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Arrêt
publié le 27 septembre 2018

Extrait de l'arrêt n° 114/2018 du 19 juillet 2018 Numéro du rôle : 6547 En cause : le recours en annulation de l'article 39, § 3, alinéas 3 à 8, du décret de la Communauté française du 13 juillet 1998 portant organisation de l'enseigneme La Cour constitutionnelle, composée des présidents J. Spreutels et A. Alen, et des juges L. Lavr(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 114/2018 du 19 juillet 2018 Numéro du rôle : 6547 En cause : le recours en annulation de l'article 39, § 3, alinéas 3 à 8, du décret de la Communauté française du 13 juillet 1998 portant organisation de l'enseignement maternel et primaire ordinaire et modifiant la réglementation de l'enseignement, et de l'article 43bis, § § 2 et 5, du décret de la Communauté française du 3 mars 2004 organisant l'enseignement spécialisé, tels que ces articles ont été respectivement remplacés et insérés par les articles 5 et 14 du décret de la Communauté française du 13 juillet 2016 relatif à la mise en oeuvre d'un cours de philosophie et de citoyenneté dans l'enseignement fondamental ainsi qu'au maintien de l'encadrement pédagogique alternatif dans l'enseignement secondaire, introduit par l'ASBL « Secrétariat Général de l'Enseignement Catholique en Communautés française et germanophone ».

La Cour constitutionnelle, composée des présidents J. Spreutels et A. Alen, et des juges L. Lavrysen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, T. Merckx-Van Goey, F. Daoût, T. Giet et J. Moerman, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président J. Spreutels, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 23 novembre 2016 et parvenue au greffe le 25 novembre 2016, l'ASBL « Secrétariat Général de l'Enseignement Catholique en Communautés française et germanophone », assistée et représentée par Me M. Kaiser et Me M. Verdussen, avocats au barreau de Bruxelles, a introduit un recours en annulation de l'article 39, § 3, alinéas 3 à 8, du décret de la Communauté française du 13 juillet 1998 portant organisation de l'enseignement maternel et primaire ordinaire et modifiant la réglementation de l'enseignement, et de l'article 43bis, § § 2 et 5, du décret de la Communauté française du 3 mars 2004 organisant l'enseignement spécialisé, tels que ces articles ont été respectivement remplacés et insérés par les articles 5 et 14 du décret de la Communauté française du 13 juillet 2016 relatif à la mise en oeuvre d'un cours de philosophie et de citoyenneté dans l'enseignement fondamental ainsi qu'au maintien de l'encadrement pédagogique alternatif dans l'enseignement secondaire (publié au Moniteur belge du 10 août 2016). (...) II. En droit (...) B.1. L'article 5 du décret de la Communauté française du 13 juillet 2016 « relatif à la mise en oeuvre d'un cours de philosophie et de citoyenneté dans l'enseignement fondamental ainsi qu'au maintien de l'encadrement pédagogique alternatif dans l'enseignement secondaire » remplace l'article 39 du décret de la Communauté française du 13 juillet 1998 « portant organisation de l'enseignement maternel et primaire ordinaire et modifiant la réglementation de l'enseignement » par le texte suivant : « § 1er. Dans chaque implantation des établissements de l'enseignement ordinaire officiel organisé ou subventionné par la Communauté française et des établissements de l'enseignement libre non confessionnel subventionné par la Communauté française qui offrent le choix entre les différents cours de religion ou de morale non confessionnelle, un cours de morale non confessionnelle, de religion ou de philosophie et de citoyenneté lorsque les élèves sont dispensés du cours de religion ou de morale, est organisé dès qu'un élève est inscrit dans un de ces cours, conformément à l'article 8 de la loi du 29 mai 1959 modifiant certaines dispositions de la législation de l'enseignement. Le cas échéant, le cours est créé ou supprimé dans le courant de l'année scolaire.

Ce cours doit être dans l'horaire continu des périodes hebdomadaires obligatoires.

Le nombre de groupes, applicable du 1er octobre au 30 septembre suivant est fixé, pour le cours le plus suivi, conformément au tableau ci-après, qui prend en compte l'ensemble des élèves de l'implantation inscrits dans ce cours au 30 septembre de l'année scolaire en cours :

Nombre d'élèves

Nombre de groupes

jusqu'à 25 élèves

1 groupe

à partir de 26 élèves

2 groupes

à partir de 45 élèves

3 groupes

à partir de 72 élèves

4 groupes

à partir de 93 élèves

5 groupes

à partir de 115 élèves

6 groupes

à partir de 141 élèves

7 groupes

à partir de 164 élèves

8 groupes

à partir de 187 élèves

9 groupes

à partir de 210 élèves

10 groupes

à partir de 233 élèves

11 groupes

+ 23 élèves

+ 1 groupe


Les cours les moins suivis comptent le même nombre de groupes que le cours le plus suivi, sans pouvoir excéder un groupe par année, sauf lorsque l'application du tableau de l'alinéa 3 fournit un résultat plus favorable. En outre, chaque groupe d'élèves ne peut comporter moins de 5 élèves, sauf s'il y a effectivement moins de 5 élèves qui suivent les cours. Toutefois, lorsque l'implantation compte des élèves répartis, d'une part, en première et deuxième primaires, d'autre part, en troisième, quatrième, cinquième et sixième primaires, deux groupes peuvent être organisés dans les cours les moins suivis s'il y a au moins deux groupes dans le cours le plus suivi.

Le cours le moins suivi est organisé par degré lorsque le cours le plus suivi compte effectivement au moins un groupe par degré.

Un groupe comprend une période de cours.

Lorsqu'un élève est amené à suivre un cours moins suivi qui n'est pas donné simultanément avec le cours le plus suivi, il ne peut être soustrait de son groupe classe qu'au moment des travaux dirigés visés à l'article 2, 25°, et ceux-ci ne peuvent comprendre aucune acquisition nouvelle dans les savoirs et compétences visés à l'article 16, § 3, du décret du 24 juillet 1997 précité. § 2. Pour les établissements visés au § 1er, le nombre de périodes pour le cours de philosophie et de citoyenneté dispensé à tous les élèves conformément à l'article 8, alinéa 3, de la loi du 29 mai 1959 modifiant certaines dispositions de la législation de l'enseignement, correspond au nombre de classes organisables déterminé sur base de l'article 29, § 1er, du présent décret.

Les reliquats visés à l'article 34, les périodes générées pour le complément d'encadrement pour les 1re et 2e primaires visées à l'article 31bis, § 1er, les périodes dédiées aux maîtres d'adaptation visées à l'article 33, § § 3 et 4, et les périodes d'encadrement différencié visées à l'article 9, § 1er, alinéa 1er, du décret du 30 avril 2009 organisant un encadrement différencié au sein des établissements scolaires de la Communauté française afin d'assurer à chaque élève des chances égales d'émancipation sociale dans un environnement pédagogique de qualité, peuvent également servir à encadrer le cours de philosophie et de citoyenneté visé à l'alinéa 1er. § 3. Le nombre total de périodes attribuées par établissement pour les cours de religion, de morale non confessionnelle et de philosophie et de citoyenneté calculé conformément au § 1er et pour les cours de philosophie et de citoyenneté calculé conformément au § 2 constituent le RLMOD. Chaque implantation bénéficie au minimum du nombre de périodes RLMOD qu'elle génère.

Ces périodes RLMOD sont attribuées au sein des implantations conformément à l'ordre de priorité défini au titre II du décret du 13 juillet 2016 relatif à la mise en oeuvre d'un cours de philosophie et de citoyenneté dans l'enseignement fondamental ainsi qu'au maintien de l'encadrement pédagogique alternatif dans l'enseignement secondaire et, à défaut, conformément aux règles du statut administratif dont relève le membre du personnel.

Le nombre total de périodes de religion et de morale non confessionnelle attribuées par établissement au 1er octobre 2014, multiplié par un facteur démographique, constitue le RLMOA, défini à l'arrondi mathématique. Ce facteur démographique est égal au nombre d'élèves primaires régulièrement inscrits au 30 septembre 2016 divisé par le nombre d'élèves primaires régulièrement inscrits au 30 septembre 2014.

La différence entre le RLMOA de l'établissement et le RLMOD de l'ensemble des implantations de l'établissement détermine un nombre de périodes. Ce nombre, positif ou négatif, est globalisé au niveau des services du Gouvernement de la Communauté française. Les implantations qui n'organisaient pas d'enseignement primaire au 1er octobre 2014 ne génèrent aucune période à globaliser.

De ce nombre de périodes globalisées visé à l'alinéa précédent est, s'il échet, automatiquement prélevé un nombre de périodes à l'intention des établissements de l'enseignement organisé par la Communauté française et des Pouvoirs organisateurs de l'enseignement subventionné par la Communauté française dont le RLMOD ne permet pas d'attribuer, selon le cas au sein de l'établissement ou du Pouvoir organisateur, aux maîtres de religion et de morale non confessionnelle, définitifs ou temporaires prioritaires, un volume de charge équivalent à leurs attributions au 30 juin 2016, conformément à l'ordre de priorité défini au titre II du décret du 13 juillet 2016 relatif à la mise en oeuvre d'un cours de philosophie et de citoyenneté dans l'enseignement fondamental ainsi qu'au maintien de l'encadrement pédagogique alternatif dans l'enseignement secondaire, et à défaut, conformément aux règles du statut administratif dont relève le membre du personnel. Ces périodes sont utilisées pour encadrer les cours de religion, de morale non confessionnelle et de philosophie et de citoyenneté. Elles augmentent, le cas échéant, les nombres de groupes déterminés conformément au § 1er.

Le solde du nombre de périodes globalisé après les prélèvements visés à l'alinéa précédent est attribué aux établissements, dans l'enseignement organisé par la Communauté française, et aux Pouvoirs organisateurs dans l'enseignement subventionné par la Communauté française visé au § 1er, pour assurer de l'adaptation et du soutien pédagogique afin d'assurer, de coordonner et de soutenir des activités éducatives visant exclusivement à mettre en oeuvre l'article 15, alinéa 1er, du décret du 24 juillet 1997 définissant les missions prioritaires de l'enseignement fondamental et de l'enseignement secondaire et organisant les structures propres à les atteindre.

Seuls les établissements, dans l'enseignement organisé par la Communauté française, et les Pouvoirs organisateurs, dans l'enseignement subventionné par la Communauté française visé au § 1er, qui contribuent positivement au nombre de périodes globalisé reçoivent des périodes pour de l'adaptation et du soutien pédagogique. Le nombre de périodes destiné à l'adaptation et au soutien pédagogique est égal au nombre positif visé à l'alinéa 4 affecté d'un coefficient égal au rapport entre le nombre de périodes du solde visé à l'alinéa précèdent et le nombre de périodes globalisé. Le résultat est arrondi à l'unité inférieure.

L'utilisation des périodes visées à l'alinéa précédent est autorisée dès communication de leur nombre par les services du Gouvernement et jusqu'au [...] 30 septembre suivant. Cette utilisation est de la compétence du pouvoir organisateur dans l'enseignement subventionné par la Communauté française visé au § 1er, et du chef d'établissement dans l'enseignement organisé par la Communauté française, après avoir pris l'avis des organes de concertations visés à l'article 25. § 4. Les implantations organisent les cours de religion, de morale non confessionnelle et l'encadrement des élèves dispensés de suivre l'un de ces cours durant le mois de septembre selon les mêmes formes et modalités que celles de l'année scolaire précédente ».

B.2. Cette disposition est entrée en vigueur au début de « l'année scolaire 2016-2017 » (article 39 du décret du 13 juillet 2016).

B.3. L'article 14 du décret du 13 juillet 2016 insère dans le décret de la Communauté française du 3 mars 2004 « organisant l'enseignement spécialisé » un article 43bis, libellé comme suit : « § 1er. Dans les établissements d'enseignement primaire spécialisé organisé par la Communauté française et les établissements d'enseignement primaire spécialisé de l'enseignement officiel subventionné et de l'enseignement libre non confessionnel subventionné qui offrent le choix entre les différents cours de religion ou de morale non confessionnelle, un cours de morale non confessionnelle, de religion ou de philosophie et de citoyenneté lorsque les élèves sont dispensés du cours de religion ou de morale, est organisé dès qu'un élève est inscrit dans un de ces cours, conformément à l'article 8 de la loi du 29 mai 1959 modifiant certaines dispositions de la législation de l'enseignement. Le cas échéant, le cours est créé ou supprimé dans le courant de l'année scolaire.

Ce cours doit être dans l'horaire continu des périodes hebdomadaires obligatoires.

Le nombre de groupes, applicable du 1er octobre au 30 septembre suivant est fixé, pour le cours le plus suivi, [...] sur la base du nombre total d'élèves du cours le plus suivi, divisé par le nombre guide du type d'enseignement comme déterminé à l'article 38 du présent décret. § 2. Le nombre de groupes du cours le plus suivi est multiplié par deux pour déterminer le nombre de périodes qui font partie du capital-périodes utilisable.

Ce nombre est multiplié par le nombre de cours organisés pour connaître le nombre maximal de périodes qui peuvent être utilisées pour l'organisation des différents cours de religion, de morale non confessionnelle et de philosophie et de citoyenneté. § 3. Le cours de morale non confessionnelle, de religion ou de philosophie et de citoyenneté lorsque les élèves sont dispensés du cours de religion ou de morale, est organisé par groupe.

Un groupe comprend une période de cours. § 4. Pour les établissements visés au § 1er, le nombre de périodes pour le cours de philosophie et de citoyenneté dispensé à tous les élèves conformément à l'article 8, alinéa 4, de la loi du 29 mai 1959 modifiant certaines dispositions de la législation de l'enseignement, correspond au nombre de classes. § 5. Au-delà des périodes nécessaires à l'organisation des différents cours de religion, de morale non confessionnelle et de philosophie et de citoyenneté, ne peuvent être prélevées du nombre maximal de périodes que les périodes nécessaires au maintien du volume de charge équivalent aux attributions au 30 juin 2016, des maîtres de religion et de morale non confessionnelle, définitifs ou temporaires prioritaires, conformément à l'ordre de priorité défini au titre II du décret du [13] juillet 2016 relatif à la mise en oeuvre d'un cours de philosophie et de citoyenneté dans l'enseignement fondamental ainsi qu'au maintien de l'encadrement pédagogique alternatif dans l'enseignement secondaire, et à défaut, conformément aux règles du statut administratif dont relève le membre du personnel.

Le nombre maximal de périodes visé au paragraphe 2, alinéa 2, ne peut être utilisé que pour l'encadrement des cours de religion, de morale non confessionnelle et de philosophie et de citoyenneté.

Les périodes de cours excédentaires ne peuvent en aucun cas faire l'objet d'un transfert vers le personnel enseignant ou vers d'autres catégories de personnel. § 6. Les implantations organisent les cours de religion, de morale non confessionnelle et l'encadrement des élèves dispensés de suivre l'un de ces cours durant le mois de septembre selon les mêmes formes et modalités que celles de l'année scolaire précédente ».

B.4. Cette disposition est entrée en vigueur au début de « l'année scolaire 2016-2017 » (article 39 du décret du 13 juillet 2016).

B.5. L'article 41 du décret de la Communauté française du 19 juillet 2017 « relatif à la mise en oeuvre d'un cours de philosophie et de citoyenneté dans l'enseignement secondaire et portant diverses adaptations dans l'enseignement fondamental » insère, dans l'article 39 du décret du 13 juillet 1998, un paragraphe 2bis. L'article 42 du décret du 19 juillet 2017 apporte plusieurs modifications au troisième paragraphe de l'article 39 du décret du 13 juillet 1998.

Les articles 44 et 45 du décret du 19 juillet 2017 remplacent respectivement les cinquième et sixième paragraphes de l'article 43bis du décret du 3 mars 2004.

Toutes ces modifications sont toutefois sans incidence pour l'examen du présent recours. La Cour ne peut étendre les limites de sa saisine.

Quant à l'intérêt du Secrétariat Général de l'Enseignement Catholique en Communautés française et germanophone B.6. Lorsqu'une association sans but lucratif introduit un recours en annulation sans invoquer son intérêt personnel, il est requis que son objet social soit d'une nature particulière et, dès lors, distinct de l'intérêt général; qu'elle défende un intérêt collectif; que la norme attaquée soit susceptible d'affecter son objet social; qu'il n'apparaisse pas, enfin, que cet objet social n'est pas ou n'est plus réellement poursuivi.

B.7.1. Il ressort des travaux préparatoires des dispositions attaquées (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2015-2016, n° 312/1, p. 7, 58; ibid., n° 312/3, p. 6) ainsi que du procès-verbal et du protocole établis le 18 mai 2016 par le « comité de négociation entre le Gouvernement de la Communauté française et les organes de représentation et de coordination des pouvoirs organisateurs de l'enseignement et des centres P.M.S. subventionnés reconnus par le Gouvernement », et produits par l'association requérante, que l'avant-projet de décret qui est à l'origine du décret du 13 juillet 2016 a été soumis à ce comité.

Ce comité se compose entre autres d'une « délégation des organes de représentation » qui peut compter des membres représentant le « Secrétariat Général de l'Enseignement Catholique » (article 5, § § 1er et 3, du décret de la Communauté française du 20 juillet 2006 « relatif à la négociation avec les organes de représentation et de coordination des Pouvoirs organisateurs de l'enseignement et des Centres P.M.S. subventionnés », modifié par l'article 36, 3), du décret-programme du 15 décembre 2010).

Il ressort des documents produits par l'association requérante que celle-ci était représentée à la réunion du 18 mai 2016 que ce comité a consacrée à la discussion de l'avant-projet de décret précité.

B.7.2. Cette participation au processus d'adoption des dispositions attaquées établit que celles-ci sont susceptibles d'affecter directement et défavorablement l'objet social de l'association requérante.

Celle-ci justifie donc de l'intérêt requis.

B.8. Le recours en annulation est recevable.

Quant au moyen relatif à l'article 5 du décret de la Communauté française du 13 juillet 2016 B.9. Il ressort des développements du moyen que la Cour est invitée à statuer sur la compatibilité de l'article 39, § 3, alinéas 6 à 8, du décret du 13 juillet 1998, tel qu'il a été inséré par l'article 5 du décret du 13 juillet 2016, avec l'article 24, § 4, de la Constitution, en ce que ces dispositions introduiraient une différence de traitement discriminatoire entre deux catégories d'établissements d'enseignement primaire ordinaire : d'une part, les établissements de l'enseignement organisé par la Communauté française, les établissements de l'enseignement officiel subventionné par cette Communauté et les établissements de l'enseignement libre non confessionnel qui offrent le choix entre le cours de morale non confessionnelle et les cours de religion et, d'autre part, les établissements de l'enseignement libre confessionnel subventionné par la Communauté française qui ne proposent que le cours de religion catholique.

Les dispositions attaquées permettraient l'attribution de « périodes de cours » aux établissements d'enseignement de la première catégorie en vue d'« assurer de l'adaptation et du soutien pédagogique afin d'assurer, de coordonner et de soutenir des activités éducatives visant exclusivement à mettre en oeuvre l'article 15, alinéa 1er, du décret du 24 juillet 1997 définissant les missions prioritaires de l'enseignement fondamental et de l'enseignement secondaire et organisant les structures propres à les atteindre », tandis que les établissements de l'enseignement libre confessionnel qui ne proposent que le cours de religion catholique ne peuvent pas revendiquer l'attribution de telles périodes en application des dispositions attaquées.

B.10. L'article 24, § 4, de la Constitution dispose : « Tous les élèves ou étudiants, parents, membres du personnel et établissements d'enseignement sont égaux devant la loi ou le décret.

La loi et le décret prennent en compte les différences objectives, notamment les caractéristiques propres à chaque pouvoir organisateur, qui justifient un traitement approprié ».

Cette disposition énonce, dans le domaine de l'enseignement, le principe d'égalité et de non-discrimination qui se déduit des articles 10 et 11 de la Constitution.

B.11.1. Les règles énoncées à l'article 39, § 3, du décret du 13 juillet 1998, inséré par l'article 5 du décret du 13 juillet 2016, visent à empêcher que l'introduction des cours de philosophie et de citoyenneté dans certains établissements d'enseignement ne cause des pertes d'emploi parmi les enseignants qui, avant la création de ces cours, dispensaient les cours de religion et de morale non confessionnelle qui seront en partie remplacés par les nouveaux cours (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2015-2016, n° 312/1, p. 4).

B.11.2. Les règles précitées, qui ont pour objet le « calcul de l'encadrement » de ces cours, sont inspirées par la « volonté de maintenir le volume global des périodes pour l'organisation des cours philosophiques » (ibid., p. 4), et sont commentées comme suit dans l'exposé des motifs du projet de décret qui est à l'origine du décret du 13 juillet 2016 : « Cet article ne concerne que l'enseignement officiel subventionné et organisé par la Communauté française ainsi que l'enseignement libre non confessionnel subventionné par la Communauté française qui offre le choix entre les différents cours de religion ou de morale non confessionnelle.

Le paragraphe premier de cet article adapte la législation actuelle en créant une catégorie supplémentaire (celle des élèves dispensés) pour le calcul du RLMO. Il définit le nombre de groupes organisables (au départ du groupe le plus suivi) pour les cours philosophiques et la dispense.

Au paragraphe 2, l'attribution des périodes pour le cours commun de philosophie et de citoyenneté est fixée : elle correspond au nombre de classes organisées. Ce paragraphe indique les périodes complémentaires utilisables pour encadrer le cours de philosophie et de citoyenneté.

Le paragraphe 3 prévoit 3 étapes de calcul.

Dans une première étape, le RLMOD (le ' D ' faisant référence à la dispense) est déterminé par implantation. Il s'agit des périodes nécessaires à la mise en oeuvre du nouveau cours d'une période de philosophie et de citoyenneté commune à tous les élèves, les différents cours (une période) de religion et de morale non confessionnelle en tenant compte des choix formulés par les parents au plus tard le 15 septembre, et de la deuxième période de citoyenneté pour les élèves qui ont sollicité la dispense.

Ces périodes RLMOD sont utilisées par l'implantation qui les a générées et affectées selon les règles transitoires prévues au titre II et, à défaut, aux règles du statut administratif dont dépend le membre du personnel (AR du 22 mars 1969, AR du 25 octobre 1971, décret du 6 juin 1994, décret du 1er février 1993, décret du 3 mars 2006).

En annexe I, un tableau reprend un exemple du calcul RLMOD pour trois implantations représentatives en nombre d'élèves. Pour chaque exemple d'implantation, la première partie du tableau illustre l'encodage, par les écoles, des chiffres de population scolaire par année d'études pour les cours philosophiques et la dispense (ex : nombre d'élèves en P1). Cela génère un nombre total d'élèves par cours qui permet, en appliquant le calcul habituel, de déterminer le nombre de groupes organisables. Ces groupes déterminent un nombre total (appelé ' A ' dans le tableau) de périodes : un groupe est égal à une période.

Pour chaque exemple d'implantation, la seconde partie du tableau illustre le calcul de périodes pour les cours de philosophie et de citoyenneté (CPC). Au départ du nombre total d'élèves inscrits dans l'implantation, un ' capital périodes ' est généré. Ce nombre de périodes divisé par 26 (et ajusté à l'unité inférieure) indique le nombre de classes organisables par l'implantation. Ce nombre de classes organisables détermine le nombre de périodes pour organiser le CPC (appelé ' B ' dans le tableau).

La somme du nombre de périodes (A) pour organiser les cours philosophiques et la dispense est additionnée au nombre de périodes (B) pour organiser le CPC. Cela constitue le RLMOD de l'implantation (A+B).

Ensuite, le RLMOA (le ' A ' pour ' adapté ', adapté à la démographie) 2014 est calculé par établissement. Le RLMOA 2014 correspond au volume RLMO du 1er octobre 2014 (comptage du 30 septembre) multiplié par un facteur tenant compte de l'évolution démographique entre 2014 et 2016.

Dans une deuxième étape, la différence entre le RLMOA et le RLMOD constitue une réserve de périodes globalisée au niveau des services du Gouvernement (DGEO).

De cette réserve, des périodes sont automatiquement prélevées et attribuées [au] profit des directions et PO dont le RLMOD est insuffisant pour attribuer aux maîtres de religion ou de morale définitifs et temporaires prioritaires un nombre de périodes correspondant à leurs attributions au 30 juin 2016. Ces périodes sont utilisées pour encadrer les cours de religion, de morale non confessionnelle et de philosophie et de citoyenneté en dérogeant si nécessaire au nombre de groupes créés et à la taille minimale de ces groupes.

Par attribution au 30 juin 2016, il faut entendre les dernières attributions de l'année scolaire 2015-2016, et au plus tard au 30 juin 2016. Sont également [incluses] dans ces attributions, les périodes d'EPA prestées par des maîtres de RLMO ayant perdu des périodes du fait de la possibilité d'être dispensé des cours de RLMO. Les périodes encore disponibles après cette opération serviront à assurer de l'adaptation ou du soutien pédagogique.

Seuls les établissements et PO qui ont contribué positivement à cette réserve reçoivent des périodes d'adaptation dont le nombre est égal à leur contribution affectée d'un coefficient égal au rapport entre le nombre de périodes encore disponible après prélèvement des périodes nécessaires à maintenir les définitifs et les temporaires prioritaires et le nombre de périodes de la réserve avant ce prélèvement (réserve initiale).

Exemple : Pour l'ensemble de ses implantation [s] et établissements d'enseignement primaire, un PO A contribue à hauteur de 16 périodes à la réserve de 1200 périodes constituée auprès de la DGEO. Pour permettre aux établissements de WBE et aux PO de l'officiel subventionné et du libre non confessionnel de compenser les périodes perdues par leurs définitifs et temporaires prioritaires, cette réserve s'est réduite de 720 périodes. Le PO A recevra une dépêche lui indiquant qu'il dispose de 16 périodes * 480/1200 = 6,4 périodes arrondies à 6 périodes.

Les périodes d'adaptation et de soutien pédagogique sont attribuées selon les règles statutaires habituelles, à savoir : à des instituteurs, maîtres d'éducation physique ou maître [s] de langue moderne (art. 2, 11° du décret du 13 juillet 1998 portant organisation de l'enseignement maternel et primaire ordinaire et modifiant la réglementation de l'enseignement).

Le paragraphe 4 prévoit, que l'organisation de l'année scolaire précédente est maintenue pour le mois de septembre en ce qui concerne les cours philosophiques et l'éventuelle dispense de ceux-ci. Ceci correspond à l'organisation habituelle des établissements scolaires.

Cela se justifie par le fait que le choix des parents n'est connu qu'au 15 septembre » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2015-2016, n° 312/1, pp. 10-11).

Il est encore précisé dans l'exposé des motifs précité : « Les négociations avec les organes de représentation et de coordination des pouvoirs organisateurs se sont clôturées le 18 mai 2016 par des avis défavorables de l'ensemble des PO. Les négociations avec les organisations syndicales se sont clôturées le 30 mai 2016 par un avis défavorable unanime.

Il semble néanmoins utile de préciser que suite à ces avis négatifs souvent fondés sur des raisons opposées, il a été décidé d'organiser une réunion tripartite entre représentants de l'Autorité, des Pouvoirs organisateurs et des organisations syndicales.

Cette réunion a permis de rapprocher les points de vue entre Pouvoirs organisateurs et organisations syndicales. Ces rapprochements portent notamment sur : 1° La gestion centralisée à la DGEO de la réserve des périodes [constituée] par la différence entre RLMOA et RLMOD;2° L'attribution automatique aux PO (subventionné) et établissements (WBE) des périodes nécessaires à compenser les pertes d'heures des définitifs et des temporaires prioritaires dues au remplacement d'une période de RLMO par une période d'EPC;3° la répartition du solde entre établissements et PO contributeurs sous forme de périodes d'adaptation;[...] » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2015-2016, n° 312/1, p. 7).

B.11.3. Le rapport de la discussion en commission parlementaire du projet de décret qui est à l'origine du décret du 13 juillet 2016 résume l'exposé de la ministre compétente en ces termes : « Ce projet concrétise également l'engagement de la Déclaration de politique communautaire (DPC) de procéder à cette réforme sans perte d'emploi global en garantissant les droits individuels des enseignants nommés à titre définitif et des temporaires prioritaires tout en assurant dès le départ la qualité du cours de citoyenneté et en évitant, autant que faire se peut, qu'un enseignant assure le cours de philosophie et de citoyenneté dans une implantation où il assure le cours de morale ou de religion.

Dans cet exposé introductif, la Ministre aborde : 1. Pour l'enseignement primaire ordinaire, la détermination des périodes nécessaires à l'organisation dans chaque implantation d'une période de philosophie et citoyenneté par classe et d'une période de religion ou de morale (RLMO), en ce compris une seconde période de philosophie et citoyenneté pour les élèves dispensés de RLMO;2. l'affectation de l'éventuel solde de la réserve à des périodes d'adaptation pour l'enseignement ordinaire;3. la constitution, avec une variante pour l'enseignement spécialisé, d'une réserve de périodes permettant de garantir le volume global de l'emploi et de protéger les définitifs et les temporaires prioritaires qui ne retrouveraient pas leurs attributions RLMO de l'année dernière, en ce compris éventuellement l'enseignement pédagogique alternatif (EPA); [...] 1° Dans une première étape, le RLMOD (le ' D ' fait référence à la Dispense) est déterminé par implantation.Il s'agit des périodes nécessaires à la mise en oeuvre : - du nouveau cours d'une période de philosophie et de citoyenneté commune à tous les élèves. Ce nouveau cours génère une période par classe organisable; - des différents cours d'une période de religion et de morale non confessionnelle et d'une seconde période de philosophie et citoyenneté pour les élèves qui ont sollicité la dispense. Ces cours génèrent un nombre de périodes calculé selon les modalités habituelles du calcul du RLMO en tenant compte des choix formulés par les parents au plus tard le 15 septembre parmi les possibilités suivantes : une des cinq religions reconnues, la morale ou la dispense.

Ces périodes RLMOD sont utilisées par l'implantation qui les a générées et affectées selon les dispositions développées plus loin.

Dans une seconde étape, afin de respecter le double engagement de maintien global de l'emploi et de protection des droits individuels des définitifs et des temporaires prioritaires, chaque établissement pour l'enseignement organisé par WBE, chaque pouvoir organisateur (PO) pour l'officiel subventionné et pour le libre non confessionnel se voit attribuer un RLMOA (avec ' A ' pour Adapté). Il s'agit du RLMO attribué pour l'année scolaire 2014-2015 (dernière année sans dispense) multiplié par un coefficient tenant compte de l'évolution démographique entre 2014 et 2016. Ce RLMO 2014-2015 se voit ainsi adapté.

La somme des différences positives ou négatives entre le RLMOA de chaque établissement ou PO selon le cas et des RLMOD de leurs implantations constitue une réserve de périodes auprès des services du Gouvernement.

De cette réserve, des périodes sont automatiquement prélevées et attribuées au profit des directions et PO dont le RLMOD est insuffisant pour attribuer aux maîtres de religion ou de morale définitifs et temporaires prioritaires un nombre de périodes correspondant à leurs attributions au 30 juin 2016, en ce compris les éventuelles périodes d'EPA. Ces périodes sont utilisées pour encadrer les cours de religion, de morale non confessionnelle et de philosophie et de citoyenneté en dérogeant si nécessaire au nombre de groupes créés et à la taille minimale de ces groupes. 2° Le solde de la réserve sera attribué aux établissements et pouvoirs organisateurs qui ont contribué au solde au prorata de leur contribution à la réserve et des périodes encore disponibles après affectation d'une partie de cette réserve au maintien de l'emploi des définitifs et temporaires prioritaires.Ainsi, si un établissement a contribué à hauteur de 9 périodes à la constitution d'une réserve de 1200 périodes dont 800 (les 2/3) ont été utilisées pour sauvegarder des emplois, il recevra une dépêche lui indiquant qu'il dispose de 3 périodes d'adaptation (1/3 de sa contribution) » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2015-2016, n° 312/3, pp. 6-7).

B.11.4. Lors des débats en commission parlementaire du projet de décret qui est à l'origine du décret du 13 juillet 2016, la ministre compétente a aussi précisé que l'élaboration de ce texte avait tenu compte du résultat de diverses simulations de l'incidence de l'introduction des cours de philosophie et de citoyenneté (ibid., n° 312/3, p. 20) et a constaté : « Ces simulations ont conduit à estimer que des périodes pourraient encore être disponibles après prélèvement des périodes nécessaires à l'organisation du RLMOD et de celles nécessaires à la protection de l'emploi des définitifs et des temporaires prioritaires. D'où la proposition d'utiliser le solde sous forme de périodes d'adaptation [...] ces heures non utilisées remontent dans un pot commun et sont redistribuées par la suite au prorata de la contribution de chaque école » (ibid., n° 312/3, p. 21).

B.12. Il ressort du texte des alinéas 3 à 5 de l'article 39, § 3, du décret du 13 juillet 1998, inséré par l'article 5 du décret du 13 juillet 2016, lu à la lumière des extraits des travaux préparatoires précités, que ce sont ces dispositions-là qui permettent de préserver l'emploi des personnes qui, au sein des établissements visés à l'article 39, § 1er, alinéa 1er, du décret du 13 juillet 1998, dispensaient un cours de religion ou le cours de morale non confessionnelle avant l'introduction des cours de philosophie et de citoyenneté et, partant, d'assurer la réalisation de l'objectif poursuivi par le pouvoir législatif de la Communauté française.

Les « périodes pour de l'adaptation et du soutien pédagogique » dont il est question aux alinéas 6 à 8 de l'article 39, § 3, du décret du 13 juillet 1998, inséré par l'article 5 du décret du 13 juillet 2016, sont, selon les travaux préparatoires de ce dernier décret, attribuées aux maîtres d'adaptation et de soutien pédagogique - à savoir l'instituteur, le maître spécial d'éducation physique ou le maître spécial de langue moderne chargés d'assurer, de coordonner et de soutenir des activités éducatives visant exclusivement à mettre en oeuvre l'article 15, alinéa 1er, du décret du 24 juillet 1997 définissant les missions prioritaires de l'enseignement fondamental et de l'enseignement secondaire et organisant les structures propres à les atteindre (article 2, 11°, du décret du 13 juillet 1998, tel qu'il est remplacé par l'article 74 du décret du 4 février 2016 « portant diverses dispositions en matière d'enseignement ») - et non à des maîtres de morale ou à des maîtres de religion.

B.13.1. A la suite de sa modification par l'article 33 du décret du 11 avril 2014 « modifiant notamment le décret du 30 juin 2006 relatif à l'organisation pédagogique du 1er degré de l'enseignement secondaire », l'article 15 du décret du 24 juillet 1997 « définissant les missions prioritaires de l'enseignement fondamental et de l'enseignement secondaire et organisant les structures propres à les atteindre » dispose : « Chaque établissement d'enseignement permet à chaque élève de progresser à son rythme, en pratiquant l'évaluation formative et la pédagogie différenciée.

Dans l'enseignement ordinaire, 1° l'élève amené à parcourir la deuxième étape de l'enseignement obligatoire en cinq ans plutôt qu'en quatre peut suivre l'année complémentaire adaptée à ses besoins d'apprentissage dans le même établissement;2° l'élève amené à parcourir le premier degré de l'enseignement secondaire en trois ans plutôt qu'en deux peut suivre l'année supplémentaire adaptée à ses besoins d'apprentissage dans le même établissement. Dans le cadre des dispositions fixées par le décret du 30 juin 2006 relatif à l'organisation pédagogique du premier degré de l'enseignement secondaire, le projet d'établissement visé à l'article 67 fixe les modalités selon lesquelles est organisé le parcours en trois ans du premier degré ou en cinq ans de la deuxième étape de l'enseignement obligatoire.

Dans l'enseignement spécialisé, l'élève évolue selon son rythme d'apprentissage et ses potentialités dans les différents degrés de maturité sur avis du Conseil de classe ».

B.13.2. L'« évaluation formative » est l'« évaluation effectuée en cours d'activité et visant à apprécier le progrès accompli par l'élève et à comprendre la nature des difficultés qu'il rencontre lors d'un apprentissage ». Cette évaluation « a pour but d'améliorer, de corriger ou de réajuster le cheminement de l'élève » et « se fonde en partie sur l'auto-évaluation » (article 5, 17°, du décret du 24 juillet 1997, modifié par l'article 75, c), du décret du 12 juillet 2012 « organisant la certification par unités d'acquis d'apprentissage (CPU) dans l'enseignement secondaire qualifiant et modifiant diverses dispositions relatives à l'enseignement secondaire »).

La « pédagogie différenciée » est la « démarche d'enseignement qui consiste à varier les méthodes pour tenir compte de l'hétérogénéité des classes ainsi que de la diversité des modes et des besoins d'apprentissage des élèves » (article 5, 19°, du décret du 24 juillet 1997, modifié par l'article 75, c), du décret du 12 juillet 2012).

B.13.3. L'article 15 du décret du 24 juillet 1997 s'applique tant aux établissements visés à l'article 39, § 1er, alinéa 1er, du décret du 13 juillet 1998 qu'à l'enseignement fondamental libre confessionnel subventionné par la Communauté française (article 1er du décret du 24 juillet 1997).

L'obligation, énoncée à l'article 15, alinéa 1er, de ce décret, de permettre à chaque élève de progresser à son rythme, en pratiquant l'évaluation formative et la pédagogie différenciée, vaut donc tant pour les établissements visés à l'article 39, § 1er, alinéa 1er, du décret du 13 juillet 1998 que pour les établissements de l'enseignement primaire libre confessionnel subventionné par cette Communauté et qui ne proposent à leurs élèves que le cours de religion catholique.

B.14. Examinant la compatibilité, avec l'article 24, § 4, de la Constitution, du régime d'encadrement spécifique prévu par la disposition de l'avant-projet de décret qui est à l'origine de l'article 39, § 3, du décret du 13 juillet 2016, la section de législation du Conseil d'Etat observait : « Il convient d'examiner si ce régime d'encadrement spécifique, qui ne concerne que les établissements de l'enseignement officiel et ceux de l'enseignement libre non confessionnel qui offrent le choix entre les différents cours de religion et de morale non confessionnelle, est justifié au regard du principe d'égalité consacré par l'article 24, § 4, de la Constitution. [...] En l'occurrence, le fait que les établissements de l'enseignement officiel soient tenus d'offrir le choix entre les différents cours de religion et le cours de morale non confessionnelle, en vertu de l'article 24, § 1er, alinéa 4, de la Constitution, est une différence objective entre les établissements qui peut justifier qu'un supplément d'encadrement leur soit octroyé afin de permettre une organisation optimale de ces cours. On peut par ailleurs admettre que, dans le cadre de l'introduction d'un cours de philosophie et de citoyenneté en lieu et place d'une des deux périodes consacrées aux cours de religion et de morale, des mesures particulières soient prises afin d'assurer un encadrement supplémentaire, compte tenu de l'objectif poursuivi par le Gouvernement de ne pas entraîner de pertes d'emplois. On attirera toutefois l'attention de l'auteur de l'avant-projet sur les difficultés suivantes. [...] L'article 39, § 3, en projet du décret du 13 juillet 1998 ne se contente pas de prévoir que les périodes supplémentaires qui seraient générées seront consacrées aux membres du personnel dont la charge aurait été diminuée, mais permet, si après cette opération il reste encore des périodes supplémentaires, de les utiliser ' pour assurer de l'adaptation et du soutien pédagogique ' dans le cadre de la mise en oeuvre de l'article 15, alinéa 1er, du décret du 24 juillet 1997. On n'aperçoit pas en l'occurrence ce qui pourrait justifier cette mesure au regard du principe d'égalité. Non seulement rien ne justifie que seuls les établissements officiels puissent bénéficier de périodes supplémentaires pour de l'adaptation et du soutien pédagogique mais, en plus, le régime spécifique d'encadrement ne peut être conçu qu'à durée limitée, le temps nécessaire à limiter les pertes d'emplois résultant de l'introduction du cours de philosophie et de citoyenneté.

L'article 5 de l'avant-projet sera réexaminé en conséquence » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2015-2016, n° 312/1, pp. 59-60).

B.15. A cette observation de la section de législation du Conseil d'Etat, il fut répondu lors des travaux préparatoires de la disposition attaquée : « Concernant la remarque relative à l'inégalité de traitement, il peut lui être répondu que, conformément à l'engagement pris dans la DPC, le volume global de l'emploi est maintenu. En effet, le RLMOA correspond à l'encadrement qui aurait été attribué sans réforme (ni dispense, ni introduction d'une heure de philosophie et citoyenneté commune) » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2015-2016, n° 312/1, p. 7; ibid., n° 312/3, p. 7).

La « DPC », c'est-à-dire la « Déclaration de politique communautaire 2014 », faite par le Gouvernement au Parlement le 23 juillet 2014, indique que l'instauration d'un « cours commun d'éducation à la citoyenneté » ne peut, « en aucun cas, entraîner la perte d'emploi pour les enseignants concernés en place » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2015-2016, n° 312/1, p. 4).

B.16. Comme le relève la section de législation du Conseil d'Etat, l'objectif d'éviter des pertes d'emploi ne permet pas de justifier, au regard de l'article 24, § 4, de la Constitution, que les « périodes pour de l'adaptation et du soutien pédagogique » dont il est question à l'article 39, § 3, alinéas 6 à 8, du décret du 13 juillet 1998, inséré par l'article 5 du décret du 13 juillet 2016, et qui sont attribuées aux établissements visés à l'article 39, § 1er, alinéa 1er, du décret du 13 juillet 1998, ne soient pas aussi attribuées aux établissements de l'enseignement libre confessionnel subventionné par la Communauté française et qui ne proposent à leurs élèves que le cours de religion catholique.

Comme il est dit en B.13, ces deux catégories d'établissements sont tenues par l'obligation qui découle de l'article 15 du décret du 24 juillet 1997.

En outre, comme il est dit en B.12, l'objectif poursuivi par le Gouvernement de ne pas entraîner de pertes d'emplois est atteint par les règles énoncées à l'article 39, § 3, alinéas 3 à 5, du décret du 13 juillet 1998.

B.17. La différence de traitement que l'article 39, § 3, alinéas 6 à 8, du décret du 13 juillet 1998, inséré par l'article 5 du décret du 13 juillet 2016, introduit entre, d'une part, les établissements visés à l'article 39, § 1er, alinéa 1er, du décret du 13 juillet 1998, et, d'autre part, les établissements de l'enseignement libre confessionnel subventionné par la Communauté française et qui ne proposent à leurs élèves que le cours de religion catholique est dénuée de justification raisonnable.

B.18. Le premier moyen est, dans cette mesure, fondé.

B.19. Afin d'éviter que l'annulation qui en résulte ne modifie rétroactivement la situation des maîtres d'adaptation et de soutien pédagogique visés en B.12 auxquels ont été attribuées les « périodes pour de l'adaptation et du soutien pédagogique » dont il est question dans la disposition attaquée, il y a lieu, en application de l'article 8, alinéa 3, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, de maintenir les effets de la disposition annulée ainsi qu'il est indiqué au dispositif.

Quant au moyen relatif à l'article 14 du décret de la Communauté française du 13 juillet 2016 B.20. Il ressort des développements du moyen que la Cour est invitée à statuer sur la compatibilité de l'article 43bis, §§ 2 et 5, du décret du 3 mars 2004, tel qu'il est inséré par l'article 14 du décret du 13 juillet 2016, avec l'article 24, § 4, de la Constitution, en ce que cette disposition permettrait que, au-delà des « périodes » nécessaires à l'organisation du cours de morale non confessionnelle, des cours de religion, et des cours de philosophie et de citoyenneté, soient attribuées aux établissements de l'enseignement primaire spécialisé auxquels ces dispositions s'appliquent, des « périodes » sans lien avec le maintien de l'emploi des maîtres de morale non confessionnelle et des maîtres de religion en fonction le 30 juin 2016.

B.21. L'article 43bis, § 2, du décret du 3 mars 2004, tel qu'il est inséré par l'article 14 du décret du 13 juillet 2016, énonce les règles permettant de déterminer le « nombre maximal de périodes qui peuvent être utilisées pour l'organisation des différents cours de religion, de morale non confessionnelle et de philosophie et de citoyenneté ».

Il ressort des termes clairs de l'article 43bis, § 5, du décret du 3 mars 2004, tel qu'il est inséré par l'article 14 du décret du 13 juillet 2016, que celles de ces « périodes » qui ne sont pas « nécessaires » à l'organisation des cours précités ne peuvent être utilisées que lorsqu'elles sont « nécessaires au maintien du volume de charge équivalent aux attributions au 30 juin 2016, des maîtres de religion et de morale non confessionnelle, définitifs ou temporaires prioritaires ».

La même disposition précise que le « nombre maximal » précité « ne peut être utilisé que pour l'encadrement des cours de religion, de morale non confessionnelle et de philosophie et de citoyenneté » et que les « périodes de cours excédentaires ne peuvent en aucun cas faire l'objet d'un transfert vers le personnel enseignant ou vers d'autres catégories de personnel ».

B.22. Reposant sur une lecture erronée de la disposition attaquée, le moyen n'est pas fondé.

Par ces motifs, la Cour - annule l'article 39, § 3, alinéas 6 à 8, du décret de la Communauté française du 13 juillet 1998 « portant organisation de l'enseignement maternel et primaire ordinaire et modifiant la réglementation de l'enseignement », inséré par l'article 5 du décret de la Communauté française du 13 juillet 2016 « relatif à la mise en oeuvre d'un cours de philosophie et de citoyenneté dans l'enseignement fondamental ainsi qu'au maintien de l'encadrement pédagogique alternatif dans l'enseignement secondaire »; - maintient définitivement les effets des dispositions annulées jusques et y compris l'année scolaire 2018-2019; - rejette le recours pour le surplus.

Ainsi rendu en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 19 juillet 2018.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, J. Spreutels

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