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Arrêt
publié le 14 juillet 2017

Extrait de l'arrêt n£ 46/2017 du 27 avril 2017 Numéro du rôle : 6364 En cause : les questions préjudicielles relatives aux articles 1 er , 2, 1°, f), et 4 du décret de la Région wallonne du 19 novembre 1998 instaurant une taxe sur le La Cour constitutionnelle, composée des présidents J. Spreutels et E. De Groot, et des juges L. (...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n£ 46/2017 du 27 avril 2017 Numéro du rôle : 6364 En cause : les questions préjudicielles relatives aux articles 1er, 2, 1°, f), et 4 du décret de la Région wallonne du 19 novembre 1998 instaurant une taxe sur les automates en Région wallonne, posées par le Tribunal de première instance de Namur, division Namur.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents J. Spreutels et E. De Groot, et des juges L. Lavrysen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke et F. Daoût, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président J. Spreutels, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par jugement du 10 février 2016 en cause de la SA « Varika » contre la Région wallonne, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 23 février 2016, le Tribunal de première instance de Namur, division Namur, a posé les questions préjudicielles suivantes : « 1. Les articles 1 du décret wallon du 19 novembre 1998 instaurant une taxe sur les automates en Région wallonne et 2, 1°, f), du même décret tel que modifié par l'article 11 du décret du 15 décembre 2012 [lire : 2011] contenant le budget des recettes de la Région wallonne pour l'année budgétaire 2011 [lire : 2012] violent-ils les articles 10, 11 et 172 de la Constitution en ce qu'ils instaurent une taxe annuelle sur les automates portant sur les appareils distributeurs automatiques de tabacs, cigares ou cigarettes, alors que la vente de tabacs, cigares et cigarettes réalisée par une autre voie que la voie automatique n'est pas visée par cette taxe ? 2. Les articles 1 du décret wallon du 19 novembre 1998 instaurant une taxe sur les automates en Région wallonne, 2, 1°, f), du même décret tel que modifié par l'article 11 du décret du 15 décembre 2012 [lire : 2011] contenant le budget des recettes de la Région wallonne pour l'année budgétaire 2011 [lire : 2012] et 4 du décret wallon du 19 novembre 1998 instaurant une taxe sur les automates en Région wallonne violent-ils les articles 10, 11 et 172 de la Constitution en ce qu'ils instaurent une taxe annuelle de 500 euros (exercice d'imposition 2011) sur les automates portant sur les appareils distributeurs automatiques de tabacs, cigares ou cigarettes, sans tenir compte (i) du chiffre d'affaires réalisé au moyen de l'automate et/ou (ii) de la durée d'exploitation de l'automate pendant l'exercice pour lequel l'impôt est dû ? 3.Les articles 1 du décret wallon du 19 novembre 1998 instaurant une taxe sur les automates en Région wallonne, 2, 1°, f), du même décret tel que modifié par l'article 11 du décret du 15 décembre 2012 [lire : 2011] contenant le budget des recettes de la Région wallonne pour l'année budgétaire 2011 [lire : 2012] et 4 du décret wallon du 19 novembre 1998 instaurant une taxe sur les automates en Région wallonne violent-ils les articles 10, 11 et 172 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec la liberté du commerce et de l'industrie, en ce qu'ils instaurent une taxe annuelle de 500 euros (exercice d'imposition 2011) sur les automates portant sur les appareils distributeurs automatiques de tabacs, cigares ou cigarettes, même si la taxe due porte substantiellement atteinte à la rentabilité de l'exploitation de la vente de tels produits par le biais de ces automates ? 4. Les articles 1 du décret wallon du 19 novembre 1998 instaurant une taxe sur les automates en Région wallonne, 2, 1°, f), du même décret tel que modifié par l'article 11 du décret du 15 décembre 2012 [lire : 2011] contenant le budget des recettes de la Région wallonne pour l'année budgétaire 2011 [lire : 2012] et 4 du décret wallon du 19 novembre 1998 instaurant une taxe sur les automates en Région wallonne violent-ils l'article 16 de la Constitution, lu en combinaison avec l'article 1er du Premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce qu'ils instaurent une taxe annuelle de 500 euros (exercice d'imposition 2011) sur les automates portant sur les appareils distributeurs automatiques de tabacs, cigares ou cigarettes, sans avoir égard à la rentabilité de l'exploitation de la vente de tels produits par le biais de ces automates ? ». (...) III. En droit (...) B.1.1. L'article 1er du décret de la Région wallonne du 19 novembre 1998 instaurant une taxe sur les automates en Région wallonne dispose : « Il est établi au profit de la Région wallonne une taxe annuelle sur les automates dans les conditions et selon les modalités déterminées par le présent décret ».

L'article 2, 1°, f), de ce décret, tel qu'il a été modifié par l'article 11, § 1er, du décret de la Région wallonne du 15 décembre 2011 contenant le budget des recettes de la Région wallonne pour l'année budgétaire 2012, dispose : « Au sens du présent décret, on entend par : 1° ' automate ' : [...] f) les appareils distributeurs automatiques de tabacs, cigares ou cigarettes ». L'article 4, § 1er, de ce décret, tel qu'il a été remplacé par l'article 11, § 2, du décret de la Région wallonne du 15 décembre 2011 précité et avant sa modification par l'article 39 du décret de la Région wallonne du 19 septembre 2013 portant des dispositions fiscales diverses, dispose : « Le montant de la taxe est fixé comme suit : 1) pour les automates visés à l'article 2, a), b) et c) : 3.500 euros par automate; 2) pour les appareils distributeurs de carburants accessibles au public, en libre service pour lesquels le carburant peut être payé par un système automatisé : a) pour les distributeurs de carburant en libre service entièrement automatisés : 743,56 euros par pistolet; b) quand plusieurs pistolets sont reliés à un compteur et ne peuvent être utilisés simultanément : 1.062,63 euros par compteur; 3) pour les appareils distributeurs de carburants accessibles au public, en libre service pour lesquels le carburant doit être payé par un système automatisé : a) pour les distributeurs de carburant en libre service entièrement automatisés : 875 euros par pistolet; b) quand plusieurs pistolets sont reliés à un compteur et ne peuvent être utilisés simultanément : 1.250 euros par compteur; 4) pour les appareils distributeurs automatiques de tabacs, cigares et cigarettes : 500 euros par appareil distributeur. Les montants des taxes précités sont adaptés chaque année en fonction des fluctuations de l'indice des prix à la consommation. La Direction générale opérationnelle Fiscalité du Service public de Wallonie publie chaque année, à partir de l'année 2012, au Moniteur belge les montants de la taxe à percevoir pour la période imposable en cours, adaptés dans la même proportion que l'évolution de l'indice des prix à la consommation entre les mois de juin de l'année de la publication et de l'année précédente ».

L'article 4, § 2, de ce décret dispose : « La taxe est due pour toute l'année, du moment que l'automate a été installé et exploité pendant une période quelconque de celle-ci ».

B.1.2. Il ressort des motifs de la décision de renvoi que le juge a quo doit se prononcer sur une taxe sur les appareils distributeurs automatiques de tabacs, cigares et cigarettes, établie pour l'année budgétaire 2011.

B.2. Il ressort des travaux préparatoires du décret de la Région wallonne du 15 décembre 2011 que le législateur décrétal a voulu soumettre une nouvelle catégorie d'automates à la taxe, les appareils distributeurs de tabacs, cigares et cigarettes. « En 1998, il avait déjà été décidé que si un jour cela s'avérait nécessaire, le décret pourrait être complété par l'assujettissement à la taxe d'un ou de plusieurs autre(s) type(s) d'automate(s). C'est ce que réalise le présent texte en matière d'appareils distributeurs automatiques de tabacs, cigares et cigarettes. Les objectifs de cet assujettissement à la taxe sur les automates sont les mêmes que ceux qui ont donné naissance au décret du 19 novembre 1998 instaurant une taxe sur les automates en Région wallonne » (Doc. parl., Parlement wallon, 2011-2012, n° 4-III a-1, n° 4-IIIbcd-1, Annexe 3ter, p. 4). « Lors de la mise en place d'une taxe sur les automates en 1998, il a toujours été bien clair que cette dernière ne pouvait pas être un frein à la modernisation des services offerts. Ce n'était donc pas l'explosion des automates qui justifiait leur taxation mais bien l'uniformisation des tarifs applicables et l'objectif d'une certaine justice fiscale » (ibid.). « En ce qui concerne les appareils distributeurs automatiques de tabac, cigares ou cigarettes, l'assujettissement à la taxe est dicté par des considérations de santé publique et d'emploi » (ibid.).

B.3.1. La première question préjudicielle interroge la Cour sur la compatibilité des articles 1er et 2, 1°, f), du décret de la Région wallonne du 19 novembre 1998 avec les articles 10, 11 et 172 de la Constitution, en ce qu'ils instaurent une taxe annuelle sur les appareils distributeurs automatiques de tabacs, cigares ou cigarettes, alors que la vente de tabacs, cigares et cigarettes réalisée par une autre voie que la voie automatique n'est pas visée par cette taxe.

B.3.2. Les articles 10 et 11 de la Constitution garantissent le principe d'égalité et de non-discrimination. L'article 172 de la Constitution constitue une application particulière de ce principe en matière fiscale.

B.3.3. Des mesures fiscales peuvent poursuivre à la fois un objectif budgétaire général et des objectifs plus particuliers, liés à certaines politiques que le législateur entend mettre en oeuvre. Il ne résulte pas du fait que le législateur poursuit un objectif budgétaire d'intérêt général qu'il ne pourrait pas distinguer certaines catégories de contribuables qui se trouvent dans une situation spécifique au regard tant de l'objet de la mesure que des objectifs particuliers qu'elle poursuit également.

B.3.4. Outre l'objectif budgétaire que peut poursuivre tout législateur dans l'exercice de sa compétence fiscale, le législateur décrétal a, par l'article 2, 1°, f), du décret en cause, voulu soumettre les appareils distributeurs de tabacs, cigares et cigarettes à la taxe à laquelle étaient déjà soumis d'autres automates, dans un souci de justice fiscale. Il a aussi invoqué des considérations de santé publique et d'emploi. La taxe vise, en effet, un mode de distribution qui permet de recourir à un nombre moindre de préposés et de diminuer l'emploi. En outre, la disposition en cause précitée a pour effet de décourager la vente de tabacs, cigares et cigarettes via des appareils automatiques, ce qui rencontre aussi l'objectif de santé publique. La tentation exercée par les appareils automatiques est réelle, même si l'arrêté royal du 3 février 2005 relatif à l'interdiction de vente de produits à base de tabacs aux personnes âgées de moins de seize ans au moyen d'appareils automatiques de distribution n'autorise le placement de ces appareils que dans des lieux fermés et impose leur verrouillage. En ce qu'ils instaurent une taxe annuelle sur les appareils distributeurs automatiques de tabacs, cigares ou cigarettes, les articles 1er et 2, 1°, f), du décret en cause ne sont donc pas sans justification raisonnable.

B.3.5. La première question préjudicielle appelle une réponse négative.

B.4.1. La deuxième question préjudicielle interroge la Cour sur la compatibilité des articles 1er, 2, 1°, f), et 4 du décret de la Région wallonne du 19 novembre 1998 avec les articles 10, 11 et 172 de la Constitution, en ce qu'ils instaurent une taxe annuelle de 500 euros sur les appareils distributeurs automatiques de tabacs, cigares ou cigarettes, sans tenir compte du chiffre d'affaires réalisé au moyen de l'automate ou de la durée d'exploitation de l'automate pendant l'exercice pour lequel l'impôt est dû.

B.4.2. Pour les motifs indiqués en B.3.4, les articles 1er et 2, 1°, f), du décret en cause sont compatibles avec les articles 10, 11 et 172 de la Constitution, en ce qu'ils instaurent une taxe annuelle sur les appareils distributeurs automatiques de tabacs, cigares ou cigarettes.

Pour répondre à la deuxième question préjudicielle, la Cour doit encore vérifier la compatibilité avec les articles 10, 11 et 172 de la Constitution de l'article 4, § 1er, 4), du décret en cause, qui fixe le montant de la taxe à 500 euros par appareil distributeur, sans tenir compte du chiffre d'affaires réalisé au moyen de l'automate ou de la durée d'exploitation de l'automate pendant l'exercice pour lequel l'impôt est dû.

B.4.3. Compte tenu de l'objectif de justice fiscale qui a conduit le législateur décrétal à soumettre les appareils distributeurs de tabacs, cigares et cigarettes à la taxe à laquelle étaient déjà soumis d'autres automates et compte tenu des montants prévus par l'article 4, § 1er, pour les autres automates, le montant de 500 euros par appareil ne peut être considéré comme déraisonnable. Il est par ailleurs pertinent au regard de cet objectif de ne tenir compte ni du chiffre d'affaires réalisé au moyen de l'automate ni de la durée d'exploitation de l'automate pendant l'exercice pour lequel l'impôt est dû, puisque ces éléments ne sont pas pris en compte pour la taxe sur les autres automates. L'article 4, § 2, du décret dispose à cet égard, de manière générale, que la taxe est due pour toute l'année, du moment que l'automate a été installé et exploité pendant une période quelconque de celle-ci.

Un système de taxation forfaitaire ne peut pas prendre en compte les particularités des divers cas d'espèce. Il ne peut appréhender leur diversité que de manière approximative et simplificatrice. Il ne pourrait entrer dans le détail des situations individuelles sans organiser un contrôle dont le coût pourrait compromettre le rendement de la taxe.

Le montant de 500 euros par appareil se justifie par ailleurs au regard de l'effet dissuasif de l'objectif de santé publique. Le législateur fiscal peut souhaiter, par la taxe litigieuse, lutter contre les dangers liés à la consommation de tabac et protéger les consommateurs en limitant le nombre d'appareils incitant à consommer du tabac.

B.4.4. La deuxième question préjudicielle appelle une réponse négative.

B.5.1. La troisième question préjudicielle interroge la Cour sur la compatibilité des articles 1er, 2, 1°, f), et 4 du décret de la Région wallonne du 19 novembre 1998 avec les articles 10, 11 et 172 de la Constitution lus ou non en combinaison avec la liberté de commerce et d'industrie, en ce qu'ils instaurent, pour l'exercice d'imposition 2011, une taxe annuelle de 500 euros sur les automates portant sur les appareils distributeurs automatiques de tabacs, cigares ou cigarettes, même si la taxe due porte substantiellement atteinte à la rentabilité de l'exploitation de la vente de tels produits par le biais de ces automates.

B.5.2. La liberté de commerce et d'industrie ne peut être conçue comme une liberté absolue. Elle ne fait pas obstacle à ce que la loi, le décret ou l'ordonnance règle l'activité économique des personnes et des entreprises. Le législateur compétent n'interviendrait de manière déraisonnable que s'il limitait la liberté de commerce et d'industrie sans aucune nécessité ou si cette limitation était disproportionnée au but poursuivi.

B.5.3. La troisième question préjudicielle, qui invoque la violation des articles 10, 11 et 172 de la Constitution, lus en combinaison avec la liberté de commerce et d'industrie, n'appelle pas une réponse différente de celle qui a été donnée aux première et deuxième questions préjudicielles.

B.6.1. La quatrième question préjudicielle interroge la Cour sur la compatibilité des articles 1er, 2, 1°, f), et 4 du décret de la Région wallonne du 19 novembre 1998 avec l'article 16 de la Constitution, lu en combinaison avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, en ce qu'ils instaurent, pour l'exercice d'imposition 2011, une taxe annuelle de 500 euros sur les automates portant sur les appareils distributeurs automatiques de tabacs, cigares ou cigarettes, sans avoir égard à la rentabilité de l'exploitation de la vente de tels produits par le biais de ces automates.

B.6.2. L'article 16 de la Constitution dispose : « Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique, dans les cas et de la manière établis par la loi, et moyennant une juste et préalable indemnité ».

L'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme dispose : « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens.

Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes ».

B.6.3. L'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme ayant une portée analogue à celle de l'article 16 de la Constitution, les garanties qu'il contient forment un ensemble indissociable avec celles qui sont inscrites dans cette disposition constitutionnelle, de sorte que la Cour tient compte de cette disposition conventionnelle lors de son contrôle des dispositions en cause.

B.6.4. L'article 1er du Premier Protocole additionnel offre une protection non seulement contre une expropriation ou une privation de propriété (premier alinéa, deuxième phrase) mais également contre toute ingérence dans le droit au respect des biens (premier alinéa, première phrase). Un impôt ou une autre contribution constituent, en principe, une ingérence dans le droit au respect des biens.

En outre, aux termes de l'article 1er du Premier Protocole additionnel, la protection du droit de propriété « ne [porte] pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes ».

L'ingérence dans le droit au respect des biens n'est compatible avec ce droit que si elle est raisonnablement proportionnée au but poursuivi, c'est-à-dire si elle ne rompt pas le juste équilibre entre les exigences de l'intérêt général et celles de la protection de ce droit. Même si le législateur fiscal dispose d'une large marge d'appréciation, un impôt viole dès lors ce droit s'il fait peser sur le contribuable une charge excessive ou porte fondamentalement atteinte à sa situation financière (CEDH, 31 janvier 2006, Dukmedjian c. France, §§ 52-58;décision, 15 décembre 2009, Tardieu de Maleissye e.a. c. France; 16 mars 2010, Di Belmonte c. Italie, §§ 38 à 40).

B.6.5. La taxe sur les appareils distributeurs automatiques de tabacs, cigares ou cigarettes constitue une ingérence dans le droit au respect des biens des propriétaires de ces appareils.

B.6.6. Ainsi qu'il est dit en B.3.4, cette taxe poursuit des objectifs légitimes qui relèvent de l'intérêt général et n'est pas sans justification raisonnable.

B.6.7. Ainsi qu'il est dit en B.4.3, le principe de la taxation forfaitaire et le montant de 500 euros par appareil ne peuvent être considérés comme déraisonnables, compte tenu des objectifs poursuivis par le législateur décrétal. Ils ne sont donc pas de nature à affecter de manière disproportionnée le droit des propriétaires de ces appareils au respect de leurs biens. Les dispositions en cause ne rompent pas le juste équilibre entre les exigences de l'intérêt général et celles de la protection du droit en cause. Il y a lieu, à cet égard, de prendre en compte le fait que le législateur décrétal poursuit notamment un objectif de santé publique, la lutte préventive contre le tabagisme. La mise en balance de la perte financière subie par le secteur avec l'importance des effets du tabac sur la santé n'aboutit pas au constat que la taxe litigieuse, qui répond à un besoin social impérieux de protection de la santé, serait disproportionnée au regard du droit invoqué.

B.6.8. La quatrième question préjudicielle appelle une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : Les articles 1er, 2, 1°, f), et 4 du décret de la Région wallonne du 19 novembre 1998 instaurant une taxe sur les automates en Région wallonne ne violent ni les articles 10, 11 et 172 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec la liberté de commerce et d'industrie, ni l'article 16 de la Constitution, lu en combinaison avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme.

Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 27 avril 2017.

Le greffier, Le président, F. Meersschaut J. Spreutels

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