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Arrêt
publié le 15 mars 2021

Extrait de l'arrêt n° 112/2020 du 27 juillet 2020 Numéro du rôle : 7335 En cause: les questions préjudicielles concernant les articles 87 et 89 du décret de la Communauté flamande du 15 février 2019 « sur le droit en matière de délinquance ju La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et F. Daoût, et des juges L. Lavrysen(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 112/2020 du 27 juillet 2020 Numéro du rôle : 7335 En cause: les questions préjudicielles concernant les articles 87 et 89 du décret de la Communauté flamande du 15 février 2019 « sur le droit en matière de délinquance juvénile » et les articles 7, 10 et 11 du décret de la Communauté flamande du 24 septembre 2019 « modifiant la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié d'infraction et à la réparation du dommage causé par ce fait et le décret du 15 février 2019 sur le droit en matière de délinquance juvénile, en ce qui concerne les dispositions transitoires », posées par le tribunal de la jeunesse du Tribunal de première instance d'Anvers, division Anvers.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et F. Daoût, et des juges L. Lavrysen, J.-P. Moerman, T. Giet, M. Pâques et Y. Kherbache, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président A. Alen, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par jugement du 28 novembre 2019, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 20 décembre 2019, le tribunal de la jeunesse du Tribunal de première instance d'Anvers, division Anvers, a posé les questions préjudicielles suivantes : « 1. Les articles 87 et 89 du décret du 15 février 2019 sur le droit en matière de délinquance juvénile violent-ils les articles 12 et 14 de la Constitution coordonnée, lus ou non en combinaison avec les articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en ce que le décret sur le droit en matière de délinquance juvénile est applicable aux faits commis par des mineurs avant la promulgation et l'entrée en vigueur du décret sur le droit en matière de délinquance juvénile ? 2. Les articles 7, 10 et 11 du décret du 24 septembre 2019 modifiant la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié d'infraction et à la réparation du dommage causé par ce fait et le décret du 15 février 2019 sur le droit en matière de délinquance juvénile, en ce qui concerne les dispositions transitoires violent-ils les articles 12 et 14 de la Constitution coordonnée, lus ou non en combinaison avec les articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en ce que les dispositions précitées du décret du 24 septembre 2019 instaurent, avec effet rétroactif au 1er septembre 2019, un régime sur la base duquel des personnes qui sont soupçonnées d'avoir commis, en tant que mineur, un fait punissable peuvent faire l'objet d'un dessaisissement, alors qu'un dessaisissement n'était pas possible sous l'empire de l'article 38 du décret du 15 février 2019 sur le droit en matière de délinquance juvénile ? ». (...) III. En droit (...) B.1. Les questions préjudicielles portent sur une décision de dessaisissement prise par le tribunal de la jeunesse.

Le dessaisissement est possible, à certaines conditions, si la personne déférée au tribunal de la jeunesse en raison d'un fait qualifié d'infraction était âgée de seize ans ou plus au moment de ce fait et si le tribunal de la jeunesse estime inadéquate une mesure de garde, de préservation ou d'éducation. Dans ce cas, le tribunal de la jeunesse peut, par décision motivée, se dessaisir et renvoyer l'affaire au ministère public aux fins de poursuite devant la juridiction compétente (article 57bis de la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer « relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié infraction et à la réparation du dommage causé par ce fait » (ci-après : la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer), tel qu'il était applicable au moment où les infractions dans l'affaire soumise au juge a quo ont été commises). La décision de dessaisissement n'est donc pas une décision quant au fond.

B.2. Le régime du dessaisissement a été modifié, pour la région de langue néerlandaise, par les dispositions en cause. Les questions préjudicielles portent plus précisément sur l'application dans le temps des règles modifiées.

B.3. Le décret de la Communauté flamande du 15 février 2019 « sur le droit en matière de délinquance juvénile » (ci-après : le décret du 15 février 2019) prévoit toujours la mesure du dessaisissement, mais en a renforcé les conditions d'application.

La condition qui est mise en cause devant le juge a quo concerne les mesures qui ont été imposées au mineur à un stade antérieur.

B.4. Avant le 1er septembre 2019, le tribunal de la jeunesse pouvait prendre une décision de dessaisissement si l'intéressé « [avait] déjà fait l'objet d'une ou de plusieurs mesures visées à l'article 37, § 2, § 2bis ou § 2ter ou d'une offre restauratrice telle que visée aux articles 37bis à 37quinquies » (article 57bis, § 1er, de la loi précitée du 8 avril 1965).

Les mesures visées couvrent un large spectre allant de l'avertissement au placement dans une institution communautaire pour la protection de la jeunesse.

B.5. L'article 38 du décret du 15 février 2019 dispose que le tribunal de la jeunesse ne peut prendre une décision de dessaisissement que si l'intéressé a déjà fait « l'objet d'une ou [de] plusieurs sanctions visées aux articles 35, 36 et 37 ».

Les articles 35, 36 et 37 du décret du 15 février 2019 portent sur l'orientation en milieu fermé (article 35) ou sur l'encadrement en milieu fermé (articles 36 et 37) dans une section d'une institution communautaire. Il s'agit de mesures qui tendent « à prendre, au cours de la procédure - et dans l'attente d'une décision quant au fond -, une mesure d'instruction ou une mesure de garde à l'égard d'un suspect qui est mineur » (Doc. parl., Parlement flamand, 2017-2018, n° 1670/1, p. 21). B.6. Le décret du 15 février 2019 est en grande partie entré en vigueur le 1er septembre 2019. L'article 89 en cause de ce décret prévoyait : « Sans préjudice des alinéas 2 et 3, le présent décret entre en vigueur le 1er septembre 2019.

Pour les articles 25, § 8, alinéas 3, 4 et 5, 32, alinéa 3, 33, alinéa 2, 34, § 1, alinéa 3, dans la mesure où la réaction de remplacement concerne le placement du délinquant mineur dans une division au sein d'une institution communautaire, créée pour les mineurs qui se voient imposer une réaction en application du présent décret, 26, 27, 35, 36, 37, à l'exception de 37, § 8, 39, 84, 85 et 86, le Gouvernement flamand fixe la date d'entrée en vigueur après avoir expressément établi que la conditionnalité pour l'application de ces articles a été réalisée. Ces articles entrent en vigueur le 1er septembre 2022 au plus tard.

L'article 37, § 8, entre en vigueur trois mois après la publication au Moniteur belge du dernier des actes d'assentiment de l'accord de coopération entre la Communauté flamande et l'Etat fédéral.

Lorsque le Gouvernement flamand, en vue de réaliser cette conditionnalité, accorde une aide à l'investissement conformément à la réglementation applicable, il peut également donner son accord au bénéficiaire de l'aide à l'investissement pour l'octroi des agréments et moyens de fonctionnement nécessaires au moment où l'infrastructure faisant l'objet de l'aide à l'investissement est mise en service ».

Ainsi, les mesures d'orientation et d'encadrement en milieu fermé n'entreront en vigueur « que si les conditions nécessaires ont été remplies, et ce eu égard à l'intérêt d'une transition prudente », et au plus tard le 1er septembre 2022 (Doc. parl., Parlement flamand, 2017-2018, n° 1670/1, p. 77).

L'article 89 précité a été modifié par l'article 10 du décret de la Communauté flamande du 24 septembre 2019 « modifiant la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié d'infraction et à la réparation du dommage causé par ce fait et le décret du 15 février 2019 sur le droit en matière de délinquance juvénile, en ce qui concerne les dispositions transitoires » (ci-après : le décret du 24 septembre 2019). Cet article 10 a ajouté l'article 38 à la liste des articles, mentionnés dans l'article 89, alinéa 2, qui entreront en vigueur ultérieurement.

B.7. L'article 87 du décret du 15 février 2019, également en cause, prévoyait : « § 1er. Une mesure provisoire ou une mesure ordonnée par le juge de la jeunesse ou le tribunal de la jeunesse en application de la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer qui est en exécution à la date d'entrée en vigueur du présent décret peut continuer à être exécutée.

Une affaire portée devant le juge de la jeunesse ou le tribunal de la jeunesse en application de la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, sur laquelle une décision a été prise à la date d'entrée en vigueur du présent décret mais qui n'est pas encore en exécution, est exécutée conformément à la décision prise.

Les règles mentionnées dans la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, ayant trait à l'exécution des mesures provisoires, des mesures et des décisions visées aux alinéas 1er et 2, sont applicables. § 2. Une affaire portée devant le juge de la jeunesse ou le tribunal de la jeunesse en application de la loi du 1er mars 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 01/03/2002 pub. 01/03/2002 numac 2002009204 source ministere de la justice Loi relative au placement provisoire de mineurs ayant commis un fait qualifié infraction fermer, sur laquelle une décision a été prise à la date d'entrée en vigueur du présent décret mais qui n'est pas encore en exécution, est exécutée conformément à la décision prise ».

Cette disposition a été modifiée par l'article 9 du décret du 24 septembre 2019. Cet article a ajouté au paragraphe 1er, alinéa 3, de l'article 87 du décret du 15 février 2019 le membre de phrase « , y compris la possibilité de révision prévue à l'article 60 de la loi précitée » et a aussi ajouté deux nouveaux paragraphes. Ainsi, « une transition opérationnelle vers les nouvelles conditions de dessaisissement est explicitée » (Doc. parl., Parlement flamand, 2019, n° 103/1, p.4). Les nouveaux paragraphes disposent : « § 3. Aux fins de la décision de dessaisissement visée à l'article 38, § 2, alinéa 2 du présent décret, le placement dans une institution publique communautaire, visé à l'article 37, § 2, 8° de la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer est assimilé aux sanctions visées aux articles 35, 36 et 37 du présent décret. § 4. Un placement ou un placement provisoire en régime éducatif fermé d'une institution publique communautaire, tels que visés respectivement aux articles 37, § 2quater, alinéa 2, et 52 de la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, peut être imposé en tant que mesure de remplacement visée à l'article 25, § 8, alinéas 3, 4 et 5, et aux articles 32, alinéa 3, 33, alinéa 3, et 34, § 1er, alinéa 3 du présent décret ».

B.8. Il découle des articles 87 et 89 du décret du 15 février 2019, avant leur modification par le décret du 24 septembre 2019, que le régime du dessaisissement modifié est entré en vigueur le 1er septembre 2019 et qu'à la suite de cette entrée en vigueur, le mineur convoqué devant le juge a quo n'entrait plus dans les conditions d'application d'un dessaisissement. A partir de la date précitée, le dessaisissement n'était, en règle, possible que si le mineur concerné avait déjà fait l'objet d'une orientation ou d'un encadrement en milieu fermé, mais ces deux mesures, ainsi qu'il est dit en B.6, ne sont pas encore entrées en vigueur.

B.9. Par sa première question préjudicielle, le juge a quo demande à la Cour si les articles 87 et 89 du décret du 15 février 2019 violent les articles 12 et 14 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec les articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en ce que le décret est applicable à des faits commis par des mineurs avant la promulgation dudit décret et son entrée en vigueur.

Compte tenu de la demande qui est à l'origine de la question préjudicielle, il convient de l'interpréter en ce sens qu'elle porte sur l'application immédiate du nouveau régime du dessaisissement.

B.10. Les articles 12 et 14 de la Constitution garantissent le principe de légalité en matière pénale. En vertu de ces dispositions, nul ne peut être poursuivi que dans les cas prévus par la loi et dans la forme qu'elle prescrit (article 12, alinéa 2, de la Constitution) et nulle peine ne peut être établie ni appliquée qu'en vertu de la loi (article 14 de la Constitution).

Il découle de ces dispositions que la loi pénale doit être formulée en des termes qui permettent à chacun de connaître, au moment où il adopte un comportement, si ce comportement est punissable ou non et la peine éventuellement encourue. Les principes de légalité et de prévisibilité sont applicables à l'ensemble de la procédure pénale.

En ce qu'ils exigent que tout délit soit prévu par la loi, l'article 7, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l'homme et l'article 15, paragraphe 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ont une portée analogue à celle de l'article 12, alinéa 2, de la Constitution. Les garanties fournies par ces dispositions forment dès lors, dans cette mesure, un tout indissociable.

B.11. La décision de dessaisissement n'est pas en soi une incrimination ou une peine : elle détermine le droit qui est applicable à un mineur ayant commis le fait qualifié d'infraction, à savoir le droit pénal plutôt que le droit en matière de délinquance juvénile. Etant donné que la décision de dessaisissement a pour effet que les poursuites sont menées selon le droit pénal commun et la procédure pénale de droit commun, la mesure a un rapport avec la procédure pénale.

Toutefois, l'exigence de prévisibilité de la procédure pénale contenue dans l'article 12, alinéa 2, de la Constitution ne s'oppose en principe pas à l'application immédiate des lois de compétence et de procédure en matière pénale (article 3 du Code judiciaire). En outre, la mesure de dessaisissement n'est nullement liée aux règles relatives à la démonstration de la faute d'une personne qui, en principe, ne peuvent pas être modifiées rétroactivement au détriment de cette personne (voir l'arrêt de la Cour n° 153/2018 du 8 novembre 2018, B.24.2).

B.12. Les articles 87 et 89 du décret du 15 février 2019 sont compatibles avec les articles 12 et 14 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en ce que le régime du dessaisissement modifié est applicable à des faits commis par des mineurs préalablement à la promulgation et à l'entrée en vigueur de ces règles. L'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ne confère pas une garantie plus large en la matière que les normes de contrôle précitées.

La première question préjudicielle appelle une réponse négative.

B.13. Comme il est déjà dit en B.6 et en B.7, le décret du 24 septembre 2019, également en cause, a modifié à nouveau le régime du dessaisissement, plus précisément pour permettre de poursuivre l'application de cette mesure au-delà du 1er septembre 2019, en attendant l'entrée en vigueur complète du décret du 15 février 2019.

Le décret du 24 septembre 2019 a été voté lors de la première séance plénière du Parlement flamand qui a suivi les élections du 26 mai 2019 (Ann., Parlement flamand, 2019-2020, 23 septembre 2019, séance plénière n° 1, pp. 26-27) et a été sanctionné et promulgué par le Gouvernement flamand un jour plus tard.

B.14. L'article 7, 1°, du décret du 24 septembre 2019 a rétabli l'article 57bis, § 1er, de la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, abrogé par le décret du 15 février 2019, dans la rédaction suivante : « § 1er. Si le suspect mineur était âgé d'au moins seize ans au moment où le délit de mineur est commis et que le tribunal de la jeunesse n'a pas jugé appropriés l'une des sanctions visées à l'article 29, § 2 du décret du 15 février 2019 sur le droit en matière de délinquance juvénile ou un placement au fond en régime éducatif ouvert ou fermé d'une institution publique communautaire, visé à l'article 37, § 2, 8°, il peut se dessaisir de l'affaire moyennant une décision motivée et la renvoyer devant le ministère public en vue de la poursuite devant soit, si l'intéressé est suspecté d'un délit ou d'un crime correctionnalisable, une chambre spéciale au sein du tribunal de la jeunesse qui applique le droit pénal et la procédure pénale de droit commun, s'il y a lieu, soit, si l'intéressé est suspecté d'avoir commis un crime non correctionnalisable, une cour d'assises composée conformément à l'article 119, alinéa 2, du Code judiciaire, s'il y a lieu.

Le tribunal de la jeunesse ne peut toutefois décider du dessaisissement que lorsque l'une des conditions suivantes est également remplie : 1° l'intéressé a déjà fait l'objet d'une ou plusieurs mesures visées à l'article 37, § § 2, 2bis ou 2ter, d'une offre restauratrice telle que visée aux articles 37bis à 37quinquies ou d'une sanction en vertu de l'article 29, § 2 du décret du 15 février 2019 sur le droit en matière de délinquance juvénile;2° le délit de mineur commis porte sur un fait visé aux articles 373, 375, 393 à 397, 400, 401, 417ter, 417quater, 468, 469, 470 et 471 à 475 du Code pénal ou une tentative de commettre un fait visé aux articles 393 à 397 du Code pénal.Le tribunal de la jeunesse peut également décider du dessaisissement lorsque le suspect mineur a commis un fait tel que visé aux articles 136bis, 136ter, 136quater, 136sexies, 137, 140 et 141 du Code pénal qui, s'il avait été commis par un majeur, serait passible d'une peine d'emprisonnement de cinq à dix ans ou d'une peine plus lourde.

La motivation est basée sur la personnalité de l'intéressé et de son entourage et sur le degré de maturité de l'intéressé.

La présente disposition peut être appliquée même si l'intéressé a atteint l'âge de dix-huit ans au moment du jugement. Dans ce cas il est assimilé à un mineur pour l'application du présent chapitre ».

B.15. L'article 10 du décret du 24 septembre 2019 a ajouté l'article 38 du décret du 15 février 2019 à la liste des articles, mentionnés dans l'article 89, alinéa 2, cité en B.6, qui entreront en vigueur ultérieurement. Aux termes de l'article 11 du décret du 24 septembre 2019, ce décret produit ses effets le 1er septembre 2019. Il en résulte que le régime du dessaisissement modifié n'est toutefois pas encore entré en vigueur le 1er septembre 2019.

B.16. Il découle des articles 7, 10 et 11 du décret du 24 septembre 2019 que l'entrée en vigueur le 1er septembre 2019 du régime du dessaisissement modifié a été annulée avec effet rétroactif et que le mineur qui est convoqué devant le juge a quo entre par conséquent à nouveau en considération pour un dessaisissement.

B.17. Par sa seconde question préjudicielle, le juge a quo demande à la Cour si les articles 7, 10 et 11 du décret du 24 septembre 2019 violent les articles 12 et 14 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec les articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en ce qu'ils instaurent avec effet rétroactif un régime sur la base duquel des personnes qui sont suspectées d'avoir commis une infraction en tant que mineur peuvent faire l'objet d'une décision de dessaisissement, alors qu'un dessaisissement n'était pas possible sous l'empire de l'article 38 du décret du 15 février 2019.

B.18. Comme il est dit en B.11, la décision de dessaisissement n'est pas en soi une peine, mais elle détermine le droit qui est applicable à un mineur ayant commis le fait qualifié d'infraction, à savoir le droit pénal au lieu du droit en matière de délinquance juvénile.

B.19. Les articles 7, 10 et 11 du décret du 24 septembre 2019 sont compatibles avec les articles 12 et 14 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, étant donné qu'ils ne relèvent pas du champ d'application de ces dispositions.

La seconde question préjudicielle appelle une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : Les articles 87 et 89 du décret de la Communauté flamande du 15 février 2019 « sur le droit en matière de délinquance juvénile » et les articles 7, 10 et 11 du décret de la Communauté flamande du 24 septembre 2019 « modifiant la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié d'infraction et à la réparation du dommage causé par ce fait et le décret du 15 février 2019 sur le droit en matière de délinquance juvénile, en ce qui concerne les dispositions transitoires » ne violent pas les articles 12 et 14 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec les articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Ainsi rendu en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 27 juillet 2020.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, A. Alen

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