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Rapport
publié le 23 juillet 2002

Conseil de la Concurrence. Décision n° 2002-V/M-01 du 8 janvier 2002. - Affaire CONC-VMP-96/0001 Vu : * la lettre du 23 janvier 1996,enregistrée le 29 janvier 1996, par laquelle le conseil de Maître Raphaël Tambue a saisi le Conseil de la Con * le rapport du Service de la concurrence déposé le 26 février 1996 * la décision de Mme la Prés(...)

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MINISTERE DES AFFAIRES ECONOMIQUES


Conseil de la Concurrence. Décision n° 2002-V/M-01 du 8 janvier 2002. - Affaire CONC-VMP-96/0001 Vu : * la lettre du 23 janvier 1996,enregistrée le 29 janvier 1996, par laquelle le conseil de Maître Raphaël Tambue a saisi le Conseil de la Concurrence en déposant plainte contre l'Ordre national des avocats de Belgique et le Conseil de l'ordre des avocats du Barreau d'Arlon et sollicité des mesures provisoires sur base de la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer sur la protection de la concurrence économique * le rapport du Service de la concurrence déposé le 26 février 1996 * la décision de Mme la Présidente du Conseil de la Concurrence du 19 mars 1996 et la question préjudicielle posée à la Cour d'arbitrage * l'arrêt du 30 avril 1997 de la Cour d'arbitrage * la plainte déposée le 12 novembre 1997 par le demandeur auprès de la Commission de l'Union européenne, Service de la Concurrence, contre l'Ordre national des avocats de Belgique et divers Ordres locaux * la décision de rejet de cette plainte du 21 septembre 1998 par la Commission des Communautés européennes * le rapport du Service de la Concurrence du 8 janvier 1999 * les mémoires de synthèse déposés par le demandeur le 8 janvier 2001, pour l'Ordre des avocats du barreau d'Arlon le 2 février 2001 et pour l'Ordre national des avocats de Belgique le même jour * la décision du Conseil de la Concurrence du 3 octobre 2001 Entendu à l'audience du 7 novembre 2001 le demandeur, les parties et leurs conseils ainsi que les rapporteurs du Service de la concurrence Après délibéré, le Conseil prononce la décision suivante : I. La demande et les antécédents de procédure Par courrier daté du 23 janvier 1996 adressé au secrétariat du Conseil de la Concurrence, M. Raphaël TAMBUE ( ci-après « le demandeur » ) dépose plainte contre le Conseil des avocats du barreau d'Arlon et contre l'Ordre national des avocats de Belgique entre les mains du Conseil de la Concurrence.

Les plaintes du demandeur tendent, au fond, à : * constater que les règlements de l'Ordre national des avocats de Belgique du 13 janvier 1994 ainsi que les divers règlements adoptés dans la plupart des barreaux pour restreindre l'accès à la profession d'avocat et notamment par le Barreau d'Arlon qui limite le nombre de stagiaires à un stagiaire par patron de stage constituent des pratiques restrictives de concurrence * ordonner la cessation de ces pratiques en faisant interdiction à l'Ordre national des avocats de Belgique, à l'Ordre des avocats du barreau d'Arlon ou à tout autre Conseil de l'Ordre d'exiger du demandeur la possession du certificat d'aptitude à la profession d'avocat comme condition d'admission ou de maintien sur une liste des stagiaires ou sur un tableau des avocats inscrits * faire interdiction à l'Ordre national des avocats de Belgique, à l'Ordre des avocats du barreau d'Arlon ou à tout autre Conseil de l'Ordre de s'opposer à l'admission du demandeur comme stagiaire par tout patron de stage au motif que ce patron de stage assumerait déjà la maîtrise de stage d'un ou de plusieurs autres stagiaires * décider de toutes autres modalités qu'il plaira au Conseil de la Concurrence pour assurer la cessation des pratiques restrictives de concurrence dénoncées conformément à l'article 31 de la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer.

Au provisoire, le demandeur sollicite du Conseil de la Concurrence les mesures suivantes : * faire interdiction au barreau d'Arlon de poursuivre la procédure d'omission annoncée à l'encontre du demandeur et lui faire injonction de s'abstenir de toute autre mesure de nature à entraver le déroulement normal du stage de celui-ci tant que le Conseil de la Concurrence n'aura pas statué * enjoindre au barreau d'Arlon (pour son propre ressort territorial) et à l'Ordre national (pour le reste du pays) de faire en sorte que le demandeur ne puisse provisoirement se voir opposer aucun règlement ni aucune pratique limitant l'accès au stage d'avocat, notamment en prévoyant une limitation du nombre de stagiaires par patron de stage.

En son rapport du 26 février 1996, l'Inspection générale des Prix et de la Concurrence a proposé au Conseil de la Concurrence de prendre les mesures provisoires suivantes : * faire injonction à l'Ordre national des avocats de Belgique de suspendre les dispositions du règlement incriminé relatives au CAPA (certificat d'aptitude à la profession d'avocat) dans la mesure où les règlements de l'Ordre national sont obligatoires à l'égard des Ordres locaux * interdire à l'Ordre des avocats du barreau d'Arlon et, par l'intermédiaire de l'Ordre national, à tout Ordre local, de subordonner la réussite du stage et, par voie de conséquence, l'inscription au tableau de l'Ordre à la réussite du CAPA * faire injonction à l'Ordre des avocats du barreau d'Arlon et, par l'intermédiaire de l'Ordre national, à tout Ordre local, de suspendre les dispositions de leurs règlements limitant directement ou indirectement le nombre de stagiaires par patron de stage * assortir ses décisions d'une astreinte.

Par décision du 19 mars 1996, Mme la Présidente du Conseil de la Concurrence a posé à la Cour d'arbitrage la question préjudicielle suivante : Les dispositions de la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer sur la protection de la concurrence économique relatives à la saisine du Conseil de la Concurrence et aux compétences du Conseil de la Concurrence à l'égard des entreprises et des associations d'entreprise et notamment les articles 6, § 1er, 10, § 1er, 12, § 5, 16, 23, § 1er, 27 à 33, 35, 36 à 41, violent-elles l'article 10 de la Constitution dans la mesure où il faudrait déduire de ces dispositions, interprétées à la lumière des articles 468, 469bis, 477, 502, 610 et 611 et 1088 du Code judiciaire, qu'échappent à la juridiction du Conseil de la Concurrence - à supposer qu'ils constituent des pratiques restrictives de concurrence au sens de la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer ou des articles 85 et 86 du Traité de Rome - les règles et usages de la profession d'avocat arrêtés par voie de règlement du Conseil général de l'Ordre national des avocats, ou résultant des actes des autorités du barreau, en ce compris le résolutions réglementaires que les Conseils de l'Ordre adoptent et, dans la mesure où il faudrait dès lors constater que la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer crée, sur le plan de l'application du droit de la concurrence, entre les titulaires de la profession d'avocat et ceux d'autres professions libérales, un traitement différencié sur base d'un critère de rattachement de leur Ordre respectif à l'ordre administratif ou à l'ordre judiciaire ? Par arrêt du 30 avril 1997, la Cour d'arbitrage a répondu de la manière suivante : « L'article 10 de la Constitution n'est pas violé par les dispositions de la loi du 5 août sur la concurrence économique relatives à la saisine du Conseil de la Concurrence et aux compétences du Conseil de la concurrence à l'égard des entreprises et associations d'entreprises, et notamment les articles 6, 6 1, 10, § 1er, 12 6 (, 16, 23, § 1er, 27 à 33, 35, 36 à 41, n ce que ces dispositions, interprétées à la lumière des articles 468 , 469bis, 477 , 502 , 610 , 611 et 1088 du code judiciaire, font échapper à la juridiction du Conseil de la Concurrence - à supposer qu'ils constituent des pratiques restrictives de concurrence au sens de la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer et des articles 85 et 86 du Traité de Rome - les règles et usages de la profession d'avocat arrêtés par voie de règlements du Conseil général de l'Ordre national des avocats, ou résultant des actes des autorités du barreau, en ce compris les résolutions réglementaires que les Conseils de l'Ordre adoptent ».

Suite à cet arrêt, et sur invitation de Mme la Présidente du Conseil de la Concurrence, la Division Prix et Concurrence a établi un rapport complémentaire en vue d'actualiser le rapport du 26 février 1996.

Le 8 janvier 1999, le Service a proposé à Mme la Présidente de : * faire injonction à l'Ordre national des avocats de Belgique de suspendre les dispositions du règlement incriminé relatives au CAPA, dans la mesure où les règlements de l'Ordre national sont obligatoires à l'égard des Ordres locaux * interdire à l'Ordre des avocats du barreau (d'Arlon) et, par l'intermédiaire de l'Ordre national, à tout Ordre local, de subordonner la réussite du stage et, par voie de conséquence, l'inscription au tableau de l'Ordre, à la réussite du CAPA * assortir ces décisions d'une astreinte.

Le demandeur sollicite, dans son mémoire de synthèse, qu'il soit fait droit à ces demandes.

II. Exposé des faits Le demandeur, né en République démocratique du Congo en 1947, est de nationalité allemande.

Il est titulaire d'une licence en droit délivrée en 1975 par la Faculté de Droit de l'Université de Strasbourg. Il termine une maîtrise en droit à l'Université de Metz un an plus tard.

De 1977 à 1983, il est fonctionnaire au Ministère des Transports et Communication à Kinshasa. De 1984 à 1993, il est juriste-collaborateur au sein d'un cabinet d'avocats situé à Sarrebruck.

Le 18 mai 1993, le demandeur prête le serment d'avocat à la Cour d'Appel de Liège et est inscrit à la liste des stagiaires le 22 mai suivant.

Le règlement de l'Ordre national des avocats de Belgique sur le stage et la formation professionnelle (ci-après « RON ») lui est applicable.

Ce règlement prévoit, entre autre, que : * article 7 : Sont seuls reçus à présenter l'épreuve les stagiaires qui justifient avoir effectivement suivi les 2/3 des cours au moins, dans les deux années qui précèdent. (...) * article 8 : Chaque stagiaire doit réussir, au plus tard, à l'issue de la deuxième année de stage, une épreuve consistant en une interrogation verbale ou écrite sur chacune des matières faisant l'objet du programme. Chaque stagiaire ne peut représenter cette épreuve qu'à deux reprises. * article 16 : Le jury décerne le CAPA au stagiaire qui a obtenu une cote de 12/20 dans toutes les matières. Il peut décerner également ce certificat au stagiaire qui a obtenu 12/20 dans 5 matières au moins, et une moyenne de 50 % des points au moins pour l'ensemble des matières. * article 17 : En cas d'échec, le stagiaire doit représenter celui-ci au plus tard à la fin de sa deuxième année de stage. En cas de deuxième échec ou en cas de circonstances exceptionnelles, le stagiaire est invité devant le conseil de l'Ordre pour y présenter ses explications. Le conseil de l'Ordre pourra soit l'autoriser à présenter une dernière épreuve dans les six mois, soit l'omettre conformément au code judiciaire pour non-accomplissement des obligations de stage. * article 20 : Le stagiaire qui demande son inscription à la liste des stagiaires d'un autre barreau doit justifier de la délivrance du CAPA dans son barreau d'origine. Sinon, il est tenu de suivre ou de compléter le cycle de cours et de présenter l'épreuve au sein du barreau dans lequel il demande son inscription.

Le demandeur a présenté les épreuves en avril 1994 et septembre 1994.

A chaque fois, il a échoué. Par décision du conseil de l'Ordre du barreau d'Arlon du 5 décembre 1994 il fût autorisé à présenter une « troisième et dernière fois » les examens du CAPA. Dans l'intervalle, le maître de stage du demandeur fût nommé magistrat et un autre membre du barreau d'Arlon accepta d'assumer la continuation de la charge de maître de stage.

Le demandeur représenta les examens relatifs à l'épreuve CAPA en avril 1995. Sans obtenir la cote de 12/20, il pouvait prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 16 al .2 dont il vient d'être fait état.

Toutefois, la délibération du Conseil de l'Ordre ne fût pas positive en ce qui le concernait. Le demandeur fût cependant autorisé » à titre tout-à-fait exceptionnel » à représenter une quatrième fois les examens du CAPA. Ce qu'il fit, sans succès, en septembre 1995.

Le 11 décembre 1995, le conseil de l'Ordre des avocats du barreau d'Arlon décide d'entamer la procédure d'omission du demandeur de la liste des stagiaires, et ce pour non-accomplissement des obligations de stage.

Le 23 janvier 1996, celui-ci dépose une plainte devant le Conseil belge de la concurrence pour violation de la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer sur la protection de la concurrence économique. Cette plainte est assortie d'une demande de mesures provisoires laquelle fait l'objet des présents débats.

Comme déjà exposé, Mme la Présidente du Conseil de la concurrence posa, en date du 19 mars 1996, une question préjudicielle à la Cour d'arbitrage à laquelle il fût répondu par un arrêt du 30 avril 1997 ( cfr. supra ).

Le 12 novembre 1997, le demandeur introduisit une plainte assortie d'une demande de mesures provisoires devant la Commission des Communautés Européennes. Par une décision de la Commission du 17 septembre 1998, la plainte est rejetée pour défaut d'intérêt communautaire suffisant.

Entre temps, le demandeur avait sollicité, en raison d'un état de santé déficient et de difficultés financières, la suspension de ses obligations de stage. Cette demande fût repoussée le 27 avril 1998 au motif que celui-ci n'avait pas produit de document prouvant son état de santé et qu'il ne justifiait pas en quoi sa situation financière serait exceptionnelle par rapport à celle des autres stagiaires.

Les débats reprirent devant Mme la Présidente le 16 décembre 1998 et celle-ci invita la Division Prix et Concurrence d'établir un complément de rapport, ce qui fût fait le 8 janvier 1999 (cfr. supra).

Le 26 février 1999, le Conseil de l'Ordre du barreau d'Arlon omet le demandeur de la liste des stagiaires et motive sa décision par le fait que celui-ci n'a pas fréquenté le cabinet de son deuxième patron, qu'il n'a pas fréquenté assidûment les audiences et qu'il n'a pas réussi les épreuves du CAPA. Le 15 mars 1999, le demandeur relève appel de cette décision devant le Conseil de discipline d'appel, ce qui a pour effet de suspendre la décision d'omission. L'affaire, à ce jour, est toujours pendante devant le Conseil de discipline d'appel.

III. Position des parties et décision du 3 octobre 2001 Maître Raphaël Tambue Le demandeur déclare conserver un intérêt à agir et explique qu'il souhaite obtenir son inscription au Tableau de l'Ordre pour retourner ensuite exercer la profession de magistrat dans son pays d'origine (la République démocratique du Congo).

Il est à relever que le demandeur est toujours inscrit sur la liste des avocats stagiaires du barreau d'Arlon, en raison de l'effet suspensif de l'appel du 15 mars 1999 à l'encontre de la décision du 26 février 1999 du Conseil de l'Ordre des avocats du barreau d'Arlon.

Le demandeur considère que le règlement litigieux n'a pas de fondement légal, mais à supposer même qu'il en ait un, la qualification de décision d'association d'entreprises est maintenue et donne compétence au Conseil de la Concurrence pour connaître de la demande.

A son estime, l'intérêt économique général au sens de l'article 35 de la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer est mis en péril - ce qui constitue une condition de compétence du Président - et l'adoption de mesures instaurant une restriction de concurrence ne se justifie pas et n'est nullement nécessaire au maintien des règles fondamentales de la profession.

Le demandeur sollicite en conséquence qu'il soit fait droit à la demande de mesures provisoires telles que formulées par le Service de la Concurrence dans son rapport du 8 janvier 1999 L'Ordre national des avocats de Belgique et l'Ordre des avocats du barreau d'Arlon La position des deux Ordres s'articule autour de quatre axes : * le demandeur n'a plus d'intérêt à son action * les conditions du référé, à savoir l'urgence et l'apparence de bon droit ne sont pas réunies * le Conseil de la Concurrence n'est pas compétent, les règlements incriminés relèvent de la compétence exclusive des autorités judiciaires * les règlements incriminés ne sont pas des décisions d'associations d'entreprises qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser de manière sensible la concurrence sur le marché belge ou une partie substantielle de celui-ci * en toute hypothèse, les règlement incriminés se justifient par des motifs touchant à l'intérêt général La décision du Conseil de la Concurrence du 3 octobre 2001 La loi du 4 juillet 2001Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/07/2001 pub. 24/07/2001 numac 2001009622 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code d'instruction criminelle et modifiant la loi du 19 février 2001 relative à la médiation en matière familiale dans le cadre d'une procédure judiciaire type loi prom. 04/07/2001 pub. 25/07/2001 numac 2001009644 source ministere de la justice Loi modifiant, en ce qui concerne les structures du barreau, le Code judiciaire et la loi du 13 mars 1973 relative à l'indemnité en cas de détention préventive inopérante type loi prom. 04/07/2001 pub. 07/08/2001 numac 2001009667 source ministere de la justice Loi modifiant l'article 633 du Code judiciaire fermer, publiée au Moniteur Belge du 25 juillet 2001, a organisé la disparition de l'Ordre national des avocats de Belgique ainsi que son remplacement par deux nouvelles institutions autonomes.

L'Ordre des barreaux francophones et germanophone réunit les ordres francophones ainsi que l'Ordre des avocats du barreau d'Eupen et l'« Orde van Vlaamse balies » regroupent les ordres néerlandophones.

Ces Ordres succèdent à la Conférence des barreaux francophones et germanophone et à la Vereniging van Vlaamse balies, associations constituées sur une base consensuelle suite aux difficultés rencontrées par l'Ordre national des avocats de Belgique.

La loi du 4 juillet 2001Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/07/2001 pub. 24/07/2001 numac 2001009622 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code d'instruction criminelle et modifiant la loi du 19 février 2001 relative à la médiation en matière familiale dans le cadre d'une procédure judiciaire type loi prom. 04/07/2001 pub. 25/07/2001 numac 2001009644 source ministere de la justice Loi modifiant, en ce qui concerne les structures du barreau, le Code judiciaire et la loi du 13 mars 1973 relative à l'indemnité en cas de détention préventive inopérante type loi prom. 04/07/2001 pub. 07/08/2001 numac 2001009667 source ministere de la justice Loi modifiant l'article 633 du Code judiciaire fermer confère aux deux Ordres leur autonomie organisationnelle.

Désormais, les deux Ordres communautaires sont compétents, entre autres, en matière d'aide juridique, de stage, de formation professionnelle des avocats stagiaires et de formation de tous les avocats appartenant aux barreaux qui en font partie.

Le 3 octobre 2001, le Conseil de la Concurrence a décidé de communiquer aux deux nouvelles entités - qui n'étaient pas à la cause - l'état de la présente procédure dans la mesure où l'objet des débats relèvent de compétences désormais attribuées aux deux Ordres créés par la nouvelle loi afin de permettre à ceux-ci de faire valoir, s'ils l'estiment opportuns, leur point de vue respectif quant aux présents débats.

Le Président de l'Ordre des Barreaux francophones et germanophone a fait savoir au Conseil de la Concurrence, par courrier du 18 octobre 2001 que « M. le Bâtonnier Antoine Braun poursuivra la défense de l'Ordre des barreaux francophones et germanophone » alors que la Présidente de l'« Orde van Vlaamse Balies » a fait savoir, par courrier du 15 octobre 2001, que cet Ordre n'envisageait pas pour l'heure d'intervention et ne comparaîtrait en conséquence pas à l'audience du 7 novembre 2001.

A l'heure actuelle, l'Ordre national des avocats de Belgique n'est cependant toujours pas dissous et ne le sera qu'au moment où les deux Ordres seront opérationnels, et ce en exécution de l'article 506 nouveau du code judiciaire.

Il résulte enfin des dispositions transitoires de la loi du 4 juillet 2001Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/07/2001 pub. 24/07/2001 numac 2001009622 source ministere de la justice Loi modifiant certaines dispositions du Code d'instruction criminelle et modifiant la loi du 19 février 2001 relative à la médiation en matière familiale dans le cadre d'une procédure judiciaire type loi prom. 04/07/2001 pub. 25/07/2001 numac 2001009644 source ministere de la justice Loi modifiant, en ce qui concerne les structures du barreau, le Code judiciaire et la loi du 13 mars 1973 relative à l'indemnité en cas de détention préventive inopérante type loi prom. 04/07/2001 pub. 07/08/2001 numac 2001009667 source ministere de la justice Loi modifiant l'article 633 du Code judiciaire fermer que les règlements adoptés par l'Ordre national restent d'application jusqu'à leur remplacement (éventuel) par de nouveaux règlements édictés par les deux Ordres.

IV. Position du conseil 4.1. L'intérêt à agir L'Ordre des Avocats du barreau Arlon et l'Ordre national des avocats de Belgique considèrent que le demandeur n'a pas d'intérêt à son action, dans la mesure où, même dans l'hypothèse d'une suspension des règlements litigieux, « le Conseil de discipline d'appel devrait constater que, cinq ans après son admission, M.Tambue n'a toujours pas rempli les obligations légales établies par son barreau et, partant, l'omettre de la liste des stagiaires ».

Les obligations concernées sont les suivantes : * fréquenter le cabinet d'un patron * fréquenter assidûment les audiences des cours et tribunaux * assumer la défense des personnes dont les intérêts lui sont confiés par le bureau de consultation et de défense * suivre avec fruit des cours de formation professionnelle.

Dans la mesure où le demandeur sollicite du Conseil la suspension et l'interdiction d'une des obligations ayant entraîné en raison de sa violation la décision d'omission prise à son encontre le 26 février 1999 par le Conseil de l'Ordre du barreau d'Arlon, le demandeur a intérêt à agir.

Le demandeur conserve également un intérêt à agir dès lors qu'il est toujours réputé inscrit à la liste des stagiaires en raison de l'effet suspensif de l'appel dirigé devant le Conseil de discipline d'appel.

Enfin, le fait qu'il ait provisoirement cesser ses activités au Barreau d'Arlon est sans incidence sur la question de l'intérêt vu le souhait réitéré du demandeur de solliciter son inscription au Tableau de l'Ordre, en vue notamment de son intention déclarée d'entamer une carrière dans la magistrature en République démocratique du Congo. 4.2. La réunion des conditions du référé Aux termes de l'article 35 de la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, l'urgence, qui doit s'apprécier au moment où le juge statue, se définit comme la menace d'un préjudice grave, imminent et irréparable pour l'intéressé ou l'intérêt général.

Le demandeur a été omis de la liste des stagiaires par décision du 26 février 1999, décision suspendue par l'effet de l'appel aussi longtemps que le conseil de discipline d'appel ne se sera pas prononcé.

Une décision définitive d'omission aurait pour conséquence la fermeture de l'accès à la profession d'avocat pour le demandeur.

La décision du 26 février 1999 est motivée par le fait que le demandeur n'a pas fréquenté le cabinet de son deuxième patron, qu'il n'a pas fréquenté assidûment les audiences et qu'il n'a pas réussi les épreuves du CAPA. Si les mesures provisoires demandées venaient à lui être accordées par le Conseil de la Concurrence, une au moins des motivations d'omission, soit l'échec dans les épreuves du CAPA, viendrait, même le cas échéant à titre provisoire, à disparaître.

A défaut, le demandeur se verrait priver de l'accès à la barre.

Il en résulte qu'à ce stade, la condition de l'urgence telle qu'elle vient d'être rappelée est remplie.

Quant à l'apparence de bon droit, il se conçoit difficilement, toujours à ce stade, de ne pas considérer que, prima facie, les règlements litigieux puissent, le cas échant, être contraires à l'article 2 de la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, fût-ce simplement en raison même des décisions déjà prises en cette cause, e.a. celle du 19 mars 1996 de la Présidente du Conseil ainsi que celle de la Commission du 17 septembre 1998.

Enfin, la circonstance que la suspension des règlements incriminés léseraient l'ensemble des avocats stagiaires qui n'ont pas encore subi les épreuves du CAPA n'est pas établie.

On voit mal en effet en quoi l'obligation de devoir ultérieurement entreprendre des démarches nécessaires à l'obtention du certificat léseraient gravement ceux-ci dans la mesure ou, au jour d'aujourd'hui, ils en sont de toutes façons astreints. 4.3. La question de la compétence du Conseil de la Concurrence Il importe d'examiner si : * les règles incriminées relèvent de la compétence exclusive des autorités judiciaires * à défaut, si la notion d'entreprise recouvre l'activité d'avocat et si l'Ordre National et/ou les Ordres locaux doivent être considérés comme association d'entreprises * en pareille hypothèse, si les règlements incriminés ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser de manière sensible la concurrence sur le marché belge ou une partie substantielle de celui-ci. 4.3.1. Les règles incriminées relèvent-elles de la compétence exclusive des autorités judiciaires ? Face à une exception d'incompétence, la Présidente du Conseil de la Concurrence avait décidé, par décision du 19 mars 1996 (cfr. supra) de surseoir à statuer et de poser à la Cour d'arbitrage une question préjudicielle sur la question de savoir si, dans l'hypothèse où il faudrait interpréter la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, à la lumière des articles du Code judiciaire organisant des recours contre les actes et règlements des autorités du Barreau devant le pouvoir judiciaire, comme excluant sa compétence à l'égard des actes et règlements du Barreau, cette législation ne violerait-elle pas la règle constitutionnelle d'égalité, dans la mesure où les autres ordres des professions libérales sont justiciables du Conseil de la Concurrence.

Cette question a été posée le 19 mars 1996. La Cour constitutionnelle y a répondu par un arrêt du 30 avril 1997.

Il convient d'analyser la portée de celui-ci.

La réponse de la Cour d'arbitrage ne permet de tirer aucune conclusion définitive au sujet de la compétence du Conseil de la Concurrence à l'égard des actes et règlements du Barreau.

Elle comporte deux volets : * Les dispositions du Code judiciaire mentionnée dans la question préjudicielle figurent dans la deuxième partie du Code qui traite de l'organisation judiciaire.

Elles organisent des recours contre les décisions et règlements des autorités du barreau. Les unes attribuent aux conseils de discipline d'appel la connaissance des recours dirigés contre les sentences disciplinaires rendus par les conseils de l'Ordre et contre les décisions prises par ces conseils en matière d'inscription au tableau et d'admission au stage.

Les autres traitent des recours en annulation qui peuvent être exercés pour excès de pouvoir, notamment contre les actes des conseils de l'Ordre et contre les règlements du conseil général de l'Ordre national des avocats. Elles en attribuent la connaissance à la Cour de cassation. * Les dispositions de la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer sur la protection de la concurrence économique mentionnées dans la question préjudicielle ont trait aux attributions du Conseil et du Service de la concurrence et aux règles de fonctionnement qu'ils sont tenus d'observer.

Elles confèrent au Conseil de la Concurrence la qualité de juridiction administrative et lui confient une compétence de décision, de proposition et d'avis.

Elles déterminent sa compétence à l'égard de pratiques restrictives de concurrence et de concentration entre deux ou plusieurs entreprises.

En tirant les conclusions de ces deux réponses, la Cour d'arbitrage a ensuite décidé que : * Les contestations auxquelles donnent lieu les dispositions réglementaires arrêtées par les Ordres des avocats sont attribuées par le Code judiciaire, tantôt aux autorités disciplinaires du barreau, tantôt à la Cour de Cassation. * A supposer que le Code judiciaire ait ainsi pour effet de faire échapper ces contestations à la compétence du Conseil de la Concurrence et que de telles contestations, lorsqu'elles concernent les titulaires des autres professions libérales, y seraient au contraire soumises, une différence de traitement serait opérée par le législateur dont il est demandé à la Cour d'apprécier l'éventuel caractère discriminatoire * La Cour limite son examen à la seule différence de traitement mentionnée dans la question préjudicielle. Elle n'examine pas si, d'une manière générale, des accords, des associations, des pratiques concertées ou des concentrations entre cabinets d'avocats sont soumis aux dispositions de la loi sur la protection de la concurrence économique.

Elle n'examine pas non plus si certains actes des autorités des barreaux peuvent constituer des pratiques restrictives de concurrence.

Elle n'a pas d'avantage à vérifier si, comme le suppose le juge a quo, les règlements arrêtés par les autorités d'autres professions libérales sont soumis aux dispositions de la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer.

La Cour d'arbitrage a rappelé le principe général selon lequel les contestations auxquelles donnent lieu les dispositions réglementaires arrêtées par les ordres des avocats sont attribuées, par le Code judiciaire, tantôt aux autorités disciplinaires du barreau, tantôt à la Cour de Cassation.

Cependant, comme le souligne le représentant de l'Ordre des avocats du barreau d'Arlon, le recours judiciaire d'un particulier à l'encontre d'une disposition réglementaires dont celui-ci conteste la légalité ne parait pas, de prime abord, exclu.

En conséquence les avocats ne paraissent donc pas, dans cette mesure, dépourvus de moyens pour réagir contre un règlement pris par le Conseil général de l'Ordre dans la mesure où celui-ci le concerne.

Cette possibilité n'est cependant pas de nature à conférer aux autorités judiciaires la compétence exclusive de l'examen des règlements incriminés.

Tout d'abord, il convient de rappeler que la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer est postérieure aux dispositions du Code judiciaire qui ont attribué à la Cour de Cassation le contentieux des actes et règlements du Barreau et a institué une nouvelle juridiction compétente pour connaître du contentieux de violation des règles de concurrence par toutes décisions d'associations d'entreprises.

L'argument de la séparation des pouvoirs invoqué à l'appui de l'incompétence du Conseil de la Concurrence en tant que juridiction administrative vis-à-vis des actes et règlements des autorités du barreau n'est pas déterminant.

Ainsi, il ne vaut pas nécessairement en ce qui concerne le droit communautaire de la concurrence (arrêt Factortame - C-221/89, 25.07.1991 cité par le demandeur en mémoire de synthèse p.6 )et ne s'est pas opposé, au niveau de l'Union, à la compétence d'autorités nationales de concurrence à l'égard des pratiques du Barreau. Tel est ainsi le cas en France.

D'autre part, s'il est vrai que les travaux préparatoires du Code judiciaire relatifs aux dispositions organisant des recours devant la Cour de Cassation indiquent la volonté du législateur d'exclure la compétence du Conseil d'Etat à l'égard des actes individuels des Conseils de l'Ordre et des règlements de l'Ordre national des avocats (Doc. Parl. Ch. Repr., sess. 1989/1990, 1281/1, PP.15-16), ils ne sont cependant pas de nature à exclure la compétence du Conseil de la Concurrence, dont la création est ultérieure.

Ils le sont d'autant moins que les travaux préparatoires de la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer n'excluent nullement une compétence de principe du Conseil de la Concurrence à l'égard des Ordres des professions libérales.

S'il est vrai que la Cour d'arbitrage a constaté que certaines dispositions du code judiciaire font échapper des contestations relatives à des dispositions réglementaires adoptées par des ordres d'avocat à la compétence du Conseil de la Concurrence - d'où il résulte une différence de traitement par rapport aux autres professions libérales - en se référant entre autres à la participation des avocats au service public de la justice ainsi qu'à leur rattachement à l'ordre judiciaire, la Cour d'arbitrage n'a cependant nullement exclu que même en ce qui concerne les actes des barreaux, les autorités ne peuvent organiser ou favoriser des pratiques restrictives de concurrence qui ne seraient pas en rapport avec les caractéristiques essentielles de nature non économique de la profession.

Il en résulte que l'incompétence du Conseil de la Concurrence ne vaudraient que dans les cas où les règlements incriminés ne porteraient pas une atteinte injustifiée aux règles de la concurrence.

A contrario, il convient donc de considérer que toute atteinte injustifiée au droit de la concurrence qui serait la conséquence d'actes du barreau peut être sanctionnée par une juridiction, fut-elle même considérée comme administrative, comme, par exemple, le Conseil de la Concurrence ou son Président (cfr. commentaires de Koen PLATTEAU de l'arrêt du 30 avril 1997 - RDC 1997, p. 575 et svtes.).

En conséquence, s'il n'appartient pas au Conseil de la Concurrence d'examiner si, en adoptant les règlements litigieux, les conseils des ordres sont ou non sortis de leur mission légale, il lui revient cependant d'examiner si ceux-ci portent ou non aux règles de la concurrence une atteinte injustifiée.

La compétence du Conseil de la Concurrence à l'égard des règlements adoptés par les conseils des ordres se mesure donc à cette aune. 4.3.2. La profession d'avocat est-elle une entreprise et les règlements litigieux (règlement national et règlements d'application) sont-elles des « décisions d'associations d'entreprises » ? A. La profession d'avocat et la notion d'entreprise La notion d'entreprise comprend » toute entité exerçant une activité économique indépendamment du statut juridique de cette entité ou de son mode de financement » (Arrêt du 23 avril 1991, Höfner et Elser - C-41/90, Rec.p.I-1979, point 21).

Comme le souligne l'Ordre des avocats du barreau d'Arlon, il ne peut plus être contesté qu'un avocat constitue une association d'entreprise au sens de l'article 2 de la loi du 5 août 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/08/1991 pub. 10/08/2010 numac 2010000448 source service public federal interieur Loi relative à l'importation, à l'exportation, au transit et à la lutte contre le trafic d'armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire ou de maintien de l'ordre et de la technologie y afférente. - Coordination officieuse en langue allemande fermer (cfr. mémoire de synthèse du Barreau d'Arlon- n° 46 p. 19).

Conformément à la définition livrée par la Cour de justice des Communautés européennes dans le cadre de l'article 85 - maintenant 81 - du Traité C.E., l'avocat, en donnant des consultations, en rédigeant des actes de procédure et des conclusions, en représentant ses clients devant les juridictions, en négociant des transactions, exerce une activité économique consistant à offrir, contre rémunération, des services sur un marché donné (cfr. mémoire de synthèse précité, idem).

B. Les règlements litigieux et les décisions d'association d'entreprises Les règlements litigieux constituent-ils des « décisions d'associations d'entreprises » ? Les parties défenderesses exposent qu'« une décision prise par un organisme composé de représentants de la profession ne peut être qualifiée de « décision d'association d'entreprises » au sens de l'article 85 du Traité C.E. que si elle vise exclusivement les intérêts économiques de la profession, les deux conditions étant dès lors cumulatives » (cfr. mémoire de synthèse précité P. 22).

A l'appui de leur thèse, elles citent deux décisions de la Cour (17 novembre 1993, C-185/91, Rec.p.I-5801 et A juin 1994, C-153/3, Rec.

P.2517) dans lesquelles la Cour avait décidé que les tarifs du transport routier et fluvial fixés par des commissions composées de représentants du secteur concerné, qui n'étaient pas liés par instructions émanant de ce secteur, ne relevaient pas de l'article 85 du Traité C.E. « dès lors que ces tarifs étaient également fixés en fonction de considérations d'intérêt général ».

Le demandeur considère que l'Ordre national et les conseils des Ordres jouent avant tout le rôle d'organismes de contrôle et d'instances de régulation d'une profession qui exerce par ailleurs une activité économique.

Il ajoute que « quant aux prérogatives de puissance publique attribuées par la loi aux ordres professionnels, si elles échappent, semble-t-il, à l'heure actuelle, au droit de la concurrence, il faut alors que l'inapplicabilité soit d'interprétation stricte et que tous les comportements détachables puissent être appréhendés par le droit de la concurrence » (cfr. mémoire de synthèse du demandeur, p.10).

La notion d'association d'entreprise n'est pas définie par le Traité.

Elle regroupe des entreprises de la même branche et se charge de représenter et de défendre leurs intérêts communs à l'égard des autres opérateurs économiques, des organismes gouvernementaux et du public en général (Le droit de la CE, volume 4, Concurrence, éditions de l'université libre de Bruxelles, 1997, 2e. Ed. - point 128) Le concept d'association d'entreprises vise à éviter que les entreprises puissent échapper aux règles de la concurrence en raison de la seule forme par laquelle elles coordonnent leur comportement sur le marché.

Pour garantir l'effectivité de ce principe, l'article 85 appréhende non seulement les modalités directes de coordination de comportement entre entreprises (les accords et les pratiques concertées), mais aussi les formes institutionnalisées de coopération, c.à.d. les situations où les opérateurs économiques agissent par l'intermédiaire d'une structure collective ou d'un organe commun (Conclusions de l'Avocat général M.Philippe Léger présentée le 10 juillet 2001 - Affaire C-309/99 - points 61 et 62).

Dans ses conclusions, M. l'Avocat général Philippe Léger fait référence à l'affaire CNSD (décision 93/438/CEE du 30 juin 1993 relative à une procédure d'application de l'article 85 du Traité CEE (IV/33.407 - CNSD - JO L 203, p.27) où la Cour a appliqué pour la première fois la notion d'entreprises à un ordre professionnel.

Sur base de cet arrêt, une entreprise ne saurait être qualifiée d'association d'entreprise lorsque d'une part elle est composée d'une majorité de représentants de la puissance publique et d'autre part, elle est tenue par la législation nationale de prendre ses décisions en tenant compte d'un certain nombre de critères d'intérêts public.

La question se pose de savoir si le fait pour une entité d'être investie d'une mission d'intérêt général - comme l'Ordre national ou les autorités ordaniques locales - a pour effet de les soustraire, de ce fait, c.a.d. en raison même de la mission particulière qui leur est imparties, du champ d'application du droit de la concurrence.

Comme rappelé plus haut, la notion d'entreprise comprend « toute entité exerçant une activité économique indépendamment du statut juridique de cette entité ou de son mode de financement ».

Une entité n'échappera donc au champ d'application des règles de concurrence que lorsque son activité ne présente aucun caractère économique.

A défaut, elle doit être qualifiée d'entreprise, le fait qu'elle soit ou non investie d'une mission d'intérêt général ou de service public important peu.

Il en résulte que si une entité exerce et une activité économique et une mission d'intérêt général ou de service public, il n'y a pas lieu de dissocier celles-ci et cette entité n'échappe pas au champ d'application des règles de concurrence.

Qu'en est- il au niveau des autorités ordaniques, nationales ou locales ? La mission d'intérêt général ou de service public de ces autorités est établie.

Leur mission légale est déterminée en fonction d'un système établi par le législateur.

Ainsi, le Code judiciaire confie des missions aux diverses autorités de(s) l'Ordre(s) en matière de sauvegarde de l'honneur, de maintien des principes de dignité, de probité et de délicatesse (articles 456 et 494 du Code judiciaire).

Il s'agit de considérations générales qui rencontrent l'intérêt de la profession dont il s'agit de préserver, dans l'intérêt de tous, l'image de marque et la dignité.

Exercent-elles une activité économique ? Il convient de répondre par l'affirmative.

Tout d'abord, il y a lieu de rappeler que l'activité de l'avocat est une activité économique qui consiste à offrir, contre rémunération, des services sur un marché donné (cfr.supra).

Il est permis de considérer que lorsqu'ils concluent des accords entre eux - la première mission de l'avocat n'est-elle pas de concilier ? -, les avocats, en tant qu'acteurs économiques privés agissent dans l'intérêts de leur mandant et non dans l'intérêt public - en ce sens que les accords conclus ne correspondent pas nécessairement à l'intérêt public.

Ensuite, l'Ordre et les Ordres locaux sont composés exclusivement (ou tout-à-fait majoritairement en ce qui concerne le cas spécifique des Conseils de discipline d'appel) de membres de la profession que le loi n'oblige pas à tenir compte de l'intérêt général dans l'exercice des compétences réglementaires en manière telle que rien ne les empêche, dans certaines décisions, de se préoccuper exclusivement des intérêts de la profession.

Enfin, dans les missions dévolues aux autorités ordinales, il y a lieu de relever » les intérêts professionnels communs des avocats » et, à cet égard, on peut se rallier à la thèse défendue par le professeur Delpérée et citée par le conseil du requérant (cfr. mémoire de synthèse page 12 in fine) selon laquelle « à côté de l'exercice de l'autorité publique l'ordre exerce d'autres responsabilités dans un but d'intérêt social ou exclusivement professionnel ».

Il convient donc de considérer la profession d'avocat comme une entreprise et les règlements litigieux (règlement national et règlements d'application) « décisions d'associations d'entreprises ». 4.3.3. Les règlements incriminés ont-ils pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser de manière sensible la concurrence sur le marché belge ou une partie substantielle de celui-ci.

Il convient maintenant d'examiner si, en ajoutant aux conditions légales d'accès à la profession la nécessité de réussir l'examen du CAPA, l'Ordre national a instauré une restriction de concurrence ou, plus précisément, si le règlement national et ses règlements d'application ont pour objet ou pour effet de restreindre de manière sensible la concurrence sur le marché des services affectés par les avocats.

Il y d'abord lieu de rappeler que la réussite de l'examen CAPA, si elle ajoute à une condition d'accès à la profession d'avocat, n'est pas le seul ajout du genre.

Ainsi, le licencié ou le docteur en droit qui souhaite s'inscrire au tableau de l'Ordre des avocats doit, au préalable, avoir réussi un examen de déontologie (ce qui sert l'intérêt général).

En outre, rien ne permet d'exclure que l'objectif poursuivi par l'obligation de la réussite de l'examen CAPA soit de familiariser les avocats stagiaires avec la pratique de la profession et dès lors d'améliorer la production des services prestés par les avocats dans l'intérêt des consommateurs de ces services (ce qui sert également l'intérêt général) plutôt que de détourner de la profession un certain nombre de licencié ou de docteur en droit.

Le règlement litigieux a déjà été évoqué (cfr. supra). La sanction de l'omission est prévue en son article 17 (En cas d'échec, le stagiaire doit représenter celui-ci au plus tard à la fin de sa deuxième année de stage. En cas de deuxième échec ou en cas de circonstances exceptionnelles, le stagiaire est invité devant le conseil de l'Ordre pour y présenter ses explications. Le conseil de l'Ordre pourra soit l'autoriser à présenter une dernière épreuve dans les six mois, soit l'omettre conformément au code judiciaire pour non-accomplissement des obligations de stage).

Le requérant, après avoir deux fois échoué, avait vainement été autorisé à présenter une « troisième et dernière fois », puis, tout aussi vainement, une quatrième fois « à titre tout-à-fait exceptionnel » les examens du CAPA. Dans son mémoire de synthèse, l'Ordre des Avocats du Barreau d'Arlon rappelle, sans être contredit, qu'au cours des années 1991-1992 à 1999-2000, 609 stagiaires ont été inscrits à l'école du stage du barreau de Liège (stagiaires provenant des barreaux de Liège, Verviers, Marche, Neufchâteau, Arlon et Eupen).

Sur ces 609 personnes, 4 n'ont pu obtenir le CAPA alors qu'elles se sont présentées aux épreuves.

Il en résulte que le taux d'échec définitif est inférieur à 1 %.

Ce chiffre est certes relatif.

Ainsi, il y a lieu de prendre en considération les avocats stagiaires qui ne s'y sont pas inscrits, tantôt en raison d'un échec aux épreuves, tantôt en raison du caractère dissuasif de celles-ci, tantôt en raison de la difficulté de trouver un maître de stage, tantôt en raison de la précarité des revenus, surtout en début de carrière, tantôt parce qu'ils ont fait le choix d'une autre orientation professionnelle.

Il pourrait, de ce fait, être soutenu que l'accès à la profession d'avocat est restreint, voire entravé, par l'exigence de la réussite de l'épreuve CAPA et que le règlement incriminé induit une restriction de concurrence.

Encore faudrait-il établir que s'il y ait en l'espèce, quod non, restriction de concurrence, encore celle-ci devrait-elle présenter un caractère sensible.

Sur base des éléments de faits portés à la connaissance du Conseil (e.a. le taux excessivement réduit d'échec et les multiples possibilité offertes au demandeur - au delà même des prescrits du règlement du stage - de passer avec fruit les examens du CAPA) et des motifs ci-avant exposés, le Conseil de la Concurrence est amené à constater que le règlement national et les règlements d'application litigieux n'ont pas pour objet de restreindre de manière sensible la concurrence sur le marché des services affectés par les avocats.

Il en résulte que la demande doit être déclarée non fondée.

Par ces motifs, Nous, Jacques Schaar, membre du Conseil de la Concurrence, exerçant les fonctions de Président du Conseil, Déclarons la demande recevable Constatons l'urgence Nous déclarons compétent pour connaître de la demande Constatons que le règlement national et les règlements d'application litigieux n'ont pas pour objet de restreindre de manière sensible la concurrence sur le marché des services affectés par les avocats et déclarons en conséquence la demande non fondée;

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