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Arrêt
publié le 24 février 2020

Extrait de l'arrêt n° 9/2020 du 16 janvier 2020 Numéros du rôle : 6999 et 7055 En cause : les recours en annulation partielle du décret de la Région wallonne du 29 mars 2018 « modifiant le Code de la démocratie locale et de la décentralisatio La Cour constitutionnelle, composée des présidents F. Daoût et A. Alen, et des juges J.-P. Moerm(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 9/2020 du 16 janvier 2020 Numéros du rôle : 6999 et 7055 En cause : les recours en annulation partielle du décret de la Région wallonne du 29 mars 2018 « modifiant le Code de la démocratie locale et de la décentralisation en vue de renforcer la gouvernance et la transparence dans l'exécution des mandats publics au sein des structures locales et supra-locales et de leurs filiales », introduits par la SA « Integrale » et par la SA « Socofe ».

La Cour constitutionnelle, composée des présidents F. Daoût et A. Alen, et des juges J.-P. Moerman, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, T. Giet et J. Moerman, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président F. Daoût, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des recours et procédure a. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 14 août 2018 et parvenue au greffe le 17 août 2018, la SA « Integrale », assistée et représentée par Me J.Bourtembourg et Me F. Belleflamme, avocats au barreau de Bruxelles, et par Me J.-P. Lacomble et Me S. Pâques, avocats au barreau de Liège, a introduit un recours en annulation du décret de la Région wallonne du 29 mars 2018 « modifiant le Code de la démocratie locale et de la décentralisation en vue de renforcer la gouvernance et la transparence dans l'exécution des mandats publics au sein des structures locales et supra-locales et de leurs filiales » et, en particulier, des articles 7 et 9, 31, 35, 38 à 41, 44, 45, 47 à 49, 51 et 52, 62, 67 à 80 et 82 de ce décret (publié au Moniteur belge du 14 mai 2018).

Par la même requête, la partie requérante demandait également la suspension des mêmes dispositions décrétales. Par l'arrêt n° 170/2018 du 29 novembre 2018, publié au Moniteur belge du 26 avril 2019, la Cour a rejeté la demande de suspension. b. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 13 novembre 2018 et parvenue au greffe le 21 novembre 2018, la SA « Socofe », assistée et représentée par Me X.Remy, Me P. De Bock et Me N. Tulkens, avocats au barreau de Bruxelles, a introduit un recours en annulation des articles 35, 44 et 45 du même décret.

Ces affaires, inscrites sous les numéros 6999 et 7055 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) II. En droit (...) Quant au désistement de la partie requérante dans l'affaire n° 7055 B.1.1. La partie requérante dans l'affaire n° 7055 déclare se désister de son recours en annulation.

B.1.2. Rien ne s'oppose à ce que la Cour décrète le désistement.

Quant à la recevabilité du recours dans l'affaire n° 6999 B.2.1. La partie requérante est une société à participation publique locale significative au sens de l'article L5111-1, alinéa 1er, 10°, du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, introduit par l'article 47 du décret de la Région wallonne du 29 mars 2018 « modifiant le Code de la démocratie locale et de la décentralisation en vue de renforcer la gouvernance et la transparence dans l'exécution des mandats publics au sein des structures locales et supra-locales et de leurs filiales » (ci-après : le décret attaqué). Toutes les dispositions insérées par le décret attaqué qui visent les sociétés à participation publique locale significative lui sont en conséquence applicables.

B.2.2. Contrairement à ce que le Gouvernement wallon soutient, les dispositions qu'elle attaque sont susceptibles d'affecter directement et défavorablement sa situation, en ce que ces dispositions instaurent des contrôles supplémentaires quant aux décisions qu'elle prend et quant aux actes qu'elle pose et en ce qu'elles lui imposent des contraintes dans ses relations avec les membres de son conseil d'administration, ainsi qu'en termes de recrutement et de gestion de son personnel dirigeant.

B.2.3. Bien que les dispositions attaquées aient pour objet ou pour effet d'assurer la conformité des actes et décisions de la partie requérante à la légalité, à l'intérêt social et à l'intérêt général, de sorte qu'elles pourraient avoir un effet bénéfique sur sa situation, ces dispositions ne lui en imposent pas moins des contraintes et des contrôles supplémentaires par rapport à ceux qui existaient antérieurement. La partie requérante a donc intérêt à en demander l'annulation.

B.2.4. Par une lettre du 6 janvier 2020, le Gouvernement wallon a demandé la réouverture des débats, de nouvelles dispositions décrétales ayant été votées par le Parlement wallon le 19 décembre 2019 et ces nouveaux éléments suffisant, à son estime, « à établir l'absence d'intérêt de la partie requérante ».

Les nouvelles dispositions décrétales auxquelles il est fait référence dans ce courrier produisent leurs effets, d'après le texte voté par le Parlement wallon le 19 décembre 2019, ce même jour ou, pour l'une d'entre elles, le 1er janvier 2019. Les dispositions attaquées ayant pu produire des effets juridiques avant leur modification lors de l'entrée en vigueur des dispositions votées par le Parlement wallon le 19 décembre 2019, la partie requérante a intérêt à en demander l'annulation.

Par ailleurs, ainsi que le reconnaît le Gouvernement wallon dans sa lettre du 6 janvier 2020, ces « nouveaux éléments » ont « déjà été évoqués pour l'essentiel lors de l'audience de plaidoiries », de sorte que les parties ont été en mesure de s'expliquer à leur sujet.

Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de réouverture des débats.

B.2.5. Le recours est recevable.

Quant à la demande de production d'une consultation juridique B.3.1. Dans sa requête en annulation, la partie requérante demande à la Cour d'ordonner la production, par le Gouvernement wallon, d'une consultation juridique qui a été donnée au Gouvernement et qui a été évoquée au cours des travaux préparatoires du décret attaqué (Doc. parl., Parlement wallon, 2017-2018, 15 mars 2018, CRIC, n° 112, pp. 13, 18 et 22).

B.3.2. Les avis juridiques sollicités par un gouvernement lors de l'élaboration d'un avant-projet de loi ne sont pas « des règles qui sont établies par la Constitution ou en vertu de celle-ci pour déterminer les compétences respectives de l'Etat, des Communautés et des Régions » (article 1er, 1°, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle). Elles ne sont donc pas de nature à pouvoir lier la Cour de quelque manière que ce soit lors de son contrôle du décret attaqué au regard des règles répartitrices de compétences.

Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la partie requérante.

Quant à la définition de la « société à participation publique locale significative » B.4.1. Le premier moyen vise le décret attaqué, en ce qu'il « étend son champ d'application à toute société à participation publique locale significative », telle qu'elle est définie à l'article 47 du décret attaqué, qui remplace l'article L5111-1 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation.

L'article 47 du décret attaqué insère, dans cette disposition, un 10° qui définit la « société à participation publique locale significative » en ces termes : « Société à participation publique locale significative : société répondant aux critères suivants : a) être une société de droit belge ou dont un siège d'exploitation est établi en Belgique;b) ne pas être une intercommunale, une association de pouvoirs publics visées à l'article 118 de la loi organique du 8 juillet 1976 des centres publics d'action sociale, une régie communale ou provinciale autonome, une ASBL communale ou provinciale, une association de projet, une société de logement, un organisme visé à l'article 3 du décret du 12 février 2004 relatif au statut de l'administrateur public ou à l'article 3 du décret du 12 février 2004 relatif au statut de l'administrateur public pour les matières réglées en vertu de l'article 138 de la Constitution; c) Et dans laquelle une ou plusieurs communes, provinces, C.P.A.S., intercommunales, régies communales et provinciales autonomes, associations de projet, association de pouvoirs publics visée à l'article 118 de la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'action sociale, sociétés de logement, ou personne morale ou association de fait associant plusieurs des autorités précitées détiennent seules, ou conjointement avec la Région wallonne, un organisme visé à l'article 3, § 1er à § 7, alinéa 1er, du décret du 12 février 2004 relatif au statut de l'administrateur public ou à l'article 3, § 1er à § 5, alinéa 1er, du décret du 12 février 2004 relatif au statut de l'administrateur public pour les matières réglées en vertu de l'article 138 de la Constitution, directement ou indirectement une participation au capital supérieure à cinquante pourcents du capital; ou désignent plus de cinquante pourcents des membres du principal organe de gestion. [...] ».

Une définition similaire figure à l'article L1532-5 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, remplacé par l'article 35 du décret attaqué, qui soumet le conseil d'administration des sociétés qu'il vise, à savoir des filiales d'intercommunales ou dans lesquelles une intercommunale détient une participation directe ou indirecte, à l'obligation de transmettre pour avis conforme à l'intercommunale certaines des décisions qu'il envisage de prendre.

B.4.2. Le moyen est pris de la violation des articles 4 et 5 de la Constitution et de l'article 6, § 1er, VIII, de l'article 7 et de l'article 19 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles. La partie requérante fait grief à la définition de la « société à participation publique locale significative » de ne pas être conforme aux règles répartitrices de compétences précitées, tant du point de vue matériel que du point de vue territorial.

Le Gouvernement flamand, partie intervenante, considère pour sa part que la définition précitée excède la compétence territoriale du législateur décrétal wallon.

B.4.3. L'exposé des motifs du décret attaqué indique que, par l'introduction dans le Code de la démocratie locale et de la décentralisation, de la définition de la « société à participation publique locale significative », le législateur décrétal entendait identifier une forme de société dans laquelle les pouvoirs publics locaux wallons sont représentés mais qui échappait auparavant aux dispositions du Code concernant la transparence des opérations menées par les intercommunales wallonnes et des mandats exercés en leur sein (Doc. parl., Parlement wallon, 2017-2018, n° 1047/1, p. 12).

B.5. L'article 6, § 1er, VIII, de la loi spéciale du 8 août 1980 confère aux régions, en ce qui concerne les pouvoirs subordonnés, le pouvoir de régler la composition, l'organisation, la compétence et le fonctionnement des institutions provinciales et communales, ainsi que celui de régler les associations de provinces, de collectivités supracommunales et de communes dans un but d'utilité publique, à l'exception de la tutelle spécifique en matière de lutte contre l'incendie, organisée par la loi.

B.6.1. Partant des recommandations formulées dans le « Rapport de la Commission d'enquête parlementaire chargée d'examiner la transparence et le fonctionnement du Groupe PUBLIFIN », adopté en séance plénière du Parlement wallon le 6 juillet 2017 (Doc. parl., Parlement wallon, 2016-2017, n° 861/1), le législateur décrétal s'est estimé compétent pour prendre, dans le cadre de sa compétence en matière de pouvoirs subordonnés, « de nouvelles règles en matière de gouvernance et de transparence au sein des structures locales, supra-locales ou dans leurs filiales » et pour étendre « considérablement le périmètre des organismes et des mandataires visés par les dispositions du Code de la démocratie locale » (Doc. parl., Parlement wallon, 2017-2018, n° 1047/1, p. 3).

B.6.2. Ainsi que l'a relevé la section de législation du Conseil d'Etat, « des sociétés de droit privé auxquelles sont confiées des missions de service public peuvent ainsi être soumises au contrôle de la Région et se voir imposer des contraintes que justifient les politiques publiques » (ibid., p. 49).

B.6.3. L'article L1512-5 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation autorise les intercommunales à prendre des participations au capital de toute société lorsqu'elles sont de nature à concourir à la réalisation de leur objet social. L'article L1512-6, § 1er, du même Code précise par ailleurs que, quel que soit leur objet, les intercommunales exercent des missions de service public. Il en découle qu'il faut considérer que les sociétés de droit privé au capital desquelles des intercommunales participent concourent, à tout le moins indirectement, à la réalisation d'une mission de service public. Il en va de même en ce qui concerne les sociétés de droit privé au capital desquelles des communes ou des provinces participent, ces dernières étant chargées de régler ce qui concerne les intérêts communaux et provinciaux, ainsi que des sociétés de droit privé au capital desquelles participent les autres personnes morales de droit public locales visées par la disposition attaquée. A ce titre, elles peuvent se voir imposer des contraintes justifiées par les politiques publiques.

B.6.4. Pour le surplus, il ne revient pas à la Cour de se prononcer concrètement sur le concours apporté par la société requérante à l'objet social de l'intercommunale qui participe à son financement ni sur le contenu des missions de service public assumées par cette intercommunale. La Cour examine les dispositions attaquées en considérant que les sociétés auxquelles elles s'appliquent concourent, le cas échéant indirectement, à la réalisation d'une mission de service public, dès lors que ces sociétés sont contrôlées, directement ou indirectement, par des personnes morales de droit public locales, qui ne peuvent poursuivre d'autre objectif que la réalisation d'un service public conforme à l'intérêt général.

B.7. Le critère du contrôle significatif qui est exercé sur les sociétés qu'il entend viser par les personnes morales de droit public locales qui relèvent de la compétence du législateur décrétal, critère qui se concrétise soit par la participation majoritaire au capital de la société, soit par la participation majoritaire au principal organe de gestion de la société, ne conduit pas en soi, le législateur décrétal à excéder sa compétence en matière de pouvoirs subordonnés.

Le législateur décrétal a en effet raisonnablement pu considérer qu'une personne morale ayant adopté la forme d'une société privée mais dont le capital est constitué à plus de 50 % de fonds publics locaux ou dont la majorité des membres du principal organe de gestion est désignée par les pouvoirs publics locaux peut être soumise à des dispositions organisant un contrôle des opérations menées à l'aide de ces fonds publics et de l'exercice des mandats confiés par ces pouvoirs publics locaux.

B.8.1. Les articles 5, 39 et 134 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 2 et 19, § 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles et avec les articles 2, § 1er, et 7 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises, prévoient une répartition exclusive des compétences territoriales. Un tel système suppose que l'objet de toute norme adoptée par un législateur régional puisse être localisé dans le territoire de sa compétence, de sorte que toute relation ou situation concrète soit réglée par un seul législateur.

B.8.2. Les dispositions attaquées définissent les sociétés à participation publique locale significative comme étant toute société de droit belge et toute société dont un siège d'exploitation est établi en Belgique, dont le capital est détenu, à plus de 50 %, par une ou plusieurs personnes morales de droit public locales soumises au Code de la démocratie locale et de la décentralisation ou dont le principal organe de gestion est composé, à plus de 50 %, par des personnes nommées par une ou plusieurs personnes morales de droit public locales soumises au Code de la démocratie locale et de la décentralisation.

B.8.3. Un tel critère de rattachement permet de localiser l'application des dispositions décrétales dans la sphère de compétence territoriale de la Région wallonne. En effet, les dispositions attaquées ont essentiellement pour objet de resserrer les rapports entre ces sociétés et les personnes morales de droit public locales dont elles sont l'émanation ou dont elles dépendent, de manière à permettre l'exercice d'un contrôle de ces sociétés par ces personnes morales ou par la Région wallonne, qui exerce la tutelle sur ces dernières. La personne morale de droit public locale, soumise au Code de la démocratie locale et de la décentralisation et donc nécessairement située sur le territoire de la Région wallonne, qui contrôle l'actionnariat de la société visée par les dispositions attaquées constitue un critère de rattachement territorial pertinent.

B.8.4. Par ailleurs, limiter le champ d'application des dispositions attaquées aux seules sociétés dont le siège social est situé sur le territoire de la Région wallonne aurait pour conséquence de faire échapper aux contrôles que le législateur décrétal entendait organiser toutes les sociétés contrôlées par une ou plusieurs personnes morales de droit public locales soumises au Code de la démocratie locale et de la décentralisation dont le siège social serait localisé dans une autre région du pays.

B.8.5. Toutefois, le système de la répartition exclusive des compétences territoriales suppose que chaque situation puisse être rattachée à la réglementation adoptée par un seul et même législateur.

En l'espèce, le législateur décrétal a prévu, au point c) de la définition de la « société à participation publique locale significative », deux critères de rattachement alternatifs, à savoir, d'une part, l'identité des personnes détenant la majorité du capital et, d'autre part, l'identité des personnes procédant à la nomination de la majorité des membres du principal organe de gestion. En retenant deux critères de rattachement différents et alternatifs, le législateur décrétal crée une situation dans laquelle il n'exclut pas, dans l'hypothèse où un autre législateur décrétal prendrait une réglementation similaire prévoyant les deux mêmes critères de rattachement alternatifs, qu'une même situation soit réglée par deux normes législatives prises par des législateurs différents.

Eu égard à l'objet du décret attaqué, qui est de favoriser la transparence des opérations réalisées et des décisions prises à l'aide des fonds investis par des personnes morales de droit public locales dans des sociétés de droit privé, il y a lieu de privilégier le critère relatif à la détention de la majorité du capital de la société par rapport au critère de la nomination de la majorité des membres de son principal organe de gestion.

B.9. Le premier moyen est fondé dans cette mesure. Il y a lieu d'annuler, dans les articles L1532-5 et L5111-1, 10°, du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, tel qu'ils ont été respectivement remplacés par les articles 35 et 47 du décret attaqué, respectivement, les mots « ou atteigne plus de cinquante pourcents des membres du principal organe de gestion, » et « ou désignent plus de cinquante pourcents des membres du principal organe de gestion ».

Quant à l'avis conforme de l'intercommunale « mère », à la tutelle administrative ordinaire et à la possibilité de désigner un commissaire spécial B.10.1. L'article 35 du décret attaqué remplace l'article L1532-5 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation par la disposition suivante : « Art. L1532-5. La filiale d'une intercommunale, ainsi que toutes les sociétés dans lesquelles une intercommunale ou une filiale de celle-ci ont une participation, à quelque degré que ce soit, pour autant que la participation totale, détenue seule ou conjointement, directement ou indirectement, des communes, provinces, C.P.A.S., intercommunales, régies communales ou provinciales autonomes, ASBL communales ou provinciales, associations de projet, associations de pouvoirs publics visées à l'article 118 de la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'action sociale, sociétés de logement ou personne morale ou association de fait associant plusieurs des autorités précitées soit supérieure à cinquante pourcents du capital ou atteigne plus de cinquante pourcents des membres du principal organe de gestion, transmettent au conseil d'administration de l'intercommunale les projets de décision relatifs aux prises ou retrait de participation dans toute personne morale de droit public ou privé, aux cessions de branches d'activités et d'universalités ainsi qu'aux rémunérations relevant de l'assemblée générale ou du principal organe de gestion.

Le conseil d'administration de l'intercommunale dispose d'un délai de trente jours pour rendre un avis conforme.

Les sociétés concernées mettent leur statut en conformité avec le présent article. A défaut, l'intercommunale se retire du capital de la société ».

En conséquence de l'annulation partielle de cette disposition, comme il est dit en B.9, il y a lieu d'omettre les mots « ou atteigne plus de cinquante pourcents des membres du principal organe de gestion » dans son alinéa 1er.

B.10.2. L'article 44 du décret attaqué insère, dans l'article L3111-1, § 1er, du même Code, qui établit la liste des organismes soumis à la tutelle administrative ordinaire de la Région wallonne, un 8°, rédigé comme suit : « 8° sur une société à participation publique locale significative, telle que définie à l'article L5111-1, alinéa 1er, 10° ».

Il en découle que les sociétés à participation publique locale significative sont, dès l'entrée en vigueur de cette disposition, soumises à la tutelle administrative ordinaire exercée par la Région wallonne.

B.10.3. L'article 45 du décret attaqué remplace l'article L3116-1 du même Code par la disposition suivante : « L'autorité de tutelle peut, par arrêté, désigner un commissaire spécial lorsqu'une personne morale de droit public ou un organisme visé à l'article L3111-1, § 1er, lèse l'intérêt général, reste en défaut de fournir les renseignements et éléments demandés, ou de mettre en exécution les mesures prescrites par les lois, décrets, arrêtés, règlements ou statuts ou par une décision de justice coulée en force de chose jugée. Le commissaire spécial est habilité à prendre toutes les mesures nécessaires en lieu et place de l'autorité défaillante, dans les limites du mandat qui lui a été donné par l'arrêté qui le désigne ».

En ce qui concerne la compétence fédérale en matière de droit des sociétés B.11. Le deuxième moyen est pris de la violation de l'article 39 de la Constitution et des articles 6, § 1er, VI, alinéa 5, 5°, et 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.

L'article 6, § 1er, VI, alinéa 5, de la loi spéciale du 8 août 1980 dispose : « L'autorité fédérale est, en outre, seule compétente pour : [...] 5° le droit commercial et le droit des sociétés; [...] ».

B.12.1. Les articles 61, § 1er, 63, 64, 521, 522, 527 et 531 du Code des sociétés, cités par la partie requérante, établissent diverses règles relatives aux organes des sociétés, à la validité des actes adoptés par ceux-ci, aux pouvoirs du conseil d'administration, à la responsabilité des membres du conseil d'administration et aux pouvoirs de l'assemblée générale des actionnaires.

Le Code des sociétés est abrogé par la loi du 23 mars 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 23/03/2019 pub. 04/04/2019 numac 2019040586 source service public federal justice Loi introduisant le Code des sociétés et des associations et portant des dispositions diverses fermer « introduisant le Code des sociétés et des associations et portant des dispositions diverses ». En vertu de l'article 39 de cette loi, le nouveau Code des sociétés et des associations est applicable à partir du 1er janvier 2020. Les articles 2.41, 2.42, 2.49, 2.56, 7.85, 7.93, 7.95, 7.98 et 7.124 du Code des sociétés et des associations établissent des dispositions semblables aux dispositions du Code des sociétés qui sont citées par la partie requérante.

B.12.2. En soumettant certains actes des filiales d'intercommunales à l'avis conforme de l'intercommunale « mère » et en prévoyant une tutelle administrative sur les sociétés à participation publique locale significative ainsi que la possibilité de désigner un commissaire spécial dans certains cas de défaillance, les dispositions attaquées règlent un aspect de la matière du droit des sociétés, laquelle ressortit à la compétence de l'autorité fédérale.

A cet égard, il importe peu que, par les dispositions attaquées, le législateur décrétal n'empêche pas l'application des dispositions du Code des sociétés qui sont citées dans le moyen, mais prévoie davantage de contrôles sur certaines sociétés. En effet, ce faisant, les dispositions attaquées modifient la réglementation relative à la prise de certaines décisions au sein des sociétés concernées et ont donc une incidence sur les pouvoirs des organes de ces sociétés. Il en découle que les dispositions attaquées ressortissent à la matière du droit des sociétés.

B.13.1. La Cour doit encore examiner si les conditions d'application de l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles sont remplies.

Cette disposition autorise notamment la Région wallonne à prendre un décret réglant une matière fédérale, pour autant que cette disposition soit nécessaire à l'exercice de ses compétences, que cette matière se prête à un règlement différencié et que son incidence sur la matière fédérale ne soit que marginale.

B.13.2. Le législateur décrétal a pu considérer qu'il était nécessaire de prendre les dispositions attaquées, en vue de renforcer la bonne gouvernance et la transparence au sein des structures locales sur lesquelles il exerce la tutelle. Sans ces dispositions en effet, certaines structures revêtant la forme de sociétés de droit privé, directement ou indirectement financées et contrôlées par les pouvoirs publics locaux, échappent à un contrôle adéquat et effectif de la part des pouvoirs publics. Il peut être admis qu'en vue d'exercer correctement sa compétence en matière d'associations de provinces, de collectivités supracommunales et de communes dans un but d'utilité publique (article 6, § 1er, VIII, alinéa 1er, 8°, de la loi spéciale du 8 août 1980), le législateur décrétal, prenant connaissance de certaines situations considérées comme étant incompatibles avec les règles de bonne gouvernance et de transparence qu'il entendait imposer au niveau local, a estimé qu'il était nécessaire de prendre les dispositions attaquées.

B.13.3. En prévoyant que les projets de décision relatifs aux prises ou aux retraits de participation dans toute personne morale de droit public ou privé, aux cessions de branches d'activités et d'universalités, ainsi qu'aux rémunérations relevant de l'assemblée générale ou du principal organe de gestion font l'objet d'un avis conforme de la part de l'intercommunale dont la société concernée est une filiale, l'article 35 du décret attaqué ne porte pas atteinte au principe selon lequel les organes de la société sont responsables des décisions qu'ils prennent. Il en va de même en ce qui concerne l'article 44 du décret attaqué, qui prévoit la tutelle administrative générale sur les actes des sociétés à participation publique locale significative, et en ce qui concerne l'article 45 du décret attaqué, qui prévoit l'intervention, dans certaines hypothèses, d'un commissaire spécial, en lieu et place des organes de la société. Ces dispositions n'ont pas pour conséquence de décharger les organes de la société de leur responsabilité, mais, dès lors qu'elles prévoient des contrôles supplémentaires sur les décisions prises par le conseil d'administration, elles ont pour effet de limiter les pouvoirs de celui-ci, qui peut se trouver empêché d'adopter certaines décisions.

Ces dispositions décrétales portent sur des aspects du droit des sociétés qui se prêtent donc à un règlement différencié, puisque les sociétés visées qui se voient imposer des contraintes et des contrôles supplémentaires ne sont pas empêchées de satisfaire, par ailleurs, à la réglementation relative à la responsabilité assumée par les organes des sociétés de droit privé.

B.13.4. Enfin, les dispositions attaquées ne s'appliquent qu'aux sociétés de droit privé dont le capital est constitué, à plus de 50%, directement ou indirectement par des participations des personnes morales de droit public qu'elles énumèrent, de sorte que leur incidence sur la matière du droit des sociétés est marginale, eu égard au nombre de personnes morales de droit privé soumises au droit des sociétés.

B.14. Il découle de ce qui précède que les dispositions attaquées sont conformes aux règles répartitrices de compétences visées dans le moyen.

Le moyen n'est pas fondé.

En ce qui concerne la compétence fédérale relative au droit de l'assurance B.15. Le troisième moyen est pris de la violation de l'article 39 de la Constitution et des articles 6, § 1er, VI, alinéa 5, 2°, et 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.

L'article 6, § 1er, VI, alinéa 5, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles dispose : « L'autorité fédérale est, en outre, seule compétente pour : [...] 2° la politique financière et la protection de l'épargne, en ce compris la réglementation et le contrôle des établissements de crédit et autres institutions financières et des entreprises d'assurances et assimilées, des sociétés de portefeuille et des fonds communs de placement, le crédit hypothécaire, le crédit à la consommation, le droit bancaire et de l'assurance, ainsi que la constitution et la gestion de ses institutions publiques de crédit; [...] ».

B.16.1. Par la loi du 13 mars 2016Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/03/2016 pub. 23/03/2016 numac 2016011092 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie Loi relative au statut et au contrôle des entreprises d'assurance ou de réassurance fermer « relative au statut et au contrôle des entreprises d'assurance ou de réassurance » (ci-après : la loi du 13 mars 2016Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/03/2016 pub. 23/03/2016 numac 2016011092 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie Loi relative au statut et au contrôle des entreprises d'assurance ou de réassurance fermer), le législateur fédéral règle, « dans l'objectif de garantir la protection des preneurs d'assurance, des assurés et des bénéficiaires de contrats et d'opérations d'assurance, et d'assurer la solidité et le bon fonctionnement du système financier, en particulier, l'établissement, l'activité et le contrôle des entreprises d'assurance ou de réassurance opérant en Belgique, en ce compris certaines modalités et conditions inhérentes aux contrats et opérations d'assurance ou de réassurance » (article 3). Cette loi organise notamment le contrôle des entreprises d'assurances par la Banque nationale de Belgique.

L'article 44 de la loi du 13 mars 2016Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/03/2016 pub. 23/03/2016 numac 2016011092 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie Loi relative au statut et au contrôle des entreprises d'assurance ou de réassurance fermer dispose que « l'organe légal d'administration assume la responsabilité finale de l'entreprise d'assurance ou de réassurance ». Au sein de cet organe sont constitués les comités d'audit, de rémunération et des risques (article 48). Les membres de ces comités doivent disposer des connaissances, des compétences, de l'expérience et des aptitudes définies par la loi (articles 49 à 51).

B.16.2. La loi du 13 mars 2016Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/03/2016 pub. 23/03/2016 numac 2016011092 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie Loi relative au statut et au contrôle des entreprises d'assurance ou de réassurance fermer transpose notamment la directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 « sur l'accès aux activités de l'assurance et de la réassurance et leur exercice », dite « solvabilité II », laquelle dispose, en son article 27, en ce qui concerne le contrôle exercé sur les entreprises d'assurances, que « les Etats membres veillent à ce que les autorités de contrôle disposent des moyens nécessaires et possèdent l'expertise, la capacité et le mandat appropriés, pour atteindre le principal objectif assigné au contrôle, qui consiste à garantir la protection des preneurs et des bénéficiaires ».

Par ailleurs, en application de l'article 42, paragraphe 1, de la directive précitée, toutes les personnes qui dirigent effectivement une entreprise d'assurances ou qui occupent d'autres fonctions-clés doivent en permanence satisfaire à des exigences en ce qui concerne leurs qualifications, connaissances et expérience professionnelles, ainsi que leur réputation et leur intégrité.

B.17. En soumettant certains actes des filiales d'intercommunales qui sont des entreprises d'assurances à l'avis conforme de l'intercommunale « mère » et en prévoyant une tutelle administrative sur les sociétés à participation publique locale significative qui sont des entreprises d'assurances, ainsi que la possibilité de désigner un commissaire spécial dans certains cas de défaillance, les articles 35, 44 et 45 attaqués concernent la matière de la réglementation et du contrôle des entreprises d'assurances, matière qui ressortit à la compétence de l'autorité fédérale.

B.18.1. La Cour doit encore examiner si les conditions d'application de l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 sont remplies.

Cette disposition autorise notamment la Région wallonne à prendre un décret réglant une matière fédérale, pour autant que cette disposition soit nécessaire à l'exercice de ses compétences, que cette matière se prête à un règlement différencié et que son incidence sur la matière fédérale ne soit que marginale.

B.18.2. Les mesures prises par le législateur fédéral en matière de contrôle des entreprises d'assurances, en exécution, notamment, de la transposition de la directive 2009/138/CE, dite « Solvabilité II », ne sauraient être écartées au profit d'autres mécanismes de contrôle instaurés par les législateurs décrétaux à l'égard de certaines entreprises d'assurances, en fonction de la composition de leur actionnariat. Singulièrement, le contrôle exercé par la Banque nationale de Belgique en vertu de la loi du 13 mars 2016Documents pertinents retrouvés type loi prom. 13/03/2016 pub. 23/03/2016 numac 2016011092 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie Loi relative au statut et au contrôle des entreprises d'assurance ou de réassurance fermer en vue de garantir la protection des preneurs d'assurance, des assurés et des bénéficiaires de contrats, ainsi que d'assurer la solidité et le bon fonctionnement du système financier ne saurait entrer en concurrence avec d'autres mécanismes de contrôle exercés par une intercommunale « mère » ou par une autorité de tutelle et ayant d'autres finalités, dès lors qu'il pourrait en résulter, pour la société d'assurances soumise à différents mécanismes de contrôle concurrents, une impossibilité de satisfaire simultanément aux décisions ou injonctions des différentes autorités de contrôle.

Il en découle que la matière du contrôle des entreprises d'assurances ne se prête pas à un règlement différencié, de sorte que l'empiétement de compétences sur la matière du contrôle des entreprises d'assurances ne saurait être justifié sur la base de l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980.

B.19. Le troisième moyen est fondé. Les dispositions attaquées violent les articles 6, § 1er, VI, alinéa 5, 2°, et 10 de la loi spéciale du 8 août 1980. En conséquence, il y a lieu d'annuler les articles 35, 44 et 45 du décret attaqué, mais uniquement en ce qu'ils s'appliquent aux entreprises d'assurances.

Quant à la « fonction dirigeante locale », aux plafonds de rémunération, aux clauses de non-concurrence et aux dispositions relatives à la fin du contrat de travail B.20.1. L'article 47 du décret attaqué remplace l'article L5111-1 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation. Cette disposition définit la notion de « fonction dirigeante locale » dans les termes suivants : « 7° fonction dirigeante locale : la personne occupant la position hiérarchique la plus élevée, sous contrat de travail ou sous statut dans une intercommunale, une association de pouvoirs publics visées à l'article 118 de la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'action sociale, une régie communale ou provinciale autonome, une A.S.B.L. communale ou provinciale, une association de projet, une société de logement, une société à participation publique locale significative ».

B.20.2. L'article 56 du décret attaqué insère, dans le Code de la démocratie locale et de la décentralisation, un article L5321-1 qui établit des plafonds de rémunération en ce qui concerne les titulaires de mandats locaux. Cette disposition contient un paragraphe 6, ainsi rédigé : « Le montant annuel maximal brut de la rémunération du titulaire de la fonction dirigeante locale ne peut pas être supérieur au montant qui figure en annexe 4 ».

L'article 82 du décret attaqué insère l'annexe 4 dans le même Code. En application de ce texte, le montant annuel maximal brut de la rémunération du titulaire de la fonction dirigeante d'une société à participation publique locale significative est de 245 000 euros indexés, et aucun autre membre du personnel ne peut percevoir une rémunération qui dépasse cette rémunération.

B.20.3. L'article 76 du décret attaqué insère dans le Code de la démocratie locale et de la décentralisation un article L6434-1, § 4, qui dispose : « Si le titulaire de la fonction dirigeante locale exerce ses fonctions dans le cadre d'un contrat de travail, une clause de non-concurrence peut être insérée avant la fin des relations contractuelles ou au moment de la rupture en respect des conditions fixées par la loi du 3 juillet 1978Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/07/1978 pub. 03/07/2008 numac 2008000527 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail Coordination officieuse en langue allemande type loi prom. 03/07/1978 pub. 12/03/2009 numac 2009000158 source service public federal interieur Loi relative aux contrats de travail fermer relative aux contrats de travail, notamment [eu] égard à l'activité de l'organisme concerné.

Une convention de non-concurrence peut être conclue après la fin des relations contractuelles eu égard à l'activité de l'organisme concerné.

Dans tous les cas, la clause de non-concurrence est prévue pour une période de six mois maximum. L'indemnité perçue à ce titre n'est pas supérieure à la rémunération de base pour la moitié de la période de non-concurrence prévue ».

En ce qui concerne la compétence fédérale en matière de droit du travail et de sécurité sociale B.21. La partie requérante prend un quatrième moyen de la violation, par les dispositions précitées, des articles 39 et 134 de la Constitution et des articles 6, § 1er, VI, alinéa 5, 12°, 6, § 1er, VIII, et 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.

L'article 6, § 1er, VI, alinéa 5, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles dispose : « L'autorité fédérale est, en outre, seule compétente pour : [...] 12° le droit du travail et la sécurité sociale ». B.22. Les dispositions attaquées limitent la rémunération du titulaire de la fonction dirigeante des sociétés à participation publique locale significative ainsi que de tous les autres membres du personnel de ces sociétés et permettent l'insertion d'une clause de non-concurrence limitée dans le contrat de travail du titulaire de la fonction dirigeante. Elles règlent ainsi des aspects de droit du travail qui ressortissent à la compétence de l'autorité fédérale.

B.23.1. La Cour doit encore examiner si les conditions d'application de l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980, telles qu'elles sont mentionnées en B.18.1, sont remplies.

B.23.2. Il ressort de l'exposé des motifs du décret attaqué que le législateur décrétal a jugé nécessaire de « renforcer la responsabilité personnelle des mandataires, qu'ils soient élus ou désignés dans des structures locales, supra-locales ou dans leurs filiales » et de développer des « règles plus strictes [...] afin d'éviter tout abus ». L'encadrement plus strict des rémunérations et le plafonnement de la rémunération attribuée à la fonction dirigeante locale font partie de ces règles destinées à éviter les abus (Doc. parl., Parlement wallon, 2017-2018, n° 1047/1, p. 3).

B.24.1. Le législateur décrétal a pu estimer nécessaire, en vue d'atteindre les objectifs qu'il poursuivait en matière de bonne gouvernance et de transparence au sein des structures locales sur lesquelles il exerce la tutelle, de prendre les dispositions attaquées. En effet, il lui revient de garantir la saine gestion des sociétés dont le capital est constitué à plus de 50% par des moyens publics. Ayant constaté l'existence de situations incompatibles avec la politique qu'il entend mener en cette matière, il a pu prendre les dispositions qui s'imposaient, en vue de corriger ces situations et de prévenir leur réapparition.

B.24.2. Le plafonnement des rémunérations dans certaines sociétés et la possibilité d'insérer une clause de non-concurrence limitée ne portent pas atteinte aux éléments essentiels de la réglementation fédérale en ce qui concerne les contrats de travail, de sorte qu'il peut être admis que les dispositions attaquées règlent des éléments du droit du travail qui se prêtent à un règlement différencié.

B.24.3. Enfin, l'incidence des dispositions attaquées sur la compétence fédérale en matière de droit du travail est marginale, dès lors que seule une catégorie bien spécifique de sociétés est concernée par l'application des dispositions décrétales attaquées.

B.25. Le quatrième moyen n'est pas fondé.

Quant au principe d'égalité et de non-discrimination B.26. Le cinquième moyen est pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec l'article 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, avec les articles 8 et 11 de la Convention européenne des droits de l'homme, avec l'article 27 de la Constitution, avec l'article 7 du décret d'Allarde et avec les articles II.3 et II.4 du Code de droit économique, avec les articles 16 et 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, avec les libertés de circulation consacrées par les articles 28, 45, 49, 54 et 56 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et avec l'article 133 de la directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 « sur l'accès aux activités de l'assurance et de la réassurance et leur exercice (solvabilité II) (refonte) ». Ce moyen vise les articles 7, 9, 31, 35, 38 à 41, 44, 45, 47 à 49, 51, 52, 62, 67 à 80 du décret attaqué.

Ce moyen est décliné en quatre branches par lesquelles la Cour est invitée à comparer la situation des sociétés soumises aux dispositions attaquées avec la situation des autres sociétés d'assurances qui n'y sont pas soumises (première branche), avec la situation des sociétés détenues, directement ou indirectement, par la Région wallonne ou par les personnes publiques qui en sont l'émanation (deuxième branche), avec la situation des sociétés d'assurances qui seraient détenues par la Région wallonne ou par les personnes publiques qui en sont l'émanation (troisième branche) et avec les organismes de financement de pensions créés sur la base de la loi du 27 octobre 2006Documents pertinents retrouvés type loi prom. 27/10/2006 pub. 10/11/2006 numac 2006023149 source service public federal securite sociale Loi relative au contrôle des institutions de retraite professionnelle fermer « relative au contrôle des institutions de retraite professionnelle » (quatrième branche).

B.27. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée.

L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité et de non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.

B.28.1. Compte tenu de l'annulation partielle de cette disposition, comme il est dit en B.9, l'article L1532-5 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, remplacé par l'article 35 attaqué, est applicable aux sociétés dans lesquelles une intercommunale ou une filiale d'une intercommunale a une participation et dont le capital est détenu à plus de 50%, directement ou indirectement, par des communes, provinces, CPAS, intercommunales, régies communales ou provinciales autonomes, ASBL communales ou provinciales, associations de projet, associations de pouvoirs publics visées à l'article 118 de la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'action sociale, sociétés de logement ou personne morale ou association de fait associant plusieurs des autorités précitées, seules ou conjointement.

Les autres dispositions attaquées sont applicables aux sociétés à participation publique locale significative, définies à l'article L5111-1, 10°, du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, inséré par l'article 47 du décret attaqué, comme étant, compte tenu de l'annulation partielle de cette disposition, comme il est dit en B.9, les sociétés dont le capital est détenu à plus de 50%, directement ou indirectement, par des « communes, provinces, CPAS, intercommunales, régies communales ou provinciales autonomes, associations de projet, associations de pouvoirs publics visées à l'article 118 de la loi du 8 juillet 1976Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/07/1976 pub. 18/04/2016 numac 2016000231 source service public federal interieur Loi organique des centres publics d'action sociale. - Coordination officieuse en langue allemande de la version applicable aux habitants de la région de langue allemande fermer organique des centres publics d'action sociale, sociétés de logement ou personne morale ou association de fait associant plusieurs des autorités précitées[,] seules ou conjointement avec la Région wallonne, un organisme visé à l'article 3, § 1er à § 7, alinéa 1er, du décret du 12 février 2004 relatif au statut de l'administrateur public pour les matières réglées en vertu de l'article 138 de la Constitution ».

B.28.2. Les différences de traitement critiquées dans le moyen reposent sur le critère de la provenance des fonds investis dans la société concernée. Les dispositions attaquées sont applicables lorsque l'actionnariat de la société est constitué pour plus de la moitié, directement ou indirectement, d'une ou de plusieurs des autorités publiques locales énumérées à l'article L1532-5 ou à l'article L5111-1, 10°, du Code de la démocratie locale et de la décentralisation.

Ce critère est objectif. La Cour doit examiner s'il est pertinent eu égard à l'objet des dispositions attaquées et à l'objectif poursuivi par le législateur décrétal.

B.29.1. Les dispositions attaquées créent des incompatibilités à l'égard des titulaires des fonctions dirigeantes dans les sociétés concernées (articles 7, 9, 31, 38 à 41 et 62) et leur imposent d'effectuer certaines déclarations (articles 48 et 49), de sorte qu'elles limitent les possibilités de recrutement pour ces fonctions.

Elles établissent un certain nombre de contraintes limitant le pouvoir décisionnel des organes de gestion des sociétés concernées, en ce qui concerne les prises ou les retraits de participation dans d'autres personnes morales de droit public ou privé, les cessions de branches d'activités et d'universalités (article 35), les rémunérations, rétributions et avantages en nature octroyés aux membres du principal organe de gestion et aux membres du personnel (article 52). Elles soumettent les sociétés à participation publique locale significative à la tutelle ordinaire exercée par la Région wallonne (article 44) et permettent à l'autorité de tutelle de désigner un commissaire spécial qui est habilité à prendre, dans certaines circonstances, toutes les mesures nécessaires en lieu et place de l'autorité (de la société) considérée défaillante (article 45). Enfin, elles leur imposent des règles en matière de gouvernance et de transparence (articles 67 à 80).

B.29.2. L'exposé des motifs du décret attaqué indique que ce dernier traduit les recommandations formulées par la Commission d'enquête parlementaire chargée d'examiner la transparence et le fonctionnement du Groupe PUBLIFIN dans son rapport du 6 juillet 2017. Le législateur décrétal a considéré que la transposition des recommandations énoncées dans ce rapport dans des outils juridiques wallons était d'intérêt général. Afin de mettre un terme à des situations que le législateur décrétal considérait comme incompatibles avec sa politique en matière de gouvernance et de transparence au sein des structures locales, supra-locales ou dans leurs filiales, et de prévenir leur réapparition, il a estimé qu'il était indispensable d'étendre « considérablement le périmètre des organismes et des mandataires visés par les dispositions du Code de la démocratie locale et dès lors, par l'exercice de la tutelle et le contrôle de la Direction de contrôle des mandats locaux » (Doc. parl., Parlement wallon, 2017-2018, n° 1047/1, p. 3).

B.30.1. Au regard de cet objectif, le critère de distinction entre les sociétés soumises aux dispositions attaquées et celles qui ne le sont pas est pertinent, puisqu'il permet aux autorités régionales et locales d'exercer un contrôle sur les sociétés privées qui sont l'émanation de personnes morales de droit public locales elles-mêmes soumises au contrôle des autorités régionales. Il est en effet permis de considérer qu'une société de droit privé dont le capital est constitué, à plus de 50%, directement ou indirectement, de fonds d'origine publique, est une émanation des personnes morales de droit public locales qui la constituent et qu'elle peut, à ce titre, être soumise à des contrôles exercés par les autorités publiques.

B.30.2. Par ailleurs, en ce qui concerne la comparaison entre les sociétés auxquelles les dispositions attaquées sont applicables et les sociétés détenues, directement ou indirectement, par la Région wallonne ou par les personnes publiques qui en sont l'émanation, il s'impose de relever que, par deux décrets pris le même jour que le décret attaqué (décret du 29 mars 2018 « modifiant les décrets [du] 12 février 2004 relatif au statut de l'administrateur public et du 12 février 2004 relatif aux commissaires du Gouvernement et aux missions de contrôle des réviseurs au sein des organismes d'intérêt public, visant à renforcer la gouvernance et l'éthique au sein des organismes wallons » et décret du 29 mars 2018 « modifiant les décrets [du] 12 février 2004 relatif au statut de l'administrateur public pour les matières réglées en vertu de l'article 138 de la Constitution et du 12 février 2004 relatif aux commissaires du Gouvernement et aux missions de contrôle des réviseurs au sein des organismes d'intérêt public pour les matières réglées en vertu de l'article 138 de la Constitution, visant à renforcer la gouvernance et l'éthique au sein des organismes wallons »), le législateur décrétal a également entendu assurer la bonne gouvernance et la transparence au sein des personnes morales contrôlées par la Région wallonne. Sans qu'il soit nécessaire de comparer précisément les dispositions applicables aux sociétés contrôlées par les pouvoirs publics locaux et celles qui sont applicables aux sociétés contrôlées par la Région, il suffit de constater que les différences entre ces dispositions sont justifiées par les natures différentes des pouvoirs publics participant à leur actionnariat.

B.31. Compte tenu de ce qu'en conséquence de l'annulation des articles 35, 44 et 45 attaqués, telle qu'elle est circonscrite en B.19, ces dispositions ne sont pas applicables aux sociétés d'assurances, les dispositions attaquées n'entraînent pas des effets disproportionnés pour les sociétés de droit privé concernées. En effet, les contraintes qu'elles imposent aux sociétés qui y sont soumises ont pour objectif de garantir la bonne gouvernance en leur sein, ce dont elles ne peuvent que tirer profit. Ces contraintes, qui requièrent, certes, une modification de l'organisation de la prise de certaines décisions, ne paraissent pas excessivement lourdes à mettre en oeuvre. Par ailleurs, les limitations imposées aux rémunérations ne paraissent pas déraisonnables et laissent une marge de négociation suffisante permettant le recrutement d'un personnel compétent et motivé.

B.32. Sans qu'il soit nécessaire de trancher la question de savoir si des personnes morales de droit privé contrôlées par les pouvoirs publics locaux peuvent se prévaloir de la liberté d'association garantie par l'article 27 de la Constitution, lu ou non en combinaison avec l'article 11 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, il suffit de constater qu'une limitation de cette liberté par les dispositions attaquées serait justifiée par l'objectif poursuivi par le législateur, qui a été rappelé en B.29.2.

B.33. Pour le surplus, la partie requérante ne démontre pas en quoi les autres normes de référence qu'elle cite dans le moyen seraient violées par les dispositions attaquées.

B.34. Le cinquième moyen n'est fondé en aucune de ses branches.

Par ces motifs, la Cour 1. décrète le désistement de la partie requérante dans l'affaire n° 7055;2. annule : - dans l'article L1532-5 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, remplacé par l'article 35 du décret de la Région wallonne du 29 mars 2018 « modifiant le Code de la démocratie locale et de la décentralisation en vue de renforcer la gouvernance et la transparence dans l'exécution des mandats publics au sein des structures locales et supra-locales et de leurs filiales », les mots « ou atteigne plus de cinquante pourcents des membres du principal organe de gestion »; - dans l'article L5111-1, 10°, du même Code, remplacé par l'article 47 du décret du 29 mars 2018 précité, les mots « ou désignent plus de cinquante pourcents des membres du principal organe de gestion »; - les articles L1532-5, L3111-1, § 1er, 8°, et L3116-1 du même Code, respectivement remplacés et insérés par les articles 35, 44 et 45 du même décret, mais uniquement en ce qu'ils s'appliquent aux entreprises d'assurances; 3. rejette le recours pour le surplus. Ainsi rendu en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 16 janvier 2020.

Le greffier, Le président, P.-Y. Dutilleux F. Daoût

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