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Arrêt
publié le 30 janvier 2019

Extrait de l'arrêt n° 182/2018 du 19 décembre 2018 Numéro du rôle : 6798 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 16.4.25 du décret de la Région flamande du 5 avril 1995 contenant des dispositions générales concernant la poli La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et F. Daoût, et des juges J.-P. Snapp(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 182/2018 du 19 décembre 2018 Numéro du rôle : 6798 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 16.4.25 du décret de la Région flamande du 5 avril 1995 contenant des dispositions générales concernant la politique de l'environnement, lu en combinaison avec l'article 16.4.29 du même décret et avec l'article 44 du décret flamand du 4 avril 2014 relatif à l'organisation et à la procédure de certaines juridictions administratives flamandes, posée par la Cour environnementale de la Région flamande.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et F. Daoût, et des juges J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, R. Leysen et M. Pâques, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président A. Alen, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par arrêt du 5 décembre 2017 en cause de Henri Pauwels contre la Région flamande, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 21 décembre 2017, la Cour environnementale de la Région flamande a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 16.4.25 du décret de la Région flamande du 5 avril 1995 contenant des dispositions générales concernant la politique de l'environnement, combiné avec l'article 16.4.29 du même décret et avec l'article 44 du décret flamand du 4 avril 2014 relatif à l'organisation et à la procédure de certaines juridictions administratives flamandes, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, dans la mesure où, pour le contrevenant auquel la procédure organisée d'amende administrative trouve à s'appliquer, la possibilité d'accorder un sursis total ou partiel de l'exécution de l'amende administrative alternative, au sens de la loi du 29 juin 1964Documents pertinents retrouvés type loi prom. 29/06/1964 pub. 27/11/2009 numac 2009000776 source service public federal interieur Loi concernant la suspension, le sursis et la probation. - Coordination officieuse en langue allemande fermer concernant la suspension, le sursis et la probation, n'est pas prévue, alors qu'une telle possibilité existe au profit du contrevenant qui, pour la même infraction, fait l'objet d'une procédure pénale, en ce qu'il serait ainsi établi une différence de traitement insusceptible de justification raisonnable ? ». (...) III. En droit (...) B.1.1. La question préjudicielle porte sur les articles 16.4.25 et 16.4.29 du décret de la Région flamande du 5 avril 1995 contenant des dispositions générales concernant la politique de l'environnement (ci-après : le décret du 5 avril 1995), qui disposaient, lorsque la question préjudicielle a été posée : « Art. 16.4.25. L'amende administrative est une sanction par laquelle l'entité régionale oblige le contrevenant à payer une somme d'argent.

Est considéré comme un contrevenant, la personne ayant commis une infraction environnementale ou un délit environnemental, ainsi que la personne ayant donné l'ordre de poser des actes faisant l'objet d'une infraction environnementale ou d'un délit environnemental.

Une amende administrative imposée est majorée des centimes additionnels applicables aux amendes pénales. Des frais d'expertise que l'entité régionale a dû faire pour pouvoir prendre sa décision peuvent éventuellement être ajoutés à une amende administrative ». « Art. 16.4.29. Si une amende administrative est imposée, l'ampleur de l'amende est adaptée à la gravité de l'infraction environnementale ou au délit environnemental. Il est également tenu compte de la fréquence et des circonstances dans lesquelles le contrevenant présumé a commis ou terminé les infractions environnementales ou les délits environnementaux ».

B.1.2. La question préjudicielle porte également sur l'article 44 du décret flamand du 4 avril 2014 relatif à l'organisation et à la procédure de certaines juridictions administratives flamandes (ci-après : le décret du 4 avril 2014), qui dispose : « Après l'annulation entière ou partielle, le Collège de maintien de la Région flamande peut prendre [lui-même] une décision quant au montant de l'amende et, le cas échéant, sur le dessaisissement d'avantage, et décider que sa décision à ce sujet remplace la décision annulée ».

B.2. La Cour est interrogée au sujet de la compatibilité de ces dispositions avec les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'elles ne prévoient pas, pour les personnes qui font l'objet d'une procédure d'amende administrative, la possibilité de bénéficier en tout ou en partie d'un sursis à l'exécution de l'amende administrative alternative, alors que, pour les personnes qui font l'objet d'une procédure pénale pour la même infraction, cette possibilité existe.

B.3. En ce qui concerne les délits environnementaux visés dans le décret du 5 avril 1995, le législateur décrétal a opté pour un système de sanction alternatif. Il appartient au procureur du Roi de décider de poursuivre ou non les auteurs présumés de ces délits. Sa décision de poursuivre le contrevenant exclut l'imposition d'une amende administrative alternative (article 16.4.34 du décret du 5 avril 1995). En revanche, si le procureur du Roi décide de ne pas engager de poursuites pénales, l'autorité régionale compétente peut entamer la procédure en vue de l'imposition éventuelle d'une amende administrative alternative (article 16.4.35 du décret du 5 avril 1995). Pour un même délit environnemental, l'auteur de celui-ci peut donc soit être renvoyé devant le tribunal correctionnel, soit se voir infliger une amende administrative alternative. Dans ce dernier cas, l'entité régionale doit, pour fixer le montant de l'amende, tenir compte de la gravité de l'infraction environnementale ou du délit environnemental, ainsi que de la fréquence et des circonstances dans lesquelles le contrevenant présumé a commis ou terminé ces infractions et délits environnementaux (article 16.4.29 du décret du 5 avril 1995). L'auteur peut introduire, auprès du Collège de maintien, un recours contre la décision lui infligeant cette amende (article 16.4.39 du décret du 5 avril 1995). Lorsqu'il décide d'annuler la décision attaquée en tout ou partie, ce Collège peut prendre lui-même une décision quant au montant de l'amende et décider que sa décision à ce sujet remplace la décision annulée (article 44 du décret du 4 avril 2014).

B.4.1. Après la saisine de la Cour dans la présente affaire, l'article 16.4.29 du décret du 5 avril 1995 a été modifié par l'article 31 du décret du 8 juin 2018 « modifiant diverses dispositions du décret du 5 avril 1995 contenant des dispositions générales concernant la politique de l'environnement et modifiant le Code flamand de l'Aménagement du Territoire du 15 mai 2009 ». Plus particulièrement, le législateur décrétal a inséré, dans l'article 16.4.29, dont le texte existant est devenu le paragraphe 1er, un paragraphe 2, qui dispose : « L'amende administrative peut être infligée totalement ou partiellement avec sursis à l'exécution. Le sursis dans le cas de l'amende administrative alternative n'est possible que dans la mesure où il n'a été infligé ni amende administrative, ni amende pénale ni emprisonnement du chef de délit environnemental et/ou d'infraction environnementale au cours des cinq années précédant le délit environnemental. Le sursis dans le cas de l'amende administrative exclusive n'est possible que dans la mesure où il n'a été infligé ni amende administrative, ni amende pénale ni emprisonnement du chef de délit environnemental et/ou d'infraction environnementale au cours des trois années précédant l'infraction environnementale.

Un dessaisissement d'avantages ne peut être infligé [...] avec sursis à l'exécution.

Le sursis est valable pour un délai d'épreuve qui ne peut être inférieur à un an ni excéder trois ans. Le délai d'épreuve prend cours à la date de la notification de la décision d'infliger une amende administrative.

Le sursis est révoqué de plein droit en cas de nouveau délit environnemental ou de nouvelle infraction environnementale commis pendant le délai d'épreuve, entraînant une condamnation à une peine ou à une amende administrative ».

Cette modification décrétale est entrée en vigueur le 12 juillet 2018, soit dix jours après sa publication au Moniteur belge.

B.4.2. Dans les travaux préparatoires du décret du 8 juin 2018, cette modification a été justifiée comme suit : « Le nouveau paragraphe 2 inséré prévoit la possibilité, pour l'entité régionale, d'infliger l'amende administrative totalement ou partiellement avec sursis à l'exécution. L'octroi du sursis n'est pas subordonné à la condition que le contrevenant le demande, mais le sursis peut également être accordé d'office.

Le sursis n'est possible que si, au cours d'une période préalable à la contravention, il n'a été infligé au même contrevenant ni amende administrative, ni amende pénale, ni peine d'emprisonnement. Une proposition préalable de paiement d'une somme d'argent n'exclut donc pas la possibilité d'un sursis. Pour les délits, cette période est de cinq ans, pour les infractions elle est de trois ans. Le début de cette période de référence négative est fixé à la date de l'infraction ou du délit environnemental, soit la date de commission de la contravention. Pour la très large majorité des contraventions, cette date peut être établie clairement. Lorsqu'une analyse et un examen ultérieurs des données recueillies (échantillons, mesures) sont requis avant qu'il soit question d'une contravention, la date du constat sera déterminante pour établir s'il a effectivement été commis une contravention, dont la date ne coïncidera pas forcément avec la prise d'un échantillon ou un mesurage. Comme date ultime et en vue d'assurer la sécurité juridique, il peut être décidé qu'en cas d'incertitude, la date de clôture du procès-verbal sera prise comme point de départ.

Un ' dessaisissement d'avantage ' lié à une amende ne peut être assorti d'un sursis. Il n'empêche que l'amende peut effectivement être prononcée avec sursis, en tant que peine principale.

L'entité régionale détermine la période de mise à l'épreuve, qui est d'au moins un an et de maximum trois ans. Si, au cours de la période de mise à l'épreuve, une nouvelle contravention environnementale est commise, laquelle donne lieu par la suite à une peine ou à une amende administrative, le sursis est révoqué d'office. Le contrevenant en sera informé par l'entité régionale » (Doc. parl., Parlement flamand, 2017-2018, n° 1547/1, pp. 21-22).

B.5. En vertu de l'article 16.4.29 modifié, l'entité régionale est actuellement compétente pour assortir une amende administrative d'un sursis. Le Collège de maintien dispose lui aussi de cette possibilité lorsque, après avoir décidé d'annuler totalement ou partiellement la décision attaquée, il se substitue à l'entité régionale et décide lui-même du montant de l'amende administrative, en vertu de l'article 44 du décret du 4 avril 2014.

B.6. Il appartient à la juridiction a quo de décider si, après la modification de l'article 16.4.29 du décret du 5 avril 1995 par le décret du 8 juin 2018, l'actuelle question préjudicielle est encore utile à la solution du litige.

L'affaire doit dès lors être renvoyée à la juridiction a quo.

Par ces motifs, la Cour renvoie l'affaire à la juridiction a quo.

Ainsi rendu en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 19 décembre 2018.

Le greffier, F. Meersschaut Le président, A. Alen

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