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Arrêt
publié le 29 avril 2015

Extrait de l'arrêt n° 24/2015 du 5 mars 2015 Numéro du rôle : 5808 En cause : le recours en annulation des articles 3, 6°, 50, 3°, et 67 du décret de la Région flamande du 31 mai 2013 portant modification de divers décrets relatifs au logemen La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et J. Spreutels, et des juges E. De G(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 24/2015 du 5 mars 2015 Numéro du rôle : 5808 En cause : le recours en annulation des articles 3, 6°, 50, 3°, et 67 du décret de la Région flamande du 31 mai 2013 portant modification de divers décrets relatifs au logement, introduit par l'ASBL « Vlaams Huurdersplatform » et l'ASBL « Forum van Etnisch-Culturele Minderheden ».

La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et J. Spreutels, et des juges E. De Groot, L. Lavrysen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, F. Daoût, T. Giet et R. Leysen, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président A. Alen, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 13 janvier 2014 et parvenue au greffe le 15 janvier 2014, un recours en annulation des articles 3, 6°, 50, 3°, et 67 du décret de la Région flamande du 31 mai 2013 portant modification de divers décrets relatifs au logement (publié au Moniteur belge du 11 juillet 2013) a été introduit par l'ASBL « Vlaams Huurdersplatform » et l'ASBL « Forum van Etnisch-Culturele Minderheden », assistées et représentées par Me M. Dambre, avocat au barreau de Gand. (...) II. En droit (...) Quant aux dispositions attaquées B.1. Les parties requérantes poursuivent en premier lieu l'annulation des articles 3, 6°, et 50, 3°, du décret de la Région flamande du 31 mai 2013 portant modification de divers décrets relatifs au logement, lesquels ont apporté des modifications au décret du 15 juillet 1997 contenant le Code flamand du Logement (ci-après : Code flamand du Logement).

B.2.1. L'article 3, 6°, du décret attaqué modifie la définition du « locataire d'une habitation sociale de location » figurant à l'article 2, § 1, 34°, du Code flamand du Logement, cette disposition prévoyant désormais ce qui suit : « [...] 34° locataire d'une habitation sociale de location : a) la personne qui, lors de l'inscription pour une habitation sociale de location, s'est présentée comme locataire de référence, et la personne qui, au début du contrat de location, est mariée ou cohabite légalement avec cette personne ou qui, au début du contrat de location, est le/la partenaire de fait de cette personne;b) la personne qui, après que le contrat de location prend cours, se marie ou cohabite légalement avec la personne, visée au point a), et qui co-signe le contrat de location ou le/la partenaire de fait qui cohabite pendant une année en tant que locataire tel/telle que visé(e) au point c) avec la personne, visée au point a);c) toute autre personne que les personnes, visées aux points a) et b), à l'exception des enfants mineurs qui ont leur domicile principal dans l'habitation sociale de location, et qui co-signent le contrat de location ». B.2.2. Avant cette modification, l'article 2, § 1er, 34°, définissait le locataire d'une habitation sociale de location de la manière suivante : « a) le signataire ou les signataires particulier(s) au moment où le contrat de location prend cours; b) la personne qui se marie avec ou devient cohabitant légal de la personne visée au point a) après que le contrat de location, visé au point a), prend cours.Les personnes mentionnées sous a) et b) informent immédiatement le bailleur d'une habitation de location sociale de leur état civil; c) le partenaire qui, aux conditions à arrêter par le Gouvernement flamand, cohabite de fait avec la personne mentionnée sous a) et qui cosigne le contrat de location, à condition que la personne mentionnée sous a) et le bailleur y consentent;d) toute autre personne à l'exception des enfants mineurs qui y ont leur domicile principal, et qui, à condition que la ou les personne(s) mentionnée(s) sous a) et le bailleur d'une habitation sociale de location y consentent, cosignent le contrat de location ». B.3.1. L'article 50, 3°, du décret attaqué a ajouté, dans l'article 95, § 1er, du Code flamand du Logement, entre le premier et le second alinéa, un alinéa qui dispose : « Une personne ne peut accéder à un contrat de location courant que lorsqu'elle démontre qu'elle répond aux conditions, visées à l'alinéa premier, à l'exception de la condition relative au revenu, et lorsque l'accès n'aboutit pas à une habitation sociale de location qui est une habitation inadaptée ».

B.3.2. L'article 95, § 1er, ainsi modifié du Code flamand du Logement, dispose : « Le candidat-locataire ne peut être admis à une habitation sociale de location que lorsqu'il prouve : 1° qu'il répond aux conditions en matière de propriété immobilière et de revenu arrêtées par le Gouvernement flamand;2° pour autant qu'il veut occuper une habitation sociale qui n'est pas située dans une commune de la périphérie ou de la frontière linguistique, tel que mentionné dans les lois coordonnées du 18 juillet 1966 sur l'emploi des langues en matière administrative, avoir la volonté d'apprendre le Néerlandais.Lors de l'apprentissage du Néerlandais, le but est d'atteindre un niveau correspondant à la valeur directive A.1. du Cadre européen commun de Référence pour Langues. Le Gouvernement flamand arrête les modalités pour constater cette volonté. Les personnes pouvant prouver qu'elles répondent déjà à cette valeur directive pour le Néerlandais, sont exemptées aux conditions à arrêter par le Gouvernement flamand. Le Gouvernement flamand désigne également les catégories des personnes qui sont exemptées de la condition de volonté d'apprendre le Néerlandais. La personne pouvant prouver à l'aide d'une attestation médicale qu'elle est grièvement malade ou qu'elle a un handicap mental ou physique l'empêchant en permanence d'obtenir la valeur directive A.1., est en tout cas exemptée de cette obligation; 3° pour autant qu'il occupe une habitation sociale qui n'est pas [lire : qui est] située dans une commune de la périphérie ou de la frontière linguistique, tel que mentionné dans les lois coordonnées du 18 juillet 1966 sur l'emploi des langues en matière administrative, sans porter préjudice aux facilités linguistiques, avoir la volonté d'apprendre le Néerlandais.Lors de l'apprentissage du Néerlandais, le but est d'atteindre un niveau correspondant à la valeur directive A.1. du Cadre européen commun de Référence pour Langues. Le Gouvernement flamand arrête les modalités pour constater cette volonté. Les personnes pouvant prouver qu'elles répondent déjà à cette valeur directive pour le Néerlandais, sont exemptées aux conditions à arrêter par le Gouvernement flamand. Le Gouvernement flamand désigne également les catégories des personnes qui sont exemptées de la condition de volonté d'apprendre le Néerlandais. La personne pouvant prouver à l'aide d'une attestation médicale qu'elle est grièvement malade ou qu'elle a un handicap mental ou physique l'empêchant en permanence d'obtenir la valeur directive A.1., est en tout cas exemptée de cette obligation; 4° pour autant que le décret du 28 février 2003 relatif à la politique flamande d'intégration civique s'applique, il a la volonté de suivre ou il a suivi le trajet d'intégration civique conformément au même décret;5° être inscrit dans les registres de la population, visés à l'article 1er, § 1er, alinéa premier, 1°, de la loi du 19 juillet 1991 relative aux registres de la population, aux cartes d'identité, aux cartes d'étranger et aux documents de séjour et modifiant la loi du 8 août 1983 organisant un Registre national des personnes physiques, ou être inscrit en adresse de référence tel que visé à l'article 1er, § 2, de la loi précitée. Une personne ne peut accéder à un contrat de location courant que lorsqu'elle démontre qu'elle répond aux conditions, visées à l'alinéa premier, à l'exception de la condition relative au revenu, et lorsque l'accès n'aboutit pas à une habitation sociale de location qui est une habitation inadaptée.

Le bailleur accorde la priorité à ceux qu'il doit reloger conformément aux dispositions de l'article 18, § 2, deuxième alinéa, de l'article 26, et de l'article 60, § 3, et aux personnes visées à l'article 90, § 1er, quatrième alinéa.

Les habitations sociales de location sont attribuées par l'organe compétent, compte tenu : 1° du choix du candidat-locataire d'une habitation sociale de location en ce qui concerne le type, le site, le loyer et les charges locatives fixes de l'habitation;2° des objectifs particuliers de la politique du logement, visés à l'article 4, § 2;3° du règlement d'attribution concrétisant le cas échéant les priorités et règles d'attribution locales arrêtées par le Gouvernement flamand. Le Gouvernement flamand arrête les modalités de l'exécution de l'alinéa quatre et prête lors de la définition des priorités et règles en matière de l'attribution d'habitation sociales de location une attention supplémentaire aux candidats-locataires appartenant aux familles les plus défavorisées ou aux personnes isolées et aux habitants d'une habitation sociale de location qui souhaitent ou doivent déménager dans une habitation adaptée. Le Gouvernement flamand peut faire dépendre une attribution d'un contrat d'accompagnement qui est conclu entre le candidat-locataire et une organisation d'aide sociale.

Le Gouvernement flamand instaure une procédure de recours pour les candidats-locataires qui se sentent préjudiciés lors de l'attribution d'une habitation sociale de location. Cette procédure fixe le délai et la forme de l'introduction d'une objection par un candidat-locataire, la possibilité d'être entendu ainsi que le mode de traitement de l'objection ».

B.4. Les dispositions attaquées sont justifiées dans l'exposé des motifs du décret attaqué, de la manière suivante : « Les catégories actuelles de locataires d'une habitation sociale de location entraînent toutefois une inégalité de traitement des enfants de locataires d'une habitation sociale de location, lors du décès ou du départ du parent survivant. Les enfants qui sont majeurs lors de la conclusion du contrat de bail sont des locataires de catégorie A et ont donc droit à l'habitation sociale de location si le parent survivant décède ou s'il quitte l'habitation sociale de location et ils peuvent acheter l'habitation sociale de location. Les enfants qui sont mineurs lors de la conclusion du contrat de bail et qui, au moment où ils deviennent majeurs, cosignent le contrat de bail en tant que locataire de catégorie D, n'ont pas ces droits. Pourtant, l'intention n'a jamais été de modifier le principe qui a toujours prévalu dans le passé, à savoir que les habitations sociales de location ne peuvent pas constituer des ' habitations dont on hérite artificiellement '. Ceci signifie que seul le locataire principal initial ainsi que son ou sa partenaire en droit ou en fait sont les derniers à pouvoir résider dans l'habitation. Il ne devrait pas être permis aux parents de transmettre l'habitation sociale de location à leurs enfants ou à des tiers. Ce principe est dicté par le souci de garantir l'égalité entre les candidats locataires, plus précisément entre les candidats locataires qui se trouvent sur liste d'attente et les enfants majeurs et tiers résidants qui sont venus cohabiter ultérieurement dans l'habitation sociale de location. Au décès ou au départ du locataire initial et de son partenaire en droit ou en fait, les enfants résidants et les autres tiers résidants doivent se porter candidat en leur nom propre pour obtenir une habitation sociale de location.

En modifiant les catégories de locataires, ce principe peut être restauré. Les enfants qui sont majeurs au début du contrat de bail sont classés dans la nouvelle catégorie C (qui correspond à l'actuelle catégorie D). Les locataires de catégorie C ne peuvent pas continuer à vivre dans l'habitation lorsque le dernier locataire de catégorie A et B décède ou a quitté l'habitation. La catégorie A ne comprendra désormais plus que la personne qui, lors de l'inscription en vue d'obtenir une habitation sociale de location, s'est présentée comme locataire de référence et la personne avec qui elle cohabite légalement ou est mariée ou son partenaire de fait au début du contrat de bail. Seuls les locataires de catégorie B (partenaires de fait et légaux, ainsi que les cohabitants légaux qui sont venus cohabiter dans l'habitation après le début du contrat de bail) peuvent continuer à demeurer dans l'habitation si le locataire de catégorie A décède ou quitte l'habitation (voyez également le commentaire de l'article 50 en projet).

En outre, l'actuelle catégorie B (cohabitants légaux et conjoints après le début du bail) est fusionnée avec l'actuelle catégorie C (partenaire de fait) pour former la nouvelle catégorie B. Il n'y aura donc plus de distinction entre ces deux catégories. Les cohabitants légaux et les conjoints après le début du contrat de bail devront désormais remplir eux aussi les conditions imposées aux personnes en manque de logement (voyez aussi le commentaire de l'article 48 en projet).

La protection juridique du logement familial, prévue par le droit civil (article 215 du Code civil (ci-après : CC), et le droit de la cohabitation légale (article 1475 CC) ne sont pas un obstacle pour soumettre aux conditions d'admission dans une habitation sociale de location les candidats locataires mariés ou cohabitants légaux qui, après le début du contrat de bail, souhaitent être admis à un contrat de bail en cours. L'offre de location de logements à des conditions sociales doit en effet être qualifiée de mission de service public (= service du logement social) qui est proposée pour permettre à des personnes répondant à certaines caractéristiques et conditions d'exercer de manière effective leur droit fondamental. Relève de ces dernières conditions le respect des obligations correspondantes, qui font partie, selon une jurisprudence constante de plus d'une décennie, de l'essence du logement social. Ainsi, il convient de fournir des informations sur le revenu, d'habiter le logement de manière strictement personnelle, de fournir des informations sur toute modification de la composition du ménage. Les moyens financiers qui sont destinés aux personnes en manque de logement sont en effet limités et ils doivent donc être alloués de manière sélective (cf. également la sélectivité catégorielle de la politique du logement). Un des principaux auteurs dans cette matière, B. Hubeau, déclare dans sa chronique de jurisprudence en matière de logements sociaux (' Kroniek van rechtspraak sociale woninghuur ', T. Vred., 1990, 321-330, en particulier les points 13 et 17) : ' Tout aussi important est l'arrêt de la Cour de cassation du 10 février 1983, dans lequel celle-ci déclare qu'il ressort de l'économie générale du logement social que celui-ci comporte certaines obligations (souvent plus strictes que les obligations civiles, mais qui y trouvent leur origine) pour le locataire, par exemple l'occupation personnelle et effective : le non-respect de celle-ci peut entraîner la dissolution du bail à sa charge (Cass., 10 février 1983, Arr. Cass., 1982-1983, 751, Pas., 1983, I, 661, J.T., 1983, 540, R.W., 1983-84, 2233, note B. Hubeau, Rev. Not. B., 1983, 310 et T. Vred., 1983, 230, note B. Jadot) '.

Pour des raisons d'intérêt général, il est nécessaire de déroger à la règle du Code civil (à savoir les répercussions du droit matrimonial/de la cohabitation légale sur le bail ordinaire). Il est souhaitable et nécessaire d'examiner également attentivement la situation des candidats mariés ou cohabitants légaux quant à leurs besoins en matière de logement, d'en tenir compte pour établir la contrepartie qu'ils payent et de les considérer comme des usagers personnels d'un service de logement social. Etant donné que le droit des baux sociaux déroge au droit du bail ordinaire à peu près sur tous les points possibles et imaginables (le droit commun du bail n'est que d'application supplétive, cf. article 91, § 3, du Code flamand du Logement) et que le droit administratif sert à garantir la position d'exception de l'intérêt général, il faut appliquer ces mesures de manière cohérente à tous les usagers du service de logement social. On peut difficilement soulever une objection contre le fait qu'il soit demandé aux usagers du service de logement social de signer le contrat de bail et de remplir les conditions d'admission imposées. Il ne saurait pas non plus y avoir d'objection à la transparence et à la volonté d'un exercice et d'un usage objectifs de ces droits - l'inverse menacerait en effet les droits fondamentaux d'autrui. Un régime différencié selon que l'intéressé réside dans un logement social ou dans un autre type d'habitation est justifié et nécessaire.

La disposition actuelle relative à la catégorie C prévoit que le Gouvernement flamand fixe les conditions auxquelles il faut satisfaire pour avoir, en tant que partenaire de fait, les mêmes droits que le cohabitant légal et le conjoint (après le début du bail). L'arrêté du Gouvernement flamand du 12 octobre 2007 réglementant le régime de location sociale et portant exécution du Titre VII du Code flamand du Logement (ci-après : arrêté-cadre sur le logement social) prévoit qu'une personne est considérée comme partenaire de fait après un an de cohabitation avec le locataire de catégorie A. Dans la définition projetée, on a choisi de fixer cette durée dans le décret : ' le partenaire de fait qui cohabite, en tant que locataire, mentionné en c), avec la personne mentionnée sous a) pendant un an '. Les cohabitants légaux et les conjoints qui emménagent après le début du contrat de bail doivent eux aussi cosigner le bail. A ce moment, le bailleur peut communiquer également les obligations qui s'imposent au locataire social. Puisque les partenaires de fait ont déjà signé le contrat de bail en tant que locataire de la nouvelle catégorie C, ils ne doivent plus le faire s'ils deviennent, après un an, locataire de la nouvelle catégorie B. Le bailleur et le locataire de catégorie A ne doivent désormais plus donner leur consentement lors de l'admission au bail d'autres locataires. Donner son consentement semble impliquer un pouvoir d'appréciation, alors que la réglementation dispose elle-même de manière suffisamment claire qu'un occupant supplémentaire n'est pas autorisé si l'intéressé ne remplit pas les conditions d'admission imposées et si cette occupation supplémentaire a pour effet de rendre le logement inadapté (cf. l'explication sur l'article 48 en projet) » (Doc. parl., Parlement flamand, 2012-2013, nr. 1848/1, pp. 7-9).

B.5.1. Il ressort de ce qui précède que le législateur décrétal veut éviter en premier lieu que des habitations sociales soient des « habitations dont on hérite artificiellement », indiquant de ce fait que le but n'est pas que les enfants du locataire d'une habitation sociale puissent automatiquement continuer à louer cette habitation ou acquérir celle-ci lorsque le locataire initial quitte l'habitation ou décède. Ces enfants doivent désormais se porter candidat en leur nom propre pour obtenir une habitation sociale de location.

B.5.2. Par ailleurs, les conjoints, cohabitants légaux et partenaires de fait sont désormais traités sur un pied d'égalité en ce qui concerne leurs droits et obligations en matière de bail social.

Si le locataire de référence est marié au début du contrat de bail ou s'il cohabite légalement ou en fait, tous les intéressés doivent signer le bail et ils sont tous soumis dès le début, en tant que locataires sociaux, aux droits et obligations qui s'appliquent en la matière.

Lorsque le locataire de référence se marie ou cohabite légalement ou en fait après le début du contrat de bail, le conjoint ou le partenaire doivent également signer le contrat de bail et ils sont eux aussi soumis aux conditions qui s'appliquent au locataire social. Par contre, comme ces conjoints ou partenaires adhèrent ainsi au contrat de bail, ils peuvent continuer à demeurer dans l'habitation si le locataire initial quitte l'habitation ou décède. Les personnes avec qui cohabite le locataire de référence étant tenues de signer le contrat de bail, le bailleur peut également exercer un contrôle sur le nombre de personnes qui résident dans l'habitation et juger si celle-ci est encore adaptée ou non.

B.6. Les parties requérantes poursuivent en outre l'annulation de l'article 67 du décret du 31 mai 2013, qui insère un nouvel article 4.2.10 dans le livre 4, titre 2, chapitre 3, du décret du 27 mars 2009 relatif à la politique foncière et immobilière, qui dispose : « § 1er. Le Gouvernement flamand peut fixer les conditions et règles complémentaires pour la location et l'aliénation de l'offre de logements modestes par des sociétés de logement social. § 2. Les conseils communaux peuvent fixer un règlement communal ' Bescheiden Wonen ' (Logement modeste), ayant la même force juridique et valeur contraignante qu'un règlement urbanistique. Ce règlement communal comprend des normes de qualité pour l'offre de logements modestes et l'environnement.

Le règlement communal peut fixer des pourcentages distincts en matière d'offre de logements modestes pour la réalisation de diverses typologies de lots et d'habitations qui appartiennent à l'offre de logements modestes.

Le règlement communal peut comprendre des règles locales d'attribution pour la location ou l'aliénation d'une offre de logements modestes par des sociétés de logement social qui complètent les règles d'attribution que fixe le Gouvernement flamand conformément au paragraphe 1er ou qui [y] dérogent.

Les règles locales d'attribution sont réalisées en concertation avec la commune ou dans le cadre d'une structure de coopération intercommunale. La commune ou la structure de coopération intercommunale fixe la procédure de réalisation. Elles associent les acteurs locaux pertinents à la réalisation.

A défaut d'un règlement communal avec des règles locales d'attribution pour la location ou l'aliénation d'une offre de logements modestes par des sociétés de logement social, les règles d'attribution fixées par le Gouvernement flamand conformément au paragraphe 1er s'appliquent ».

B.7. Les travaux préparatoires ont justifié l'insertion de cette nouvelle disposition de la manière suivante : « Le présent article insère un nouvel article 4.2.10 dans le décret relatif à la politique foncière et immobilière. A l'instar de l'article 4.2.9 existant (prix maximum indicatifs), cet article s'applique non seulement aux projets permettant la réalisation d'une offre de logements modestes en exécution d'une ' charge urbanistique ' relative à l'offre de logements modestes, mais également aux projets de sociétés de logement social visant à réaliser, sur une base volontaire, une offre de logements modestes. L'article fait une distinction entre les règles régionales, d'une part, et les normes et règles communales, d'autre part ( § 2).

Le paragraphe 1er confère au Gouvernement flamand la faculté de fixer les conditions et les règles supplétives de location et d'aliénation de logements modestes.

L'actuel paragraphe 3 de l'article 4.2.2 du décret relatif à la politique foncière et immobilière est transféré dans le paragraphe 2 du nouvel article 4.2.10. A l'heure actuelle, le règlement communal ' Logement modeste ' (' Bescheiden Wonen '), s'applique seulement aux projets affectés d'une charge visant à la réalisation d'une offre de logements modestes, car ' en exécution de l'article 4.2.1 '. En dissociant ces dispositions, la commune peut également imposer des normes de qualité pour l'offre de logements modestes et l'environnement, dans le cadre de projets réalisés par des sociétés de logement social en application de l'article 41, § 2, du Code flamand du Logement. Le même raisonnement s'applique à la possibilité d'établir une différenciation en fonction de la typologie de parcelles et d'habitations qui font partie de l'offre de logements modestes.

De plus, il est proposé de compléter le paragraphe en question en prévoyant la possibilité, pour les communes, d'établir des règles d'attribution locales pour la location de logements modestes et/ou pour l'aliénation de logements modestes et de parcelles. Ces règles d'attribution locales peuvent compléter les règles d'attribution générales établies par le Gouvernement flamand ou y déroger. Ainsi, une commune qui souhaite tenir compte des besoins de groupes-cibles spécifiques en matière de logement (par exemple, des primo-locataires sur le marché du logement), de l'ancrage local des candidats, de la qualité de vie détériorée ou compromise dans certains quartiers ou complexes, etc., pourra établir des règles d'attribution spécifiques.

Ce système permet de s'adapter de manière efficace à la situation locale et de tenir compte au maximum des besoins spécifiques dans une commune » (Doc. parl., Parlement flamand, 2012-2013, n° 1848/1, pp. 31-32).

Quant à l'intérêt des parties requérantes B.8.1. Lorsqu'une association sans but lucratif qui n'invoque pas son intérêt personnel agit devant la Cour, il est requis que son objet social soit d'une nature particulière et, dès lors, distinct de l'intérêt général; qu'elle défende un intérêt collectif; que la norme attaquée soit susceptible d'affecter son objet social; qu'il n'apparaisse pas, enfin, que cet objet social n'est pas ou n'est plus réellement poursuivi.

B.8.2. Aux termes de l'article 5 de ses statuts, l'ASBL « Vlaams Huurdersplatform » a pour objet de favoriser le droit au logement des locataires et des candidats locataires et, en particulier, de groupes de locataires socialement vulnérables. Cet objet social est de nature particulière et est dès lors distinct de l'intérêt général.

Etant donné que les dispositions attaquées renforcent les conditions d'admission en vue d'obtenir une habitation sociale de location, plus précisément à l'égard de la personne avec qui le locataire de référence se marie ou cohabite légalement après le début du contrat de bail, et autorisent le Gouvernement flamand et les communes à fixer des règles supplétives pour la location et l'aliénation de logements modestes par des sociétés de logement social, le décret attaqué affecte cet objet social.

Par le présent recours, la première partie requérante défend un intérêt collectif qu'elle poursuit effectivement, au vu de son dernier rapport annuel. La circonstance que les statuts de la première partie requérante ne lui imposent pas expressément de poursuivre cet objet par des procédures judiciaires et la circonstance que ces statuts l'obligent en revanche à offrir un soutien à ses membres individuels n'y portent pas atteinte.

B.8.3. Dès lors que la première partie requérante justifie d'un intérêt à agir et que son recours est recevable, la Cour ne doit pas examiner si ce dernier l'est aussi en ce qui concerne l'ASBL « Forum Etnisch-Culturele Minderheden ».

B.8.4. Les exceptions sont rejetées.

Quant aux règles répartitrices de compétence B.9. Dans le premier moyen, les parties requérantes font valoir que les articles 3, 6°, et 50, 3°, du décret de la Région flamande du 31 mai 2013 portant modification de divers décrets relatifs au logement violeraient les règles répartitrices de compétence et, particulièrement, l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.

Elles estiment que le législateur décrétal a excédé ses compétences en exigeant que la personne qui, après le début du contrat de bail, se marie ou cohabite légalement avec le locataire de référence signe le contrat de bail et en soumettant ainsi cette personne aux conditions d'admission prévues à l'article 95, § 1er, alinéa 1er, du Code flamand du Logement, ce qui signifie que le candidat locataire doit notamment démontrer qu'il est disposé à apprendre le néerlandais et, le cas échéant, à suivre un parcours d'intégration civique.

Le législateur décrétal aurait ainsi prévu, en matière de protection du logement familial, des règles qui dérogent à la protection offerte par l'article 215, § 2, alinéa 1er, et par l'article 1477, § 2, du Code civil et il règlerait en réalité le régime matrimonial primaire et le régime primaire de la cohabitation légale, qui ressortissent à la compétence du législateur fédéral et que le législateur décrétal ne pourrait pas non plus régler en vertu de ses pouvoirs implicites.

B.10.1. L'article 39 de la Constitution dispose : « La loi attribue aux organes régionaux qu'elle crée et qui sont composés de mandataires élus, la compétence de régler les matières qu'elle détermine, à l'exception de celles visées aux articles 30 et 127 à 129, dans le ressort et selon le mode qu'elle établit. Cette loi doit être adoptée à la majorité prévue à l'article 4, dernier alinéa ».

Dans la version qui s'appliquait au moment où les dispositions attaquées ont été adoptées, l'article 6, § 1er, IV, de la loi spéciale du 8 août 1980 disposait : « Les matières visées à l'article 107quater [actuellement 39] de la Constitution sont : [...] En ce qui concerne le logement : Le logement et la police des habitations qui constituent un danger pour la propreté et la salubrité publiques ».

B.10.2. Il se déduit des dispositions précitées que les régions sont compétentes pour régler l'ensemble de la matière du logement. Ainsi, le législateur décrétal peut régler l'accès au logement social et déterminer la personne qui doit être considérée comme un locataire social.

B.11.1. Le décret de la Région flamande du 15 décembre 2006 « portant modification du décret du 15 juillet 1997 contenant le Code flamand du Logement » a modifié le titre VII du Code flamand du Logement, qui réglemente la location de logements dans le secteur social. Par cette modification, le législateur décrétal entendait apporter une réponse aux problèmes de qualité de la vie et de l'habitat qui existent dans certains complexes de logements sociaux en Flandre, afin de garantir le droit au logement de l'ensemble des habitants. Pour cela, ces dispositions définissaient plus clairement qu'auparavant les obligations du locataire et du bailleur et mettaient à la disposition de ce dernier les instruments qui devraient lui permettre de réagir rapidement et adéquatement vis-à-vis des locataires qui créent des nuisances et détériorent la qualité de la vie et de l'habitat dans les logements sociaux (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, pp. 3-4).

B.11.2. D'après les travaux préparatoires, le décret s'inscrivait dans la mise en oeuvre de la politique flamande du logement. Un des objectifs de celle-ci est une qualité de vie optimale dans les quartiers, la promotion de l'intégration des habitants dans leur environnement social et la promotion de chances égales pour chacun. Un des moyens mis en oeuvre à cette fin est l'encouragement de la mixité sociale. Dans cette optique, la connaissance de base du néerlandais permet d'améliorer la communication entre le locataire et le bailleur et augmente la convivialité et la sécurité dans les logements (ibid., p. 5).En effet, des expériences passées auraient démontré que certains problèmes apparus dans les logements sociaux ont pu être causés par le manque de moyen de communication commun entre les locataires entre eux et entre les locataires ne parlant pas le néerlandais et les services du bailleur (ibid., p. 17).

B.11.3. Avant l'adoption du décret attaqué, les conjoints et les partenaires qui emménageaient ensemble dès le début dans l'habitation sociale de location étaient tous deux soumis aux conditions d'admission fixées dans l'article 95 du Code flamand du Logement. Par la modification attaquée, le législateur décrétal vise à imposer également ces mêmes obligations aux personnes qui ne cohabitent pas avec le locataire de référence au début du bail mais qui le rejoignent ultérieurement en tant que conjoint ou cohabitant légal et qui sont de ce fait considérés eux aussi comme des locataires sociaux.

B.12. La mise à disposition d'un logement social entraîne pour le locataire un avantage pécuniaire important, financé par des moyens publics, qui consiste en la jouissance d'une habitation à un loyer qui est inférieur au prix du marché.

B.13.1 Par son arrêt n° 101/2008 du 10 juillet 2008, la Cour a jugé que le législateur décrétal peut adopter, en vertu de sa compétence en matière de logement, des dispositions qui règlent l'accès au logement social, notamment pour prévoir que les locataires et les candidats locataires doivent faire la preuve de leur volonté d'apprendre le néerlandais, étant donné qu'une connaissance minimale, par tous les locataires, de la langue qui est utilisée par les services du bailleur contribue à améliorer la communication avec ceux-ci et en conséquence la qualité de l'habitation pour l'ensemble des habitants des logements concernés (B.10.2). Par le même arrêt, la Cour a également jugé que le législateur décrétal, tout en étant compétent pour apprécier si, en matière de logement social, il convient de déroger à des règles inscrites dans le Code civil, ne peut porter atteinte à la sécurité de logement dans le secteur du logement social, qui est un élément fondamental de la concrétisation du droit à un logement décent garanti par l'article 23 de la Constitution et confié aux différents législateurs (B.23.1 et B.23.2).

B.13.2 Ce même arrêt a annulé la possibilité de faire figurer une clause résolutoire expresse dans le contrat de location et a rejeté le recours pour le surplus, sous la réserve, d'une part, que les sanctions éventuelles du refus d'apprendre le néerlandais ou de suivre le parcours d'intégration civique soient proportionnées aux nuisances ou torts causés par ces refus et qu'elles ne puissent justifier la résiliation du bail que moyennant un contrôle judiciaire préalable et, d'autre part, que l'obligation « d'avoir la volonté d'apprendre le néerlandais » et les sanctions qui s'y attachent soient interprétées comme ne s'appliquant pas aux candidats-locataires et aux locataires de logements sociaux visés par le décret précité, situés dans les communes périphériques ou de la frontière linguistique, et qui entendent bénéficier des facilités linguistiques.

B.14. La Cour doit toutefois examiner si les dispositions attaquées rendent impossible ou exagérément difficile l'exercice par le législateur fédéral de sa compétence résiduelle relative au statut civil des époux ou des cohabitants légaux. Le principe de proportionnalité est en effet inhérent à l'exercice de toute compétence.

B.15.1. A l'époque de la rédaction des dispositions attaquées, l'article 215, § 2, du Code civil disposait : « Le droit au bail de l'immeuble loué par l'un ou l'autre époux, même avant le mariage et affecté en tout ou en partie au logement principal de la famille, appartient conjointement aux époux, nonobstant toute convention contraire.

Les congés, notifications et exploits relatifs à ce bail doivent être adressés ou signifiés séparément à chacun des époux ou émaner de tous deux. Toutefois, chacun des deux époux ne pourra se prévaloir de la nullité de ces actes adressés à son conjoint ou émanant de celui-ci qu'à la condition que le bailleur ait connaissance de leur mariage.

Toute contestation entre eux quant à l'exercice de ce droit est tranchée par le juge de paix.

Les dispositions du présent paragraphe ne s'appliquent ni aux baux commerciaux, ni aux baux à ferme ».

En vertu de l'article 1477, § 2, du Code civil, cette disposition s'explique par analogie à la cohabitation légale.

B.15.2. En adoptant l'article 215 du Code civil, le législateur entendait protéger les intérêts de la famille contre des actes unilatéraux de l'époux titulaire d'un droit réel ou contractuel sur le logement principal de la famille (Doc. parl., Sénat, S.E., 1974, n° 683/2, annexe, p. 20). Les travaux préparatoires font apparaître que le législateur entendait éviter qu'« un des époux puisse à lui seul priver son conjoint et ses enfants d'un toit » (ibid., p. 21).

Ainsi, le législateur a conféré à tout époux un droit à être consulté pour les actes juridiques effectués par l'autre époux qui ont ou pourraient avoir pour effet de faire perdre la base matérielle de la vie familiale. Dans le cas où le logement familial est une habitation de location, l'article 215, § 2, du Code civil tend à éviter qu'un seul des époux puisse, à l'insu de l'autre, procéder à la résiliation du bail.

B.15.3. Le législateur a voulu protéger le logement familial loué par une présomption légale, selon laquelle le droit au bail appartient aux deux époux, même si seul l'un d'eux a signé le bail et indépendamment du fait que le bail ait été conclu avant ou pendant le mariage.

Pour que cette protection puisse débuter, il est toutefois requis que le bailleur soit informé du mariage et que le logement loué soit le logement principal de la famille. Pour apprécier cette dernière condition, il faut tenir compte des caractéristiques spécifiques du système de location sociale.

B.16.1. Pour avoir droit à une habitation sociale de location, le locataire doit remplir les conditions fixées à l'article 95, § 1er, du Code flamand du logement, notamment en matière de propriété immobilière et de revenus. Ceci implique qu'une modification de ces situations peut entraîner une adaptation des conditions de location ou, le cas échéant, la cessation du bail social. Le bailleur doit également veiller aux normes de sécurité, de salubrité et de qualité de l'habitat dans les habitations sociales louées (article 5). C'est la raison pour laquelle le locataire social est tenu d'informer le bailleur de toute modification dans l'occupation de l'habitation (article 92, § 3) et qu'une personne ne peut adhérer à un bail en cours que si cette adhésion n'a pas pour effet de rendre le logement inadapté (article 95).

B.16.2. Ce qui précède signifie que lorsqu'un locataire d'une habitation sociale se marie, le bailleur doit avoir la possibilité, contrairement à la location sur le marché privé, d'évaluer les conditions du bail et, le cas échéant, de les adapter. La modification de la composition familiale peut également amener le bailleur à proposer une autre habitation plus adaptée. Le système de location sociale diffère ainsi fondamentalement de la location sur le marché privé, en ce qu'il est subventionné par les autorités publiques et dépend de conditions imposées au locataire ainsi que de la situation familiale de celui-ci.

B.16.3. Le fait que le législateur fédéral soit compétent, dans le cadre du statut civil des époux, pour imposer des droits et obligations relatifs au logement familial n'empêche pas le législateur décrétal d'imposer simultanément à ces mêmes personnes des obligations déterminées, lorsque ce logement familial est une habitation sociale de location.

B.17.1. L'article 215, § 2, du Code civil vise à offrir une protection contre la résiliation unilatérale du bail par l'un des époux mais n'est pas lié aux obligations qui s'appliquent pour conclure le bail.

Par conséquent, on ne saurait déduire de cette disposition un droit inconditionnel pour les époux à destiner n'importe quelle habitation de location à être le logement familial.

B.17.2. L'article 215, § 2, du Code civil ne s'oppose dès lors pas à ce qu'il soit demandé à la personne qui se marie avec le locataire d'une habitation sociale d'adhérer au contrat de bail et de respecter les conditions à cet effet.

Toutefois, puisque les dispositions attaquées obligent le conjoint à adhérer au contrat de bail déjà en cours, elles ont pour effet de le soumettre à toutes les obligations qui en découlent et donc aussi à celles qui portent sur sa cessation.

B.17.3. Dans le cadre de l'application de l'article 215, § 2, du Code civil, un seul des époux ne peut pas mettre fin unilatéralement à la location du logement familial. Les congés et notifications à cet effet doivent émaner des deux époux. A défaut d'avoir agi conjointement, l'autre époux peut invoquer la nullité de ces documents.

Aux termes de l'article 98, § 3, du Code flamand du logement, un locataire peut à tout moment résilier le contrat de bail, mais cette résiliation ne s'applique qu'à son égard. Par conséquent, le risque qu'en cas d'acte unilatéral de l'un des époux, l'autre époux perde la protection du logement familial n'existe pas.

B.17.4. Ainsi, les dispositions attaquées n'affectent pas les objectifs que poursuit le législateur fédéral par l'article 215, § 2, alinéa 1er, du Code civil, qui, bien qu'il règle les droits et devoirs respectifs des époux, est étroitement lié à la matière du logement.

B.18. Les dispositions attaquées ressortissent par conséquent à la compétence du législateur décrétal en matière de logement et n'ont pas pour effet de rendre impossible ou exagérément difficile l'exercice de la compétence fédérale en matière de statut civil des époux. En conséquence, il n'y a pas lieu d'examiner si les conditions d'application de l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 sont remplies.

B.19. Le premier moyen n'est pas fondé.

Quant au principe d'égalité et de non-discrimination, au droit à un logement décent et au droit au respect de la vie privée et familiale B.20. Dans les deuxième, troisième et quatrième moyens, les parties requérantes font valoir que les articles 3, 6°, et 50, 3°, du décret attaqué violent les articles 10 11, 22 et 23, alinéa 3, 3°, de la Constitution, combinés avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 9, paragraphe 1, de la Convention relative aux droits de l'enfant. Les dispositions attaquées instaureraient une différence de traitement injustifiée entre les conjoints qui louent un logement social et les conjoints qui louent un logement sur le marché privé et elles priveraient ainsi du droit à un logement décent certains partenaires de locataires sociaux; en outre, elles permettraient de séparer des familles avec enfants. Eu égard à leur connexité, ces moyens doivent être examinés conjointement.

B.21.1. L'article 22 de la Constitution dispose : « Chacun a droit au respect de sa vie privée et familiale, sauf dans les cas et conditions fixés par la loi.

La loi, le décret ou la règle visée à l'article 134 garantissent la protection de ce droit ».

L'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme prévoit : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ». Il ressort des travaux préparatoires de l'article 22 de la Constitution que le Constituant a recherché la plus grande concordance possible avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme (Doc. parl., Chambre, 1992-1993, n° 997/5, p. 2).

B.21.2. L'article 23 de la Constitution dispose : « Chacun a le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine.

A cette fin, la loi, le décret ou la règle visée à l'article 134 garantissent, en tenant compte des obligations correspondantes, les droits économiques, sociaux et culturels, et déterminent les conditions de leur exercice.

Ces droits comprennent notamment : [...] 3° le droit à un logement décent; [...] ».

Sans doute la Cour doit-elle, dans le domaine de la politique du logement, respecter l'appréciation des législateurs décrétaux quant à l'intérêt général, sauf si cette appréciation est manifestement déraisonnable, mais ce pouvoir d'appréciation est moins large lorsque cette politique du logement risque d'entraîner pour une certaine catégorie de personnes la perte de leur logement, ce qui est effectivement considéré comme une des ingérences les plus extrêmes dans le droit au respect du logement (CEDH, 13 mai 2008, McCann c.

Royaume-Uni, § 50).

B.21.3. L'article 9, paragraphe 1, de la Convention relative aux droits de l'enfant dispose : « Les Etats parties veillent à ce que l'enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré, à moins que les autorités compétentes ne décident, sous réserve de révision judiciaire et conformément aux lois et procédures applicables, que cette séparation est nécessaire dans l'intérêt supérieur de l'enfant. Une décision en ce sens peut être nécessaire dans certains cas particuliers, par exemple lorsque les parents maltraitent ou négligent l'enfant, ou lorsqu'ils vivent séparément et qu'une décision doit être prise au sujet du lieu de résidence de l'enfant ».

B.22.1. Dans la mesure où les moyens sont fondés sur une comparaison entre la situation des époux qui louent un logement social et la situation des époux qui louent un logement sur le marché privé, la différence de traitement s'explique par l'exercice des compétences respectives de l'autorité fédérale et de la Région flamande dans des matières différentes. Alors que la Région flamande est compétente pour le logement social, comme il est exposé en B.10.2, les compétences en matière de bail ordinaire et de bail d'habitation revenaient, au moment où les dispositions attaquées ont été adoptées, à l'autorité fédérale.

Sans préjudice de l'application éventuelle du principe de proportionnalité dans l'exercice des compétences, l'autonomie que l'article 6, § 1er, IV, de la loi spéciale du 8 août 1980 a conférée aux régions n'aurait pas de sens si une différence de traitement entre les destinataires de règles fédérales, d'une part, et de règles régionales, d'autre part, dans des matières analogues, était jugée contraire en tant que telle au principe d'égalité et de non-discrimination.

B.22.2. Dans la mesure où ils sont fondés sur la différence de traitement entre des époux qui louent un logement social et les époux qui louent une habitation sur le marché privé, les moyens ne sont pas fondés. La Cour doit toutefois encore examiner si les dispositions attaquées sont compatibles avec le droit au respect de la vie privée et familiale et avec le droit à un logement décent.

B.23. Les dispositions attaquées n'imposent pas plus d'obligations au locataire de référence d'un logement social que celles qu'il doit déjà respecter en vertu de l'article 95, § 1er, du Code flamand du Logement. Elles étendent ces obligations, à l'exception de la condition de revenu, aux personnes qui adhèrent au bail en cours, dans le cadre ou non d'un mariage ou d'une cohabitation légale.

Dans ce cadre, elles obligent la personne qui, après le début du contrat de bail, se marie ou cohabite légalement avec le locataire de référence à signer le bail, une obligation qui s'appliquait auparavant déjà au cohabitant de fait du locataire de référence. Par conséquent, non seulement le locataire de référence et les personnes qui emménagent avec lui dans le logement social dès le début du contrat de bail, mais également toute personne qui adhère à un contrat de bail en cours doivent désormais démontrer leur volonté d'apprendre le néerlandais et, si le décret du 28 février 2003 relatif à la politique flamande d'intégration civique s'applique, de suivre le parcours d'intégration civique.

En échange du respect de ces obligations, le locataire social et son ou sa partenaire obtiennent, quel que soit le moment de leur mariage ou de leur contrat de cohabitation légale, un avantage important, financé par des moyens publics, qui consiste en la jouissance d'une habitation à un loyer qui est inférieur au prix du marché.

B.24. Les dispositions attaquées ne peuvent être considérées comme une limitation au droit au logement décent de l'époux ou du partenaire que dans la mesure où le fait que le locataire de référence initial se marie ou conclut un contrat de cohabitation légale, a pour conséquence que les époux ou partenaires occuperont nécessairement l'habitation sociale de location en tant que logement familial.

B.25.1. Selon les travaux préparatoires du décret du 15 décembre 2006, « la connaissance du néerlandais émancipe le locataire, améliore la communication entre le locataire et le bailleur et augmente la sécurité dans les complexes de logements. » C'est pourquoi « il faut promouvoir l'apprentissage d'une langue commune au locataire et au bailleur, à savoir le néerlandais », ce qui améliore également la convivialité dans les quartiers de logements sociaux (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, p. 5). Le législateur décrétal a eu égard à l'expérience passée, qui montre que, dans certaines habitations sociales, des problèmes ont pu être causés par le manque de moyen de communication entre des locataires qui ne parlaient pas le néerlandais et les services du bailleur, dans la mesure où ces locataires ne comprenaient pas les consignes données par le bailleur (ibid, p. 17). L'obligation imposée à chaque candidat-locataire et locataire d'être prêt à apprendre le néerlandais devrait remédier à ce genre de problèmes.

B.25.2. Ces objectifs doivent également être mis en relation avec ceux de la politique d'intégration et d'intégration civique, qui est actuellement régie par le décret du 28 février 2003 relatif à la politique flamande d'intégration civique et qui sera régie dans le futur par le décret du 7 juin 2013 relatif à la politique flamande d'intégration et d'intégration civique.

L'article 2 du décret du 28 février 2003 définit l'intégration civique comme « un processus interactif au cours duquel les autorités proposent aux immigrés, au sens de l'article 5, § 1er, II, 3°, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, un programme spécifique qui, d'une part, leur permet de renforcer leur autonomie et, d'autre part, contribue à leur reconnaissance, par la société, en tant que citoyens à part entière, dans le but d'arriver à une pleine participation active et une citoyenneté partagée par tous, et l'obtention d'une cohésion sociale suffisante ».

Dans le « groupe-cible » de ce décret, qui comprend notamment tout étranger majeur inscrit dans une commune de langue néerlandaise, l'« intégrant » qui est locataire ou candidat-locataire d'un logement social en Région flamande figure parmi les catégories prioritaires pour le parcours d'intégration primaire, conformément à l'article 3, § 4, 4°, du décret du 28 février 2003.

L'article 13, § 1er, du même décret décrit ce parcours dans les termes suivants : « Dans le parcours primaire d'intégration civique, le programme de formation se compose de trois paquets de formation, à savoir l'orientation sociale, le néerlandais comme seconde langue et l'orientation de la trajectoire de vie.

L'orientation sociale a pour but de renforcer le fonctionnement autonome, d'une part en stimulant la connaissance des droits et devoirs et la connaissance et la compréhension de notre société et de ses valeurs fondamentales et, d'autre part, en entamant le développement de quelques compétences nécessaires à l'autonomie des intégrants.

Le paquet de cours de néerlandais comme seconde langue a pour but de stimuler l'acquisition rapide d'aptitudes de base du néerlandais, en vue d'un cours complémentaire proposé aux intégrants.

L'orientation de la trajectoire a pour but de soutenir et d'accompagner un processus individuel, au cours duquel l'intégrant prend en charge sa trajectoire de vie, acquiert notamment une connaissance du marché du travail et du système de l'enseignement, ses compétences déjà présentes étant transposées dans le cadre de notre société ».

B.25.3. En étendant, par l'effet du décret attaqué, ces obligations à tous les usagers du service de logement social, le législateur décrétal poursuit les mêmes objectifs. Il vise ainsi à assurer la bonne compréhension entre le locataire et le bailleur, ainsi que la qualité de vie des habitants des logements sociaux, de sorte que les mesures attaquées s'inscrivent elles aussi dans le cadre du droit fondamental à un logement décent de ces autres habitants (Doc. parl., Parlement flamand, 2012-2013, n° 1848/1, p. 8).

B.26.1. L'obligation de signer le contrat de bail en cours et les obligations qui découlent de cette signature sont pertinentes pour réaliser les objectifs poursuivis par le législateur décrétal en matière de communication et de qualité de vie.

Le législateur décrétal a pu juger que le but des dispositions attaquées, qui est d'améliorer la qualité de vie d'habitat dans les complexes de logement sociaux, ne pouvait être atteint si chaque locataire ne participait pas activement à sa réalisation.

B.26.2. En outre, les dispositions attaquées ont permis de faire disparaître une inégalité existante. Désormais, les obligations de signer le contrat, d'être disposé à apprendre le néerlandais et de suivre, le cas échéant, le parcours d'intégration civique ne s'appliquent plus seulement, comme auparavant, à la personne qui est mariée ou cohabite, dès le début du contrat de bail, avec le locataire de référence, mais également à la personne qui se marie ou qui cohabite légalement avec le locataire de référence après le début du bail. Par rapport aux objectifs poursuivis par le législateur décrétal, le moment auquel le mariage ou le contrat de cohabitation légale a été conclu n'a en effet aucune importance.

B.27.1. Il ressort des travaux préparatoires relatifs à l'article 23 de la Constitution que le Constituant ne souhaitait pas « confiner les citoyens dans un rôle passif ou [...] les inciter à adopter une attitude passive », mais qu'au contraire, il entendait affirmer que « quiconque a des droits, a également des devoirs », partant de l'idée que « le citoyen a pour devoir de collaborer au progrès social et économique de la société dans laquelle il vit » (Doc. parl., Sénat, S.E. 1991-1992, n° 100-2/4°, pp. 16-17). C'est pourquoi il a permis aux législateurs auxquels il confie la charge de garantir les droits économiques, sociaux et culturels de tenir compte des « obligations correspondantes », selon les termes de l'alinéa 2 de l'article 23.

B.27.2. Les citoyens bénéficiaires des droits économiques, sociaux et culturels énoncés à l'article 23 de la Constitution peuvent donc se voir imposer des obligations pour accéder à ces droits. Les mots « A cette fin », placés en tête de cet alinéa 2, indiquent toutefois que ces obligations doivent être liées à l'objectif général inscrit à l'alinéa 1er de l'article 23, qui est de permettre à chacun de mener une vie conforme à la dignité humaine, par la jouissance des droits énumérés à l'alinéa 3 du même article. Ces obligations doivent permettre aux personnes à qui elles sont imposées de contribuer à la réalisation effective de cet objectif, pour elles-mêmes ainsi que pour les autres bénéficiaires des droits énumérés à l'article 23, et doivent être proportionnées à l'objectif ainsi défini.

B.28.1. Le législateur décrétal a pu estimer que la condition d'être prêt à apprendre le néerlandais de façon à atteindre un niveau de maîtrise élémentaire de cette langue pouvait être considérée comme une « obligation correspondante » au sens de l'article 23 de la Constitution. Il peut en effet être admis que « le fait d'être disposé à apprendre le néerlandais est donc un moyen permettant d'augmenter l'implication du locataire dans la réalisation, avec le bailleur, d'un logement social décent », spécialement dans les quartiers où cohabitent des personnes d'origines différentes (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, p. 21).

B.28.2. L'obligation de montrer sa volonté d'apprendre le néerlandais n'est pas disproportionnée à cet objectif, dès lors qu'elle ne porte que sur une connaissance élémentaire de la langue, que des cours sont offerts gratuitement aux personnes intéressées (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, p. 19), que celles-ci sont néanmoins libres de montrer leur volonté d'apprendre le néerlandais par tout autre moyen (ibid.) et qu'aucune obligation de résultat ne peut leur être imposée, de sorte que ni la connaissance effective de la langue ni son usage après que des cours ou une autre forme d'apprentissage ont été suivis ne peuvent être ni exigés, ni vérifiés par le bailleur (ibid., p. 16).

B.28.3. Il n'est pas exigé du conjoint ou du cohabitant légal qu'il remplisse déjà effectivement, au moment de la signature du contrat de bail, les conditions en matière de connaissance de la langue ou d'intégration, de sorte que l'accès à un logement social ne peut leur être refusé pour ces motifs. Il leur est par contre demandé, au début du bail, d'être disposé à remplir ces conditions à l'avenir. La volonté réelle d'apprendre le néerlandais et de suivre le parcours d'intégration civique ne peut dès lors être évaluée qu'après un certain temps.

B.29.1. Si les obligations imposées au locataire social ne sont pas respectées, le bailleur peut, selon les conditions que le Gouvernement flamand doit arrêter, accompagner ou faire accompagner le locataire d'un logement social, moyennant le consentement de ce dernier, pour qu'il remplisse ses obligations (article 92, § 3, du décret du 15 juillet 1997).

B.29.2. Le refus persistant d'un conjoint ou d'un partenaire qui est devenu, en tant que partie contractante, un usager du service de logement social de se conformer à ces obligations peut entraîner une sanction administrative (article 102bis du Code flamand du Logement) ou, le cas échéant, la résiliation du contrat de bail (article 98, § 3, du Code flamand du Logement).

B.29.3. L'objectif d'assurer la qualité de vie la meilleure possible pour tous les habitants des logements sociaux peut certes justifier qu'un accompagnement soit prévu pour les nouveaux locataires et que leurs obligations leur soient rappelées. Des sanctions proportionnées doivent pouvoir être prises à l'égard des locataires qui, négligeant de se conformer à leurs obligations contractuelles, causent par là des désagréments ou des nuisances à l'ensemble des personnes occupant les logements. Il est dès lors légitime que le législateur décrétal prévoie un ensemble de mesures et de sanctions permettant aux bailleurs de logements sociaux de réagir adéquatement et de manière proportionnée aux comportements indésirables ou aux manquements des locataires.

B.29.4. Par ailleurs, dans certains cas, le comportement des locataires peut justifier qu'il soit mis fin au contrat de bail. Dans ces hypothèses, l'article 98, § 3, du Code flamand du logement prévoit la possibilité de résiliation du bail, moyennant un préavis de trois ou de six mois, selon les cas. En application du droit commun, la résiliation du bail pour manquement du locataire à ses obligations contractuelles peut toujours être prononcée par le juge de paix, de sorte que cette sanction est soumise à un contrôle judiciaire préalable.

B.29.5. En outre, ainsi que l'a relevé la section de législation du Conseil d'Etat dans son avis précédant le décret du 15 décembre 2006, serait manifestement disproportionnée une résiliation du contrat de bail qui serait demandée par le bailleur pour cause de négligence ou de refus de la part du locataire dans l'apprentissage de la langue, alors qu'il ne pourrait être prouvé par le bailleur que cette négligence ou ce refus ont causé des nuisances graves ou des atteintes réelles à la qualité de vie des autres locataires (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/1, p. 58). Le juge de paix pourra dès lors, dans ce cas aussi, vérifier si la gravité du manquement du locataire est de nature à justifier la résiliation du contrat de bail.

B.30. Sous réserve de cette interprétation, les dispositions attaquées ne sont pas incompatibles avec les articles 10, 11, 22 et 23 de la Constitution, combinés avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 9, paragraphe 1, de la Convention relative aux droits de l'enfant.

Les deuxième, troisième et quatrième moyens ne sont pas fondés.

Quant à la libre circulation des travailleurs B.31. Dans le cinquième moyen, les parties requérantes font valoir que les articles 3, 6°, et 50, 3°, du décret attaqué violent les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec les articles 18, 39 et 43 du traité CE et avec les articles 7 et 9 du règlement (CEE) n° 1612/68 du Conseil, du 15 octobre 1968, relatif à la libre circulation des travailleurs à l'intérieur de la Communauté, en ce qu'ils affecteraient de manière discriminatoire la libre circulation des travailleurs.

B.32.1. Depuis le 1er décembre 2009, date d'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, la citoyenneté européenne, la libre circulation des travailleurs et la liberté d'établissement ne sont plus régies par les dispositions auxquelles les parties requérantes renvoient, mais par les articles 21, 45 et 49 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

Le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne est toutefois, en substance, la même norme que le Traité CE, qui a simplement été modifié, renuméroté et rebaptisé. Etant donné que les garanties fondamentales du droit de l'Union européenne que ciblent les parties requérantes sont claires, le cinquième moyen est recevable en ce qu'il concerne les articles 18, 39 et 43 du Traité CE. B.32.2. En revanche, le cinquième moyen n'est pas recevable en ce qu'il concerne le règlement (CEE) n° 1612/68, étant donné que ce règlement a été abrogé par l'article 41 du règlement (UE) n° 492/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 5 avril 2011, relatif à la libre circulation des travailleurs à l'intérieur de l'Union. Ce second règlement n'est donc pas un prolongement du premier.

B.33. Bien que les parties requérantes invoquent les articles 18, 39 et 43 du Traité CE, elles ne traitent que de la libre circulation des travailleurs. La Cour limite dès lors son examen à l'article 45 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

B.34. En vertu de l'article 5, § 2, 1°, du décret du 28 février 2003 relatif à la politique flamande d'intégration civique, les citoyens de l' « UE+ », c'est-à-dire des Etats membres de l'Espace économique européen et de la Suisse, sont dispensés de l'obligation d'intégration civique.

Le cinquième moyen n'est dès lors pas fondé en ce qu'il concerne l'obligation de suivre, le cas échéant, le parcours d'intégration civique.

B.35. La Cour doit toutefois encore examiner le cinquième moyen, en ce qu'il concerne l'obligation de démontrer la volonté d'apprendre le néerlandais.

B.36.1. Le droit à la libre circulation des travailleurs comprend le droit à l'accès au logement à l'égal des nationaux.

B.36.2. Les dispositions attaquées sont applicables à tous les candidats-locataires et locataires qui souhaitent occuper un logement social en Région flamande, ainsi qu'à leurs partenaires qui souhaitent ultérieurement être partie au contrat de bail, quelle que soit leur nationalité. Elles n'établissent dès lors aucune distinction de traitement sur la base de la nationalité.

Dans le cadre de l'appréciation des dispositions attaquées, il y a lieu de souligner qu'il ne peut être exigé des intéressés qu'ils connaissent ou parlent le néerlandais ni lors de l'inscription des candidats-locataires, ni lors de l'admission des locataires à un logement social. Qu'il soit ou non citoyen de l'Union européenne, nul ne peut donc se voir refuser un logement social pour ce motif.

Il est toutefois demandé aux candidats-locataires ou aux locataires qui ne peuvent démontrer qu'ils satisfont, pour la connaissance du néerlandais, au critère A.1. du Cadre européen commun de référence pour les langues de s'engager à montrer leur volonté d'apprendre le néerlandais. Comme il est exposé en B.28.2, il ne s'agit pas à cet égard d'une obligation de résultat, mais uniquement d'une obligation de moyen, à laquelle le locataire ainsi que le partenaire qui souhaite ultérieurement devenir partie au contrat de bail peuvent facilement satisfaire, de sorte qu'il n'est pas possible de mettre fin au contrat de bail au seul motif que les intéressés ne connaissent pas ou ne parlent pas le néerlandais.

B.37.1. Le droit à la libre circulation des travailleurs et le principe de non-discrimination qui s'y attache n'interdisent pas aux autorités d'établir certaines conditions, notamment linguistiques, pour l'accès à certains droits liés au principe de libre circulation.

Selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, « les mesures nationales restrictives de l'exercice des libertés fondamentales garanties par le Traité ne peuvent être justifiées que si elles remplissent quatre conditions : s'appliquer de manière non discriminatoire, répondre à des raisons impérieuses d'intérêt général, être propres à garantir la réalisation de l'objectif qu'elles poursuivent et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour l'atteindre » (CJCE, 4 juillet 2000, C-424/97, S. Haim, point 57). Il appartient en principe aux juridictions nationales de vérifier que ces conditions sont réunies, sans préjudice de leur possibilité d'interroger la Cour de justice quant à l'interprétation des dispositions du droit de l'Union européenne applicables (ibid., point 58).

B.37.2. Sans qu'il soit nécessaire d'examiner si la condition d'être prêt à apprendre le néerlandais constitue une mesure restrictive de l'exercice de la liberté de circulation, il suffit de constater en l'espèce que les dispositions attaquées sont applicables à tous les locataires et candidats-locataires d'un logement social, quelle que soit leur nationalité, que pour les motifs exprimés en B.25.1 à B.29.4, elles poursuivent un objectif qui peut être considéré comme d'intérêt général, qu'elles sont propres à en garantir la réalisation et qu'elles sont, compte tenu de l'interprétation indiquée en B.29.5 qui doit leur être donnée par le Gouvernement flamand appelé à les mettre en oeuvre, proportionnées à cet objectif.

Quant au principe de légalité B.38. Dans le sixième moyen, les parties requérantes font valoir que l'article 67 du décret attaqué viole les articles 10 et 11 de la Constitution, combiné avec le principe de légalité consacré par l'article 23 de la Constitution, en ce qu'il confère au Gouvernement flamand et aux autorités locales un pouvoir excessif pour déterminer les conditions de location et d'aliénation de logements modestes.

B.39. L'article 23, alinéa 3, 3°, de la Constitution fait obligation aux législateurs compétents de garantir le droit à un logement décent et leur permet de déterminer les conditions d'exercice de ce droit.

Cet article n'interdit pas d'accorder des délégations à un gouvernement, pour autant qu'elles portent sur des mesures dont l'« objet » a été déterminé par le législateur compétent.

B.40. La disposition attaquée permet au Gouvernement flamand de déterminer des conditions et des règles complémentaires pour la location et l'aliénation de logements modestes par des sociétés de logement social.

En outre, elle permet aux communes de déterminer, dans le règlement communal « Bescheiden Wonen » (« Logement modeste »), les règles d'attribution locales pour la location et l'aliénation de logements modestes par des sociétés de logement social. Ces règles peuvent compléter les règles d'attribution régionales ou y déroger.

Ainsi, la disposition attaquée indique de manière suffisante l'objet des délégations conférées au Gouvernement flamand et des missions attribuées aux communes.

B.41.1. Il appartient au Gouvernement flamand de déterminer si les règles d'attribution locales doivent recevoir ou non l'approbation du Gouvernement flamand. Par ailleurs, l'absence d'une tutelle administrative spécifique n'empêche pas que les règles d'attribution locales relèvent de la tutelle administrative générale, visée dans les articles 252 à 260 du décret communal flamand du 15 juillet 2005.

B.41.2. En outre, en accordant une telle délégation, le législateur décrétal n'a pu habiliter le Gouvernement flamand à adopter des dispositions qui entraîneraient une violation du droit constitutionnel à un logement décent. Les travaux préparatoires du décret du 15 décembre 2006 précisent explicitement que seule la volonté d'apprendre le néerlandais est exigée, et que la connaissance effective de la langue ne peut être vérifiée, sauf chez les personnes qui demandent à être exemptées au motif qu'elles possèdent déjà un niveau suffisant de connaissance de la langue (Doc. parl., Parlement flamand, 2005-2006, n° 824/5, p.12). Il appartient au juge compétent de vérifier si le Gouvernement flamand n'a pas fait un usage illégal de la délégation qui lui est accordée.

B.42. Le sixième moyen n'est pas fondé.

Par ces motifs, la Cour rejette le recours, sous réserve de l'interprétation mentionnée en B.29.5 et de ce qui est dit en B.13.2.

Ainsi rendu en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 5 mars 2015.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, A. Alen

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