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Arrêt
publié le 23 juillet 2021

Extrait de l'arrêt n° 39/2021 du 4 mars 2021 Numéro du rôle : 7396 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 47 de la loi du 20 juillet 1990 « relative à la détention préventive » et les articles 247 et 248 de la loi générale La Cour constitutionnelle, composée des présidents F. Daoût et L. Lavrysen, et des juges J.-P. (...)

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Extrait de l'arrêt n° 39/2021 du 4 mars 2021 Numéro du rôle : 7396 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 47 de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer « relative à la détention préventive » et les articles 247 et 248 de la loi générale sur les douanes et accises, coordonnée le 18 juillet 1977, posée par un juge d'instruction du Tribunal de première instance francophone de Bruxelles.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents F. Daoût et L. Lavrysen, et des juges J.-P. Moerman, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, T. Giet, R. Leysen, J. Moerman, M. Pâques, Y. Kherbache, T. Detienne et D. Pieters, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président F. Daoût, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par ordonnance du 13 mai 2020, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 5 juin 2020, un juge d'instruction du Tribunal de première instance francophone de Bruxelles a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 47 de la loi du 20.07.1990 sur la détention préventive instituant un régime dérogatoire de répression de la fraude en matière de douanes et accises ainsi que les articles 247 et 248 de la loi du 18.07.1977 sur les douanes et accises, en ce qu'ils prévoient la possibilité pour les agents de mettre en état d'arrestation les fraudeurs sans domicile connu dans le royaume, ayant contrevenu aux articles 220 et 224 à l'effet d'être mis sur le champ à disposition du juge ainsi que la possibilité de toujours mettre les fraudeurs en état d'arrestation préventive, lorsque l'infraction devra entraîner l'application de la peine d'emprisonnement, ne violent-ils pas les articles 10 et 11 de la Constitution, ainsi que subsidiairement, l'article 5.4 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04.11.1950, en ce que : 1ère branche : la possibilité, pour un juge d'instruction de délivrer un mandat d'arrêt sur pied de l'article 16 de la loi du 20.07.1990 relative à la détention préventive, subordonne la possibilité de délivrer un mandat d'arrêt aux conditions cumulatives suivantes : - le mandat d'arrêt doit être d'absolue nécessité pour la sécurité publique (article 16 § 1 alinéa 1er); - le fait justifiant le mandat d'arrêt doit être de nature à entraîner pour l'inculpé un emprisonnement correctionnel d'un an ou d'une peine plus grave (article 16 § 1 alinéa 1er); - si le maximum de la peine ne dépasse pas 15 ans de réclusion, il faut qu'en sus de l'absolue nécessité pour la sécurité publique, il existe de sérieuses raisons de craindre que l'inculpé, s'il était laissé en liberté, commette de nouveaux crimes et délits, se soustraie à l'action de la justice, tente de faire disparaître des preuves ou entre en collusion avec des tiers (article 16 § alinéa 3 [lire : § 1er alinéa 4]); 2ème branche : le contrôle de la régularité du mandat d'arrêt et de la nécessité de maintenir la détention préventive au-delà de 5 jours, tels que régis par l'article 21 de la loi du 20.07.1990 relative à la détention préventive, implique que ces deux points soient soumis à la chambre du conseil du tribunal de 1ère instance dans les 5 jours de la délivrance du mandat d'arrêt, avec recours possible contre la décision de la chambre du conseil devant la chambre des mises en accusation (cour d'appel) et ensuite, possibilité de pourvoi devant la cour de cassation (articles 30 et 31 de la loi du 20.07.1990 relative à la détention préventive) ? ». (...) III. En droit (...) Quant à la recevabilité de la question préjudicielle B.1.1. Le Conseil des ministres soulève une exception d'irrecevabilité de la question préjudicielle, au motif que la Cour ne serait pas compétente pour connaître d'une question posée par un juge d'instruction saisi d'une demande de délivrance d'un mandat d'arrêt.

B.1.2. En vertu de l'article 142, alinéa 3, de la Constitution et de l'article 26, § 2, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, seules les juridictions peuvent saisir la Cour de questions préjudicielles. Bien que les travaux préparatoires de ces dispositions ne contiennent aucune définition de la notion de « juridiction » habilitée à poser une question préjudicielle à la Cour, il peut être déduit de l'objectif poursuivi par l'instauration de la procédure préjudicielle qu'il convient de donner une interprétation large à cette notion.

B.1.3. Le juge d'instruction est un juge du tribunal de première instance, il est indépendant et impartial, et il est notamment appelé à autoriser ou à ordonner des mesures de contrainte. Même si les décisions qu'il prend ne sont pas revêtues de l'autorité de la chose jugée, elles participent de l'exercice de la fonction juridictionnelle et s'inscrivent dans le cadre d'une procédure judiciaire. Ce constat vaut a fortiori dans le cadre de la délivrance d'un mandat d'arrêt. Le juge d'instruction doit donc en principe être considéré comme une juridiction au sens des dispositions précitées.

B.1.4. C'est en règle à la juridiction a quo qu'il appartient d'apprécier si la réponse à la question préjudicielle est utile à la solution du litige. Ce n'est que lorsque tel n'est manifestement pas le cas que la Cour peut décider que la question n'appelle pas de réponse, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

B.1.5. L'exception est rejetée.

Quant au fond B.2.1. La question préjudicielle porte sur l'article 47 de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer « relative à la détention préventive » (ci-après : la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer) et sur les articles 247 et 248 de la loi générale sur les douanes et accises, coordonnée le 18 juillet 1977 (ci-après : la loi générale sur les douanes et accises).

B.2.2. L'article 47 de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer, qui figure sous le titre II « Dispositions finales, modificatives et abrogatoires », dispose : « La présente loi ne modifie pas les lois relatives à la répression de la fraude en matière de douanes et accises ».

B.2.3. Les articles 247 et 248 de la loi générale sur les douanes et accises, qui figurent sous le chapitre XXIV « Amendes et peines en général », disposent : «

Art. 247.En cas d'une contravention de l'espèce de celles mentionnées aux articles 220 et 224 et à laquelle les dispositions de l'article 228 ne seront point applicables, les fraudeurs pourront, lorsqu'au su des agents ils n'ont pas de domicile connu dans le royaume, être mis en état d'arrestation par les agents, à l'effet d'être remis sur-le-champ à la disposition du juge.

Art. 248.§ 1er. Par extension de l'article 247, les fraudeurs pourront toujours être mis en état d'arrestation préventive, lorsque l'infraction devra entraîner l'application de la peine d'emprisonnement. § 2. Le § 1er est également applicable en matière d'accises et de taxes assimilées à des droits d'accise lorsque l'infraction est punie d'une peine principale d'emprisonnement ».

B.3. La Cour est invitée à examiner la compatibilité des dispositions en cause avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec l'article 5, paragraphe 4, de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce que ces dispositions n'offrent pas aux personnes qui font l'objet d'une détention préventive pour une infraction en matière de douanes et accises les mêmes droits et garanties qu'aux personnes qui font l'objet d'une détention préventive pour une infraction pénale de droit commun.

Tout d'abord, la possibilité pour un juge d'instruction de délivrer un mandat d'arrêt en application de l'article 16 de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer est subordonnée au respect des conditions cumulatives suivantes : (1) le mandat d'arrêt doit être d'absolue nécessité pour la sécurité publique (article 16, § 1er, alinéa 1er), (2) le fait justifiant le mandat d'arrêt doit être de nature à entraîner pour l'inculpé un emprisonnement correctionnel d'un an ou d'une peine plus grave (article 16, § 1er, alinéa 1er) et (3) si le maximum de la peine ne dépasse pas quinze ans de réclusion, il faut qu'outre l'absolue nécessité pour la sécurité publique, il existe de sérieuses raisons de craindre que l'inculpé, s'il était laissé en liberté, commette de nouveaux crimes et délits, se soustraie à l'action de la justice, tente de faire disparaître des preuves ou entre en collusion avec des tiers (article 16, § 1er, alinéa 4) (première branche de la question préjudicielle). En outre, le contrôle de la régularité du mandat d'arrêt et de la nécessité de maintenir la détention préventive au-delà de cinq jours, conformément à l'article 21 de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer, implique que ces deux points soient soumis à la chambre du conseil du tribunal de première instance dans les cinq jours de la délivrance du mandat d'arrêt, avec recours possible contre la décision de la chambre du conseil devant la chambre des mises en accusation et possibilité de pourvoi devant la Cour de cassation, conformément aux articles 30 et 31 de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer (seconde branche de la question préjudicielle).

B.4.1. En matière de douanes et accises, un régime de détention préventive dérogeant à celui qui est organisé, en droit commun, par la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer est autorisé et organisé, respectivement, par l'article 47 de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer et par les articles 247 et 248 de la loi générale sur les douanes et accises.

Ce régime de détention préventive en matière de douanes et accises existe parallèlement au régime organisé par la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer.

Ce régime suit une logique qui lui est propre, sans s'inspirer des principes et garanties établis par le régime organisé par la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer, établi postérieurement au régime prévu en matière de douanes et accises.

B.4.2. La Cour doit examiner si les différences de traitement entre les personnes qui sont soumises au régime de détention préventive en matière de douanes et accises et celles qui sont soumises au régime de détention préventive de droit commun, en ce qui concerne, d'une part, les conditions de délivrance du mandat d'arrêt, et, d'autre part, le contrôle juridictionnel de ce mandat et du maintien en détention préventive, sont compatibles avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec l'article 5, paragraphe 4, de la Convention européenne des droits de l'homme.

B.5.1. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée.

L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité et de non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.

B.5.2.1. Depuis la révision du 24 octobre 2017, l'article 12, alinéa 3, de la Constitution dispose : « Hors le cas de flagrant délit, nul ne peut être arrêté qu'en vertu d'une ordonnance motivée du juge qui doit être signifiée au plus tard dans les quarante-huit heures de la privation de liberté et ne peut emporter qu'une mise en détention préventive ».

L'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme dispose : « 1. Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales : [...] c) s'il a été arrêté et détenu en vue d'être conduit devant l'autorité judiciaire compétente, lorsqu'il y a des raisons plausibles de soupçonner qu'il a commis une infraction ou qu'il y a des motifs raisonnables de croire à la nécessité de l'empêcher de commettre une infraction ou de s'enfuir après l'accomplissement de celle-ci; [...] 3. Toute personne arrêtée ou détenue, dans les conditions prévues au paragraphe 1, c) du présent article, doit être aussitôt traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires et a le droit d'être jugée dans un délai raisonnable, ou libérée pendant la procédure.La mise en liberté peut être subordonnée à une garantie assurant la comparution de l'intéressé à l'audience. 4. Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal, afin qu'il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale. [...] ».

B.5.2.2. Lorsqu'une disposition conventionnelle liant la Belgique a une portée analogue à celle d'une des dispositions constitutionnelles dont le contrôle relève de la compétence de la Cour et dont la violation est alléguée, les garanties consacrées par cette disposition conventionnelle constituent un ensemble indissociable avec les garanties inscrites dans les dispositions constitutionnelles concernées.

B.5.2.3. Etant donné que tant l'article 12 de la Constitution que l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme garantissent le droit à la liberté individuelle, la Cour doit, lorsqu'elle exerce un contrôle au regard de cette disposition conventionnelle en combinaison avec les articles 10 et 11 de la Constitution, également prendre en compte la disposition constitutionnelle précitée.

B.5.3. Il s'impose en outre de tenir compte de la nature des principes en cause et du fait que la détention préventive porte atteinte à la liberté individuelle. Eu égard à l'importance fondamentale de l'habeas corpus, toutes les limitations de la liberté individuelle doivent être interprétées de manière restrictive et leur constitutionnalité doit être traitée avec la plus grande circonspection.

B.6.1. Les travaux préparatoires de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer indiquent que la philosophie générale de la réforme opérée s'articulait autour de trois axes fondamentaux : l'accentuation du caractère exceptionnel de la détention préventive, le renforcement des garanties des droits de la défense et l'institution de mesures alternatives à la détention préventive (Doc. parl., Sénat, 1988-1989, n° 658/2, p.6; Doc. parl., Chambre, 1989-1990, n° 1255/2, p. 2).

Par ailleurs, le projet qui est devenu la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer « quoique revoyant la question de la privation de liberté dans sa totalité » conservait les « grands principes de la législation actuelle qui constituent des garanties fondamentales des droits individuels », à savoir l'intervention du juge d'instruction conformément au prescrit constitutionnel, l'intervention d'un autre juge dans les cinq jours et le contrôle systématique de la détention préventive par la chambre du conseil de mois en mois (ibid.,p. 3).

B.6.2. En ce qui concerne l'articulation entre le nouveau régime établi par la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer et le régime prévu en matière de douanes et accises, il ressort des travaux préparatoires que la section de législation du Conseil d'Etat avait recommandé au législateur de modifier la loi générale sur les douanes et accises afin de faire appliquer la nouvelle loi sur la détention préventive « aux poursuites du chef d'infractions en matière de douanes et accises » (Doc. parl., Sénat, 1988-1989, n° 658/1, p. 71).

La section de législation avait observé : « Il convient que le Ministre des Finances figure parmi les proposants, compte tenu des modifications à apporter à la loi générale sur les douanes et accises » (ibid., p. 68).

B.6.3. Le législateur a cependant maintenu le principe selon lequel la nouvelle loi sur la détention préventive ne serait pas applicable en matière de douanes et accises : « L'article 47 du projet précise qu'il n'est pas dérogé au régime applicable en matière de douanes et accises (comme l'article 22 de la loi actuelle).

En effet, si on voulait mettre fin au régime particulier applicable en ces matières, il faudrait procéder à une réforme de la loi générale sur les douanes et accises, ce que le Ministre des Finances ne souhaite pas à l'heure actuelle » (Doc. parl., Chambre, 1989-1990, n° 1255/2, p. 15; voy. aussi Doc. parl., Sénat, 1988-1989, n° 658/2, p. 15).

Les travaux préparatoires expliquent à ce sujet : « L'article 49 du projet à l'examen reprend le texte de l'article 22 de la loi actuelle relative à la détention préventive.

Un commissaire constate qu'en matière de douanes et accises, les dispositions relatives à l'arrestation sont beaucoup plus strictes. Il propose, dès lors, que la nouvelle loi soit également applicable en matière de douanes et accises.

Un autre membre s'associe à cette proposition, en rappelant que l'avis du Conseil d'Etat va dans le même sens.

Bien qu'il soit favorable à cette proposition, le Ministre de la Justice demande néanmoins à la Commission de maintenir le texte initial du projet, étant donné que son collègue des Finances, compétent en cette matière, ne l'a pas autorisé à procéder à une telle modification.

La Commission décide d'accéder à la demande du Ministre de la Justice, mais charge néanmoins son Président d'informer par lettre le Ministre des Finances de l'opinion divergente de la Commission.

Sous réserve de la réponse du Ministre des Finances, l'article 49 est adopté à l'unanimité des 16 membres présents » (Doc. parl., Sénat, 1988-1989, n° 658/2, pp. 116-117).

En ce qui concerne l'article 47 en projet, il a par ailleurs été précisé : « Interrogé par [...], le Ministre précise que cet article vise une autre procédure en matière de détention préventive, qui est prévue par les lois relatives à la répression de la fraude en matière de douanes et accises. Cette procédure paraît exorbitante par comparaison avec le projet à l'examen.

La législation en question relève de la compétence du Ministre des Finances, qui ne souhaite pas la modifier pour l'instant, ce qui explique cette disposition du projet.

M. [...] trouve anormal qu'une procédure touchant aux libertés fondamentales de la personne soit réglée différemment selon la législation qui est enfreinte. Il serait hautement souhaitable que le législateur se penche sur cette question » (Doc. parl., Chambre, 1989-1990, n° 1255/2, p. 46).

B.6.4. Il ressort de ce qui précède que, lors de l'adoption de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer, le ministre de la Justice et la Commission de la Justice qui avait travaillé sur le projet de réforme souhaitaient rendre le nouveau régime applicable en matière de douanes et accises, mais cette intention n'a pu être concrétisée, en raison de la réforme de la législation sur les douanes et accises qu'un tel régime imposait et que ne souhaitait pas le ministre des Finances en fonction à l'époque.

B.7.1. Le maintien d'un régime de détention préventive spécifique dans le cadre d'infractions en matière de douanes et accises n'est donc pas justifié par la volonté de principe du législateur de conserver deux régimes distincts, mais uniquement par la nécessité d'une réforme de la législation sur les douanes et accises que ne souhaitait pas le ministre compétent lors de l'adoption de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer de réforme globale de la détention préventive.

Les différences de traitement qui en résultent, selon que le régime de détention préventive relève de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer ou de la loi générale sur les douanes et accises, sont dès lors fondées sur un critère de distinction qui, selon la volonté du législateur exprimée lors de l'adoption de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer, était appelé à disparaître dès que la législation sur les douanes et accises serait réformée.

B.7.2. C'est au législateur qu'il appartient de décider de l'opportunité d'une réforme globale de la loi sur les douanes et accises qui permettrait de tenir compte des principes et garanties établis par la réforme de la détention préventive en 1990. Une telle réforme peut en effet imposer des choix de politique répressive, qui relèvent de la marge d'appréciation étendue du législateur.

Le temps dont peut disposer le législateur pour mettre fin à des différences de traitement qu'il ne souhaitait maintenir que provisoirement n'est pas illimité, de sorte que le maintien de deux régimes parallèles en matière de détention préventive peut s'avérer de moins en moins justifié. La Cour substituerait cependant son appréciation à celle d'une assemblée démocratiquement élue si elle censurait aujourd'hui l'absence d'une réforme globale de la loi sur les douanes et accises, dont seul le législateur peut décider.

B.7.3. Compte tenu de ce qui est dit en B.7.2, la Cour doit dès lors examiner si les différences de traitement critiquées n'entraînent pas des effets disproportionnés pour les personnes qui sont soumises au régime de détention préventive en matière de douanes et accises, tel qu'il existe aujourd'hui.

Quant à la délivrance du mandat d'arrêt B.8. La première branche de la question préjudicielle invite à comparer les conditions fondamentales de délivrance d'un mandat d'arrêt, selon que la détention préventive est régie par l'article 16, § 1er, de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer ou par les articles 247 et 248 de la loi générale sur les douanes et accises.

B.9.1. L'article 16, § 1er, de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer dispose : « En cas d'absolue nécessité pour la sécurité publique seulement, et si le fait est de nature à entraîner pour l'inculpé un emprisonnement correctionnel principal d'un an ou une peine plus grave, le juge d'instruction peut décerner un mandat d'arrêt. [...] Si le maximum de la peine applicable ne dépasse pas quinze ans de réclusion, le mandat ne peut être décerné que s'il existe de sérieuses raisons de craindre que l'inculpé, s'il était laissé en liberté, commette de nouveaux crimes ou délits, se soustraie à l'action de la justice, tente de faire disparaître des preuves ou entre en collusion avec des tiers. Lors d'infractions visées au livre II, titre Iter, du Code pénal pour lesquelles le maximum de la peine applicable dépasse cinq ans d'emprisonnement, ces raisons ne doivent pas être remplies ».

B.9.2. L'article 247 de la loi générale sur les douanes et accises prévoit la possibilité pour les agents de mettre en état d'arrestation, à l'effet d'être mis sur-le-champ à disposition du juge, les présumés fraudeurs sans domicile connu dans le royaume, qui ont contrevenu aux articles 220 et 224 et pour lesquels une transaction n'a pas mis fin à l'affaire conformément à l'article 228.

Les infractions visées sont punies d'un emprisonnement de quatre mois au moins à un an au plus, porté à cinq ans en cas de fraude fiscale grave, de lésion des intérêts de l'Union européenne ou en cas de récidive. L'article 221, § 1er, de la loi générale sur les douanes et accises prévoit en outre que, dans les cas prévus par l'article 220, les marchandises seront saisies et confisquées, et les contrevenants encourront une amende.

L'article 248 de la loi générale sur les douanes et accises prévoit en outre que les présumés fraudeurs pourront toujours être mis en état d'arrestation préventive, lorsque l'infraction devra entraîner l'application de la peine d'emprisonnement.

B.9.3. Ces dispositions s'inscrivent dans le cadre du droit pénal douanier, qui relève du droit pénal spécial et par lequel le législateur, sur la base d'un système spécifique de recherche et de poursuite pénales, entend combattre l'ampleur et la fréquence des fraudes dans une matière particulièrement technique relative à des activités souvent transfrontalières et régie en grande partie par une abondante réglementation européenne.

Un tel objectif légitime ne dispense cependant pas le législateur de l'obligation de respecter les droits fondamentaux des personnes concernées.

B.10.1. L'article 16, § 1er, alinéa 1er, de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer fixe à un an d'emprisonnement le seuil minimal pour que la détention préventive soit possible.

Cette exigence manifeste la « volonté de réserver le recours au mandat d'arrêt aux cas d'une gravité certaine [...] sans pour autant que la barre soit imprudemment placée trop haut, privant le juge d'instruction d'un moyen qui, hélas, est parfois nécessaire » (Doc. parl., Chambre, 1989-1990, n° 1255/2, p. 4; voy. aussi Doc. parl., Sénat, 1988-1989, n° 658/2, p. 7).

B.10.2. Les articles 247 et 248 en cause autorisent la détention préventive de présumés fraudeurs sans domicile connu qui encourent une peine d'emprisonnement de quatre mois au moins (article 247) ou de présumés fraudeurs qui encourent une peine d'emprisonnement, quelle qu'en soit la durée (article 248).

Ces dispositions créent donc, en ce qui concerne les infractions pouvant justifier une détention préventive, une différence de traitement entre les personnes qui relèvent du régime de douanes et accises et celles qui relèvent du régime de droit commun.

B.10.3. Comme il est dit en B.9.3, ces dispositions s'inscrivent dans le cadre du droit pénal douanier, qui relève du droit pénal spécial et par lequel le législateur, sur la base d'un système spécifique de recherche et de poursuite pénales, entend combattre l'ampleur et la fréquence des fraudes dans une matière particulièrement technique relative à des activités souvent transfrontalières et régie en grande partie par une abondante réglementation européenne.

La constatation des infractions en matière de douanes et accises est souvent rendue difficile par le nombre de personnes qui interviennent dans le commerce et par la mobilité des marchandises sur lesquelles les droits sont dus.

Dans ce cadre, les peines d'emprisonnement ne constituent pas l'instrument privilégié pour les infractions en matière de douanes et accises, le législateur préférant punir les infractions en matière de douanes et accises d'amendes lourdes pour empêcher que des fraudes soient commises dans le but d'obtenir les gains énormes qu'elles peuvent générer.

B.10.4. La politique répressive, qui englobe l'appréciation de la gravité d'un manquement et la sévérité avec laquelle il peut être puni, relève du pouvoir d'appréciation du législateur.

Compte tenu des choix de politique répressive en matière de douanes et accises, il n'est pas manifestement disproportionné de ne pas fixer, comme en droit commun, un seuil minimal d'emprisonnement ou le même seuil minimal d'emprisonnement, pour que la détention préventive puisse être ordonnée.

B.11.1. L'article 16, § 1er, alinéa 1er, de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer prévoit par ailleurs que le mandat d'arrêt ne peut être décerné qu'en cas d'absolue nécessité pour la sécurité publique.

B.11.2. Quant à la condition selon laquelle le mandat d'arrêt ne peut être décerné qu'en cas d'absolue nécessité pour la sécurité publique, il ressort des travaux préparatoires de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer que le législateur a voulu accentuer le caractère exceptionnel de la détention préventive et exclure tout recours abusif à la détention préventive (Doc. parl., Chambre, 1989-1990, n° 1255/2, p. 2).

Désormais, « le juge d'instruction disposera d'un pouvoir d'appréciation dans tous les cas et devra toujours motiver sa décision » (Doc. parl., Sénat, 1988-1989, n° 658/2, p. 8). La notion d' « absolue nécessité » indique à cet égard « d'une manière générale le caractère restrictif de l'application de l'institution » (Doc. parl., Sénat, 1988-1989, n° 658/1, p. 6).

Il apparaît ainsi que la condition selon laquelle le mandat d'arrêt ne peut être décerné qu'en cas d'absolue nécessité pour la sécurité publique traduit le souci général du législateur de limiter au maximum la détention préventive.

B.11.3. Bien que la loi générale sur les douanes et accises ne mentionne pas explicitement l'exigence de l'absolue nécessité, il convient d'admettre, compte tenu du caractère radical de la privation de liberté et de ce qui a été indiqué plus haut, qu'après une privation de liberté fondée sur les articles 247 et 248 de la loi précitée, le juge d'instruction ne peut décerner un mandat d'arrêt qu'à condition que sa nécessité absolue en soit démontrée. Dans cette interprétation, il n'existe pas de différence de traitement par rapport à cette condition fondamentale générale pour la délivrance d'un mandat d'arrêt.

B.11.4. Enfin, en ce qui concerne les conditions fondamentales de délivrance d'un mandat d'arrêt, l'article 16, § 1er, alinéa 4, de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer prévoit encore que si le maximum de la peine ne dépasse pas quinze ans de réclusion, il faut qu'il existe, en plus de l'absolue nécessité pour la sécurité publique, de sérieuses raisons de craindre que l'inculpé, s'il était laissé en liberté, commette de nouveaux crimes ou délits, se soustraie à l'action de la justice, tente de faire disparaître des preuves ou entre en collusion avec des tiers. Ces conditions supplémentaires sont alternatives et non cumulatives (Cass., 20 mars 1996, P.96.354.F.; 12 février 1997, P.97.161.F).

La loi générale sur les douanes et accises ne prévoit pas de telles exigences comme conditions fondamentales pour la délivrance d'un mandat d'arrêt.

B.11.5. La privation de liberté fondée sur les articles 247 et 248 de la loi générale sur les douanes et accises concerne des auteurs sans domicile connu en Belgique ou des présumés fraudeurs qui encourent une peine d'emprisonnement.

B.11.6. Bien que le législateur ait pu considérer qu'en pareil cas, il existe de sérieuses raisons de craindre que l'inculpé, s'il était laissé en liberté, se soustraie à l'action de la justice ou tente de faire disparaître des preuves, cela ne peut dispenser le juge d'instruction d'établir réellement un tel risque et de motiver en conséquence le mandat d'arrêt, sans porter atteinte aux droits de l'inculpé concerné.

B.11.7. En outre, l'article 12, alinéa 3, de la Constitution, depuis la révision du 24 octobre 2017, ne permet de porter atteinte au droit à la liberté individuelle garanti par son alinéa 1er que pour autant que la personne fasse l'objet d'une arrestation fondée sur une ordonnance motivée d'un juge qui doit être signifiée dans les 48 heures de la privation de liberté.

Les travaux préparatoires relatifs à la révision constitutionnelle du 24 octobre 2017 indiquent à cet égard : « Le nouvel alinéa 3 de l'article 12 de la Constitution indique clairement qu'aucune exception, même par la loi, à la règle générale de quarante-huit heures ne sera possible. Le nouveau libellé laisse clairement entendre que le mandat d'arrêt décerné par le juge en vue d'une mise en détention préventive doit être signifié dans les 48 heures après l'arrestation. Une ordonnance de prolongation du délai d'arrestation de 48 heures au maximum, sous la responsabilité du procureur du Roi, est désormais exclue » (Doc. parl., Chambre, 2016-2017, DOC 54-2611/001, p. 5).

B.11.8.1. Bien que les articles 247 et 248 de la loi générale sur les douanes et accises ne prévoient pas expressément que le mandat d'arrêt doive être motivé, l'article 12, alinéa 3, de la Constitution impose que le mandat d'arrêt décerné par un juge d'instruction en matière de douanes et accises soit signifié dans les 48 heures après l'arrestation et qu'il soit motivé.

Cette motivation doit notamment porter sur la justification d'une privation de liberté par une détention préventive, au regard de la philosophie générale de cette mesure.

B.11.8.2. En outre, le législateur a voulu définir lui-même les raisons pour lesquelles la détention préventive peut être ordonnée, y compris pour les cas où l'inculpé n'a pas de résidence effective en Belgique (Doc. parl., Sénat, 1988-1989, n° 658/1, p. 7): « Le principe général est qu'une décision relative à la détention préventive doit être motivée autrement que par des formules de style ou des lieux communs. [...] La finalité d'une obligation de motiver est la réalisation d'une protection juridique effective pour l'individu et non l'intention de rendre inutilement difficiles les décisions à prendre.

Pour les cas où l'inculpé n'a pas de résidence effective en Belgique, la loi actuelle prévoit une justification simplifiée du mandat d'arrêt. Il ne paraît pas indiqué de prévoir une règlementation particulière pour ces cas » (ibid., pp. 7-8).

Il a également été souligné : « Actuellement, le juge d'instruction ne doit pas assortir le mandat d'arrêt d'une motivation particulière si l'inculpé n'a pas sa résidence en Belgique.

Cette distinction opérée entre inculpés ayant leur résidence en Belgique et inculpés non résidents sera supprimée.

En effet, l'inculpé n'ayant pas sa résidence en Belgique doit bénéficier de la même protection juridique que tout autre citoyen belge ou étranger.

Les mandats d'arrêts devront donc toujours être dûment motivés » (Doc. parl., Sénat, 1988-1989, n° 658/2, p. 8).

B.11.8.3. Il découle de ce qui précède que le mandat d'arrêt décerné en matière de douanes et accises ne peut être délivré qu'en cas d'absolue nécessité pour la sécurité publique et lorsqu'il y a de sérieuses raisons de craindre que l'inculpé, s'il était laissé en liberté, commette de nouveaux crimes et délits, se soustraie à l'action de la justice, tente de faire disparaître des preuves ou entre en collusion avec des tiers. De plus, il doit ressortir des motivations du mandat d'arrêt que ces conditions ont été respectées.

B.11.9. Sous réserve de l'interprétation mentionnée en B.11.8.3, la différence de traitement, en ce qui concerne les conditions de fond et la motivation du mandat d'arrêt, est inexistante.

Quant au contrôle du mandat d'arrêt et du maintien en détention B.12. Dans son ordonnance de renvoi, le juge a quo estime qu'à la différence de ce que prévoit la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer, les articles 247 et 248 de la loi générale sur les douanes et accises n'organisent aucun contrôle de la régularité du mandat d'arrêt ni de la nécessité du maintien en détention, par la chambre du conseil, avec possibilité d'appel devant la chambre des mises en accusation et de pourvoi devant la Cour de cassation. Cette absence de contrôle juridictionnel serait incompatible avec l'article 5, paragraphe 4, de la Convention européenne des droits de l'homme.

B.13.1. En vertu de l'article 5, paragraphe 4, de la Convention européenne des droits de l'homme, toute personne qui est privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal, afin qu'il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et qu'il ordonne sa libération si la détention est illégale. Un système de contrôle périodique et automatique de la légalité de la détention sans que la personne en détention préventive dispose de la possibilité d'introduire dans l'intervalle une requête en révision n'est pas en soi incompatible avec l'article 5, paragraphe 4, à condition que la révision ait lieu à des intervalles raisonnables (CEDH, 24 septembre 1992, Herczegfalvy c.

Autriche, § 75; 2 octobre 2012, Abdulkhakov c. Russie, § § 209 et 210).

Selon la nature de la privation de liberté concernée, un contrôle juridictionnel de la légalité du maintien en détention doit avoir lieu « à intervalles réguliers ». Les motifs qui justifiaient à l'origine la détention peuvent en effet cesser d'exister (CEDH, 24 octobre 1979, Winterwerp c. Pays-Bas, § 55; 19 mai 2016, D.L. c. Bulgarie, § 87).

Une détention préventive, mesure qui, selon la Convention européenne, doit être de durée strictement limitée, exige des intervalles courts (CEDH, 25 octobre 1989, Bezicheri c. Italie, § 21; Abdulkhakov c.

Russie, précité, § 213).

B.13.2. Afin d'examiner le caractère raisonnable des intervalles, il convient de tenir compte, dans l'analyse du respect de l'exigence de « bref délai » visée à l'article 5, paragraphe 4, précité, des différentes dispositions et des délais de procédure prévus par le droit interne (CEDH, 21 avril 2009, Raducu c. Roumanie, § 82).

B.13.3. L'article 5, paragraphe 4, de la Convention européenne des droits de l'homme, qui garantit à toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention le droit d'introduire un recours devant un tribunal, ne fait cependant naître aucun droit à un recours contre les décisions juridictionnelles ordonnant ou prolongeant une arrestation. En vertu de l'article 5, paragraphe 4, l'intervention d'un organe unique suffit, à condition que la procédure suivie ait un caractère juridictionnel et donne à l'individu en cause des garanties adaptées à la nature de la privation de liberté dont il s'agit (CEDH, 18 juin 1971, De Wilde, Ooms et Versyp c. Belgique, § 76; 31 juillet 2000, Jécius c. Lituanie, § 100).

B.14.1. Les articles 250 à 252 de la loi générale sur les douanes et accises prévoient une procédure accélérée en matière de douanes et accises.

Ces articles disposent : «

Art. 250.Les agents des douanes et accises pourront amener les individus qu'ils mettent en état d'arrestation, conformément aux articles 247 à 249, devant le juge au tribunal de police du canton dans lequel l'arrestation s'est faite, ou les officiers de la police fédérale, s'il s'en trouve dans cet endroit, et dans ce cas le juge au tribunal de police ou les officiers de la police fédérale seront tenus de faire conduire, le plus tôt possible, les individus arrêtés devant le procureur du Roi.

Art. 251.Les agents des douanes et accises seront obligés de transmettre au juge au tribunal de police ou au procureur du roi, lors de l'arrestation ou du moins aussitôt que possible, et dans les trois jours au plus tard, une copie du procès-verbal constatant l'infraction.

Art. 252.Si, dans le terme de quatorze jours après que l'individu arrêté est arrivé dans la prison, et après qu'il en a été donné connaissance au conseiller général désigné pour l'administration en charge des contentieux, il n'a point été porté d'action par l'Administration générale des douanes et accises, ou en son nom, devant le tribunal correctionnel, le procureur du roi sera tenu de mettre en liberté sur-le-champ, mais provisoirement, l'individu arrêté, et de faire aussitôt part de cet élargissement au directeur régional ».

L'article 252 de la loi générale sur les douanes et accises prévoit que, si aucune action n'a été portée devant le tribunal correctionnel dans les quatorze jours après que l'individu arrêté est arrivé dans la prison et après qu'il en a été donné connaissance au conseiller général désigné pour l'administration en charge du contentieux - cette information devant être considérée comme concomitante avec le moment où l'individu arrêté est arrivé dans la prison -, le procureur du Roi sera « tenu de mettre en liberté sur-le-champ, mais provisoirement, l'individu arrêté ».

Il découle de l'article 252 de la loi générale sur les douanes et accises que la durée de la détention préventive est en principe strictement limitée puisque, si aucune action n'est portée devant le tribunal correctionnel dans les quatorze jours de l'arrivée de l'individu dans la prison, il sera mis fin à la détention préventive par une mise en liberté provisoire.

B.14.2. Les possibilités de recours juridictionnel contre le mandat d'arrêt en matière de douanes et accises doivent dès lors être appréciées au regard de cette durée strictement limitée entre l'arrestation et la saisine du tribunal correctionnel.

B.14.3. En excluant l'application de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer, les dispositions en cause privent la personne mise en détention préventive en matière de douanes et accises du contrôle de la régularité du mandat d'arrêt et du maintien de la détention préventive, dans les cinq jours de la délivrance du mandat d'arrêt, par la chambre du Conseil, prévus par l'article 21 de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer, et du contrôle systématique, par la chambre du conseil, de mois en mois, du maintien de la détention préventive, conformément à l'article 22 de la même loi.

B.15. Dès lors que, comme il est dit en B.14.1, la durée entre l'arrestation de la personne et la saisine du tribunal correctionnel est strictement limitée et ne peut donc atteindre un mois, il est cohérent de ne pas prévoir, en matière de douanes et accises, un contrôle systématique, de mois en mois, tel que celui que prévoit l'article 22 de la loi du 20 juin 1990.

Une telle mesure ne peut par conséquent entraîner une limitation disproportionnée des droits des intéressés.

B.16.1. En ce qui concerne le contrôle de la légalité du mandat d'arrêt et du maintien en détention préventive, il convient d'examiner si, compte tenu de la durée strictement limitée entre l'arrestation de la personne et la saisine du tribunal correctionnel, l'absence d'un contrôle systématique, dans les cinq jours, de la régularité du mandat d'arrêt et du maintien en détention préventive ne porte pas une atteinte excessive aux droits de la personne mise en détention préventive en matière de douanes et accises.

Une telle limitation des droits de l'intéressé ne saurait être compatible avec l'article 5, paragraphe 4, de la Convention européenne des droits de l'homme, combiné avec les articles 10 et 11 de la Constitution, que si l'intéressé dispose d'un recours offrant, au regard de la procédure en matière de douanes et accises considérée dans son ensemble, des garanties équivalentes à celles des recours organisés par la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer.

B.16.2.1. L'article 281, § 1er, de la loi générale sur les douanes et accises dispose : « Toutes actions du chef de contraventions, fraudes ou délits, contre lesquels les lois en matière de douanes et accises prononcent des peines seront portées en première instance devant les tribunaux correctionnels, et, en cas d'appel, devant la cour d'appel du ressort, pour y être instruites et jugées conformément au Code d'instruction criminelle ».

Il résulte de cette disposition, combinée avec les articles 247 et 248 de la loi générale sur les douanes et accises, que la personne mise en détention préventive en matière de douanes et accises a la possibilité d'introduire une demande de mise en liberté provisoire, conformément aux articles 113 et suivants du Code d'instruction criminelle.

La Cour de cassation a en effet jugé : « Attendu qu'en vertu de l'article 22 de la loi du 20 avril 1874 relative à la détention préventive il n'est pas dérogé aux lois relatives à la répression de la fraude en matière de douanes », de sorte qu'« en vertu de l'article 281 de la loi générale la détention préventive en matière de douanes [...] est régie par les dispositions du Code d'instruction criminelle, à l'exclusion des dispositions de la loi du 20 avril 1874 et sous réserve des dispositions dérogatoires que contiendraient les lois en matière de douanes et accises » (Cass., 6 mars 1984, Pas., 1984, n° 382; voy. aussi Cass., 9 mai 1978, Pas., 1978, p. 1031).

Lorsqu'une telle demande de mise en liberté provisoire en matière de douanes et accises est introduite avant la saisine du tribunal correctionnel, elle est adressée à la chambre du conseil, puis, en appel, à la chambre des mises en accusation, conformément à l'article 114 du Code d'instruction criminelle. Ainsi, la Cour de cassation a jugé : « Attendu que le juge d'instruction et les juridictions d'instruction ont seuls compétence pour statuer sur une demande de mise en liberté provisoire d'un détenu depuis la délivrance du mandat jusqu'au renvoi devant le tribunal correctionnel; qu'aux termes de l'article 114 du Code d'instruction criminelle, applicable à la matière en vertu de l'article 22 de la loi du 20 avril 1874, c'est la chambre du conseil qui devait connaître de la demande; que la juridiction d'appel de la chambre du conseil est la chambre des mises en accusation » (Cass., 28 mai 1934, Pas., 1934, p. 290).

Par contre, lorsque la demande de mise en liberté provisoire en matière de douanes et accises est introduite après la saisine du tribunal correctionnel, elle doit être adressée à ce dernier, avec possibilité d'appel devant la cour d'appel. Ainsi, la Cour de cassation a jugé qu'« [a]près la décharge du juge d'instruction de l'instruction et la citation par l'administration des douanes et accises devant le tribunal correctionnel, la juridiction qui prend connaissance de la cause est uniquement compétente pour statuer sur la demande de mise en liberté provisoire de l'inculpé » (Cass., 10 juin 2008, P.08.0831.N).

B.16.2.2. En ce qui concerne la demande de mise en liberté pouvant être introduite en matière de douanes et accises avant la saisine du tribunal correctionnel, conformément aux articles 113 et suivants du Code d'instruction criminelle, la Cour de cassation a jugé : « Attendu que, conformément à l'article 5.4 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la chambre du conseil et, en degré d'appel, la chambre des mises en accusation appelées, en application de l'article 114 du Code d'instruction criminelle, à statuer sur une demande de mise en liberté provisoire en matière de douanes et accises sont tenues d'examiner la légalité de l'arrestation » (Cass., 30 juillet 1996, P.96.1062.N).

Afin que le recours de l'intéressé offre, au regard de la procédure en matière de douanes et accises considérée dans son ensemble, des garanties équivalentes à celles que prévoit le recours organisé par l'article 21 de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer, la demande de mise en liberté provisoire doit impliquer un examen de la régularité du mandat d'arrêt et de la justification du maintien en détention préventive.

Si les juridictions d'instruction estiment que le mandat d'arrêt n'a pas été régulièrement décerné ou qu'un maintien en détention préventive n'est plus justifié, conformément à ce qui est dit en B.11.8.3, l'intéressé doit être libéré immédiatement, sans conditions, et donc sans le cautionnement prévu à l'article 114, alinéa 2, du Code d'instruction criminelle.

En outre, la demande de mise en liberté provisoire doit - sous peine de ne pas constituer un recours effectif - être traitée dans les mêmes délais que ceux qui sont prévus à l'article 27 de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer, qui prévoit également une possibilité de demander la mise en liberté provisoire.

B.16.2.3. Sous réserve que la demande de mise en liberté provisoire introduite par la personne en détention préventive en matière de douanes et accises avant la saisine du tribunal correctionnel soit interprétée dans le sens de ce qui est dit en B.16.2.2, les dispositions en cause n'entraînent pas une limitation disproportionnée des droits des intéressés.

B.16.3. Par ailleurs, conformément aux articles 113 à 126 du Code d'instruction criminelle, une demande de mise en liberté provisoire peut être adressée au tribunal correctionnel lorsque ce dernier a été saisi en application de l'article 252 de la loi générale sur les douanes et accises.

L'article 27 de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer prévoit que, lorsque l'instruction est terminée, mais que la détention préventive n'a pas pris fin, l'inculpé dispose de la possibilité de demander sa mise en liberté provisoire au tribunal correctionnel saisi; il est statué sur la requête dans les cinq jours de son dépôt.

Lorsque le tribunal correctionnel est saisi en application de l'article 252 de la loi générale sur les douanes et accises, la personne en détention préventive en matière de douanes et accises doit, lorsqu'elle introduit une demande de mise en liberté provisoire auprès du tribunal correctionnel, disposer d'un recours offrant des garanties équivalentes à celles que prévoit le recours organisé par l'article 27 de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer et traité dans les mêmes délais que ceux qui sont prévus par cette disposition. Il en résulte que l'exigence de cautionnement ne doit pas être appliquée à cette demande.

B.16.4. Sous réserve que la demande de mise en liberté provisoire introduite par la personne en détention préventive en matière de douanes et accises après la saisine du tribunal correctionnel soit interprétée comme il est dit en B.16.3, les dispositions en cause n'entraînent pas une limitation disproportionnée des droits des intéressés.

B.17. Pour le surplus, la Cour rappelle, comme elle l'a dit en B.7.2, que c'est au législateur qu'il appartient de réformer la loi générale sur les douanes et accises et de garantir aux personnes détenues préventivement que, compte tenu du caractère essentiel de la liberté individuelle, elles bénéficieront de l'application de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer ou, à tout le moins, de garanties équivalentes à celles qui sont énoncées dans la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : Sous réserve des interprétations mentionnées en B.11.8.3, B.16.2.2 et B.16.3, l'article 47 de la loi du 20 juillet 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/1990 pub. 02/12/2010 numac 2010000669 source service public federal interieur Loi relative à la détention préventive Coordination officieuse en langue allemande fermer « relative à la détention préventive » et les articles 247 et 248 de la loi générale sur les douanes et accises, coordonnée le 18 juillet 1977, ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec l'article 5, paragraphe 4, de la Convention européenne des droits de l'homme.

Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 4 mars 2021.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, F. Daoût

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