des travaux préparatoires, cités en B.1.4.2, de l'article 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire, en cause, que le législateur décrétal a en outre estimé qu'il ne se justifiait plus, d'un point de vue social, d'encore faire droit à la remise en état des lieux à la demande de l'inspecteur urbaniste ou du collège des bourgmestre et échevins.

Dès lors qu'il considère que le maintien d'infractions en matière d'urbanisme dans des zones autres que les zones vulnérables du point de vue spatial ne doit plus être réprimé, le législateur décrétal a raisonnablement pu considérer qu'il était justifié, dans l'intérêt général, d'éviter également que des actions publiques en réparation toujours pendantes soient encore accueillies à partir du 1er septembre 2009, date d'entrée en vigueur du décret de la Région flamande du 27 mars 2009.

B.6.6. Dans les zones vulnérables du point de vue spatial, les infractions énumérées à l'article 6.1.1 du Code flamand de l'aménagement du territoire restent punissables et l'action publique en réparation peut également encore être exercée. L'action publique en réparation peut également être accueillie lorsqu'elle est fondée sur des infractions constituées par une construction dans des zones autres que des zones vulnérables du point de vue spatial. La mesure est dès lors limitée aux cas où l'action en réparation était encore pendante au 1er septembre 2009 pour des faits de maintien dans des zones autres que les zones vulnérables du point de vue spatial.

Pour le surplus, le législateur décrétal a uniquement adopté une réglementation pour l'action publique en réparation et il n'a dès lors pas porté atteinte aux droits des personnes de faire cesser le dommage qu'elles subiraient, par exemple en tant que propriétaire d'une parcelle voisine, par une réparation en nature, ou tout au moins de se faire indemniser pour les situations qui continuent de constituer une faute quasi délictuelle.

B.6.7. Il s'ensuit que l'article 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire n'entraîne pas en l'espèce une réduction sensible du niveau de protection de l'environnement ou une réduction sensible qui ne puisse être justifiée par des motifs d'intérêt général qui la fondent.

B.6.8. La deuxième question préjudicielle dans les affaires nos 4824, 4844, 4845 en 4861 appelle une réponse négative.

Quant à la troisième question préjudicielle dans les affaires nos 4824, 4844, 4845 et 4861 B.7.1. Contrairement à la question préjudicielle précédente, qui portait uniquement sur l'alinéa 4 de l'article 6.1.1 du Code flamand de l'aménagement du territoire, cette question invite la Cour à contrôler également l'article 6.1.1, alinéa 3, du Code flamand de l'aménagement du territoire au regard du « principe de standstill contenu dans l'article 23 de la Constitution ».

Dans la troisième question préjudicielle posée dans l'affaire n° 4861, qui est fort comparable, l'article 6.1.2 du Code flamand de l'aménagement du territoire est en outre mentionné.

Ces questions doivent être examinées conjointement, l'article 6.1.2 du Code flamand de l'aménagement du territoire constituant un tout indissociable avec l'article 6.1.1, alinéa 3.

B.7.2. En l'espèce, la question est de savoir si l'obligation de standstill est violée en ce que les dispositions en cause, lues en combinaison, rendent impossible l'imposition d'une mesure de réparation sur la base de faits de maintien dans une zone non vulnérable du point de vue spatial. Selon la question, la possibilité d'intenter une action publique en réparation dépend donc de l'éventuelle poursuite et déclaration de culpabilité de l'auteur de l'infraction constituée par la construction, « alors que cette circonstance est sans (aucun) rapport avec le dommage que la situation illégale cause au bon aménagement du territoire ».

B.7.3. Lors de l'examen de la deuxième question préjudicielle, ont déjà été exposés les motifs d'intérêt général qui ont amené le législateur décrétal à dépénaliser le maintien d'infractions en matière d'urbanisme dans des zones autres que les zones vulnérables du point de vue spatial (article 6.1.1, alinéa 3, et article 6.1.2 du Code flamand de l'aménagement du territoire) et, partant, à éviter qu'il soit encore fait droit à des actions publiques en réparation (article 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire).

Par ailleurs, il a été exposé que, dans les zones vulnérables du point vue spatial, les infractions énumérées à l'article 6.1.1 du Code flamand de l'aménagement du territoire restent punissables et l'action publique en réparation demeure possible, qu'il en va de même pour les infractions constituées par une construction, même dans des zones autres que les zones vulnérables du point de vue spatial, et que le législateur décrétal n'a pas porté atteinte au droit des personnes de faire cesser le dommage éventuellement subi, par exemple en tant que propriétaire d'une parcelle voisine, par une réparation en nature ou tout au moins de se faire indemniser pour les situations qui continuent de constituer une faute quasi délictuelle.

B.7.4. La conclusion de la Cour selon laquelle l'article 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire n'entraîne pas une réduction sensible du niveau de protection de l'environnement ou une réduction sensible qui ne puisse être justifiée par des motifs d'intérêt général, s'impose tout autant à l'égard de l'alinéa 3 de cet article et à l'égard de l'article 6.1.2 du Code flamand de l'aménagement du territoire.

B.7.5. La troisième question préjudicielle dans les affaires nos 4824, 4844, 4845 et 4861 appelle une réponse négative.

Quant à la quatrième question préjudicielle dans les affaires nos 4824, 4844 et 4845 et quant à l'unique question préjudicielle dans l'affaire 4832 B.8.1. La Cour est invitée à contrôler l'article 6.1.1, alinéas 3 et 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire au regard du principe d'égalité et de non-discrimination, consacré par les articles 10 et 11 de la Constitution.

La question invite à comparer la catégorie des personnes qui maintiennent une infraction en matière d'urbanisme dans des zones autres que des zones vulnérables du point de vue spatial et auxquelles l'infraction constituée par la construction ne peut être imputée, mais pour laquelle le constructeur est déclaré coupable, avec la catégorie des personnes qui maintiennent une infraction en matière d'urbanisme dans des zones autres que des zones vulnérables du point de vue spatial et auxquelles l'infraction constituée par la construction ne peut être imputée, mais pour laquelle le constructeur n'est pas déclaré coupable. Seule la première catégorie de personnes devra, le cas échéant, subir les effets d'une mesure de réparation. Sous cet angle, les deux catégories de personnes sont comparables.

Contrairement à ce que soutient la SCA « Verschaeve-Grouset & C° », la question ne porte pas sur une comparaison entre des situations dans une zone vulnérable du point de vue spatial et des situations en dehors de ces zones.

B.8.2. Le deuxième intimé dans l'affaire n° 4845 fait valoir que la réponse à la question ne contribue pas à la solution du litige pendant devant le juge a quo. Etant donné que la mesure de réparation a été ordonnée, dans l'instance soumise au juge a quo, contre le premier intimé en tant que constructeur, la question hypothétique concernant un cas dans lequel le constructeur n'est pas poursuivi ou ne peut plus être poursuivi pour l'infraction relative à la construction serait dénuée de pertinence.

Même s'il n'était plus possible d'intenter contre lui une action en réparation en tant que personne qui maintient la situation, le deuxième intimé dans l'affaire n° 4845 peut être confronté aux conséquences de la condamnation pénale, pour l'infraction relative à la construction, du premier prévenu, qui a également été condamné à une remise en l'état. La question préjudicielle vise précisément à savoir s'il est discriminatoire que les personnes qui maintiennent une situation doivent subir cette mesure de réparation lorsque l'auteur de l'infraction constituée par la construction est condamné mais ne doivent pas subir cette mesure de réparation lorsqu'il n'y a pas de condamnation pour l'infraction constituée par la construction.

L'exception est rejetée.

B.8.3. La différence de traitement repose sur un critère de distinction objectif : dans le premier cas décrit en B.8.1, l'auteur de l'infraction constituée par la construction dans des zones autres que des zones vulnérables du point de vue spatial peut être condamné; dans le second cas, il ne peut l'être.

Par les dispositions en cause, le législateur décrétal a voulu, d'une part, que les faits de maintien d'infractions en matière d'urbanisme dans des zones autres que des zones vulnérables du point de vue spatial ne soient plus punissables et que l'action publique en réparation qui serait uniquement fondée sur ce maintien ne soit plus accueillie à partir du 1er septembre 2009 et, d'autre part, que les infractions constituées par une construction restent punissables - qu'il s'agisse ou non d'une zone vulnérable du point de vue spatial - et que l'action en réparation demeure possible.

A la lumière de cet objectif et compte tenu du caractère réel de l'action en réparation, il est raisonnablement justifié que cette action puisse encore être accueillie lorsque le constructeur est déclaré coupable, d'autres personnes devant, le cas échéant, aussi subir les conséquences de la mesure de réparation.

Ces mesures améliorent l'équilibre entre, d'une part, l'objectif de répression et de remise en l'état à l'égard de ceux qui sont reconnus coupables de l'infraction constituée par une construction et, d'autre part, la recherche d'une plus grande sécurité juridique pour ceux qui acquièrent des droits sur le bien concerné et qui peuvent uniquement encore être inquiétés si l'auteur de l'infraction constituée par la construction est condamné. Par ailleurs, le législateur décrétal a prévu une série de mesures d'information qui permettent aux personnes qui acquièrent des droits sur le bien concerné d'être informées d'irrégularités urbanistiques dont le bien serait entaché et d'éventuelles actions qui seraient pendantes concernant ce bien.

Enfin, le législateur décrétal n'a pas porté atteinte au droit des personnes de faire cesser le dommage qu'elles subiraient, par exemple en tant que propriétaire d'une parcelle voisine, par une réparation en nature ou tout au moins de se faire indemniser pour les situations qui continuent de constituer une faute quasi délictuelle.

B.8.4. La quatrième question préjudicielle dans les affaires 4824, 4844 et 4845 et l'unique question préjudicielle dans l'affaire n° 4832 appellent une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : - L'article 6.1.1, alinéa 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire (« Vlaamse Codex Ruimtelijke Ordening »), coordonné par l'arrêté du Gouvernement flamand du 15 mai 2009, ne viole pas l'article 16 de la Constitution, combiné avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme. - L'article 6.1.1, alinéas 3 et 4, et l'article 6.1.2 du Code flamand de l'aménagement du territoire ne violent pas l'article 23, alinéa 3, 4°, de la Constitution. - L'article 6.1.1, alinéas 3 et 4, du Code flamand de l'aménagement du territoire ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.

Ainsi prononcé en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, à l'audience publique du 29 juillet 2010.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président, M. Bossuyt.

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