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Arrêt
publié le 04 juin 2009

Extrait de l'arrêt n° 59/2009 du 25 mars 2009 Numéro du rôle : 4414 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 7, § 14, de l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs, tel qu'il a été La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Bossuyt et M. Melchior, et des juges P. Ma(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 59/2009 du 25 mars 2009 Numéro du rôle : 4414 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 7, § 14, de l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs, tel qu'il a été inséré par l'article 114 de la loi-programme du 2 août 2002, posée par la Cour du travail de Bruxelles.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Bossuyt et M. Melchior, et des juges P. Martens, R. Henneuse, E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, J. Spreutels et T. Merckx-Van Goey, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président M. Bossuyt, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par arrêt du 10 janvier 2008 en cause de Karine Arakelyan contre l'Office national de l'emploi, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 18 janvier 2008, la Cour du travail de Bruxelles a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 7, § 1er [lire : § 14], de l'arrêté-loi du 28 décembre 1944, inséré par l'article 114 de la loi-programme du 22 août [lire : 2 août] 2002, qui a donné un fondement légal à l'article 43 de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage, viole-t-il les articles 10, 11, 23 et 191 de la Constitution, combinés avec l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, lui-même combiné avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à cette Convention, en ce que cette disposition impose aux étrangers des conditions supplémentaires d'admissibilité au bénéfice des allocations de chômage, en exigeant qu'ils satisfassent, en sus des autres conditions d'admission, à la législation relative au séjour et à l'occupation de la main-d'oeuvre étrangère, même dans le cas de candidats réfugiés ou d'étrangers autorisés à séjourner pour motif humanitaire, sur la base de l'article 9, alinéa 3, de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur les étrangers, et qui, en raison de l'absence d'arrêtés d'exécution, ne peuvent satisfaire à la législation sur l'occupation de la main-d'oeuvre étrangère, alors que, pour les Belges, l'occupation en violation d'autres réglementations relatives au droit du travail n'a pas d'effet sur l'admissibilité et le bénéfice du droit aux allocations de chômage ? ». (...) III. En droit (...) Quant à la disposition en cause B.1.1. La question préjudicielle a pour objet l'article 7, § 14, alinéas 1er à 3, de l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs, tel qu'il a été inséré par l'article 114 de la loi-programme du 2 août 2002, qui dispose : « Ce paragraphe concerne les conditions de stage en vue de l'octroi du droit aux allocations visé au § 1er, alinéa 3, i, m, o et p, dans le chef du travailleur étranger ou apatride.

Le travailleur étranger ou apatride n'est admis au bénéfice des allocations que si, au moment de la demande d'allocations, il satisfait à la législation relative au séjour et à celle relative à l'occupation de la main-d'oeuvre étrangère.

Le travail effectué en Belgique par le travailleur étranger ou apatride n'est pris en considération pour l'accomplissement des conditions de stage que s'il a été effectué conformément à la législation relative à l'occupation de la main-d'oeuvre étrangère ».

B.1.2. La disposition en cause confère un fondement légal à l'article 43 de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage (ci-après : « arrêté royal portant réglementation du chômage »), qui dispose : « Sans préjudice des dispositions précédentes, le travailleur étranger ou apatride est admis au bénéfice des allocations s'il satisfait à la législation relative aux étrangers et à celle relative à l'occupation de la main-d'oeuvre étrangère.

Le travail effectué en Belgique n'est pris en considération que s'il l'a été conformément à la législation relative à l'occupation de la main-d'oeuvre étrangère. [...] ».

B.1.3. Au cours des travaux préparatoires, l'insertion de l'article 7, § 14, précité a été justifiée comme suit : « [Il] reprend de manière inchangée la réglementation existante relative au droit aux allocations de chômage sur base des prestations de travail [...], dans le chef de travailleurs de nationalité étrangère. [...] Il est proposé d'intégrer les dispositions en question dans une loi, dans le sens formel du terme, étant donné que la procédure définie statue que le Roi, dans ce cas, ne dispose pas de la compétence de décréter des dispositions dérogatoires vis-à-vis de personnes de nationalité étrangère. C'est ce que la Cour de Cassation a récemment conclu dans un arrêt du 25 mars 2002. [...] Cet amendement vise donc la transposition de la règle actuelle dans l'arrêté royal en une loi, et n'apporte donc aucune modification aux droits et devoirs du travailleur même » (Doc. parl., Chambre, 2001-2002, DOC 50-1823/003, pp. 6-7).

Quant à la recevabilité de la question préjudicielle B.2. Le juge a quo demande à la Cour si la disposition en cause entraîne une violation des « articles 10, 11, 23 et 191 de la Constitution, combinés avec l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, lui-même combiné avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à cette Convention, en ce que cette disposition impose aux étrangers des conditions supplémentaires d'admissibilité au bénéfice des allocations de chômage, en exigeant qu'ils satisfassent, en sus des autres conditions d'admission, à la législation relative au séjour et à l'occupation de la main-d'oeuvre étrangère, même dans le cas de candidats réfugiés ou d'étrangers autorisés à séjourner pour motif humanitaire, sur la base de l'article 9, alinéa 3, de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer [sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers (ci-après : loi sur les étrangers)], et qui, en raison de l'absence d'arrêtés d'exécution, ne peuvent satisfaire à la législation sur l'occupation de la main-d'oeuvre étrangère, alors que, pour les Belges, l'occupation en violation d'autres réglementations relatives au droit du travail n'a pas d'effet sur l'admissibilité et le bénéfice du droit aux allocations de chômage ».

B.3.1. Le Conseil des ministres objecte que la question préjudicielle n'est pas recevable, parce qu'il ne peut être déduit ni du libellé de celle-ci, ni de la motivation de la décision de renvoi quelles sont les « autres réglementations relatives au droit du travail » visées.

Les deux catégories de personnes qui seraient traitées différemment ne seraient pas désignées de manière suffisamment précise.

B.3.2. La question préjudicielle invite la Cour à examiner si la disposition en cause est compatible avec les articles 10, 11, 23 et 191 de la Constitution, combinés avec l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 1er du Premier Protocole à cette Convention, qui garantit le droit au respect des biens.

B.3.3. En vertu de l'article 26, § 1er, 3°, de la loi spéciale du 6 janvier 1989, tel qu'il a été modifié par la loi spéciale du 9 mars 2003, la Cour est compétente pour statuer, à titre préjudiciel, sur les questions relatives à la violation, notamment par une loi, des articles du titre II de la Constitution, parmi lesquels figure l'article 23. La violation de cet article peut être directement alléguée sans que la question préjudicielle procède à une comparaison, laquelle n'est requise qu'en ce qui concerne les articles 10 et 11 de la Constitution.

B.3.4. En outre, lorsqu'une question préjudicielle dénonce une violation des articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec une disposition conventionnelle garantissant un droit fondamental, la violation alléguée consiste en ce qu'une différence de traitement est instaurée en privant une catégorie de personnes de ce droit fondamental, alors que ce droit est garanti sans restriction à toute autre personne.

B.3.5. Pour le surplus, il apparaît que le juge a quo compare la situation des étrangers visés dans la disposition en cause avec celle des personnes pour lesquelles « l'emploi occupé en violation d'autres réglementations relatives au droit du travail n'a aucune influence sur l'admissibilité et le bénéfice du droit aux allocations de chômage ».

B.3.6. L'exception est rejetée.

Quant aux normes de contrôle B.4.1. L'article 191 de la Constitution dispose : « Tout étranger qui se trouve sur le territoire de la Belgique jouit de la protection accordée aux personnes et aux biens, sauf les exceptions établies par la loi ».

B.4.2. En vertu de cette disposition, une différence de traitement qui défavorise un étranger ne peut être établie que par une norme législative. Cette disposition n'a pas pour objet d'habiliter le législateur à se dispenser, lorsqu'il établit une telle différence, d'avoir égard aux principes fondamentaux consacrés par la Constitution. Il ne découle donc pas de l'article 191 que le législateur puisse, lorsqu'il établit une différence de traitement au détriment d'étrangers, ne pas veiller à ce que cette différence ne soit pas discriminatoire, quelle que soit la nature des principes en cause.

B.5. L'article 23 de la Constitution dispose : « Chacun a le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine.

A cette fin, la loi, le décret ou la règle visée à l'article 134 garantissent, en tenant compte des obligations correspondantes, les droits économiques, sociaux et culturels, et déterminent les conditions de leur exercice.

Ces droits comprennent notamment : [...] 2° le droit à la sécurité sociale, à la protection de la santé et à l'aide sociale, médicale et juridique; [...] ».

B.6.1. Parmi les droits et libertés garantis par les articles 10 et 11 de la Constitution figurent les droits et libertés résultant de dispositions conventionnelles internationales qui lient la Belgique.

L'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme garantit également le principe d'égalité et de non-discrimination en ce qui concerne la jouissance des droits et libertés mentionnés dans cette Convention et dans ses protocoles additionnels. Parmi ces droits et libertés figure l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, qui dispose : « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens.

Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes ».

B.6.2. L'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme ne garantit pas le droit à une allocation de sécurité sociale que ne prévoit pas le système juridique de l'Etat contractant. Toutefois, lorsque cet Etat prévoit une allocation déterminée, il ne peut y lier de conditions discriminatoires (CEDH, 6 juillet 2005, Stec et autres c. Royaume-Uni, §§ 54-55).

Quant au fond de l'affaire B.7. La finalité propre de la législation sur le chômage n'empêche pas que le législateur, soucieux de maintenir un système de sécurité sociale juste et viable, puisse y ancrer les principes de la législation relative au séjour et à l'autorisation de travail des étrangers et qu'une allocation, qui suppose la disponibilité sur le marché de l'emploi, soit refusée à des personnes qui n'ont pas un accès légal au territoire, ni au marché de l'emploi. Le législateur peut également prévoir que le travail effectué en Belgique par le travailleur étranger n'entre en considération pour le stage que s'il a été effectué conformément à la législation relative à l'occupation des travailleurs étrangers.

B.8.1. La question préjudicielle fait toutefois spécifiquement référence à la catégorie des candidats réfugiés ou des étrangers autorisés à séjourner pour motif humanitaire en vertu de l'article 9, alinéa 3, de la loi sur les étrangers. En effet, il ressort de la décision de renvoi qu'au moment de son emploi, l'appelante devant la Cour du travail était initialement candidate réfugiée et a été régularisée, après le rejet de sa demande d'asile, sur la base de l'article 9, alinéa 3, de la loi sur les étrangers.

B.8.2. En ce qui concerne les étrangers autorisés à séjourner pour motif humanitaire en vertu de l'article 9, alinéa 3, de la loi sur les étrangers, il ressort de la décision de renvoi que l'emploi après régularisation a été pris en compte comme stage pour l'obtention d'une allocation de chômage.

B.9. Il reste donc à examiner si la disposition en cause est discriminatoire en ce qu'un travail effectué par des candidats réfugiés, qui, selon l'interprétation du juge a quo, « en raison de l'absence d'arrêtés d'exécution, ne peuvent satisfaire à la législation sur l'occupation de la main d'oeuvre étrangère », n'a pas été pris en compte comme ayant satisfait aux conditions de stage. La Cour limite son examen à cette hypothèse.

B.10.1. La loi du 30 avril 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/04/1999 pub. 21/05/1999 numac 1999012338 source ministere de l'emploi et du travail Loi relative à l'occupation des travailleurs étrangers fermer relative à l'occupation de travailleurs étrangers exige que les travailleurs étrangers disposent d'un permis de travail pour pouvoir travailler légalement. Pour qu'un travailleur étranger puisse être employé, l'employeur doit, au préalable, obtenir de l'autorité compétente une autorisation d'occupation (article 4, § 1er) et le travailleur doit obtenir un permis de travail (article 5). Selon l'article 4, § 4, le Roi peut, par un arrêté délibéré en Conseil des ministres, déterminer à quelles conditions une autorisation provisoire d'occupation peut être accordée à un employeur. En vertu de l'article 7, le Roi peut, par un arrêté délibéré en Conseil des ministres, dispenser les catégories de travailleurs étrangers qu'Il détermine, de l'obligation d'obtenir un permis de travail. Dans ce cas, l'employeur ne doit pas demander une autorisation d'occupation.

Dans les travaux préparatoires de cette loi, il est mentionné que les candidats réfugiés peuvent appartenir aux catégories qui sont dispensées de l'obligation d'obtenir un permis de travail (Doc. parl., Chambre 1998-1999, n° 2072/3, p. 6).

B.10.2. En exécution de la loi du 30 avril 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/04/1999 pub. 21/05/1999 numac 1999012338 source ministere de l'emploi et du travail Loi relative à l'occupation des travailleurs étrangers fermer, l'arrêté royal du 6 février 2003 a fixé les règles en matière d'occupation des candidats réfugiés et permet depuis lors que des jours de travail effectués avec une autorisation provisoire de travail puissent être pris en considération pour l'admission au droit aux allocations de chômage.

Cet arrêté étant entré en vigueur le 1er avril 2003, il ne pouvait s'appliquer à l'affaire soumise au juge a quo, puisque la demande d'asile de l'appelante avait été rejetée par la Commission permanente de recours des réfugiés le 4 octobre 2002.

Il ressort en outre de l'article 40, § 1er, 2°, in fine, de l'arrêté royal du 9 juin 1999 que le système antérieur, qui prévoyait que les candidats réfugiés pouvaient être occupés moyennant une autorisation provisoire d'occupation, n'était plus applicable aux demandes introduites après le 1er juillet 1999. Il s'ensuit qu'entre le 1er juillet 1999 et le 1er avril 2003, date à laquelle l'arrêté royal du 6 février 2003 est entré en vigueur, il n'existait pas de base légale pour l'occupation de candidats réfugiés pour lesquels une autorisation provisoire d'occupation n'avait pas été obtenue avant le 1er juillet 1999.

B.10.3. La Cour n'est pas interrogée sur la loi du 30 avril 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/04/1999 pub. 21/05/1999 numac 1999012338 source ministere de l'emploi et du travail Loi relative à l'occupation des travailleurs étrangers fermer et sur ses arrêtés d'exécution. Etant donné que la disposition en cause ne donne droit au travailleur étranger ou apatride à des allocations de chômage que s'il satisfait à la législation relative à l'occupation des travailleurs étrangers, son champ d'application est toutefois indissociable de cette législation. En conséquence, la Cour peut examiner si la disposition en cause est inconstitutionnelle dans la mesure où elle avait pour effet que des prestations de travail effectuées par des candidats réfugiés avant l'entrée en vigueur de l'arrêté royal du 6 février 2003 n'étaient pas prises en considération pour le droit aux allocations de chômage, parce qu'ils ne pouvaient être occupés légalement, en vertu de la loi du 30 avril 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/04/1999 pub. 21/05/1999 numac 1999012338 source ministere de l'emploi et du travail Loi relative à l'occupation des travailleurs étrangers fermer, et que l'arrêté d'exécution qui pouvait leur accorder une dispense n'existait pas encore.

B.11.1. Aussi longtemps que l'arrêté royal annoncé en exécution de la loi du 30 avril 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/04/1999 pub. 21/05/1999 numac 1999012338 source ministere de l'emploi et du travail Loi relative à l'occupation des travailleurs étrangers fermer ne fut pas pris, une situation d'insécurité juridique qui existait déjà depuis longtemps a été perpétuée.

En effet, sur la base d'une directive administrative du 29 juin 1981 et d'autres directives ultérieures, les employeurs qui souhaitaient occuper des candidats réfugiés pouvaient obtenir une autorisation provisoire d'occupation. La jurisprudence a évolué au sujet de la décision de l'Office national de l'emploi de ne pas prendre en considération l'occupation sur la base de cette directive pour le droit aux allocations de chômage tant que le réfugié n'était pas reconnu, au motif qu'il n'était pas satisfait à la législation relative à l'occupation de travailleurs étrangers. Alors que, dans ses arrêts du 17 juin 1996 (Pas., 1996, I, n° 240) et du 16 septembre 1996 (Pas., 1996, I, n° 312), la Cour de cassation avait qualifié la directive administrative, qui n'a jamais été publiée au Moniteur belge , d'illégale, elle a jugé, dans un arrêt du 26 mai 2001 (Pas., 2001, n° 314), qu'il ne peut être déduit d'une absence de publication qu'une directive administrative n'aurait pas de caractère réglementaire. B.11.2. L'insécurité juridique qui existait depuis des années a perduré après l'adoption de la loi du 30 avril 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/04/1999 pub. 21/05/1999 numac 1999012338 source ministere de l'emploi et du travail Loi relative à l'occupation des travailleurs étrangers fermer relative à l'occupation des travailleurs étrangers, parce que l'autorité permettait elle-même qu'en attendant l'adoption d'un arrêté royal qui avait été annoncé en faveur des candidats réfugiés, des autorisations provisoires d'occupation fussent encore délivrées sur la base de la circulaire du 26 avril 1994, bien que, depuis l'adoption de la loi du 30 avril 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/04/1999 pub. 21/05/1999 numac 1999012338 source ministere de l'emploi et du travail Loi relative à l'occupation des travailleurs étrangers fermer, celle-ci fût dépourvue de fondement légal (question parlementaire, n° 1214 du 22 mars 2000, Ann., Chambre, 1999-2000, Com. 157, 8-9; question parlementaire, n° 2-36 du 18 novembre 1999, Ann., Sénat, 1999-2000, Plén. 13, 8-9). Il apparaît de la décision de renvoi que, dans l'affaire soumise au juge a quo, l'Office des étrangers du ministère de l'Intérieur, dans une lettre du 14 mai 2001 adressée à l'appelante, s'est référé à la possibilité d'une occupation provisoire sur la base de la circulaire précitée.

B.11.3. Il n'est pas compatible avec les principes généraux de la sécurité juridique et de la confiance suscitée que les candidats réfugiés, entre le 1er juillet 1999 et le 1er avril 2003, date à laquelle l'arrêté royal du 6 février 2003 est entré en vigueur, aient ainsi été trompés quant à la légalité de leur occupation et quant au droit correspondant aux allocations de chômage.

B.11.4. Compte tenu de ce qui précède, la disposition en cause a eu des effets disproportionnés en ce que des allocations de chômage ont été refusées à des étrangers autorisés à séjourner pour motif humanitaire, sur la base de l'article 9, alinéa 3, de la loi sur les étrangers, parce que le travail effectué entre le 1er juillet 1999 et le 1er avril 2003, tandis qu'ils avaient le statut de candidat réfugié déclaré recevable, n'était pas conforme à la législation relative à l'occupation des travailleurs étrangers et n'entrait donc pas en ligne de compte comme stage, alors que, pour le surplus, ils satisfaisaient à toutes les exigences de la loi pour avoir droit à une telle allocation, ce qui impliquait notamment qu'ils avaient payé au cours de cette période d'occupation des cotisations de sécurité sociale et qu'au moment de leur demande d'allocation, ils satisfaisaient à la législation relative au séjour et à l'occupation des travailleurs étrangers.

B.12. Dans cette mesure, la disposition en cause n'est pas compatible avec les articles 10, 11, 23 et 191 de la Constitution.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 7, § 14, de l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs viole les articles 10, 11, 23 et 191 de la Constitution en ce qu'il a eu pour conséquence que des allocations de chômage ont été refusées à des étrangers autorisés à séjourner pour motif humanitaire, sur la base de l'article 9, alinéa 3, de la loi du 15 décembre 1980Documents pertinents retrouvés type loi prom. 15/12/1980 pub. 20/12/2007 numac 2007000992 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives type loi prom. 15/12/1980 pub. 12/04/2012 numac 2012000231 source service public federal interieur Loi sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, parce que le travail qu'ils avaient effectué entre le 1er juillet 1999 et le 1er avril 2003, tandis qu'ils avaient le statut de candidat réfugié déclaré recevable, n'était pas conforme à la législation relative à l'occupation des travailleurs étrangers et n'entrait donc pas en ligne de compte comme stage, alors que, pour le surplus, ils satisfaisaient aux exigences de la loi pour avoir droit à une telle allocation.

Ainsi prononcé en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989, à l'audience publique du 25 mars 2009.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président, M. Bossuyt.

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