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Arrêt
publié le 14 juillet 2017

Extrait de l'arrêt n£ 55/2017 du 11 mai 2017 Numéros du rôle : 6505 et 6506 En cause : les questions préjudicielles concernant l'article 3.2.5 du décret de la Région flamande du 27 mars 2009 relatif à la politique foncière et immobilière, pos La Cour constitutionnelle, composée des présidents E. De Groot et J. Spreutels, et des juges L. (...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n£ 55/2017 du 11 mai 2017 Numéros du rôle : 6505 et 6506 En cause : les questions préjudicielles concernant l'article 3.2.5 du décret de la Région flamande du 27 mars 2009 relatif à la politique foncière et immobilière, posées par le Tribunal de première instance de Flandre occidentale, division Bruges.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents E. De Groot et J. Spreutels, et des juges L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, F. Daoût, T. Giet et R. Leysen, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président E. De Groot, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par jugements du 29 juin 2016 en cause respectivement de la SCA « Mavy » contre la ville de Tielt et de Emile Maes et autres contre la ville de Tielt, dont les expéditions sont parvenues au greffe de la Cour le 15 septembre 2016, le Tribunal de première instance de Flandre occidentale, division Bruges, a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 3.2.5 du décret relatif à la politique foncière et immobilière, qui habilite les communes à lever une taxe annuelle sur les terrains à bâtir non bâtis situés en zone d'habitat ou les parcelles non bâties, viole-t-il les règles qui sont établies par la Constitution ou en vertu de celle-ci pour déterminer les compétences respectives de l'Etat, des communautés et des régions, visées à l'article 10 de la loi spéciale de réformes institutionnelles, en ce qu'il n'est pas démontré qu'un recours aux pouvoirs implicites est nécessaire à l'exercice des compétences des communautés et des régions ? ».

Ces affaires, inscrites sous les numéros 6505 et 6506 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) III. En droit (...) B.1. La Cour est interrogée sur l'article 3.2.5 du décret de la Région flamande du 27 mars 2009 relatif à la politique foncière et immobilière.

Celui-ci dispose : « § 1er. Les communes libèrent des sites d'habitat potentiels et combattent la spéculation foncière.

A cette fin, les conseils communaux sont autorisés à lever un impôt annuel, levé sur des terrains à bâtir nus situés en zone d'habitat ou des lots nus, compte tenu des règles minimales suivantes : 1° lorsque la redevance d'activation est fixée à un montant par mètre courant de longueur du terrain à bâtir ou du lot attenant à la voie publique, la redevance s'élève au moins à 12,50 euros par mètre courant;2° lorsque la redevance d'activation est fixée à un montant par mètre carré de superficie du terrain à bâtir ou du lot, la redevance s'élève au moins à 0,25 euro par mètre carré;3° dans tous les cas, une redevance minimale de 125 euros est appliquée par terrain à bâtir ou par lot. Dans la même commune, on peut lever tant une redevance d'activation sur des terrains non bâtis dans une zone d'habitat que sur des lots non bâtis. § 2. Les montants visés au § 1er, alinéa deux, sont liés à l'évolution de l'indice ABEX et correspondent à l'indice du mois de décembre 2008.

Ils sont adaptés le 1er janvier de chaque année à l'indice ABEX du mois de décembre précédant l'adaptation ».

B.2. Il ressort des faits du litige soumis au juge a quo que plusieurs propriétaires de parcelles non bâties contestent le paiement d'un impôt fondé sur un règlement-taxe communal du 27 juin 2013, dont l'article 3.2.5 du décret en cause constituerait la base légale.

Les demandeurs devant le juge a quo relèvent qu'en application de l'article 170, § 4, de la Constitution, aucune imposition ne peut être établie par la commune que par une décision de son conseil et que la loi détermine, relativement à ces impositions, les exceptions dont la nécessité est démontrée.

Ils en déduisent que le législateur décrétal ne pouvait en l'espèce limiter l'autonomie fiscale des communes qu'en recourant aux pouvoirs implicites contenus à l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.

Le juge a quo interroge la Cour sur la conformité de l'article 3.2.5 du décret en cause avec l'article 10 précité en ce qu'il ne serait pas démontré qu'un recours aux pouvoirs implicites est en l'espèce nécessaire à l'exercice de ses compétences par la Région flamande.

B.3.1. L'article 170, § 4, de la Constitution dispose : « Aucune charge, aucune imposition ne peut être établie par l'agglomération, par la fédération de communes et par la commune que par une décision de leur conseil.

La loi détermine, relativement aux impositions visées à l'alinéa 1er, les exceptions dont la nécessité est démontrée ».

B.3.2. L'on peut déduire des travaux préparatoires de l'article 170 de la Constitution que le Constituant entendait, en adoptant la règle contenue à l'alinéa 2 de l'article 170, § 4, prévoir une « sorte de mécanisme de défense » de l'Etat « à l'égard des autres niveaux de pouvoir, de manière à se réserver une matière fiscale propre » (Doc. parl., Chambre, S.E. 1979, n° 10-8/4°, p. 4).

Cette règle a également été décrite par le Premier ministre comme un « mécanisme régulateur » : « La loi doit être ce mécanisme régulateur et doit pouvoir déterminer quelle matière imposable est réservée à l'Etat. Si on ne le faisait pas, ce serait le chaos et cet imbroglio n'aurait plus aucun rapport avec un Etat fédéral bien organisé ou avec un Etat bien organisé tout court " (Ann., Chambre, 22 juillet 1980, p. 2707. Voy. également : ibid., p. 2708; Ann., Sénat, 28 juillet 1980, pp. 2650-2651). « Je tiens à souligner [...] que, dans ce nouveau système de répartition des compétences fiscales entre l'Etat, les communautés et les régions et institutions du même niveau, les provinces et les communes, c'est l'Etat qui a le dernier mot. C'est ce que j'appelle le mécanisme régulateur » (Ann., Sénat, 28 juillet 1980, p. 2661).

B.3.3. Il découle de l'article 170, § 4, alinéa 2, de la Constitution que celui-ci réserve au législateur fédéral, en ce qui concerne les impôts communaux, les exceptions dont la nécessité est démontrée, de sorte que les régions ne peuvent adopter une réglementation qui aurait pour effet de restreindre le pouvoir des communes d'instaurer une taxe que si les conditions d'application de l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles sont réunies.

Il est requis, à cette fin, que la réglementation adoptée soit nécessaire à l'exercice des compétences de la région, que la matière se prête à un régime différencié et que l'incidence des dispositions en cause sur cette matière ne soit que marginale.

B.4. Pour examiner la conformité de l'article 3.2.5 du décret en cause à l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, il convient d'avoir égard aux articles 3.2.6 à 3.2.12 et 3.2.14 et 3.2.15 du même décret, auxquels renvoient les travaux préparatoires de ce dernier.

Ces articles disposent : « Art. 3.2.6. La présente section s'applique dans la mesure où les règlements de redevance communaux n'y dérogent pas.

Art. 3.2.7. La redevance d'activation est due par la personne qui est le propriétaire du terrain à bâtir ou du lot le 1er janvier de l'année de redevance.

Lorsqu'il n'existe pas de droit de superficie ou d'emphytéose, la redevance d'activation est due par le fermier ou le superficiaire.

S'il y a plusieurs redevables de la redevance, ceux-ci sont solidairement tenus au paiement de la redevance d'activation due.

Art. 3.2.8. Sont exonérés de la redevance d'activation : 1° les propriétaires d'un seul terrain à bâtir nu en zone d'habitat ou d'un lot nu, à l'exclusion de tout autre bien immobilier situé en Belgique ou à l'étranger;2° les organisations de logement social et Vlabinvest apb; 3° [...] 4° les associations de jeunesse et associations sportives agréées par les pouvoirs publics. Une exemption, limitée à un seul terrain à bâtir nu en zone d'habitat ou à un lot nu par enfant, est également accordée aux parents ayant des enfants qui sont à charge ou non. Cette exemption est accordée à condition que l'enfant réponde le 1er janvier de l'année de redevance aux deux conditions suivantes : 1° il n'a pas encore atteint l'âge de trente ans; 2 il n'a pas depuis trois années entières un terrain à bâtir nu dans une zone d'habitat, un lot nu ou une habitation en pleine propriété, seul ou avec la personne avec qui il est marié ou cohabite légalement ou de fait.

Art. 3.2.9. La redevance d'activation n'est pas levée sur des parcelles qui répondent aux deux conditions suivantes : 1° elles appartiennent au même propriétaire que celui du terrain à bâtir ou du lot bâti continu [lire : contigu];2° ils [lire : elles] forment un ensemble spatial ininterrompu avec ce terrain ou lot bâti. L'exemption visée à l'alinéa premier, ne s'applique qu'à une longueur côté rue de trente mètres maximum. Lorsque la redevance d'activation est calculée au mètre carré, l'exemption est calculée en multipliant la longueur [de] rue exonérée par la longueur moyenne du terrain à bâtir nu en zone d'habitat ou du lot nu.

Art. 3.2.10. La redevance d'activation n'est pas levée sur des terrains à bâtir et lots qui ne peuvent être affectés à la construction pendant l'année de redevance : 1° suite à leur aménagement en équipements collectifs, en ce compris leurs dépendances;2° en vertu de la Loi sur le bail à ferme du 4 novembre 1969, la preuve du bail pouvant être fournie par tous les moyens de droit;3° en raison de leur affectation réelle et complète à l'agriculture ou l'horticulture, pendant toute l'année;4° suite à une interdiction de construire ou une quelconque autre servitude d'utilité publique rendant la construction de logements impossible;5° en raison d'une cause étrangère qui ne peut être imputée au redevable de la redevance, telle que la dimension réduite des terrains à bâtir ou des lots, ou leur implantation, forme ou situation physique. Art. 3.2.11. La redevance d'activation est suspendue dans le chef des titulaires d'une autorisation de lotissement accordée en dernière instance administrative, et ce, pendant cinq ans, à compter du 1er janvier de l'année suivant la délivrance de l'autorisation en dernière instance administrative, respectivement, lorsque le lotissement comprend des travaux, à partir du 1er janvier de l'année suivant l'année de délivrance de l'attestation, visée à l'article 4.2.16, § 2, du Code flamand de l'Aménagement du Territoire, le cas échéant pour la phase de l'autorisation de lotissement pour laquelle l'attestation est délivrée.

Art. 3.2.12. Outre les exemptions accordées par ou en vertu de la présente section, la non-imposabilité générale de l'Etat, des Communautés, des Régions et des Communes s'applique pour ce qui concerne les biens du domaine public et les biens du domaine privé qui sont affectés à un service d'utilité publique ». « Section 4. - Règles particulières en matière d'instauration d'une redevance d'activation Art. 3.2.14. Toute commune qui ne dispose pas d'une redevance sur des terrains à bâtir ou lots nus, vérifie en janvier et en juillet la tension entre le besoin en logements et le potentiel de construction.

Le besoin en logements est calculé à l'aide du modèle de pronostic établi par le Gouvernement flamand, basé sur les conclusions scientifiques récentes plus particulièrement dans le domaine de l'évolution des ménages, des flux de migration et des évolutions et tendances démographiques. Aussi longtemps que le modèle de pronostic n'est pas établi, le besoin en logements est calculé sur la base des indications du Schéma de structure d'aménagement de la Flandre.

Le potentiel de construction est calculé comme étant la somme de, d'une part, le produit du nombre de terrains à bâtir nus avec le ratio moyen de réalisation de terrains à bâtir nus fixé par le Gouvernement flamand, et d'autre part, le produit du nombre de lots nus avec le ratio de réalisation moyen de lots nus fixé par le Gouvernement flamand. Lors de la fixation des ratios moyens de réalisation, le Gouvernement flamand tient compte de la nature urbaine ou rurale de la zone.

Art. 3.2.15. Lorsque le besoin en logements dépasse le potentiel de construction à trois dates de mesure consécutives, on parle d'une sous-offre structurelle.

En cas de sous-offre structurelle, une redevance d'activation doit être appliquée aux lots nus à partir de l'année civile suivant la dernière mesure. Cette obligation s'applique pour une période de trois années de redevance.

Lorsque, durant la deuxième et la troisième année de la redevance d'activation obligatoire sur des lots nus, une nouvelle sous-offre structurelle est constatée, une redevance d'activation doit être appliquée aux terrains à bâtir nus en zone d'habitat à partir de l'année civile suivant la dernière mesure. Cette obligation s'applique pour une période de trois années de redevance ».

B.5. Les travaux préparatoires du décret mentionnent : « 45. Concrètement et au vu de la littérature, il est incontestable que la figure actuelle de la taxe communale (facultative) sur des terrains non bâtis (article 143 du décret flamand portant organisation de l'aménagement du territoire) a prouvé son utilité pour l'activation de terrains dormants.

Cette taxe a donc été reprécisée et transformée en une ' redevance d'activation ' (article 3.2.5 et suiv.). 46. Les règles décrétales relatives à cette redevance d'activation se décomposent en deux groupes. Le premier groupe comprend des règles de droit supplétif. Elles ont été inscrites à la section 2. Les communes peuvent y déroger; elles peuvent également les compléter (en prévoyant p. ex. des exonérations supplémentaires). Tout cela coïncide avec la demande de l'Association flamande des villes et des communes de donner un contenu à part entière au principe de subsidiarité, et avec les objections formulées par la section de législation du Conseil d'Etat, qui considère que même si le législateur décrétal ' autorise ' les communes à instaurer une taxe, il faut tenir compte du fait que les régions ne peuvent toucher à l'autonomie fiscale communale qu'en recourant aux pouvoirs implicites (p. 7).

Le second groupe comprend des règles impératives. En dehors du fait évident que la taxe relève du décret sur la procédure du 30 mai 2008 (article 3.2.13), il s'agit : 1° de la fixation des montants minimums de la redevance nécessaires pour garantir l'effectivité de la redevance (article 3.2.5, § 1er, alinéa 2); 2° de l'obligation de lever une redevance lorsque le potentiel de construction au sein de la commune ' reste insuffisant ' par rapport aux besoins en logements dans la commune.Une réglementation nuancée a été élaborée à cet égard dans les articles 3.2.14 et 3.2.15. La première date d'introduction d'une redevance obligatoire (sur les lots) est le 1er janvier 2011 (obligation pour 3 ans); la redevance sur les terrains à bâtir peut le cas échéant être imposée de façon obligatoire à partir du 1er janvier 2014 (obligation pour 3 ans).

Cette systématique implique que les communes qui disposent d'ores et déjà d'un règlement-taxe peuvent parfaitement maintenir la systématique actuelle et n'ont pas à procéder à des adaptations. A strictement parler, il y a quand même une condition à remplir à partir de l'entrée en vigueur de ce projet, qui est que les règlements communaux doivent respecter les redevances minimales fixées à l'article 3.2.5, § 1er, alinéa 2. Dans la pratique, cela ne peut cependant pas constituer un problème dans la mesure où la Circulaire BA-2004/3 du 14 juillet 2004 ' Fiscalité communale - Coordination des instructions ' prévoit déjà une cotisation minimale de 125 euros (par parcelle ou terrain) (voyez également le 5 du commentaire juridique ci-dessous). 47. Sous l'angle technique de la compétence, les obligations inscrites dans le ' deuxième groupe ' (voyez les numéros précédents) peuvent être justifiées de la manière suivante. Fondement juridique d'une obligation décrétale et stipulée en vue de l'introduction d'une redevance d'activation Hypothèse de base - 1 - Traditionnellement, la possibilité dans le chef de l'autorité supérieure d'intervenir dans l'autonomie fiscale communale est justifiée sur la base de l'article 170, § 4, de la Constitution, qui dispose : ' § 4. Aucune charge, aucune imposition ne peut être établie par (...) la commune que par une décision de (son) conseil.

La loi détermine, relativement aux impositions visées à l'alinéa précédent, les exceptions dont la nécessité est démontrée. '.

Dans la mesure où cette disposition stipule que ' la loi ' détermine les exceptions dont la nécessité est démontrée, se pose la question de savoir si on vise ici la loi fédérale ou le décret (qui est effectivement, lui aussi, une norme législative). - 2 - La jurisprudence du Conseil d'Etat, section de législation, considère en tout cas que le mot ' loi ' fait effectivement référence à la ' loi fédérale ' (voyez notamment les pages 7-8 de l'avis sur le projet de décret à l'examen).

Le Conseil estime en effet que la formulation de la disposition précitée lors de la modification de la Constitution du 29 juillet 1980 n'a certainement pas été arrêtée dans un contexte neutre du point de vue des compétences; à cette date, le Constituant avait déjà procédé à la création des communautés et des régions et il avait déjà accordé une compétence législative aux communautés (révision de la Constitution du 24 décembre 1970) et aux régions (révision de la Constitution du 17 juillet 1980). Lorsqu'il a formulé l'article 170, § 4, alinéa 2, de la Constitution, le législateur aurait donc parfaitement pu tenir compte de cette compétence des entités fédérées, mais ne l'a pas fait; la notion de ' loi ' utilisée ne peut donc être interprétée que dans un sens strictement formel (' le législateur fédéral '). - 3 - Compte tenu de cette vision standard, les régions (comme cela a déjà été affirmé plus haut) ne peuvent interférer dans l'autonomie fiscale communale que par un recours aux pouvoirs implicites, c'est-à-dire les pouvoirs qui, à strictement parler, ne relèvent pas de leurs propres compétences, mais qui sont nécessaires pour l'exercice d'une compétence propre. Nous savons que d'après la Cour constitutionnelle, le recours aux pouvoirs implicites n'est admissible qu'à la condition que la matière réservée se prête à un régime différencié, que l'incidence sur la matière fédérale en cause ne soit que marginale et que le recours aux pouvoirs implicites soit nécessaire.

En l'espèce, un tel recours aux pouvoirs implicites peut certainement se justifier pour étayer a) l'obligation stipulée par le décret en projet d'instaurer une redevance d'activation et b) les montants minimums fixés par le décret pour la redevance.

Nécessité - 4 - Il ressort de la littérature que le concept de la redevance communale sur des terrains non bâtis a incontestablement prouvé son utilité. - 5 - Mais l'impôt ' ne pourra atteindre son objectif que s'il est suffisamment élevé '. En tant qu'autorité de tutelle, l'autorité flamande a déjà estimé précédemment qu'un résultat utile peut seulement être atteint moyennant un tarif minimum de 125 euros. Une étude comparative des règlements-taxes de Flandre occidentale montre que cette imposition minimale est effectivement respectée partout. En extrapolant ce montant de base à un lot ' actuel ' de 500 m2 avec une largeur de rue normale de 10 mètres, l'on obtient alors les autres minima mentionnés à l'article 3.2.5, § 1er, alinéa 2, à savoir 0,25 euro par mètre carré (en partant d'une redevance basée sur des normes de surface), soit 12,50 euros par mètre courant attenant à la voie publique.

Etant donné que la somme de 125 euros (qui sert de base aux autres minima) est déjà retenue par l'autorité de tutelle, et que le montant minimum est bien suivi politiquement parlant et produit les effets escomptés, il est nécessaire de veiller à ce que les nouvelles communes adhérant au système de la redevance d'activation imputent au moins la norme minimale existante lors de la fixation des montants des redevances. - 6 - Compte tenu de l'efficacité de la taxation en question, l'autorité flamande ne peut en outre mettre en oeuvre les compétences propres sur le plan de la politique foncière et immobilière que si elle peut définir les cas dans lesquels l'instrument de la redevance d'activation doit impérativement être utilisé en fonction de la réduction et de la lutte contre la spéculation foncière et de la réalisation de destinations de zones. L'autorité centrale compétente doit en effet mettre des instruments à disposition pour vaincre ' l'immobilisme ' d'administrations locales lorsque les objectifs politiques finaux incorporés au projet de décret, et qui sont notamment à intégrer au Plan relatif à la politique foncière et immobilière de la Flandre, risquent d'être compromis. La réglementation en projet constitue ainsi un instrument nécessaire pour mettre en oeuvre les compétences flamandes sur le plan de la politique foncière et immobilière, telles que consacrées par l'article 6, § 1er, I, 6°, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.

Incidence marginale - 7 - L'ensemble de la réglementation en projet sur la redevance d'activation n'a qu'une incidence marginale, ce qui peut être simplement déduit du constat de ce que la redevance d'activation est très proche de ce que réglait déjà l'article 70bis de la loi organique de l'urbanisme; le tout correspond en tout cas à l'article 282 du Code bruxellois de l'aménagement du territoire ou à l'article 160 du Code wallon de l'aménagement du territoire, de l'urbanisme et du patrimoine.

Possibilité de régime différencié - 8 - La notion de ' redevance d'activation' se prête enfin à un régime différencié compte tenu de la possibilité de localiser clairement l'objet de la redevance en Région flamande. Le régime du décret en projet a en outre une portée limitée au sein de l'ensemble des réglementations fiscales et concerne le domaine spécifiquement ' régional ' de l'aménagement du territoire et de la politique foncière et immobilière; il n'est ainsi pas ou pratiquement pas porté atteinte à la compétence fédérale de principe et générique en matière de fixation des exceptions à l'autonomie fiscale communale.

En recourant aux pouvoirs implicites, on peut donc très certainement étayer, dans les limites des scénarios interprétatifs actuels, l'obligation en projet qui est stipulée sur le plan de l'instauration de la redevance d'activation, et la fixation par décret des montants minimums pour la redevance. » (Doc. parl., Parlement flamand 2008-2009, n° 2012/1, pp. 20-22).

B.6. L'autorisation inscrite à l'article 3.2.5, § 1er, alinéa 2, du décret en cause n'énonce aucune obligation d'instaurer une redevance communale en vue de l'activation de terrains à bâtir nus situés en zone d'habitat, sauf lorsqu'une commune se trouve dans la situation mentionnée à l'article 3.2.15 du décret.

La réglementation décrétale porte, en revanche, atteinte à l'autonomie fiscale communale dans la mesure où elle impose des règles minimales en ce qui concerne le montant des redevances d'activation effectivement levées par les communes. Le législateur décrétal est dès lors tenu, sur ce point, de justifier son intervention par le recours aux pouvoirs implicites dont la nécessité doit être démontrée pour l'exercice de compétences régionales propres.

B.7.1. Comme il ressort des travaux préparatoires cités en B.5, le législateur décrétal a estimé que la réglementation en cause constituait un instrument nécessaire pour mettre en oeuvre les compétences de la Région flamande sur le plan de la politique foncière et immobilière, déterminées par l'article 6, § 1er, I, 6°, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.

Cet article confère, en effet, aux régions, la compétence en matière de politique foncière et immobilière, en ce compris la régulation du marché immobilier afin d'éviter la raréfaction de l'offre et des hausses de prix induites par la spéculation (Doc. parl., Chambre, 1977-1978, n° 461/20, p. 6).

Dans le cadre d'une réglementation destinée à garantir la cohérence et l'effectivité de la lutte contre la spéculation foncière et à libérer des sites d'habitation potentiels par l'activation des terrains « dormants », le législateur décrétal a pu estimer nécessaire de fixer des montants minimaux pour les redevances d'activation prélevées par les communes dès lors que la pratique avait démontré que de tels montants étaient de nature à garantir le respect effectif, par les redevables, de l'objectif poursuivi par cette imposition et, partant, l'efficacité de la mesure.

B.7.2. Il apparaît donc que la réglementation décrétale mise en place par la disposition en cause est nécessaire pour l'exercice de la compétence en matière de politique foncière et immobilière définie par l'article 6, § 1er, I, 6°, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.

Il ressort par ailleurs des travaux préparatoires cités en B.5 que la matière se prête à une réglementation différenciée et que l'incidence de la disposition en cause sur la compétence réservée au législateur fédéral est marginale.

B.8. La question préjudicielle appelle une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 3.2.5, § 1er, alinéa 2, du décret de la Région flamande du 27 mars 2009 relatif à la politique foncière et immobilière ne viole pas l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.

Ainsi rendu en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 11 mai 2017.

Le greffier, Le président, P.-Y. Dutilleux E. De Groot

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