Etaamb.openjustice.be
Arrêt
publié le 30 janvier 2004

Extrait de l'arrêt n° 166/2003 du 17 décembre 2003 Numéros du rôle : 2513 et 2515 En cause : les recours en annulation de la loi du 1 er mars 2002 relative au placement provisoire de mineurs ayant commis un fait qualifié infractio La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges L. François, P(...)

source
cour d'arbitrage
numac
2003202371
pub.
30/01/2004
prom.
--
moniteur
https://www.ejustice.just.fgov.be/cgi/article_body(...)
Document Qrcode

Extrait de l'arrêt n° 166/2003 du 17 décembre 2003 Numéros du rôle : 2513 et 2515 En cause : les recours en annulation de la loi du 1er mars 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 01/03/2002 pub. 01/03/2002 numac 2002009204 source ministere de la justice Loi relative au placement provisoire de mineurs ayant commis un fait qualifié infraction fermer relative au placement provisoire de mineurs ayant commis un fait qualifié infraction, introduits par l'a.s.b.l. Liga voor Mensenrechten, l'a.s.b.l. Ligue des droits de l'homme et l'a.s.b.l.

Défense des Enfants - International - Belgique, branche francophone (D.E.I. Belgique).

La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges L. François, P. Martens, R. Henneuse, M. Bossuyt, E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman et E. Derycke, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président A. Arts, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des recours et procédure a. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 23 août 2002 et parvenue au greffe le 26 août 2002, l'a.s.b.l. Liga voor Mensenrechten, dont le siège social est établi à 9000 Gand, Van Stopenberghestraat 2, a introduit un recours en annulation de la loi du 1er mars 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 01/03/2002 pub. 01/03/2002 numac 2002009204 source ministere de la justice Loi relative au placement provisoire de mineurs ayant commis un fait qualifié infraction fermer relative au placement provisoire de mineurs ayant commis un fait qualifié infraction (publiée au Moniteur belge du 1er mars 2002, troisième édition). b. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 31 août 2002 et parvenue au greffe le 2 septembre 2002, l'a.s.b.l.

Ligue des droits de l'homme, dont le siège social est établi à 1000 Bruxelles, rue de l'Enseignement 91, et l'a.s.b.l. Défense des Enfants - International - Belgique, branche francophone (D.E.I. Belgique), dont le siège social est établi à 1000 Bruxelles, rue du Marché aux Poulets 30, ont introduit un recours en annulation de la loi du 1er mars 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 01/03/2002 pub. 01/03/2002 numac 2002009204 source ministere de la justice Loi relative au placement provisoire de mineurs ayant commis un fait qualifié infraction fermer précitée.

Ces affaires, inscrites sous les numéros 2513 et 2515 du rôle de la Cour, ont été jointes.

Par les mêmes requêtes, les parties requérantes avaient également demandé la suspension de la loi précitée. Par arrêt no 167/2002 du 13 novembre 2002 (publié au Moniteur belge du 28 février 2003), la Cour a rejeté les demandes de suspension de la loi précitée. (...) II. En droit (...) B.1. La loi attaquée dispose : «

Art. 1er.La présente loi règle une matière visée à l'article 77 de la Constitution.

Art. 2.Les personnes visées à l'article 36, 4o, de la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à la protection de la jeunesse peuvent, selon le cas, être confiées par le tribunal de la jeunesse ou par le juge d'instruction, dans le cadre d'une mesure provisoire de protection sociétale, à un Centre de placement provisoire pour mineurs ayant commis un fait qualifié infraction, appelé ci-après : le Centre.

Art. 3.L'accès au Centre est limité aux garçons et est soumis aux conditions cumulatives suivantes, décrites de façon circonstanciée dans l'ordonnance du juge : 1o la personne est âgée de plus de quatorze ans au moment où le fait qualifié infraction a été commis et il existe suffisamment d'indices sérieux de culpabilité; 2o le fait qualifié infraction pour lequel elle est poursuivie est de nature, si elle était majeure, à entraîner, au sens du Code pénal ou des lois particulières une peine : a) de réclusion de cinq ans à dix ans ou une peine plus lourde, ou b) d'emprisonnement correctionnel principal d'un an ou une peine plus lourde si elle a précédemment fait l'objet d'une mesure définitive du tribunal de la jeunesse en raison d'un fait qualifié infraction puni de la même peine; 3o il existe des circonstances impérieuses, graves et exceptionnelles se rattachant aux exigences de protection de la sécurité publique; 4o l'admission, à titre de mesure provisoire, de la personne dans un établissement approprié prévu à l'article 37, § 2, 3o, juncto 52, de la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à la protection de la jeunesse, dans une institution publique prévue à l'article 37, § 2, 4o juncto 52, y compris dans une section d'éducation fermée, conformément aux dispositions de l'article 52quater de la même loi, est, en raison du manque de place, impossible.

Art. 4.La mesure provisoire de protection sociétale ne peut être prise que pour une durée aussi brève que possible et uniquement lorsque la finalité de la mesure provisoire ne peut être atteinte d'une autre manière.

Elle ne peut être prise dans le but d'exercer une répression immédiate ou une quelconque forme de contrainte.

Elle doit être exécutée dans le respect des dispositions des articles 37 et 40 de la Convention internationale des droits de l'enfant, dont le texte est remis à l'intéressé, contre accusé de réception, lors de son admission.

Art. 5.§ 1er. Le tribunal de la jeunesse décide, cinq jours après avoir rendu son ordonnance initiale, et ensuite chaque mois, soit le retrait, soit la modification, soit le maintien de la mesure, sans que ce dernier puisse excéder le délai total de deux mois. L'ordonnance de maintien comprend en même temps l'invitation à l'examen de l'affaire dans le délai suivant.

L'intéressé, son conseil et le ministère public sont à chaque fois entendus; les parents ou les personnes qui ont la garde de l'intéressé sont à chaque fois dûment convoqués. Si, au cours des deux mois et cinq jours, il est décidé d'appliquer la mesure provisoire prévue à l'article 52quater de la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à la protection de la jeunesse, la période écoulée est déduite de la première période visée à cet article 52quater, alinéa 1er. § 2. L'article 60, alinéa 1er, de la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à la protection de la jeunesse est intégralement d'application.

Art. 6.§ 1er. Pour les nécessités de l'information ou de l'instruction, le tribunal de la jeunesse ou le juge d'instruction peut, par ordonnance motivée, interdire l'intéressé de communiquer librement avec les personnes qu'il désigne nommément, à l'exception de son conseil, et ce pendant un délai de trois jours calendrier maximum. § 2. Le tribunal de la jeunesse ou le juge d'instruction peut, sur avis de la direction du Centre, et sous les conditions qu'il détermine, autoriser l'intéressé, par ordonnance motivée, à quitter l'établissement pour une durée qu'il détermine ou à avoir des contacts avec des tiers qu'il désigne.

Art. 7.§ 1er. Lorsque le fait qualifié infraction entraîne la mort, une maladie apparemment incurable, une incapacité physique ou mentale permanente, la perte complète de l'usage d'un organe ou une mutilation grave ou lorsque le fait qualifié infraction relève des infractions commises avec violence prévues au Chapitre V, Titre VII, Livre II, du Code pénal, les personnes lésées sont informées sans délai par le service accueil des victimes du parquet du procureur du Roi de chaque ordonnance du tribunal de la jeunesse ou du juge d'instruction contenant suppression ou modification de la mesure provisoire de protection sociétale ou autorisation de quitter brièvement le Centre. § 2. Lorsqu'un juge d'instruction est saisi, le tribunal de la jeunesse l'informe de la suppression ou de la modification de la mesure provisoire de protection sociétale ou de l'autorisation de quitter brièvement le Centre.

Art. 8.L'appel contre les ordonnances du tribunal de la jeunesse doit être interjeté dan un délai de quarante-huit heures qui court, à l'égard du ministère public, à compter de la communication de l'ordonnance et, à l'égard des autres parties au litige, à compter de l'accomplissement des formalités prévues à l'article 52ter, alinéa 4, de la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à la protection de la jeunesse.

La mesure prise est maintenue tant qu'elle n'a pas été modifiée par la juridiction d'appel.

Le recours peut être formé par l'intéressé par déclaration à la direction du Centre. Celle-ci inscrit le recours dans un registre coté et paraphé. Il en avise immédiatement le greffe du tribunal compétent et lui adresse un extrait du registre par lettre recommandée. La chambre de la jeunesse de la cour d'appel instruit la cause et se prononce dans les quinze jours ouvrables à compter de l'acte d'appel.

Passé ce délai, la mesure cesse d'être d'application. Le délai est suspendu pendant la durée de la remise accordée à la demande de la défense. Le délai de citation devant la cour est de trois jours.

Art. 9.En application de l'article 92bis, § 1er, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, inséré par la loi du 8 août 1988, un accord de coopération peut être conclu avec les Communautés en ce qui concerne l'apport d'accompagnement et d'encadrement pédagogique des personnes confiées au Centre ainsi que le droit disciplinaire et le droit de plainte qui sont d'application dans le Centre.

Art. 10.La présente loi entre en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge . Elle cessera d'être en vigueur le 31 octobre 2002, si un accord de coopération visé à l'article 9 n'est pas conclu à cette date. » Quant à l'intérêt des parties requérantes B.2.1. Lorsqu'une association sans but lucratif se prévaut d'un intérêt collectif, il est requis que son objet social soit d'une nature particulière et, dès lors, distinct de l'intérêt général; que cet intérêt ne soit pas limité aux intérêts individuels des membres; que la norme entreprise soit susceptible d'affecter l'objet social; enfin, qu'il n'apparaisse pas que l'objet social ne soit plus réellement poursuivi.

B.2.2. Le Gouvernement flamand conteste en substance que l'objet social des associations requérantes soit défavorablement affecté par la loi attaquée.

B.2.3. La loi attaquée vise à permettre, sous certaines conditions et dans certaines circonstances, le placement des mineurs d'âge dans un centre fermé.

B.2.4. L'objet social des parties requérantes est de combattre toute injustice et toute atteinte arbitraire aux droits d'un individu ou d'une collectivité et de défendre les principes d'égalité, de liberté et d'humanisme sur lesquels se fondent les sociétés démocratiques (partie requérante dans l'affaire no 2513 et première partie requérante dans l'affaire no 2515) et de faire progresser, protéger et défendre les droits de l'enfant dans tous les domaines, et tout particulièrement ceux qui figurent dans les déclarations et instruments internationaux (deuxième partie requérante dans l'affaire no 2515).

B.2.5. Sans qu'une telle définition de l'objet social d'une a.s.b.l. doive être prise à la lettre comme un moyen qu'elle se donne d'attaquer n'importe quelle norme sous le prétexte que toute norme a une incidence sur les droits de quelqu'un, il peut être admis qu'une mesure de privation de liberté, en particulier lorsqu'elle vise des mineurs d'âge, est de nature à pouvoir affecter défavorablement l'objet social des associations requérantes.

L'exception d'irrecevabilité est rejetée.

Quant aux moyens pris de la violation des règles répartitrices de compétences B.3.1. Le premier moyen dans les deux affaires est pris de la violation de l'article 5, § 1er, II, 6o, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles. En vertu de cette disposition, les communautés sont compétentes pour : « La protection de la jeunesse, en ce compris la protection sociale et la protection judiciaire, à l'exception : a) des règles du droit civil relatives au statut des mineurs et de la famille, telles qu'elles sont établies par le Code civil et les lois qui le complètent;b) des règles de droit pénal érigeant en infraction les comportements qui contreviennent à la protection de la jeunesse et établissant des peines qui punissent ces manquements, en ce compris les dispositions qui ont trait aux poursuites, sans préjudice de l'article 11;c) de l'organisation des juridictions de la jeunesse, de leur compétence territoriale et de la procédure devant ces juridictions;d) de la détermination des mesures qui peuvent être prises à l'égard des mineurs ayant commis un fait qualifié d'infraction;e) de la déchéance de l'autorité parentale et de la tutelle sur les prestations familiales ou autres allocations sociales.» B.3.2. Les communautés ont, en vertu de cette disposition, la plénitude de compétence pour régler la protection de la jeunesse dans la plus large acception du terme, sauf les exceptions qui y sont explicitement mentionnées.

B.3.3. En vertu de l'article 5, § 1er, II, 6o, d), précité, la « détermination des mesures qui peuvent être prises à l'égard des mineurs ayant commis un fait qualifié d'infraction » constitue l'une des exceptions pour lesquelles l'autorité fédérale est compétente.

Cette disposition d'exception est le résultat d'un amendement adopté par la commission compétente de la Chambre et qui visait à établir clairement que seule la détermination même des mesures pouvant être prises à l'égard des mineurs délinquants relevait de la compétence fédérale et non les établissements dans lesquels ces mesures sont exécutées (Doc. parl., Chambre, S.E. 1988, no 516/5, p. 4; Ann., Chambre, S.E. 1988, 28 juillet 1988, p. 1351).

B.3.4. Selon le Conseil des ministres, le Gouvernement flamand et le Gouvernement de la Communauté française, la loi attaquée n'a pas été adoptée en vertu de la disposition dérogatoire précitée mais sur la base de la compétence résiduelle du législateur fédéral, l'objectif principal n'étant pas la protection de la jeunesse mais la protection de la société.

B.3.5. La loi attaquée permet au tribunal de la jeunesse ou au juge d'instruction, dans le cadre d'une mesure provisoire de protection sociétale, de confier des mineurs d'âge ayant commis un fait qualifié infraction à un centre de placement provisoire pour mineurs, ci-après appelé le « Centre », (article 2). Cette possibilité est soumise à certaines conditions, parmi lesquelles l'existence de circonstances impérieuses, graves et exceptionnelles se rattachant aux exigences de protection de la sécurité publique (article 3, 3o). La mesure provisoire ne peut être prise que pour une durée aussi brève que possible et uniquement lorsque la finalité de la mesure ne peut être atteinte d'une autre manière (article 4, alinéa 1er).

Par ailleurs, le placement provisoire des mineurs ayant commis un fait qualifié infraction ne peut avoir lieu que si leur admission dans un établissement communautaire est impossible en raison du manque de place (article 3, 4o). En outre, le législateur a subordonné la mise en oeuvre de la loi attaquée à la conclusion, en application de l'article 92bis, § 1er, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, d'un accord de coopération avec les communautés en ce qui concerne l'accompagnement et l'encadrement pédagogique des personnes confiées au Centre ainsi que le droit disciplinaire et le droit de plainte applicables dans le Centre. La loi aurait en effet cessé d'être en vigueur le 31 octobre 2002 si un tel accord de coopération n'avait pas été conclu (article 10).

Enfin, la mesure ne peut être prise dans le but d'exercer une répression immédiate ou une quelconque forme de contrainte (article 4, alinéa 2).

B.3.6. L'objectif de la loi attaquée, qui est de garantir la sécurité publique en protégeant la société contre les mineurs délinquants, n'empêche pas que cette loi relève du champ d'application de l'article 5, § 1er, II, 6o, d), de la loi spéciale du 8 août 1980.

Cette disposition dérogatoire a précisément été justifiée par le souci de la sécurité publique. Au cours des travaux préparatoires de la loi spéciale du 8 août 1988 modifiant la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, le Vice-Premier ministre et ministre des Réformes institutionnelles a rappelé que : « si la protection de la jeunesse constitue sans aucun doute en premier lieu une aide et une assistance, certaines mesures contraignantes doivent parfois être liées non seulement à la protection de la jeunesse mais également à la protection de la société. Le Gouvernement a dès lors souhaité maintenir des règles uniformes pour les mesures de protection judiciaire à l'égard des mineurs délinquants » (Doc. parl., Chambre, S.E., 1988, no 516/6, p. 111).

La mesure de placement organisée par la loi attaquée ne diffère en rien des mesures de garde qui sont prévues par l'article 37 de la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer et que le tribunal de la jeunesse peut prendre, en vertu de l'article 36, 4o, de la même loi, sur réquisition du ministère public à l'égard des « personnes poursuivies du chef d'un fait qualifié infraction, commis avant l'âge de dix-huit ans accomplis ». En effet, aucune distinction n'est faite dans cette loi entre les réquisitions qui poursuivraient une fin de sécurité publique et celles qui poursuivraient une fin d'assistance.

B.3.7. Il s'ensuit que le législateur fédéral pouvait déterminer le contenu de la mesure attaquée et les conditions dans lesquelles elle peut être prise, mais qu'il n'est en principe pas compétent pour l'infrastructure au sein de laquelle cette mesure sera exécutée.

B.3.8. La loi attaquée a toutefois pour objectif spécifique de résoudre, dans l'attente d'une réforme de la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, le problème né de l'abrogation de l'article 53 de cette même loi qui « a eu pour conséquence que des délinquants mineurs d'âge ont dû être remis en liberté du fait du défaut temporaire de places nécessaires à leur prise en charge, et ce, bien que les Communautés aient adapté la capacité de leurs institutions » (Doc. parl., Chambre, 2001-2002, DOC 50 1640/004, p. 4).

Au cours des travaux parlementaires qui ont précédé cette abrogation, il avait été relevé : « [...] en ce qui concerne la problématique des compétences, [...] on se trouve actuellement dans une impasse. Le gouvernement fédéral est compétent pour faire fonctionner les juridictions de la jeunesse et aussi, dans une certaine mesure, pour assurer les aspects de sécurité publique, tandis que la maîtrise de la problématique des moyens appartient aux communautés. Par ailleurs, on demande à celles-ci de remplir des missions de sécurité publique, alors que leur vocation est d'aider, de protéger, d'apporter des soins, etc. » (Doc. parl., Sénat, 1998-1999, no 1-667/3, p. 33).

Il s'ensuit que le législateur fédéral a pu juger nécessaire, afin d'exercer la compétence que lui attribue l'article 5, § 1er, II, 6o, d), de la loi spéciale du 8 août 1980, d'adopter une mesure relative au placement provisoire des mineurs ayant commis un fait qualifié infraction, dès lors que cette mesure, compte tenu de ses limites, de son caractère complémentaire et subsidiaire et de l'exigence d'un accord de coopération avec les communautés, ne porte pas atteinte de manière disproportionnée à la compétence des communautés.

B.3.9. Le premier moyen dans l'affaire no 2515 est pris aussi de la violation de l'article 6, § 3bis, 4o, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, qui prévoit qu'une concertation associant les gouvernements concernés et l'autorité fédérale concernée a lieu pour la détermination et la bonne fin des mesures qui peuvent être prises à l'égard des mineurs ayant commis un fait qualifié infraction.

Il ressort des travaux préparatoires de la loi attaquée que la concertation avec les gouvernements de communauté exigée par l'article 6, § 3bis, 4o, de la loi spéciale du 8 août 1980 a eu lieu (Doc. parl., Chambre, 2001-2002, DOC 50 1640/004, pp. 5-6; Ann., Chambre, 2001-2002, 28 février 2002, pp. 29 et 38).

B.3.10. Le premier moyen dans les deux affaires ne peut être admis.

B.4.1. Le deuxième moyen dans l'affaire no 2515 est pris de la violation des articles 5, § 1er, II, 6o, d), et 6, § 3bis, 4o, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, combinés avec l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme, avec les articles 37 et 40 de la Convention relative aux droits de l'enfant et avec « le principe général de droit international de l'obligation de standstill ». Selon les parties requérantes, le législateur fédéral empêcherait les communautés de respecter leurs engagements de droit international.

B.4.2. L'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme dispose : « 1. Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales : [...] d) s'il s'agit de la détention régulière d'un mineur, décidée pour son éducation surveillée ou de sa détention régulière, afin de le traduire devant l'autorité compétente; [...] ».

L'article 37 de la Convention relative aux droits de l'enfant dispose : « Les Etats parties veillent à ce que : [...] b) nul enfant ne soit privé de liberté de façon illégale ou arbitraire.L'arrestation, la détention ou l'emprisonnement d'un enfant doit être en conformité avec la loi, n'être qu'une mesure de dernier ressort, et être d'une durée aussi brève que possible; [...] ».

L'article 40 de la même Convention dispose : « 1. Les Etats parties reconnaissent à tout enfant suspecté, accusé ou convaincu d'infraction à la loi pénale le droit à un traitement qui soit de nature à favoriser son sens de la dignité et de la valeur personnelle, qui renforce son respect pour les droits de l'homme et les libertés fondamentales d'autrui, et qui tienne compte de son âge ainsi que de la nécessité de faciliter sa réintégration dans la société et de lui faire assumer un rôle constructif au sein de celle-ci. [...] » B.4.3. Toute autorité a l'obligation de respecter, dans sa sphère de compétences, les obligations conventionnelles.

B.4.4. Dès lors que la loi attaquée ne concerne que les mineurs ayant commis un fait qualifié infraction et que, sur la base de la répartition de compétences exposée plus haut, c'est l'autorité fédérale qui est compétente pour déterminer les mesures de protection de la jeunesse qui peuvent être prises à l'égard de ces mineurs, la Cour n'aperçoit pas comment la loi en cause pourrait empêcher les communautés de respecter leurs engagements de droit international.

Par conséquent, il n'est pas nécessaire d'examiner si les dispositions conventionnelles invoquées contiennent une obligation de standstill .

B.4.5. Le moyen ne peut être accueilli.

Quant aux moyens pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution B.5. Certains moyens portent sur les conditions d'application du placement provisoire de mineurs dans le Centre.

B.6.1. Selon un premier grief, les mineurs pourraient, contrairement aux personnes majeures, être privés de leur liberté sans qu'un juge ait constaté qu'ils ont commis un fait qualifié infraction (deuxième moyen, première branche, dans l'affaire no 2513).

B.6.2. En vertu de la loi attaquée, les personnes poursuivies pour un fait qualifié infraction commis avant l'âge de dix-huit ans peuvent être confiées au Centre par le tribunal de la jeunesse ou par le juge d'instruction, dans le cadre d'une mesure provisoire de protection sociétale (article 2). L'une des conditions d'application de cette mesure, qui doit être consignée de façon circonstanciée dans l'ordonnance du juge, est le fait qualifié infraction pour lequel la personne est poursuivie et qui, si elle était majeure, serait de nature à entraîner une peine de réclusion de cinq à dix ans ou une peine plus lourde ou un emprisonnement correctionnel principal d'un an ou une peine plus lourde si la personne a précédemment fait l'objet d'une mesure définitive du tribunal de la jeunesse en raison d'un fait qualifié infraction puni de la même peine (article 3, 2o). Une autre condition est qu'il existe suffisamment d'indices sérieux de culpabilité (article 3, 1o).

B.6.3. En vertu de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à la détention préventive, une personne à l'égard de laquelle il existe des indices sérieux de culpabilité relatifs à un crime ou à un délit peut être arrêtée par le procureur du Roi ou le juge d'instruction.

B.6.4. Il s'ensuit que tant les personnes majeures que les personnes mineures peuvent être privées de leur liberté sans qu'un juge ait constaté qu'elles ont commis un fait qualifié infraction. Il suffit, dans les deux cas, qu'existent suffisamment d'indices sérieux de culpabilité.

Le grief ne peut être admis.

B.7.1. Selon un deuxième grief, les mineurs ayant commis un fait qualifié infraction seraient traités différemment en fonction de la disponibilité des places dans les établissements communautaires (deuxième moyen, troisième branche, dans l'affaire no 2513 et troisième moyen dans l'affaire no 2515).

B.7.2. En vertu de la loi attaquée, un mineur ayant commis un fait qualifié infraction ne peut être confié au Centre, dans le cadre d'une mesure provisoire, que lorsque son admission, à titre de mesure provisoire, dans un établissement de la communauté est impossible en raison du manque de place (article 3, 4o).

B.7.3. Le législateur utilise un critère pertinent pour atteindre l'objectif, exposé en B.3.6, qui consiste à sauvegarder la sécurité publique en évitant que des mineurs ayant commis un fait qualifié infraction doivent être remis en liberté par manque de place dans un établissement communautaire.

B.7.4. La mesure provisoire de protection sociétale ne peut être prise que pour une durée aussi brève que possible et uniquement lorsque le but de la mesure ne peut être atteint d'une autre manière. Elle ne peut être prise dans le but d'exercer une répression immédiate ou une quelconque forme de contrainte. Elle doit être exécutée dans le respect des dispositions des articles 37 et 40 de la Convention internationale des droits de l'enfant, dont le texte est remis à l'intéressé, contre accusé de réception, lors de son admission (article 4).

La mesure n'a dès lors pas d'effet disproportionné.

Le grief ne peut être admis.

B.8.1. Certains moyens portent sur les circonstances dans lesquelles les mineurs peuvent être placés dans le Centre.

Le grief contenu dans ces moyens réside en ce qu'au Centre, contrairement à ce qui se passe dans les établissements communautaires, il ne serait pas prévu de programme de rééducation et d'enseignement (deuxième moyen, quatrième branche, dans l'affaire no 2513 et quatrième moyen dans l'affaire no 2515).

B.8.2. Ainsi qu'il est exposé en B.3.5, le législateur a subordonné la mise en oeuvre de la loi attaquée à la conclusion, en application de l'article 92bis, § 1er, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, d'un accord de coopération avec les communautés en ce qui concerne l'accompagnement et l'encadrement pédagogique des personnes confiées au Centre ainsi que le droit disciplinaire et le droit de plainte applicables dans le Centre (article 9). Il ressort de l'article 10 de la loi attaquée que celle-ci eût cessé d'être en vigueur le 31 octobre 2002 si un tel accord de coopération n'avait pas été conclu.

Si la loi attaquée ne contient elle-même aucun programme de rééducation et d'enseignement, c'est parce que cette matière relève de la compétence exclusive des communautés et que c'est à celles-ci qu'il appartient de l'exercer à la faveur de l'accord de coopération prévu par la loi.

B.8.3. Le 30 avril 2002, un accord de coopération a été conclu entre l'Etat fédéral, la Communauté germanophone, la Communauté française et la Communauté flamande, relatif au Centre.

Bien que la constitutionnalité de la loi attaquée doive être appréciée en elle-même et que la Cour ne soit pas saisie des normes législatives approuvant cet accord de coopération, elle observe que, conformément à ce qu'exige l'article 9 de la loi, l'accord de coopération prévoit que les équipes pédagogiques et les services sociaux sont compétents à l'égard des jeunes admis dans le Centre, conformément aux missions qui ont été confiées à ces services par les autorités communautaires respectives. Sans préjudice de l'application de la loi, ils exercent leurs compétences à l'égard de ces jeunes de la même manière qu'à l'égard des délinquants mineurs qui sont confiés aux structures des autorités communautaires, sauf en ce qui concerne le transfert des jeunes (article 13).

B.8.4. Le grief ne peut être retenu.

B.9. Certains moyens portent sur les garanties procédurales dont est entourée la mesure de privation de liberté en cause.

B.10.1. Un premier grief porte sur la durée maximale différente de placement d'un mineur au Centre et dans un établissement communautaire (deuxième moyen, troisième branche, dans l'affaire no 2513).

B.10.2. En vertu de la loi attaquée, le tribunal de la jeunesse décide cinq jours après avoir rendu son ordonnance initiale, et ensuite chaque mois, soit du retrait, soit de la modification, soit du maintien de la mesure, sans que ce dernier puisse excéder le délai total de deux mois (article 5, § 1er).

B.10.3. En vertu de l'article 52quater de la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à la protection de la jeunesse, le juge ou le tribunal de la jeunesse peut ordonner une mesure de garde pour une période de trois mois au plus dans un établissement fermé de la communauté.

B.10.4. Il ressort de l'examen du premier moyen que la mesure de placement provisoire de mineurs au Centre relève de la compétence de l'autorité fédérale pour les motifs exprimés en B.3.

Le caractère complémentaire et subsidiaire de la mesure, constaté en B.3.8, justifie la différence de traitement critiquée.

Le grief ne peut être admis.

B.11.1. Selon un deuxième grief, les mineurs qui sont privés de leur liberté sur la base de la loi attaquée n'auraient pas le droit de contester la légalité de la mesure devant un juge indépendant et impartial, contrairement aux personnes majeures privées de leur liberté sur la base de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à la détention préventive (septième moyen dans l'affaire no 2515).

B.11.2. La différence de traitement entre certaines catégories de personnes qui découle de l'application de règles procédurales différentes dans des circonstances différentes n'est pas discriminatoire en soi. Il ne pourrait être question de discrimination que si la différence de traitement qui découle de l'application de ces règles de procédure entraînait une limitation disproportionnée des droits des personnes concernées.

B.11.3. Une bonne administration de la justice garantit au justiciable que sa cause soit entendue par un juge indépendant et impartial, comme l'exigent aussi les articles 5.4 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. Ceci implique non seulement que le juge soit indépendant et impartial, mais aussi que cette indépendance et cette impartialité ne puissent raisonnablement être mises en doute.

B.11.4. Dans certains cas, lorsque le tribunal de la jeunesse a pris la mesure provisoire de protection sociétale, c'est ce même tribunal qui décide soit du retrait, soit de la modification ou du maintien de la mesure.

Toutefois, le fait que le tribunal de la jeunesse joue successivement le rôle de juge d'instruction, de chambre du conseil et de juge du fond ne constitue pas une violation du droit à un juge indépendant et impartial, parce que les points de droit que le juge de la jeunesse doit trancher au cours des différentes phases du procès sont différents (voir Cour européenne des droits de l'homme, 24 août 1993, Nortier c. Pays-Bas).

B.11.5. Les droits des personnes concernées ne sont dès lors pas limités de manière disproportionnée.

Le grief ne peut être admis.

B.12.1. Selon un troisième grief, le mineur d'âge placé dans le Centre serait discriminé par rapport au mineur placé dans un établissement communautaire, parce que la durée du placement dans le Centre dépend d'un critère que le mineur d'âge ne peut examiner ni contester sur la base du dossier répressif (cinquième moyen dans l'affaire no 2515).

B.12.2. Le placement dans le Centre ne peut être ordonné que lorsque l'admission, pour une mesure provisoire, dans un établissement communautaire fermé est impossible en raison du manque de place (article 3, 4o).

Lorsque le tribunal de la jeunesse décide soit du retrait, soit de la modification ou du maintien de la mesure, il est tenu de vérifier si les conditions de l'article 3 de la loi attaquée sont toujours remplies. Selon les travaux préparatoires, « lorsque le placement décidé par le juge est à nouveau possible en raison d'une libération de place, le juge est tenu de faire sortir l'intéressé du Centre par une mesure modificative » (Doc. parl., Chambre, 2001-2002, DOC 50 1640/001, p. 6).

En outre, l'article 60, alinéa 1er, de la loi du 8 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/04/1965 pub. 02/08/2010 numac 2010000404 source service public federal interieur Loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié et à la réparation du dommage causé par ce fait. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative à la protection de la jeunesse est intégralement applicable (article 5, § 2), ce qui signifie que le tribunal de la jeunesse peut à tout instant mettre fin à la mesure provisoire ou la modifier (Doc. parl., Chambre, 2001-2002, DOC 50 1640/001, p. 7).

B.12.3. Dans ces circonstances, on ne saurait considérer que la condition litigieuse limite de façon disproportionnée les droits des mineurs concernés.

Le grief ne peut être admis.

B.13.1. Un quatrième grief concerne le fait que le tuteur serait privé du droit d'être entendu par le tribunal de la jeunesse (deuxième moyen, cinquième branche, dans l'affaire no 2513).

B.13.2. Lorsque le tribunal de la jeunesse se prononce soit sur le retrait, soit sur la modification ou sur le maintien de la mesure, l'intéressé, son conseil et le ministère public sont à chaque fois entendus. Les parents ou les personnes qui ont la garde de l'intéressé sont à chaque fois dûment convoqués (article 5, § 1er, alinéa 2).

B.13.3. Selon le Conseil des ministres, le législateur a voulu associer à la procédure la ou les personnes qui sont les plus proches du mineur dans la vie quotidienne.

B.13.4. Si le tuteur n'a pas la garde du mineur, le législateur peut raisonnablement estimer que la personne qui exerce la garde est plus à même d'informer le tribunal de la jeunesse que le tuteur. Comme l'observe le Conseil des ministres, le législateur n'a donc pas exclu automatiquement le tuteur du droit d'être entendu.

Le grief ne peut être admis.

B.14.1. Selon un cinquième grief, le mineur placé par le juge d'instruction, à la différence du mineur placé par le tribunal de la jeunesse, n'aurait pas la possibilité d'intenter un recours contre la décision de placement au Centre (sixième moyen dans l'affaire no 2515).

B.14.2. Le grief repose sur une lecture erronée de la loi attaquée.

La mesure initiale est en effet prise par le tribunal de la jeunesse ou par le juge d'instruction, après quoi, toutefois, c'est toujours le tribunal de la jeunesse, d'abord dans les cinq jours et ensuite mensuellement, qui doit décider soit du retrait, soit de la modification ou du maintien de la mesure. Ce n'est que contre ces dernières ordonnances du tribunal de la jeunesse qu'un recours est ouvert.

Le grief ne peut être admis.

B.15.1. Enfin, deux moyens portent sur la limitation aux garçons de la mesure de privation de liberté en cause (deuxième moyen, deuxième branche, dans l'affaire no 2513 et huitième moyen dans l'affaire no 2515).

B.15.2. La distinction repose sur un critère objectif. La Cour doit toutefois examiner si ce critère est pertinent, compte tenu de l'objet de la norme considérée.

Il convient d'avoir égard, lorsque le critère envisagé repose sur le sexe des personnes concernées, aux articles 10, 11 et 11bis, alinéa 1er, de la Constitution. Ces dispositions, lues conjointement, invitent les législateurs à être particulièrement prudents lorsqu'ils établissent une différence de traitement sur la base du sexe. Un tel critère n'est admissible que s'il est justifié par un objectif légitime et s'il est pertinent par rapport à celui-ci. Le contrôle de la Cour est plus strict si le principe fondamental de l'égalité des sexes est en cause.

En outre, lorsque les personnes concernées sont visées par la Convention relative aux droits de l'enfant, il faut avoir égard à l'article 2 de cette Convention, qui oblige les Etats parties à respecter les droits qui y sont énoncés indépendamment de toute considération de sexe.

B.15.3. Il ressort des travaux préparatoires qu'il y a toujours eu suffisamment de place dans les établissements communautaires fermés pour placer des filles mineures (Doc. parl., Chambre, 2001-2002, DOC 50 1640/004, p. 8).

La circonstance que, au moment de l'adoption de la norme, il n'y avait aucun problème de places disponibles dans les établissements communautaires réservés aux filles n'est pas en soi de nature à justifier la mesure en cause, étant donné qu'il ne peut être exclu que cette situation évolue. Toutefois, il faut tenir compte des besoins urgents qui existaient au moment de l'adoption de la loi, d'une part, et des spécificités du Centre et des contraintes impérieuses liées à l'organisation de la vie quotidienne en son sein, d'autre part. Aussi longtemps qu'il n'est pas démontré qu'un même besoin urgent existe en ce qui concerne les filles mineures - ce que ne font pas les parties requérantes -, il ne peut être reproché au législateur, dans l'exercice d'une compétence complémentaire et subsidiaire, de ne pas avoir institué un centre également pour les mineures.

B.15.4. Les moyens ne peuvent être admis.

Par ces motifs, la Cour rejette les recours.

Ainsi prononcé en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 17 décembre 2003.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président, A. Arts.

^