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Arrêt
publié le 05 décembre 2018

Extrait de l'arrêt n° 64/2018 du 31 mai 2018 Numéro du rôle : 6675 1En cause : les questions préjudicielles concernant les articles 52 et 59, 4°, du décret de la Région flamande du 15 juillet 2016 relatif à la politique d'implantation commerc La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et J. Spreutels, et des juges L. Lavr(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 64/2018 du 31 mai 2018 Numéro du rôle : 6675 1En cause : les questions préjudicielles concernant les articles 52 et 59, 4°, du décret de la Région flamande du 15 juillet 2016 relatif à la politique d'implantation commerciale intégrale, posées par le Conseil d'Etat.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et J. Spreutels, et des juges L. Lavrysen, T. Merckx-Van Goey, F. Daoût, T. Giet et R. Leysen, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président A. Alen, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par arrêt n° 238.415 du 6 juin 2017 en cause de Christiaan Hendrickx et Paul De Hert contre la Région flamande, avec, comme partie intervenante, la société en commandite de droit allemand « Lidl Belgium GmbH & Co. KG », dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 14 juin 2017, le Conseil d'Etat a posé les questions préjudicielles suivantes : « Les articles 52 et 59, 4°, du décret de la Région flamande du 15 juillet 2016 relatif à la politique d'implantation commerciale intégrale, lus ensemble, violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec le principe de la sécurité juridique, en ce que des autorisations d'implantation commerciale expirées après le 1er juillet 2014 retrouvent leur validité, alors que les autorisations d'implantation commerciale déjà expirées à la date du 1er juillet 2014 ne retrouvent pas leur validité, même s'il est satisfait aux conditions de fond de l'article 52 ? Les articles 52, alinéa 1er, et 59, 4°, du décret de la Région flamande du 15 juillet 2016 relatif à la politique d'implantation commerciale intégrale, lus ensemble, violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec le principe de la sécurité juridique, en ce que des autorisations d'implantation commerciale expirées retrouvent leur validité par suite d'une procédure en annulation intentée devant le Conseil d'Etat par des tiers intéressés, à un moment où ce recours en annulation n'avait pas un tel effet, a fortiori lorsque le titulaire de l'autorisation d'implantation commerciale n'a pas fait usage de la possibilité de prolongation prévue par l'article 13 de la loi relative à l'autorisation d'implantations commerciales ? Les articles 52, alinéa 2, et 59, 4°, du décret de la Région flamande du 15 juillet 2016 relatif à la politique d'implantation commerciale intégrale, lus ensemble, violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec le principe de la sécurité juridique, en ce que le lien entre l'autorisation d'implantation commerciale, le permis d'urbanisme et le permis d'environnement est instauré avec effet rétroactif pour toutes les autorisations d'implantation commerciale qui n'étaient pas encore expirées le 1er juillet 2014 au lieu de s'appliquer aux autorisations d'implantation commerciale qui ont été demandées après le 1er juillet 2014 ? L'article 52, alinéa 2, du décret de la Région flamande du 15 juillet 2016 relatif à la politique d'implantation commerciale intégrale, interprété en ce sens qu'il n'est pas tenu compte des permis d'urbanisme définitivement refusés, bien qu'ils soient postérieurs au 1er juillet 2014 et à la délivrance de l'autorisation d'implantation commerciale, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce que le délai de validité de l'autorisation d'implantation commerciale non encore expirée à la date du 1er juillet 2014 est suspendu tant que le permis d'urbanisme et le permis d'environnement n'ont pas été définitivement octroyés, alors que le permis d'urbanisme et le permis d'environnement sont nuls de plein droit lorsque l'autorisation qui y est liée est définitivement refusée ? ». (...) III. En droit (...) B.1.1. Selon la décision de renvoi, le juge a quo a été saisi le 14 décembre 2015 d'un recours en annulation introduit contre une autorisation socio-économique qui avait été délivrée le 29 novembre 2011. En vertu de l'article 13 de la loi du 13 août 2004Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/08/2004 pub. 05/10/2004 numac 2004011378 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie et service public federal finances Loi relative à l'autorisation d'implantations commerciales fermer relative à l'autorisation d'implantations commerciales, cette autorisation aurait été périmée le 29 novembre 2015. L'article 52 du décret de la Région flamande du 15 juillet 2016 relatif à la politique d'implantation commerciale intégrale, qui est entré en vigueur le 1er juillet 2014, prévoit toutefois plusieurs motifs de suspension du délai de péremption, ce qui implique qu'il n'y aurait pas péremption et que l'autorisation reprendrait vigueur avec effet rétroactif.

B.1.2. Par ses quatre questions préjudicielles, le juge a quo interroge la Cour sur la compatibilité avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec le principe de la sécurité juridique, de l'article 52 du décret de la Région flamande du 15 juillet 2016, combiné ou non avec l'article 59, 4°, du même décret, en raison de son application rétroactive à partir du 1er juillet 2014 à toutes les autorisations d'implantations commerciales qui étaient encore valables à ce moment.

B.2. Par son arrêt n° 51/2018, du 26 avril 2018, la Cour a annulé cet article 59, 4°, du décret du 15 juillet 2016.

L'article 52 précité dispose : « L'échéance prévue à l'article 13 de la loi du 13 août 2004Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/08/2004 pub. 05/10/2004 numac 2004011378 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie et service public federal finances Loi relative à l'autorisation d'implantations commerciales fermer relative à l'autorisation d'implantations commerciales pour les autorisations d'implantations commerciales encore valables octroyées en application de la loi du 29 juin 1975 sur les implantations commerciales et la loi du 13 août 2004Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/08/2004 pub. 05/10/2004 numac 2004011378 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie et service public federal finances Loi relative à l'autorisation d'implantations commerciales fermer relative à l'autorisation d'implantations commerciales est suspendue tant qu'un recours en annulation de l'autorisation est en instance auprès du Conseil d'Etat et tant qu'un appel en annulation d'éventuels autres permis, habilitations ou autorisations requis pour le projet est en instance au Conseil d'Etat ou au Conseil [pour les contestations des autorisations].

La même échéance, si elle s'applique à un permis socio-économique pour une exploitation commerciale pour laquelle un permis d'urbanisme ou un permis d'environnement sont également requis, est suspendue tant que le permis d'urbanisme ou le permis d'environnement n'ont pas été définitivement octroyés. Dans ce cas, l'échéance prévue à l'article 13 de la loi du 13 août 2004Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/08/2004 pub. 05/10/2004 numac 2004011378 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie et service public federal finances Loi relative à l'autorisation d'implantations commerciales fermer relative à l'autorisation d'implantations commerciales ne commence qu'au jour où le permis d'urbanisme et/ou le permis d'environnement sont définitivement délivrés ».

Avant son annulation l'article 59, 4°, précité disposait : « Le présent décret entre en vigueur à la date de publication au Moniteur belge, à l'exception de : [...] 4° l'article 52.Le présent article produit ses effets à partir du 1er juillet 2014 ».

B.3. L'article 52, en cause, du décret du 15 juillet 2016 prévoit, en ce qui concerne le délai de péremption de l'autorisation d'implantation commerciale, un régime transitoire pour les autorisations d'implantations commerciales encore valables octroyées en application de la loi du 29 juin 1975 relative aux implantations commerciales et de la loi du 13 août 2004Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/08/2004 pub. 05/10/2004 numac 2004011378 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie et service public federal finances Loi relative à l'autorisation d'implantations commerciales fermer relative à l'autorisation d'implantations commerciales.

L'article 13 de la loi précitée du 13 août 2004 dispose que l'autorisation expire de plein droit lorsque le projet n'a pas été mis en oeuvre dans un délai de quatre années à compter du jour où elle a été délivrée, autorisation qui peut être prorogée pour une période d'un an, à la requête du demandeur. Contrairement à l'article 101 du décret du 25 avril 2014, la loi précitée ne prévoit pas de suspension du délai de déchéance dans certaines situations.

En vertu de l'article 52 du décret du 15 juillet 2016, le délai de déchéance prévu à l'article 13 de la loi du 13 août 2004Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/08/2004 pub. 05/10/2004 numac 2004011378 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie et service public federal finances Loi relative à l'autorisation d'implantations commerciales fermer en ce qui concerne les autorisations encore valables qui ont été octroyées en application de la législation fédérale est suspendu tant qu'un recours en annulation de l'autorisation ou d'autres permis, habilitations ou autorisations requis pour le même projet est en instance auprès du Conseil d'Etat ou du Conseil pour les contestations des autorisations, et tant que le permis d'urbanisme ou le permis d'environnement requis pour le projet n'ont pas été définitivement octroyés.

B.4. L'article 59 du décret du 15 juillet 2016 fixe l'entrée en vigueur du décret à la date de sa publication au Moniteur belge, à l'exception toutefois de plusieurs dispositions. Avant l'annulation de l'article 59, 4°, l'article 52, en cause, avait produit ses effets à partir du 1er juillet 2014.

B.5. Par son arrêt n° 51/2018 du 26 avril 2018, la Cour a annulé cet article 59, 4°, du décret du 15 juillet 2016 pour les motifs suivants : « B.13.1. La non-rétroactivité des lois est une garantie ayant pour but de prévenir l'insécurité juridique. Cette garantie exige que le contenu du droit soit prévisible et accessible, de sorte que le justiciable puisse prévoir, dans une mesure raisonnable, les conséquences d'un acte déterminé au moment où cet acte est accompli.

La rétroactivité ne se justifie que si elle est indispensable à la réalisation d'un objectif d'intérêt général.

S'il s'avère que la rétroactivité a en outre pour but ou pour conséquence d'influencer l'issue de procédures juridictionnelles dans un sens déterminé ou d'empêcher les juridictions de se prononcer sur une question de droit dont elles ont été saisies, la nature du principe en cause exige que des circonstances exceptionnelles ou des motifs impérieux d'intérêt général justifient l'intervention du législateur, laquelle porte atteinte, au préjudice d'une catégorie de citoyens, aux garanties juridictionnelles offertes à tous.

B.13.2. Etant donné que l'article 59, 4°, attaqué, du décret du 15 juillet 2016 fixe rétroactivement la date d'entrée en vigueur de l'article 52 du même décret, l'issue des procédures juridictionnelles pendantes peut changer, dès lors que les juridictions devront constater, sur la base de ces dispositions, qu'une autorisation qui avait expiré en vertu de l'article 13 de la loi du 13 août 2004Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/08/2004 pub. 05/10/2004 numac 2004011378 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie et service public federal finances Loi relative à l'autorisation d'implantations commerciales fermer est à nouveau valable. Partant, la Cour doit examiner si la rétroactivité est absolument nécessaire pour la réalisation d'un objectif d'intérêt général et si elle est justifiée par des circonstances exceptionnelles ou des motifs impérieux d'intérêt général.

B.14.1. La rétroactivité de l'article 52 attaqué a été justifiée comme suit dans l'exposé des motifs : ' Pour des raisons d'égalité et d'équité, il est nécessaire d'appliquer le régime de suspension - censé supprimer, au moyen de l'article 52 en projet (à combiner avec l'article 53), l'iniquité du régime de déchéance, tel qu'il est prévu par l'article 13 de la loi du 13 août 2004Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/08/2004 pub. 05/10/2004 numac 2004011378 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie et service public federal finances Loi relative à l'autorisation d'implantations commerciales fermer - aux autorisations d'implantations commerciales qui étaient encore exécutoires au moment du transfert vers les régions de la compétence relative aux implantations commerciales, c'est-à-dire au 1er juillet 2014. Ce transfert de compétence est aussi l'occasion d'offrir la sécurité juridique nécessaire aux entrepreneurs qui disposaient d'une autorisation d'implantation commerciale au 1er juillet 2014. Puisque la compétence relative aux implantations commerciales était du ressort de l'autorité fédérale avant le 1er juillet 2014, l'entrée en vigueur de la disposition finale instaurée au moyen du présent décret ne peut être antérieure à la date du 1er juillet 2014. La date du 1er juillet 2014 est donc indissociablement liée aux règles répartitrices de compétence. La rétroactivité de l'article 52 en projet est dès lors indispensable pour conserver l'égalité entre tous les titulaires d'une autorisation d'implantation commerciale qui était exécutoire au 1er juillet 2014, pour supprimer au maximum l'iniquité et pour créer la sécurité juridique. Il convient de souligner que le Conseil d'Etat a déjà jugé, dans ses arrêts, qu'aussi longtemps que subsiste l'incertitude quant à la validité de l'autorisation et, partant, des obligations qui en sont le corollaire, le délai imparti pour mettre en oeuvre l'autorisation est interrompu à l'égard de celui qui s'abstient d'en faire usage : [...] La disposition proposée consacre donc la jurisprudence du Conseil d'Etat ' (Doc. parl., Parlement flamand, 2015-2016, n° 767/1, pp. 89-90).

B.14.2. Il apparaît dès lors que le législateur décrétal a considéré la rétroactivité de l'article 52 du décret du 15 juillet 2016 comme étant ' indispensable pour conserver l'égalité entre tous les titulaires d'une autorisation d'implantation commerciale qui était exécutoire au 1er juillet 2014, pour supprimer au maximum l'iniquité et pour créer la sécurité juridique '.

B.14.3. L'iniquité et la sécurité juridique nécessaire auxquelles le législateur décrétal fait référence concernent la situation qui, selon lui, découle de l'article 13 de la loi du 13 août 2004Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/08/2004 pub. 05/10/2004 numac 2004011378 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie et service public federal finances Loi relative à l'autorisation d'implantations commerciales fermer et dans laquelle ' une autorisation d'implantation commerciale ne peut parfois être mise en oeuvre parce que d'autres permis requis ne sont pas exécutoires en raison de procédures d'annulation, alors que, d'autre part, le délai de déchéance, prévu pour inciter le titulaire du projet à réaliser son projet, continue à s'écouler ' (Doc. parl., Parlement flamand, 2015-2016, n° 767/1, p. 85).

B.15.1. Il relève du pouvoir d'appréciation du législateur décrétal de décider des modalités selon lesquelles il fait usage des compétences transférées aux régions et il peut prévoir un autre régime que celui en vigueur sous l'empire de la législation fédérale antérieure. La suppression de l'iniquité née, selon le législateur décrétal, de l'ancienne législation fédérale relative à la péremption des autorisations d'implantations commerciales est certes un objectif qui peut amener le législateur décrétal à modifier ce régime, mais elle n'est pas suffisante pour justifier la rétroactivité de la disposition attaquée.

B.15.2. Le même raisonnement vaut en ce qui concerne l'objectif consistant à ancrer dans un texte législatif la jurisprudence du Conseil d'Etat citée par le législateur décrétal. Cette jurisprudence concernait en outre exclusivement les litiges mettant en cause l'autorisation même d'implantation commerciale et avait une portée plus limitée que l'article 52 attaqué. De surcroît, cette jurisprudence ne pouvait être considérée comme constante et prévisible au point de susciter chez les justiciables des attentes légitimes quant à la validité de l'autorisation qui avait été délivrée en vertu de la législation fédérale, laquelle ne prévoyait pas de suspension du délai de déchéance.

B.16.1. La rétroactivité de l'article 52 attaqué a été également justifiée par la nécessité de traiter de manière égale tous les titulaires d'une autorisation qui était encore valable au 1er juillet 2014. Pour justifier le choix de cette date, il est renvoyé au fait que c'est depuis celle-ci que les régions sont compétentes en matière d'implantations commerciales, y compris en matière d'autorisations d'implantations commerciales. B.16.2. Le fait que la Région flamande soit compétente pour régler les implantations commerciales depuis le 1er juillet 2014 limite sa compétence dans le temps mais ne saurait justifier la rétroactivité du nouveau régime jusqu'à cette date. En effet, tant que le législateur décrétal n'avait pas fait usage de sa compétence, la législation fédérale antérieure est restée d'application. Le législateur décrétal ne peut modifier rétroactivement l'ordre juridique sans qu'il soit satisfait aux conditions mentionnées en B.13.1.

B.16.3. Les personnes qui disposaient d'une autorisation d'implantation commerciale valable au 1er juillet 2014 se trouvaient au moment de la publication des dispositions attaquées dans des situations essentiellement différentes selon qu'à ce moment cette autorisation avait expiré ou non en vertu de l'ancienne législation fédérale.

B.17.1. Sans la rétroactivité qui lui est conférée par l'article 59, 4°, du décret du 15 juillet 2016, l'article 52 dudit décret serait entré en vigueur à la date de la publication du décret au Moniteur belge, conformément à l'article 59. Si l'article 52 était entré en vigueur immédiatement, il n'aurait été applicable qu'aux titulaires d'une autorisation encore valable à cette date.

En donnant un effet rétroactif à cette disposition, l'article 59, 4°, du décret vise dès lors à faire bénéficier de celle-ci les personnes qui disposaient d'une autorisation valable au 1er juillet 2014, mais dont l'autorisation avait expiré à la date de la publication du décret attaqué au Moniteur belge, conformément à la législation fédérale antérieure. La rétroactivité de l'article 52, attaqué, peut en effet avoir pour conséquence que ces autorisations d'implantations commerciales périmées redeviennent valables de plein droit. Ce régime protège donc principalement des intérêts privés.

Les personnes dont l'autorisation d'implantation commerciale avait expiré conformément à l'ancienne législation fédérale avant l'adoption du décret du 15 juillet 2016 ne pouvaient pas s'attendre légitimement à ce que cette autorisation « renaisse » du fait d'une intervention rétroactive du législateur décrétal.

B.17.2. Une telle rétroactivité a pour conséquence d'influencer des situations définitivement acquises et peut porter atteinte à la confiance légitime et à la situation juridique de personnes autres que les anciens titulaires d'autorisations. Il se peut en effet que, suite à la péremption d'une autorisation d'implantation commerciale, des personnes autres que le titulaire de l'autorisation initiale aient obtenu une autorisation d'implantation commerciale pour la même zone territoriale et aient déjà fait des investissements en vue de réaliser leur projet. De plus, il est possible que l'autorité qui délivre les autorisations ait revu sa politique pour le lieu concerné en tenant compte de la péremption d'une autorisation et ait aligné ses actes sur cette révision. Enfin, il est également possible que d'autres tiers se soient fondés sur cette situation pour poser certains actes juridiques.

B.17.3. Dès lors que la « renaissance » de plein droit d'autorisations périmées peut donc conduire à l'existence simultanée de décisions d'autorisation ou de décisions de l'autorité inconciliables ou peut porter atteinte à la confiance légitime des citoyens, les dispositions attaquées compromettent la sécurité juridique pour les tiers qui ont agi en fonction de la péremption des autorisations d'implantation commerciale délivrées.

L'article 59, 4°, attaqué, du décret du 15 juillet 2016 ne crée donc pas un juste équilibre entre, d'une part, les intérêts privés des anciens titulaires d'autorisations et, d'autre part, ceux des pouvoirs publics et autres tiers qui ont agi en fonction de la péremption des autorisations visées.

B.17.4. Le fait de remédier rétroactivement à la situation des personnes qui disposaient encore d'une autorisation d'implantation commerciale valable au 1er juillet 2014 ne saurait être considéré comme nécessaire à la réalisation d'un objectif d'intérêt général et n'est pas justifié par des circonstances exceptionnelles ou des motifs impérieux d'intérêt général.

B.18. Le premier moyen dans l'affaire n° 6603 et le premier moyen dans l'affaire n° 6604 sont fondés. L'article 59, 4°, du décret du 15 juillet 2016 doit dès lors être annulé ».

B.6. Par conséquent, l'article 59, 4°, du décret du 15 juillet 2016 a disparu ex tunc de l'ordre juridique, ce qui a pour conséquence que l'article 52 du décret du 15 juillet 2016 n'a produit des effets qu'à partir du 29 juillet 2016, date de la publication de ce décret au Moniteur belge.

B.7.1. Il résulte de ce qui précède que les première, deuxième et troisième questions préjudicielles sont devenues sans objet.

B.7.2. Il revient en règle à la juridiction a quo de déterminer les normes applicables au litige qui lui est soumis. Lorsque, toutefois, des dispositions qui manifestement ne peuvent être appliquées au litige au fond sont soumises à la Cour, celle-ci n'en examine pas la constitutionnalité.

Dès lors que la rétroactivité ne s'applique plus, eu égard à ce qui précède, à l'article 52 du décret du 15 juillet 2016, cette disposition est entrée en vigueur le 29 juillet 2016, de sorte que l'autorisation socio-économique en cause devant le juge a quo était définitivement périmée le 29 novembre 2015 en vertu de l'article 13 de la loi du 13 août 2004Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/08/2004 pub. 05/10/2004 numac 2004011378 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie et service public federal finances Loi relative à l'autorisation d'implantations commerciales fermer relative à l'autorisation d'implantations commerciales.

En conséquence, l'article 52 ne peut manifestement pas être appliqué au litige soumis à la juridiction a quo.

La quatrième question préjudicielle n'appelle pas de réponse.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : - Les première, deuxième et troisième questions préjudicielles sont sans objet. - La quatrième question préjudicielle n'appelle pas de réponse.

Ainsi rendu en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 31 mai 2018.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, A. Alen

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